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Cette histoire veut nous faire comprendre que sur scène, nous aussi<br />
voyons de véritables acteurs, et que la vie réelle pénètre jusque sur le<br />
théâtre, indépendamment de la fiction qu’on nous représente.<br />
... cela tout en nous représentant des fictions réalistes qui sont censées<br />
représenter le pur réel.<br />
Ces nuances sont sans doute difficiles à saisir sans avoir écouté Paillasse,<br />
mais on nage en plein paradoxe sur cette question de la vérité, qui est à la<br />
fois celle des gens sur scène et celle de la scène représentée (avec une<br />
tension insoluble entre les deux).<br />
Les compositeurs n’ont pas hésité à s’en amuser, puisque le titre de<br />
cavalleria rusTicana de Pietro Mascagni (“Chevalerie rustique”) fait<br />
explicitement référence à la transposition des codes de théâtre habituel<br />
dans un milieu modeste. Et de fait, on y retrouve en une heure tous les<br />
ingrédients habituels : adultère, jalousie, dévotion, délation, duel.<br />
Le compositeur ne se cache pas, de la sorte, d’exploiter sur un sujet<br />
nouveau les structures préexistantes.<br />
On pourrait dire de même pour fedora de Giordano, avec son récital de<br />
piano au milieu de l’acte II, qui pose la question du statut de ce qui est<br />
présenté sur scène.<br />
Le mouvement se répand en Italie, et l’on parle aussi de vérisme pour les<br />
drames historiques (tout ce qui imite le réel d’une façon ou d’une autre),<br />
ou tout simplement pour la période de composition postverdienne.<br />
Ce qui pousse les commentateurs à retirer leur compositeur favori de<br />
cette catégorie quasiment infamante.<br />
• Elle suppose un côté près du réel, avec des effets vocaux<br />
racoleurs pas toujours jugés de bon goût.<br />
• Elle met toute une période dans le même sac, aussi lorsque l’on<br />
veut distinguer un compositeur, on l’en ôte.<br />
• Il est vrai que l’étiquette est parfois attribuée abusivement. Par<br />
exemple pour Ponchielli, qui écrit la Gioconda d’après Hugo dans une<br />
couleur très verdienne.<br />
du coup, la différenciation est un peu épineuse.<br />
Le vérisme peut aussi bien désigner l’ensemble de la période qui succède<br />
à Verdi qu’un mouvement musical précis qui se définit à partir de ses<br />
sujets. Ou, de façon plus retorse, par sa musique.<br />
Si on le prend au sens le plus restreint, on peut y inclure Leoncavallo,<br />
Mascagni, Catalani, éventuellement Giordano.<br />
Ponchielli n’en est pas - et Montemezzi non plus bien évidemment<br />
(il appartient déjà à la période suivante de toute façon). On en retire<br />
généralement Puccini pour le distinguer, comme au-dessus de cette<br />
catégorie un peu honteuse.<br />
En réalité, on trouve du vérisme chez Puccini : il TaBarro, BoHèMe, voire<br />
BuTTerfly en sont. Manon lescauT, bien qu’adaptée du roman du XVIIIe<br />
que l’on sait, en a le ton (une grande attention à la vraisemblance, un<br />
enchaînement vif des scènes, sans grands airs, des foules bigarrées,<br />
un goût pour le misérabilisme). Mais la farce précisément datée mais<br />
intemporelle Gianni Schicchi ou le conte cruel Turandot n’en sont pas.<br />
Venons-en à la question telle qu’elle nous était posée, autour de Tosca.<br />
Tosca, par sa volonté de suivre au plus près une journée historique (beau<br />
comme l’antique), et sous un jour très concret (la torture, la cérémonie<br />
pendant l’interrogatoire, la fausse exécution) a quelque chose de<br />
vériste.<br />
Musicalement, ce style se repère par son goût pour les grandes phrases<br />
larmoyantes, souvent doublées aux cordes. On table sur la séduction<br />
mélodique et le pouvoir lacrymal de la musique.<br />
Les effets vocaux peuvent contenir le cri, du moins ainsi que le veut<br />
la tradition - d’où le reproche qui est fait lorsque ce style contamine<br />
l’esthétique beaucoup plus « classique », altière et épurée de Verdi. Les<br />
orchestres ont entendu Wagner, et il y a quelque chose de straussien<br />
(très simplifié) dans ces grands élans.<br />
Un drame très émotionnel, proche de ce qu’on appellerait un mélodrame,<br />
au sens non musical du terme.<br />
TOSCA Dossier pédagogique / <strong>Angers</strong> <strong>Nantes</strong> <strong>Opéra</strong> 2008/09<br />
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