Actuel 20
- Minna Resnick - Danièle Aron - Eddy Dumont - Engin Ensen - Éric Fourmestraux - Judith Rothchild - Julian Lemousy - Philippe Tardy - Veronica Odén - Olivia Quintin - La Gravure Originale - FIG Bilbao Print Festival - Beirut Printmaking Studio
- Minna Resnick
- Danièle Aron
- Eddy Dumont
- Engin Ensen
- Éric Fourmestraux
- Judith Rothchild
- Julian Lemousy
- Philippe Tardy
- Veronica Odén
- Olivia Quintin
- La Gravure Originale
- FIG Bilbao Print Festival
- Beirut Printmaking Studio
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Actueln o 20
l’estampe contemporaine
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C
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(4) Minna Resnick
(14) Danièle Aron
(20) Eddy Dumont
(26) Engin Ensen
(32) Éric Fourmestraux
(38) Judith Rothchild
(44) Julian Lemousy
(48) Philippe Tardy
(54) Veronica Odén
(58) Olivia Quintin
(62) La Gravure Originale
(64) FIG Bilbao Print Festival
(66) Beirut Printmaking Studio
Nous sommes en novembre 2020
et la pandémie de Covid-19 continue d’avoir des
répercussions locales et internationales. Sans vouloir
être pessimiste, il est clair que le monde est loin de
sortir de certaines des restrictions que les pays ont
imposées à leurs citoyens et plus encore de revenir
à la situation antérieure. Malgré la tristesse que la
pandémie a apportée, les artistes du monde entier
ont continué à travailler, car c’est ce qu’ils doivent
faire, même si leurs conditions de travail ont
beaucoup changé et que la possibilité de partager
leur travail dans des expositions et compétitions
a été sévèrement réduite.
Néanmoins, comme le montre la parution de cette
édition d’Actuel, il y a une volonté de continuer
à faire et à partager le travail des graveurs malgré
le changement de donne.
Les fils qui unissent les artistes dans cette édition
montrent leur connexion avec le monde naturel
et les êtres humains qui l’habitent. Ils s’engagent
dans la lutte avec les supports et les idées pour
produire une matrice aussi parfaite que possible
avant de créer les impressions. Une série aussi
compliquée de processus peut sembler, pour ceux
qui ne sont pas initiés aux mystères, s’apparenter
à l’alchimie. Peut-être, en ces temps troublés,
est-ce la meilleure analogie que l’on puisse faire.
Ont collaboré à l’écriture de ce numéro :
Pascale De Nève, Richard Noyce, Alain Delaere, Minna Resnick, Georges Meurant,
Eddy Dumont, Éric Fourmestraux (spécial merci), Judith Rothchild, Laetitia Chauvin,
Philippe Brunel, Sabine Delahaut, Engin Ensen, Veronica Odén, Olivia Quintin
et Christian Massonnet
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Actueln o 20
l’estampe contemporaine
Mais il y a autre chose. Alors que le monde lutte
pour accepter les effets persistants du Covid-19,
il n’est pas à l’abri d’événements inattendus et
imprévisibles. Lequel d’entre nous aurait prédit le
désastre qui a frappé Beyrouth en début de soirée au
mois d’août ? Une grande partie de cette ville animée
et créative a été détruite ou endommagée, entraînant
de terribles pertes en vies humaines, habitats et lieux
de travail. Parmi ceux-ci se trouve le Beirut Printmaking
Studio, dont l’histoire fut racontée dans un petit numéro
d’Actuel dédié à cet atelier.
La résilience des personnes impliquées dans
l’entreprise, et leur détermination à restaurer leur atelier
et à poursuivre leur travail sont une démonstration de
ce que signifie être un être humain créatif. Cela peut
prendre du temps, mais ils réussiront certainement
à jouer un rôle important dans la renaissance
de la culture et de la vie créative de la ville.
Avec la même détermination, bien que dans des
circonstances très différentes, les artistes inclus dans
Actuel 20 continueront de développer et de partager
leur travail, car c’est ce que font toujours les artistes.
Covid-19 sera finalement vaincu, les gouvernements
changeront, et les catastrophes naturelles
et causées par l’homme imposeront leur chaos
imprévisible sur le monde, comme ils l’ont toujours
fait. Mais les artistes seront toujours là pour enregistrer
et exprimer leurs réactions personnelles à tout ce que
le monde leur offre, et le monde est le meilleur endroit
pour cet esprit créatif.
Richard Noyce
Actuel est une émanation
du groupe Facebook
« Parlons Gravure »
Comité de sélection :
Sabine Delahaut
Jean-Michel Uyttersprot
Catho Hensmans
Comité de rédaction :
Jean-Michel Uyttersprot
Pascale De Nève
Mise en page :
Jean-Michel Uyttersprot
Pierre Guérin
Relecture :
Annie Latrille
Minna Resnick pour les estampes en
couvertures et pour le tirage de tête
de ce numéro : un tirage réalisé
spécialement pour la revue
et limité à 20 exemplaires (cf. p. 2).
Sauf indication particulière,
les images appartiennent
aux auteurs.
Les légendes des images sont à lire
de gauche à droite et de haut en bas.
Pour toutes informations :
magazine.actuel@gmail.com
www.actueldelestampe.com
Éditeur responsable :
K1L éditions.
Imprimé par la Ciaco,
Louvain-la-Neuve, Belgique.
Couverture : Tintoretto Gesso 250 g
Intérieur : Indigo Tatami Ivoire 135 g
Prix de vente : 20 €
N ° ISSN : 0774-6008
EAN : 9782930980317
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Minna
Resnick
Au cours de ma carrière de presque cinq
décennies en tant qu’artiste, mon travail s’est
largement concentré sur la signification visuelle
du langage. La communication est insaisissable
et dépend des contextes historiques et culturels.
Les mots et les images qui semblent communs
à une génération peuvent être inconnus d’une
autre. Cela permet à mon travail d’examiner
la nature changeante de l’expérience au fil
du temps et du vieillissement, et de commenter
les thèmes de l’attente et de la réalité,
de l’idéal et du quotidien, y compris le débat
personnel et interne qui se produit lorsque
les femmes se confrontent à elles-mêmes
et à leur rôle dans la société contemporaine.
Je présente ce mélange intergénérationnel
en utilisant des images de manuels du début
et du milieu du XX e siècle sur la gestion
de la maison, la décoration, la réparation,
la santé et l’éducation, ainsi que des images
contemporaines, y compris des photos
de maison et des magazines de mode.
Outre des images tirées de livres, j’utilise
des motifs de papier peint en toile comme
matériau source.
Des œuvres d’art open source, issues de
collections muséales du XIX e siècle, ont été plus
récemment intégrées dans le discours.
Mon objectif est d’encourager le déplacement
et la désorientation des informations.
Remixer le récit crée de nouvelles associations.
Chaque méthode change et déconstruit toute
hiérarchie d’informations. J’espère faire cela
tout en conservant un sens de l’humour.
Historiquement, j’ai travaillé dans deux médiums
distincts : la lithographie et le dessin. Au départ,
je m’intéressais principalement à la vie intérieure
d’une femme, et mon imagerie avait une
focalisation singulière et était présentée dans
un espace réaliste. Cependant, après que mes
intérêts ont commencé à changer, j’avais besoin
d’un autre type d’espace dans lequel je pourrais
aborder des réalités concurrentes. Il y a une
trentaine d’années, poussé par ce changement
de direction artistique, mon plan de l’image
s’est effondré. Cela m’a fourni le moyen visuel
de présenter plusieurs couches d’expériences
conflictuelles. J’ai alors commencé à combiner
des images lithographiques et dessinées
pour créer des séquences narratives.
Cela a fusionné la déclaration répétitive inhérente
à la gravure avec la capacité de reformulation
par le dessin, ce qui a changé le contexte.
Depuis quinze ans, je travaille avec Tom Blaess,
dans son atelier d’imprimerie à Berne, en Suisse,
créant les premières couches de mon travail.
Tom et moi venons d’horizons traditionnels
de la gravure et il est important pour nous deux
que les images manipulées numériquement
qui naissent dans son atelier simulent
les qualités des techniques de gravure
plus classiques. Nous imprimons souvent
à la main des images de mes fichiers,
qui sont ensuite photographiées, ou froissées
et re-photographiées, ou re-scannées, pour
produire une image qui devient la première
couche de mon dessin. C’est un processus
compliqué, mais exaltant. J’emporte toutes
ces images imprimées numériquement avec
moi et je passe des années à les regarder,
à imaginer, rechercher et développer chacune
d’elles en dessin. J’utilise tous les supports que
je trouve pour compléter le récit – techniques
d’impression à la main, pochoirs, encre, spray,
collage et crayons de couleur.
Même si la majorité de mon travail est désormais
constituée de pièces uniques, j’ai toujours pensé
et je continue de penser comme un graveur,
ce qui a été ma formation. Je visualise
en couches et les ajoute une par une
à l’image, construisant le travail.
Je le fais simplement avec l’ajout d’autres
matériaux et pas seulement des encres.
Minna Resnick
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Du trait au mot
la rubrique de Pascale De Nève
Minna Resnick
ou la multiplicité des langages
L’œuvre de Minna Resnick s’effeuille comme
une stratification de couches mémorielles.
Empruntant à l’imagerie des années 1950,
l’artiste se livre à un jeu de superposition
et de transparence pour faire cohabiter passé
et présent en creusant les filons du langage
corporel et des méandres de la communication,
sur fond de papier peint désuet.
Une posture, un visage, une bouche
ou un regard voilés, un repli ou un toucher…
Tout est dit.
Il ne manque que les mots, apparaissant
en filigrane comme une litanie mystérieuse
et universelle.
Et pourtant, il ne s’agit pas de tout décrypter.
Il suffit de laisser le regard traverser les couches
du temps et le récit du quotidien pour atteindre
sa vérité. Quelle qu’elle soit.
Minna Resnick vit et travaille depuis 1987 à Ithaca
(New York). Elle est exposée aux niveaux national
et international, et son travail se trouve dans
plus de 50 collections publiques et privées.
Il est représenté dans les collections permanentes
du Brooklyn Museum, à New York ; le Denver Art Museum
(Colorado) ; la bibliothèque publique de New York ;
le Newark Museum (New Jersey) ; l’Agence d’information
des États-Unis ; le Victoria and Albert Museum, à Londres ;
et au Kunsthaus Grenchen (Suisse).
Elle a reçu le prestigieux American National
Endowment for the Arts Fellowship en 1980, ainsi
qu’une douzaine d’autres subventions financées,
y compris la New York Foundation for the Arts Fellowships
en 1991 et 1995, et une Constance Saltonstall Artist
Fellowship en 1999. En 2007 et 2009, elle a organisé
une exposition internationale de gravure et un symposium
connexe en Chine.
Minna Resnick donne régulièrement des conférences
et des ateliers aux États-Unis et enseigne à temps partiel.
www.minnaresnick.com
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Couverture : Stand Tall, impression digitale, monotype, crayon de couleur, encre acrylique, 42 × 32 cm, 2018
Page 2 : I need to hear your voice, lithographie et transfert au solvant, 20 × 15 cm, 2020
Page 4 : Stewardship, transfert au solvant, crayon de couleur et encre acrylique, 38 × 28,5 cm, 2020
Page 6 : Civilization On Fire, photocollagraphie, transfert au solvant, crayon de couleur,
encre acrylique, 75,5 × 56,5 cm, 2020
Page 7 : He Didn’t Consider It Really Dangerous, impression à la gomme arabique, crayon de couleur, 76 × 51 cm, 2014
History Can’t Be Unwritten, impression digitale, monotype, crayon de couleur, encre acrylique, 44 × 34,5 cm, 2016
Page 8 : Shipwreck, impression digitale, sérigraphie, crayon de couleur, encre acrylique, 42 × 32 cm, 2018
Page 9 : The Rest of the Story, impression digitale, crayon de couleur, 59 x 41 cm, 2017
Page 10 : Hide and Seek, photocollographie, impression à la gomme arabique, crayon de couleur,
encre acrylique, 76 × 56,5 cm, 2019
Page 11 : What I Know About Men, impression digitale, crayon de couleur, encre acrylique, 42 × 32,4 cm, 2018
Page 13 : No, no, Janet, Be good. photocollographie, crayon de couleur, 76 × 57 cm, 2010
Dos de couverture : Everything He Wants, impression digitale, sérigraphie sur plaque de cuivre,
crayon de couleur, 42 × 32,5 cm, 2012
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Minna Resnick est une conteuse.
Pas dans le sens premier du mot,
mais une conteuse qui utilise le dessin
et différentes techniques d’impression.
Néanmoins, les images qui en résultent sont
des histoires, avec la même validité et le même
but que les contes parlés qui forment la mémoire
centrale de la famille et de la tribu.
En tant qu’artiste extrêmement sensible avec
une longue carrière de création d’images,
Minna Resnick a développé un répertoire
de techniques et une accumulation
d’observations de personnes et de leurs
façons d’interagir dans la société, laissant
derrière elles les preuves de leurs attitudes
et de leurs réactions au monde dans lequel elles
vivent. C’est à partir de ces matériaux qu’elle
a produit un ensemble d’œuvres qui la marquent
comme une artiste majeure de ce siècle.
Tout au long de son travail d’artiste active
et engagée depuis plus de quarante ans,
elle s’est intéressée à la manière dont
les êtres humains communiquent entre eux,
à travers l’utilisation de rituels, d’introspection
et de récit pour tenter de comprendre
qui ils sont et comment ils se rapportent
aux autres. L’accent est mis sur la langue sous
toutes ses formes, de la communication
non verbale décrite dans ses premiers travaux
à l’utilisation du texte réel dans son travail
actuel. Une grande partie de son travail
est centrée sur la nature physique du corps
humain. Elle a utilisé le même modèle pendant
de nombreuses années ce qui a abouti,
sans le vouloir, admet-elle, à une archive
d’images d’une femme vieillissante.
Cela fonctionne en parallèle avec son propre
développement continu en tant qu’artiste et
femme.
Les premiers travaux de Resnick étaient
en lithographie, utilisant au départ la pierre,
puis passant aux plaques, ce qui lui a permis
de travailler à un plus grand format.
Les traditions de la lithographie impliquent
une adhésion étroite à la rigueur du dessin
sur la matrice à l’envers, et également
aux exigences de l’étape de production
qui aboutit à l’édition finale des estampes.
Ces deux étapes nécessitent de la précision
et de la concentration pour que la conception
initiale soit maintenue avec clarté jusqu’à
l’image finale. Plus récemment, Minna Resnick
a intégré des techniques de sérigraphie
et de photographie numérique dans son
travail, enrichissant la gamme de nuances
qu’elle peut présenter dans ses images.
Bien que ses premiers travaux aient adhéré
à la formalité plus conventionnelle du travail dans
le cadre de l’image, on note un changement
majeur à partir de 1990, avec sa conscience
de rompre ces conventions, conduisant
à une présentation d’images qui sortaient
du cadre. Cela a permis l’utilisation d’images
multicouches qui abordent la notion de réalités
et de thèmes simultanés, ainsi que les dualités
de l’attente et de la réalité, de l’idéal et de la vie
quotidienne. Ce changement lui a également
permis d’explorer avec plus d’attention
son intérêt pour le genre et la sexualité, ainsi
que les changements dans la réalité
et la vulnérabilité des femmes dans la société.
Le féminisme est toujours présent dans
son travail, non pas comme une protestation
colérique ou une déclaration politique,
mais d’une manière subtile mais persistante
qui engage le spectateur et suggère
qu’il s’interroge sur ce qu’il voit.
Cela, à son tour, pourrait s’avérer avec le temps
une approche plus productive de la question.
Le haut niveau d’intégrité du travail
de Minna Resnick est incontestable. Elle admet
que cela implique un travail lent et régulier,
et la nécessité de se concentrer pour s’assurer
que le travail final reste frais et fidèle à l’objectif
initial. Ce qui émerge est un travail dans
lequel le concept et la technique fusionnent
pour produire des images d’une puissance
incontestable et d’une présence mystérieuse.
Richard Noyce
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Danièle Aron
Le monde a ses contraintes.
On y prend chair dans un espace étrange assujetti aux lois de la pesanteur et peuplé de corps
en mouvement, soumis à la condition humaine.
Mais toute activité humaine n’est en quelque sorte que l’expression inavouée d’une avidité
d’éternité. Cette perception ontologique ne se comprend pas par la raison, ni par les pensées,
mais par une attention permanente à la vie qui nous anime et à sa faculté créatrice.
C’est de cette consciente évidence qu’émerge l’activité artistique de Danièle Aron.
Son œuvre relève d’une évocation inattendue, comme d’une vision d’un univers inexploré
se déployant devant un regard sans prescience. Ses personnages, nés spontanément
de la virginité de l’espace, semblent étonnés du prodige de la vie, enracinés dans leur vécu,
inquiets de leur présence immatérielle, étrangers à leur propre identité.
Visages familiers cependant que l’on se persuade d’avoir déjà rencontrés,
nés de l’habileté d’une main d’artiste par d’innombrables incisions et petites balafres
dévoilant leurs multiples turbulences de l’esprit. N’y reconnaît-on pas notre propre carence ?
Ce n’est dès lors plus la curiosité d’un regard qu’on leur porte, mais celui d’une empathie
spontanée pour leur univers où tous discours, cris, silences et pleurs, rires et chuchotements
des dernières décennies vibrent encore et semblent imprégner l’air qu’ils respirent.
Mais alors que la force créatrice de la nature
reste constante, la précarité de l’existence,
la conscience de l’illusoire, de la versatilité de
tout ce qui se définit et semble évident invitent
à prendre garde, à revoir la perception de ce
monde et à s’interroger sur la conception et
l’interprétation des choses. Comme l’ombre
confirme la lumière, la vulnérabilité de toute
créature reflète une nature intérieure, une
présence à la faculté expansive, une avidité
d’expression.
C’est le leitmotiv de Danièle Aron.
L’artiste anime la nature intérieure
de ses créatures d’une jubilation explosive,
d’une félicité exubérante, d’une ode à la vie,
contrastant avec la dérision d’une nature
réfléchie.
C’est la vision du monde végétal et animal,
d’une sève ascendante qu’elle dévoile
d’une espérance d’éclosion immanente,
d’une révélation éthérée de la conscience d’être,
d’un perpétuel continuum.
C’est en s’affranchissant de l’idée de soi et
des contraintes qu’impose l’esprit qu’on prend
pleinement conscience du silence intérieur,
essentiel à toute créativité.
Quel est ce monde et qui le regarde ?
Alain Delaere
Danièle Aron est née le 28 novembre 1960.
Formée en 1983 à l’Académie royale des beaux-arts de
Bruxelles, dans l’atelier de dessin de Willy Demulder,
Lucien Massaert et Danny Vienne, Danièle Aron a poursuivi
sa formation à l’École nationale supérieure des arts visuels
de La Cambre, dans l’atelier de Pierre Lahaut.
En 2019, elle est également diplômée en gravure dans
l’atelier d’Anne Kellens, à l’École des arts d’Ixelles.
Depuis trente ans, elle enseigne à l’Académie de dessin
et des arts visuels de Molenbeek-Saint-Jean, Bruxelles.
Parallèlement à son travail d’enseignante,
elle pratique le dessin et la gravure.
Son travail interroge la relation entre l’humain, le végétal
et l’animal. Leur cohabitation engendre un dialogue étrange.
C’est la tension qui en émerge, la poésie plastique et la
puissance émotionnelle de l’image qui l’intéresse.
http://danielearon.be
Page 14 : Homo erectus, eau-forte, 24 × 14 cm, 2017
Page 16 : Sans titre (hortensia), eau-forte et aquatinte,
20,5 × 14,5 cm, 2017
Page 17 : Sans titre (casque fleuri), eau-forte et aquatinte,
29,5 × 16 cm, 2009
Page 18 : Sans titre (aigle) eau-forte et vernis mou,
24 × 14 cm, 2017
Sans titre (grimace), eau-forte, 24,5 × 16 cm, 2018
Éros, eau-forte, 24 × 26 cm, 2018
Sans titre (graminées), eau-forte et aquatinte,
27 × 16 cm 2019
Page 19 : Sans titre (tulipes), eau-forte et aquatinte,
24 × 13,5 cm, 2015
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Volontaire, efficace, sensible, ce dessin emprunte à la gravure sur métal – eau-forte,
aquatinte – son espace tendu entre le creux imposé par la matrice au papier et, inscrits
par les morsures, les reliefs qui en émergent très distinctement. Des combinaisons de
portraits, d’animaux, de végétaux trament le plus souvent une imagerie d’introspection.
Sinon, comment comprendre cette insistance à nourrir l’étrangeté du paradoxe ?
Georges Meurant
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Eddy Dumont
Mon travail était au départ essentiellement photographique.
Mon sujet favori : « l’abandon ». Nous arrivons à oublier tellement de choses sans le vouloir.
Pour traiter du sujet de l’oubli, j’oriente mon appareil photographique plus précisément vers
des lieux désaffectés. Voilà quinze ans que je ne me lasse pas de pénétrer dans ces immenses
usines, ces toutes petites maisons, ou ces châteaux surdimensionnés… Peu importe l’endroit,
l’envie et le plaisir y sont les mêmes. On découvre dans ces lieux des sentiments uniques.
Comme la curiosité qui nous pousse à être attentifs au moindre détail qui nous entoure,
alors qu’en réalité on se retrouve entouré de murs vides et froids : le vide, le silence, l’apaisement,
la liberté, l’adrénaline dus à l’interdit, voilà ce qui m’envahit, ce qui comble l’inactivité de l’endroit.
Murs texturés, pièces vides, machines arrêtées, salons désertés auraient tellement à nous
raconter. Voilà pourquoi j’ai décidé de les mettre à l’honneur à travers mes photos.
Huit ans plus tard, mes photographies
rencontrent dans un premier temps
la gravure taille-douce. Première expérience
avec le cuivre, les outils, la presse,
le perchlorure de fer. Je teste, je prends
des directions improbables, inédites pour
moi. Sur la plaque de cuivre, avec une
pointe sèche, ma gravure reste timide.
Après ma première reproduction
photographique, je n’arrive
pas à aller plus loin…
Grâce à Philippe Martin (enseignant
des techniques d’impression aux beaux-arts
de Rouen), je découvre une technique
de reproduction photographique du XIX e siècle.
Une révélation pour moi :
l’héliogravure.
Cette technique m’a tout de suite attiré, pour
tout ce qu’elle révèle sur une photographie.
Elle permet une reproduction époustouflante,
avec des noirs profonds, elle redonne
de la matière aux images.
Pour moi, cette révélation de textures
est en réel lien avec la richesse
des matériaux que l’on retrouve dans
les friches que j’ai tant aimé visiter.
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Eddy Dumont est né à Rouen en 1983.
Il vit actuellement dans le Finistère-Sud,
où il a implanté L’Atelier Obraz, atelier
d’héliogravure, taille-douce et d’image
par procédés anciens.
www.atelierobraz.fr
Page 20 : L’Hôpital effacé, héliogravure,
travail sur typon, 30 × 20 cm, 2020
Page 21 : 7 h du matin, héliogravure,
20 × 15 cm, 2015
Page 22 : Au bain-marie, héliogravure,
45 × 30 cm, 2017
Page 23 : Morsure en coulure, matrice
d’héliogravure, travail de la morsure,
18 × 12 cm, 2018
Vie de baignoire, matrice d’héliogravure,
travail de la morsure, 10 × 30 cm, 2018
Pages 24 et 25 : Le Trou noir, héliogravure,
travail de la morsure, 15 × 10 cm, 2018
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L’héliogravure a véritablement marqué
mon travail tant elle m’a demandé
d’énergie. J’ai déjà passé quatre ans
à comprendre les subtilités du procédé
tellement sa complexité est immense !
Et je suis loin d’avoir fini…
Cette technique m’a apporté
beaucoup de liberté à travers
mes images. J’ai commencé
par faire de la reproduction
photographique stricte
(voire académique), pour comprendre
les rouages, l’importance de la
température, l’intérêt de l’hygrométrie,
le sérieux de la densité du noir, etc.
La gélatine (matière principale
de l’héliogravure) est sans doute
la plus difficile à appréhender.
C’est une matière vivante,
presque susceptible,
qu’il faut gérer à chaque tirage.
Après avoir appris la technique,
j’ai commencé à comprendre
les possibilités infinies
qu’offrait l’héliogravure sur la
transformation de mes clichés.
Au-delà de la photographie,
mon travail pouvait alors s’étendre
comme je l’entendais au travers
du cuivre et de la feuille.
J’ai compris que je pouvais
accentuer l’univers d’abandon grâce
au travail du cuivre. En le détériorant,
l’impression des photographies
sera inévitablement marquée.
Ces marques de rayures, d’effacements
partiels, de coulures, coïncident
parfaitement avec l’univers que
j’aimerais faire dégager de mon travail.
Mon travail peut maintenant prendre
une tournure à la fois artistique
et technique. Aujourd’hui je continue
mon travail de photographe dans des
lieux oubliés puis je trouve une grande
satisfaction à expérimenter en atelier
par le biais de l’héliogravure.
Je pars alors à la recherche
de procédés chimiques
ou mécaniques permettant de rendre
de manière encore plus visible
la détérioration puis la disparition
de lieux causées par l’oubli.
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Engin Ensen
En tant qu’artiste, plutôt que de me spécialiser
dans un médium spécifique,
je m’intéresse à la pratique expérimentale
de divers médias et à l’exploration de leurs
limites, puis je reconsidère les nouvelles
informations et résultats obtenus à travers
de nouveaux matériaux et médias.
Par conséquent, j’essaie de transposer en
gravure les œuvres créées dans divers médias
tels que la vidéo, la peinture, les installations,
l’art sonore, la photographie. Cette approche
signifie aussi revenir en arrière et réinterpréter
mes travaux antérieurs.
Ainsi, mon travail est
constitué de va-et-vient
plutôt que d’une linéarité
temporelle, d’éditions
revisitées, de nouvelles
configurations d’œuvres
antérieures et sûrement
de nouvelles idées
à développer.
Dans mes créations, je m’inspire parfois
d’un mot, d’un son, d’un geste ou d’une image
tirés des médias de masse. Ces premières
ébauches tournent généralement autour
de certains problèmes politiques internes
et de problèmes politiques et écologiques
internationaux. Les œuvres de cette sélection
sont principalement liées au visionnage devant
un écran. La fin des années 80 et le début
des années 90 ont coïncidé avec la vague
d’économie libérale qui nous a fait subir
un énorme changement. À travers lui,
la visualisation limitée de mon monde
imaginaire s’est diversifiée grâce
aux produits de la culture de masse.
Il y a un impact
très important de
ces mondes visuels,
des dessins animés,
des documentaires,
des animations et
des jeux vidéo sur
mon travail. Ainsi,
certaines images
et figuration courantes,
en particulier les
écrans cathodiques
analogiques, les
images détaillées
en gros plan, les lignes
de balayage et les
erreurs de décalage,
même la quadrichromie
(CMJN) en tant que
langage de conception et les différences de
couleur stochastiques sont les éléments préférés
de ce monde visuel analogique et numérique.
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Après une longue pause, je suis retourné
à mes travaux d’impression et j’ai commencé
la série intitulée Fatigue oculaire, comme celle
causée par la lecture ou la visualisation trop
longue d’un écran d’ordinateur. Un problème
rencontré par beaucoup et qui se manifeste
souvent par des yeux secs, entre autres choses.
Dans Eyestrain, plutôt que la critique des médias,
ce que je cherche à démontrer, c’est la carte
panoramique
de nos esprits qui
ont été dominés
par la culture
visuelle allant des
médias sociaux
aux émissions
de télévision
La poursuite
perpétuelle de la
confirmation de ce
que nous avons
vu, entendu et pris
comme vérité est
un autre point qui
a attiré mon
attention.
La fatigue oculaire est entièrement liée à ce
résultat, comme la désinformation, le discours
politique, la tension sociale et la polarisation.
L’effet « glitch » dans les tirages, qui peut être
pris comme un simple effet ou un filtre, est en fait
une analyse visuelle pointant sur le caractère
trompeur du journal télévisé, de la supervision,
de la censure et des mécanismes de contrôle.
En outre, dans la plupart de mes œuvres, j’utilise
des motifs répétitifs et étendus qui ne sont pas
de simples éléments visuels, mais
incompréhensibles en un coup d’œil, difficiles
à suivre d’une partie à l’autre et en quelque sorte
des images omniprésentes.
Je travaille sur ces modèles en tant qu’éléments,
big data ou superstructures qui indiquent l’autre
face de ce qui est vu et montré.
Engin Ensen, 2020
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Engin Ensen est né en 1984.
Il vit et travaille à Ankara, Turquie
Page 26 : Benefits of Palm Oil, sérigraphie, 100 × 170 cm, 2020
Page 27 : Eyestrain V.1, sérigraphie, 70 × 80 cm, 2019
Page 28 : My Gluttonous Meth Mouth Serie Pt. 3.0 Goldens of the Alamos Company, sérigraphie, 50 × 70 cm, 2019
Page 29 : Eyestrain, sérigraphie, 170 × 70 cm, 2020
Pages 30 et 31 : Planes of Subsconscious, sérigraphie, 20 × 31 cm, 2020
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Éric Fourmestraux
est né en 1963.
Il vit et travaille à Paris
Il est artiste graveur,
membre des conseils
d’administration de
Graver Maintenant,
de la JGC Gravure
contemporaine,
de La Taille et le Crayon
et de l’Association des
amis d’Alfred-Georges
Regner (aaAGR).
Il est également membre
de Manifestampe.
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Éric
Fourmestraux
La rencontre, un jour, avec Pierre Degenszajn, enfant juif rescapé
de la Seconde Guerre mondiale – durant laquelle les noms de Papon
et Mengele se sont immiscés dans la conversation – a donné naissance,
en 2018-2019, à l’installation In memoriam [aux quarante-huit enfants juifs déportés
de l’école Vicq-d’Azir à Paris 10 e ]. Les empreintes des quarante-huit cintres gravés
et les voix enregistrées n’ont pas laissé leur trace que sur le papier.
Le projet Synchronies invisibles, avec des artistes brésiliens, en a été une suite
logique avec Wer bist du, Onkel Josef ?
L’exposition Emprunts-Empreintes en a révélé, quant à elle,
le nom d’emprunt avec la série Wer bist du, Gregor Helmut ?
Comment le « médecin » nazi Josef Mengele
– surnommé « l’Ange de la mort » et
tristement célèbre, notamment pour ses
nombreuses et funestes expériences sur
des jumeaux au camp d’Auschwitz –
a-t-il pu finir « paisiblement » ses jours
au Brésil, sous le nom de Gregor Helmut,
sans jamais avoir été jugé ?
Recomposer des images d’images
recomposées. Telle une exhumation,
simplement pour ne pas oublier les
quatre cent mille personnes conduites
dans les chambres à gaz
par le Dr Mengele, ni les quelque six
millions de victimes du système
concentrationnaire nazi.
Page 32 : Amour amore [à Juliette G.], taille-douce, taille d’épargne et embossage, 69 × 35 cm, 2019
(édition 2019 de la JGC gravure contemporaine avec la gravure Pas tout dit de Julien Mélique)
Page 33 : In memoriam [aux quarante-huit enfants juifs déportés de l’école Vicq-d’Azir à Paris 10 e ], 2018-2019, installation de
48 matrices | cintres en bois de tailles diverses et de leur impression en taille d’épargne sur feuille de BFK Rives 50 × 33 cm
suspendue par minipinces à dessin – 6 accrochés au mur et 42 suspendus à une barre penderie murale avec piétements
de soutien en tubes d’aluminium Ø 30 mm et raccords tubulaires, 145 × 350 cm – 48 éprouvettes verre et bouchons liège
avec copeaux et poussière de bois de cintre sur trois supports de présentation – casque audio et fichier son avec les voix
de Pierre Degenszajn, 87 ans, Yal Rey, 11 ans, et Myriam Anselme, 9 ans
Page 34 : Wer bist du, Gregor Helmut ? #3, eau-forte, taille d’épargne, fils barbelés imprimés, lettres à frapper sur BFK Rives
et tissu rayé, 50 × 65,5 cm, 2019
Wer bist du, Gregor Helmut ? #2, eau-forte, fils barbelés imprimés et lettres à frapper sur BFK Rives et tissu rayé,
50 × 65,5 cm, 2019
Page 35 : In memoriam [aux quarante-huit enfants juifs déportés de l’école Vicq-d’Azir à Paris 10 e ] (détail), 2018-2019
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Éric FOURMESTRAUX (France)
Wer bist du, Onkel Josef ?
à partir de l’œuvre
fragment
10 x 10 cm
Jander Rama (Brésil)
Tecno-sereia Submarina
2014
eau-forte et aquatinte sur papier Hahnemühle
45 x 34 cm
La vie n’est faite que de rencontres : un jour avec 0,01 mètre carré d’une estampe brésilienne, conçue et offerte par
une certaine Senhora XX ou un certain Senhor XY ; le lendemain, les images de Luigi Ghirri dans l’exposition Cartes et
territoires au musée du Jeu de Paume.
Être tellement imprégné et vivre avec ma toute dernière production, In memoriam [aux quarante-huit enfants
juifs déportés de l’école Vicq d’Azir à Paris 10 e ], 2018-2019, issue aussi d’une rencontre. Un jour (un autre) avec Pierre
Degenszajn. Tellement forte. Où les noms de Papon et Mengele se sont immiscés dans la conversation.
Chercher un lien avec le Brésil, quel qu’il soit.
Me souvenir du séminaire du Bal Que peut une image ? à l’École des hautes études en sciences sociales – EHESS, fin
octobre 2012 et de cette première rencontre avec les portraits reconstitués par les experts du visage-crâne de Josef
Mengele. Puis dans l’exposition Images à charge – La construction de la preuve par l’image en 2015 au Bal où Diane
Dufour se demandait « Comment l’image se construit-elle dans un discours scientifique et historique de vérité ? »
D’une Diane à une autre, et faire le lien avec la célèbre photographie Identical Twins, Roselle, New Jersey, 1967 de
Diane Arbus, et avec l’obsession du « médecin » nazi Josef Mengele, surnommé « l’Ange de la mort », connu pour ses
nombreuses et terribles expériences sur des jumeaux au camp d’Auschwitz.
En référence au supposé schéma de montage de l’extrait d’estampe brésilienne, me dessiner un mode d’emploi
mental, un schéma de montage neuronal… Trouver des connexions avec les points de liaison numérotés de Richard
Helmer.
Des constructions… Déconstructions !
Lier, relier, délier, délayer.
Que peut une image ? Qu’est-ce qu’une carte postale ? Que véhicule-t-elle ? À quoi sert-elle ? À qui est-elle destinée ?
Dessiner un présentoir de cartes postales… vide… Qu’est-ce qu’une image de l’absence d’image ?
Le manque, le vide, le vide qui dessine une grille, un grillage, une entrave… comme des fils barbelés.
Les camps de la mort. La déshumanisation. Les rayures du tissu grossier des vêtements des déportés. Les badges
de différentes couleurs cousus sur la veste, jaune pour les Juifs, marron pour les Tsiganes, violet pour les Témoins de
Jehovah, rose pour les homosexuels, vert pour les récidivistes, rouge pour les prisonniers politiques et noir pour les
asociaux…
Repasser la toile rayée, et n’en garder que les bandes. Verticales…Tenant les corps droits, encore un temps.
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Wer bist du, Onkel Josef ?
2019
eau-forte, taille d’épargne, embossage et dessin graphite imprimé en numérique
papier Ultra Smooth Hahnemühle 305 g et BFK Rives 250 g - 50 x 65 cm
Laisser ma pensée digresser pour occulter l’effroyable.
Penser à Daniel Buren. L’oublier.
Penser aux derniers survivants du « bloc des jumeaux » d’Auschwitz, ce baraquement où s’entassaient les petits
cobayes de l’« oncle Mengele », comme il se faisait appeler.
Classer, trier, faire des choix. Dessiner des images.
D’un visage-crâne de Mengele, d’un extrait d’une gravure brésilienne, d’un portrait de Mengele avec des points de
repère numérotés, de jumelles de Diane Arbus. Les répéter une fois pour les « jumeler ». Les encadrer par paires du
fil d’une grille. Qu’est-ce qu’une image dans un présentoir de cartes postales ? Lui-même recadré avec des images
manquantes, hors champs. Qu’est-ce qu’induit la répétition de ces mêmes images ?
Combiner les images. Crâne et schéma de montage. Y glisser une erreur de perspective, en clin d’œil à Escher, croisé
dans une exposition à Naples…
Composer les morceaux d’un puzzle cérébral. Complexifier une image, chercher un équilibre, puis, un à un retirer la
charge de l’image. La surcharge. La référence à l’énucléation des cobayes, trop de fils barbelés…
Ne garder que l’empreinte de ces derniers.
Que devient une image d’images recomposées ?
Telle une exhumation.
En France, à Paris. Ou au Brésil, à Porto Alegre, ou à Novo Hamburgo ? La synchronie deviendra-t-elle visible ?
Simplement ne pas oublier les quatre cent mille personnes conduites à la chambre à gaz par le D r Mengele, et les
quelques six millions de victimes du système concentrationnaire nazi…
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JUDITH ROTHCHILD
Dans l’art, comme dans la vie, le noir et le blanc s’entrecroisent,
chacun dépendant de l’autre. La lumière crée l’ombre, l’obscurité accentue la clarté.
Sur la page, ils sont intimement
liés comme un puzzle
à résoudre. En gravure
en manière noire, on va
du noir au blanc et en dessin,
c’est le contraire, mais chaque
trace du noir crée les
éclats de lumière comme
la trace du blanc définit
les masses noires.
Je dessine comme je grave,
en regardant la vie,
la lumière, les formes.
C’est une façon de saisir
le temps, de faire que
chaque instant a plus de
substance.
La manière noire, pour moi,
est du dessin pur.
Je travaille pour trouver
la lumière au fond de la
surface veloutée de la plaque,
directement sur le cuivre,
d’après le sujet, et sans
étude préparatoire.
Le travail est fait en couches
successives et la plaque
garde la mémoire de chaque
geste de la main.
L’épreuve finale est la somme des heures de brunissage et il est souvent plus riche
et plus précis qu’un dessin peut l’être.
La densité du noir ajoute aussi à la perception d’une super-réalité.
En même temps, je prends plaisir à sortir de mon atelier pour dessiner sur le vif
en grand format les arbres et la campagne qui m’entourent.
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Judith Rothchild est née à Boston, États-Unis.
Elle a fait des études artistiques aux États-Unis d’Amérique mais également en Autriche.
Judith Rothchild vit et travaille à Octon, dans le sud de la France
www.fr.wikipedia.org/wiki/Judith_Rothchild
Page 38 : Un matin en septembre, manière noire, 20 × 15 cm, 2017
Page 39 : La Face cachée, manière noire, 15 × 15 cm, 2019
Pages 40 et 41 : Passiflores, manière noire, 20 × 15 et 20 × 30 cm, 2018
Page 42 : In the Spotlight V, manière noire, 37 × 25 cm, 2017
In the Spotlight II, manière noire, 37 × 25 cm, 2017
Pages 43 : Cactus, manière noire, 20 × 15 cm, 2018
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Julian Lemousy
Julian Lemousy est né en 1986 au Creusot (71). Il vit et travaille en Bourgogne.
Diplômé de l’École supérieure des beaux-arts du Mans, il a participé à plusieurs expositions de groupe,
notamment à BBB (Toulouse) et à La Station (Nice). Il a également organisé plusieurs expositions dans son atelier,
rebaptisé pour l’occasion L’Atelier Mineur. Il met régulièrement son savoir-faire et sa presse à gravure au service
de ses amis artistes et anime des ateliers d’impression et de sculpture dans plusieurs écoles municipales de la région
(école d’art de Beaune, etc.).
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La gravure a choisi Julian Lemousy plus qu’il ne l’a choisie.
Après des études consacrées à la sculpture, la gravure
ne s’est imposée dans sa pratique qu’après la sortie de l’école.
Il y avait bien eu des signes avant-coureurs pourtant,
tel ce parpaing passé sous la presse – opération aussi
audacieuse que surprenante – qui a posteriori se conçoit comme
un geste fondateur. L’artiste, entraîné à la conception d’objets
sculpturaux, s’est soudain senti plus ému par l’image tirée
de l’objet que par l’objet lui-même. Il l’explique par la force
de l’empreinte – soit l’action même de la gravure – qui établit
un nouveau rapport, contour et couleur s’imposant aussi comme
une solution très directe pour rendre compte du réel.
Bien que transmédié par l’image et la figuration, le monde tangible
s’infiltre dans l’œuvre, et par suite, l’ancre dans le temps.
L’acquisition d’une presse à gravure en 2014 achève la transition
totale du sculpteur en graveur. Il complète sa formation initiale
obtenue à l’École supérieure des beaux-arts du Mans
au gré d’erreurs et d’expérimentations. Se tenant éloigné
d’une application stricte des règles de la gravure, il s’autorise
des possibilités beaucoup plus excitantes que celles
que la formation de l’artisan lui aurait garanties.
Très vite, sa manière personnelle s’impose : elle s’exprime
en grande taille, dans des formats tout à fait inhabituels,
strictement en gravure sur bois, par goût du travail à la fraiseuse,
de la chaleur du matériau, naturel, économique disponible
partout, et typique du bricoleur de surcroît, enfin matériau
qui autorise les repentirs. Il s’applique à travailler le dessin
par masses, sans rechercher la précision du trait.
Surtout, il met au point un processus à plusieurs couches
et plusieurs couleurs pour jouer des contrastes
et de la profondeur. Le travail préparatoire s’apparente à « coder »
l’image puisque, en fonction des effets recherchés, il grave
de une à treize matrices, comme autant de calques superposés,
chacun associé à une seule couleur. Les matrices patiemment
imprimées les unes après les autres, l’ensemble ne se découvre
qu’à la toute fin du process, au moment ultime de la révélation.
À ce jour, ses gravures s’expriment en nuances de gris,
suivant un subtil jeu sur les saturations, mais l’artiste pourrait être
tenté par d’autres couleurs. Déjà, quelques touches de rouge sont
parfois posées en contrepoint des gris, blancs et noirs.
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De ce médium vénérable et classique
(mais aussi un peu passé, reconnaissons-le)
qu’est l’estampe, Julian Lemousy fait pourtant
un objet ultracontemporain inscrit dans
son époque. Par la technique d’abord, puisque
l’artiste part d’une image photographique –
numérique bien sûr –, prise par ses soins
le plus souvent, voire exceptionnellement trouvée
sur Internet, dans les rares cas où la vue d’une
image allogène susciterait le désir de gravure.
L’artiste confie à ce propos cette réflexion
pénétrante : « L’image s’impose à moi et
demande la gravure. » Le choix de ses propres
photos est motivé par le besoin de s’assurer de
leur authenticité et de leur singularité et l’envie
de rendre compte de sa propre réalité.
La fabrication totale de l’image – de bout en bout,
depuis le choix de son sujet jusqu’à sa révélation
sur le papier – est à cette condition.
Ensuite, l’image chez Julian Lemousy est aussi
ultracontemporaine par le traitement qu’elle subit.
Exit l’expressivité du dessin, les gravures
bénéficient du trait froid et neutre typique
du photoréalisme. Au-delà de ce rendu
photographique, la transformation par ordinateur
et le codage en matrices obligent l’artiste
à trouver des solutions qui conservent
des détails, de la finesse grâce à la fraiseuse,
sans viser un trait parfait. En résulte une image
qui change suivant la distance du spectateur,
légèrement floue de loin, selon une illusion
recherchée d’image basse définition,
auquel l’œil du XXI e siècle s’est tellement habitué.
Une image finalement si triturée qu’elle
en devient vaguement irréelle.
Laetitia Chauvin
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Page 44 : Cabane in the Wood, xylogravure, 71 × 111 cm, quatre matrices, 2018
Page 46 : Pavillon fort, xylogravure, 43 × 50 cm, 2019
Page 47 : Au pied de mon arbre, xylogravure, 70 x 50 cm, 2020
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Philippe Tardy
Philippe Tardy,
ou la résurrection réussie…
Pour le collectionneur ou l’amateur, pénétrer
dans l’atelier d’un artiste s’avère toujours une
expérience excitante. Une expérience parfois
risquée : quand on connaît sa production,
le rencontrer dans son cadre familier de travail
peut susciter des impressions contradictoires,
troubler la représentation que l’on s’est faite
de l’œuvre. Mais aussi, souvent, une expérience
stimulante et réjouissante. Parce que l’on
s’approche, croit-on, du cœur de l’œuvre,
du processus même
de la création, ou que
s’approfondit, par l’échange,
la lecture des œuvres.
C’est ce qui s’est passé
avec Philippe Tardy,
accueillant, chaleureux,
loquace, chez lui,
dans son atelier.
Depuis longtemps,
les estampes de
Philippe Tardy
nous plaisent par
leur sujet, des paysages
poétiques, à la fois
étranges et familiers
d’une nature paisible
et presque idéalisée :
ciels immenses et calmes,
vastes mers légèrement
moutonneuses, terres
ordonnées, arbres élancés,
épars ou alignés.
Pas de feu.
Pas de bruit.
Des paysages comme
des natures mortes.
Mais subtilement animés : les présences
sont rares en général, parfois minuscules,
une silhouette, en contemplation solitaire –
image du graveur ou du spectateur –, un bateau
ou un train d’un autre temps en mouvement ;
parfois, au contraire, des rassemblements
d’êtres vivants dansant, nageant, glissant,
courant, volant, mais isolés les uns des autres…
On voit des vols d’oies
sauvages par-dessus
des arbres, des pins
maritimes mollement
secoués par une brise
nocturne ou penchés
au-dessus de la mer
au creux d’une crique,
une voile tendue comme
une aile sur une mer
sereine, un fleuve quasi
immobile et large comme
une baie, un alignement
de cyprès ou de vignes,
un rocher massif d’où
s’élance un plongeur,
une vaste plaine travaillée
de cultures sous
un lumineux clair d’été
ou une pampa parcourue
d’animaux en marche.
Philippe Tardy grave l’ordre naturel
des choses, la poésie d’un moment
ou la beauté d’un paysage pur.
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Ce qui ravit aussi, c’est qu’on retrouve,
par la mise en couleurs de ces planches, avec
leurs teintes de bleu et de terre de Sienne,
ou d’ocre jaune (que permet l’utilisation de fins
papiers aquarellés et contrecollés), un écho
d’Hercules Seghers, et plus largement
de la gravure hollandaise pour la représentation
de vastes espaces, d’un Johannes Ruischer
par exemple ; un écho qui est sans doute
hommage et désir de s’inscrire dans une
tradition, et non, comme on le voit aujourd’hui,
volonté de « revisiter » ou de « se confronter
avec » ou de « questionner » les grands
devanciers.
Mais, dans ces espaces étrangement
silencieux, on découvre que poussent
des germes d’inquiétude.
L’atelier est austère, « monacal », dit Philippe
Tardy lui-même : une table de travail, une presse,
des étagères ou des espaces de rangement
pour le papier, l’eau-forte, les pigments,
les outils… Rien de confortable.
Raison, ordre et simplicité. De rares fenêtres
ouvrent sur un horizon rapproché et borné
d’arbres ou de murs. Ici, point de distraction.
Point d’ouverture à l’extérieur. L’ouverture
se produit dans la planche de cuivre :
trente centimètres dessinent un panorama,
un centimètre carré suffit à montrer maisons
et habitants. La planche et le travail rassurent,
mettent à portée de pointe le monde
qu’il a souvent parcouru, ce dont témoignent
les titres de ses gravures ; la mer, les estuaires,
les plaines s’ouvrent, là, devant soi, sous
la loupe. Mais on comprend aussi qu’il dise
redouter le danger de se perdre dans le détail,
dans le tracé de cet infiniment petit, sous l’effet
d’une fascination jouissive, mais qui enferme
autant que l’atelier lui-même. Et puis, l’infiniment
grand de l’espace des gravures s’enrichit
et se trouble sous l’effet de la multiplication
de minuscules dessins que la pointe fait surgir,
avec drôlerie parfois, ou de tracés légers d’une
inquiétante étrangeté : dans le ciel vide d’un
paysage apparaissent bien sûr des oiseaux,
des traces de nuages, mais aussi un chapeau
emporté par le vent, une montgolfière,
une silhouette en pleine course ou à quatre
pattes, un mot même ici ou là tendu comme
une bannière, ou un animal fantastique et
d’autres signes encore répétés et mystérieux…
À tel point que la sérénité apparente
de ces paysages paraît finalement
à l’observateur, muni d’une loupe lui aussi,
beaucoup plus relative, comme perturbée
par cette floraison de signes graphiques
inattendus, d’autant que les hommes y sont
rares, voire absents. Et que la danse macabre
fait aussi partie des sujets du graveur.
Dans cette efflorescence d’anomalies infimes,
Philippe Tardy n’exprime-t-il pas un effroi
métaphysique devant un univers finalement
vide ? Ces si beaux paysages figés et froids
ne sont-ils pas le signe d’une colère rentrée
devant une nature admirée mais si mal habitée ?
Dans ces foules d’individus toujours solitaires
– hommes, mais aussi oiseaux et animaux,
et même arbres – n’y a-t-il pas une image
désespérante de la condition humaine ?
Mais le lent et patient travail du graveur
et la gravure elle-même, par la beauté qu’elle
communique, sont les moyens de conjurer
inquiétude, révolte et pessimisme. Il avait intitulé,
dit-il, sa première gravure La Résurrection
manquée ; aujourd’hui, deux ou trois décennies
plus tard, l’estampe en général est visiblement
pour lui le moyen d’une résurrection réussie.
Le mot qui résume Philippe Tardy, c’est
finalement « résistance » : il résiste aux tentations
du repli sur soi, il résiste à l’enfermement dans
le détail ; il résiste au pessimisme possible ; enfin,
il résiste aux ruptures qu’on peut voir à l’œuvre
dans beaucoup de pratiques contemporaines,
en choisissant le paysage – ce genre si décrié –,
en conservant des formats modestes,
en essayant de traduire la beauté du monde,
ce gros mot de « l’art contemporain ». Qu’il en
soit remercié ! Bienheureuse la célébration du
monde à laquelle il se livre, en s’opposant
à ses démons et à ceux du monde tout entier.
Philippe Brunel, collectionneur
Philippe Tardy est né en 1960.
Il vit et travaille à Oullins, en région lyonnaise, où il se
consacre à la gravure en taille-douce depuis 1986.
Il est membre de l’association Empreinte à Lyon.
www.rhonestampe.fr/2016/03/31/philippe-tardy-ou-larésurrection-réussie/
www.philippetardy.com
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Page 48 : La Croisière, eau-forte et aquatinte en deux planches, sur cuivre, 32 × 18 cm
Page 49 : Vers Assouan, eau-forte sur cuivre, tirée sur Ingres aquarellé, 30 × 25 cm, 1996
Page 51 : Ville, eau-forte sur cuivre, 12 × 9 cm, 2017
Pages 52 et 53 : L’envol, eau-forte sur cuivre tirée sur Ingres aquarellé, 17 × 52 cm, 2015
Le Lac, eau-forte sur cuivre, 17 × 52 cm, 2018
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Veronica
Odén
Je suis une graveure suédoise, membre
de The Swedish Printmakers’ Association,
The Artist Federal of Värmland et The Artist
Federal of Dalsland (un studio d’artistes et
une communauté de galeries dans le Dalsland).
J’ai mon propre studio à la maison, où je travaille
principalement la pointe sèche, dont j’aime
le côté tranchant et la ligne similaire à celle
de la broderie. Dans mon récent projet,
qui est devenu une exposition individuelle
à la Gallery Bergman, à Karlstad, en Suède,
j’ai représenté des femmes qui ont fait quelque
chose qui sort de l’ordinaire de leur vivant.
Le projet s’appelait Leaving the Kitchen
(quitter la cuisine). Je pensais que c’était
un sujet passionnant pour une exposition.
Beaucoup de femmes que j’ai représentées
ont été pionnières dans leurs propres domaines.
J’ai dépeint des artistes, des écrivaines,
des révolutionnaires, des avocates
et bien d’autres…
Ces femmes ont clairement brisé les frontières
qui avaient été établies par la société
et ont élargi l’idée de ce que les femmes
pouvaient faire et ce qui était considéré comme
approprié pour une femme. Pour moi, l’histoire
derrière les portraits a été une source de confort.
Elles apportent toutes des histoires
passionnantes de sacrifice et de dépassement
des frontières. Au début du processus créatif,
je travaillais très librement et j’ai commencé à
jouer avec les arrière-plans.
Ensuite, j’ai imprimé la pointe sèche sur le fond
que je trouvais le plus approprié pour mon projet,
créant ainsi une certaine ambiance autour
de mes sujets. Quitter la cuisine est une série
de 70 portraits, tous monotypés.
Un de mes sujets fut Gertrud Arndt, une
photographe appartenant au mouvement
du Bauhaus. Son intérêt pour la photographie
commence alors qu’elle travaille dans
un cabinet d’architectes où elle prend
des photos de bâtiments.
Initialement, elle voulait être architecte,
ce qui l’a menée au Bauhaus, mais le fait qu’elle
soit la seule femme de la classe la conduit
à un sentiment d’isolement et elle change
d’orientation pour le cours de tissage.
Elle pense qu’étudier le tissage est le seul
moyen pour elle de continuer ses études
au Bauhaus en tant que femme.
Au Bauhaus,
elle
rencontre un
professeur
qui parle
fréquemment
de la
photographie
expérimentale.
Après ses
études, elle
reprend les
photographies
de bâtiments
pour
l’entreprise
de son mari.
Puis, elle
commence à
photographier
des natures
mortes et
des amis, dont elle réalise une série de
43 portraits. Après cela, elle cesse la photo.
La reconnaissance vient en 1979, lorsqu’elle
obtient une exposition au Museum Folkwang.
Mon portrait de Gertrud Arndt est réalisé à partir
d’une de ces photographies.
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Veronica Odén
est née en 1972.
Elle vit et travaille
à Åmål, en Suède.
Elle est musicienne
et artiste
plasticienne.
Page 54 : Luisa Casati
Page 55 : Miss Lily Elise I,
Page 56 : Miss X I, Colette I
Page 57 : Georgia O´Keeffe, Gertrud Arndt I, Colette III
Pour tous les travaux, pointe sèche sur fond préparé.
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Olivia Quintin
En observant le travail d’Olivia Quintin, on devine une nature optimiste et énergisante.
C’est une artiste de la couleur.
Son atelier se trouve en Bretagne, à Vannes, où elle exerce depuis une quinzaine d’années.
Exploratrice dans l’âme, on décèle dans son parcours une curiosité constante
et un goût pour les expérimentations artistiques de toutes sortes,
« pour la joie d’être surprise et de rester étonnée ».
Même si, comme beaucoup, elle a connu
des périodes de vide et de doute dans son
parcours artistique, elle continue
à chercher de nouvelles voies créatives,
quitte à changer radicalement de cap.
Avec elle, c’est tout ou rien.
C’est ainsi qu’après quinze ans
de pratique à l’aquarelle, elle a commencé
la gravure il y a environ trois ans.
Son apprentissage débute aux Ateliers
artistiques de Trussac, à Vannes,
où elle expérimente diverses facettes
de la gravure, notamment dans le cadre
d’un projet collectif sur les textes
d’Apollinaire, qui sera le fondement
de sa pratique actuelle basée sur la gravure
sur bois et les collages.
Entre figuratif et abstraction, elle développe
un style particulier axé sur les formes
colorées, qui combine plusieurs techniques
qu’elle qualifie de « morphogravure ».
Technique, esthétique et inspiration
Les formes imagées, souvent des oiseaux,
évoluent ainsi dans une gamme
chromatique très personnelle, tantôt joyeuse, tantôt plus sombre et mystérieuse.
Ses collages organiques, qui sont habillés de silhouettes parées de gravure sur bois, s’animent
dans une mise en scène. Ce petit monde multiple et vivant communique au rythme des vies
qu’elle imagine. Les dialogues s’installent, reliés par un fil gravé dans un jeu de formes et d’aplats
colorés. Le graphisme parfois brutal de ses créations est subtilement nourri par un jeu
de transparence, réminiscence de sa pratique à l’aquarelle.
Les corps imbriqués, superposés, se transforment ensuite en une entité plus globale.
Ils deviennent alors les danseurs d’un unique ballet, nous entraînant d’une énergie vibrante
vers une douce poésie.
Et si, en définitive, cette multitude ne formait qu’un ?
Le monde décrit dans les gravures d’Olivia Quintin est un paradoxe attirant, mélange subtil d’un
monde en mouvement, parfois inquiétant, et d’une réalité qu’elle souhaiterait plus harmonieuse.
À travers son travail, elle veut finalement nous convaincre que la vie « ensemble » est la plus forte.
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Olivia Quintin est née à Rennes,
elle a passé son enfance à Saint-Malo et vit maintenant
à Vannes, où elle profite avec sa famille de la douceur,
des couleurs et des lumières du golfe du Morbihan.
www.olivia-quintin.com
Morphogravure
Je grave une plaque de bois en creux.
Sur la plaque de bois encrée, je pose différents supports
de différentes formes qui ont été eux-mêmes déjà imprimés
avec cette plaque gravée ou simplement encrés, puis
j’imprime le tout sur une feuille de papier qui comporte
des collages issus de précédentes gravures ou de papiers
fantaisies que j’ai glanés.
Le tout en un seul passage.
Page 58 : Cormorans 2, gravure sur bois et collages (morphogravure), 70 × 50 cm, 2020
Page 59 : Vol de sternes 3, gravure sur bois et collages (morphogravure), 15 × 15 cm, 2019
Page 60 : Aigrette garzette 1, gravure sur bois et collages (morphogravure), 50 × 50 cm, 2020
Page 61 : Tournepierres 4, gravure sur bois et collages (morphogravure), 60 × 40, 2019.
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Le Club La Gravure Originale est une association
de collectionneurs d’estampes dont l’objet
est de promouvoir l’estampe, création originale
d’artiste, imprimée en multiples exemplaires
mais en nombre limité, et de la mettre en
valeur auprès du public par des expositions
et en facilitant les rencontres entre
amateurs et artistes. L’association soutient
la création d’estampe en éditant une
sélection annuelle d’œuvres gravées originales
créées pour le Club et dont le tirage du nombre
d’épreuves est strictement limité avant
poinçonnage de la matrice. Indépendante
des règles du marché traditionnel de l’édition
commerciale, fonctionnant sans but
lucratif et sans subventions,
La Gravure Originale a pour
unique ambition de se fonder
sur la qualité des artistes
pressentis ; c’est ainsi que le
Club, qui fête en 2020 ses
50 ans d’existence, a constitué
une prestigieuse collection
d’estampes contemporaines
caractérisée par une triple
diversité aux niveaux des
techniques, des styles et
de la notoriété des graveurs.
Les critères éditoriaux de
la collection du Club :
des artistes ayant une
grande notoriété dans le
monde de l’estampe et
reconnus par leurs pairs ;
c’est ainsi que plusieurs
artistes ont été membres
de l’Académie des beaux-arts
de l’Institut après leur
sélection par le Club : Louis Leygue, André
Jacquemin, Roger Vieillard, Jean-Marie Granier,
Louis-René Berge, Pierre Collin ;
de jeunes artistes ayant une réelle écriture
personnelle. De nombreux artistes ont reçu les
prix Casa de Velázquez et/ou Gravix. Une
ouverture sur des cultures différentes, des
artistes non-résidents en France. Ont été ainsi
sélectionnés des artistes résidant en Allemagne,
Angleterre, Australie, Espagne, États-Unis, Italie,
Japon. Toutes les techniques de la gravure sont
représentées. Et une belle ouverture vers les
autres techniques de l’estampe : sérigraphie
et impression numérique.
L’exposition rétrospective, 50 ans d’estampe
Jubilé de La Gravure Originale, italique a eu lieu
du 1 er au 24 octobre 2020 dans les beaux locaux
de la Fondation Taylor, à Paris.
Pour l’occasion,
trois gravures
originales ont
été éditées
(taille- douce et
taille d’épargne,
en souscription),
ainsi que deux
beaux livres :
La Gravure
Originale,
Histoire de
50 ans d’édition
d’estampes,
Catalogue
de l’ensemble
des éditions
et Impressions
d’ateliers
de France Dumas,
une coédition
Riveneuve/La
Gravure Originale.
Trois conférences ont complété ce programme,
L’histoire du Club par Christian Massonnet,
La gravure après Duchamp par Jean-Marie
Marandin et L’estampe contemporaine en 1970
par Michel Melot. Il y eut de belles rencontres
avec les artistes et une exposition des gravures
d’une classe de CM1 de l’école
La Tour-d’Auvergne (Paris 9 e ).
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Page 62 : Marie Boralevi, Eloping with a Beast,
techniques mixtes, 49,5 × 36,5 cm, 2013
Page 63 : Judith Rothchild, Le Citronnier,
manière noire, 39,5 × 20 cm, 2012
Yves Jobert, Reflets du quotidien, burin, 49 × 34,5 cm, 1972
Sylviane Canini, MCMXC, eau-forte, 53,5 × 49,5 cm, 1990
Vincent Vilard, Sans titre,
aquatinte, eau-forte, 3D, 49 × 39 cm, 2013
José San Martin, En piste, xylogravure, 49 × 40 cm, papier :
65× 50 cm (souscription) © Dominique de Graeve
Cécile Combaz, Clin d’œil, xylogravure, 34,5 × 34 cm, papier :
65 × 50 cm (souscription) © La Gravure Originale
Georges Rubel, État VI, Jardin zen occidentalisé, aquatinte,
techniques mixtes, diam : 27 cm, papier : 65 × 50 cm
(souscription) © La Gravure Originale
Dado, Sans titre, eau-forte et pointe sèche, 29 × 23,5 cm, 1990
G. W. Both, Sans titre, linogravure, 67 × 43 cm, 20 08
François Houtin, Samothrace, eau-forte, 37,5 × 29,7 cm, 2007
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FIG Bilbao
Print Festival
De gauche à droite : Mireia Massagué, directrice du musée Chillida-Leku ; Javier Novo, directeur du Musée
des beaux-arts de Bilbao ; Ignacio Goitia, artiste ; Eugenia Griffero directrice des projets internationaux ;
Petra Joos, curatrice du Gughenheim ; Iñaki Alonso, président du FIG de Bilbao.
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Le Festival international de l’estampe et de l’art
sur papier célébrera encore sa foire annuelle
d’art, dans sa neuvième édition, au Palais
Euskalduna de la ville de Bilbao, présentant
également une plate-forme en ligne pour ses
galeries internationales en raison de la situation
sanitaire liée au Covid-19.
Du 26 au 29 novembre 2020, vous pourrez
profiter au Palais Euskalduna d’une cinquantaine
de galeries présentes, et bien d’autres sur notre
nouvelle plateforme en ligne pour les galeries
internationales. Grâce à la diffusion en continu,
notre programme « Show the studio »
vous permettra d’assister à des conférences
internationales et des ateliers avec des
professionnels du monde graphique, comme
La Ceiba Gráfica (Mexique), Tamarind Institute
(États-Unis), Fundación CIEC (Betanzos,
Espagne), Xalubinia Menorca (Espagne),
Frans Masereel Centrum (Belgique).
Les graveurs Marta Cárdenas et Mari Puri
Herrero seront au salon, interviewées par
la journaliste Begoña Zubieta en conversation
à notre table des « Femmes dans l’art ».
Des musées comme le Musée des beaux-arts
de Bilbao et le musée Chillida-Leku
présenteront des pièces de leur collection,
ainsi que la fondation Iberdrola.
Des œuvres choisies de Basquegraphia
et Openportfolio ou des projets offrant
de la visibilité aux artistes émergents
seront visibles lors de la foire.
Comme chaque année,
FIG Bilbao, dans
un projet collaboratif
avec le Musée des
beaux-arts de Bilbao,
présentera l’exposition
et un catalogue des
œuvres de l’artiste
Eduardo Arroyo.
FIG Bilbao Festival a le soutien des institutions
publiques de la ville et du ministère de la Culture
du gouvernement espagnol.
Iñaki Alonso, président de l’équipe FIG Bilbao ; Eugenia
Griffero Fabre, Olga Iradier, Ana Gime
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solidarity
beirut
printmaking
Cher(e)s ami(e)s et collègues graveur(s),
et chers amateurs d’art,
Le 4 août 2020, nous avons tous découvert avec
effroi les images des deux explosions qui ont
ravagé la ville de Beyrouth, alors que le pays était
déjà en proie à une terrible récession depuis 2018
et frappé de plein fouet par la pire crise
économique, sociale et de gouvernance de son
histoire… Dans ce dramatique contexte, où
l’essentiel devient inabordable et où le quotidien
est une lutte, un atelier de gravure en activité peut
apparaître comme une utopie, voire un mirage…
Le Beirut Printmaking Studio, fondé par l’artiste
Tarek Mourad, a tout d’une oasis ! C’est un lieu
d’apprentissage de la plupart des techniques de
gravure, mais aussi de la débrouille, hissée – plus
que partout ailleurs – au statut de sacerdoce.
Situé dans une région du monde où la culture de
la gravure est loin d’être prédominante, cet atelier
est un modèle du genre. Le métier, autant que
l’esprit de la gravure, s’y exerce pleinement,
fédérant une joyeuse communauté d’artistes
polyvalents et inventifs.
Les presses, les rouleaux de lithographie,
et tout ce qui ne peut se trouver sur place ont
dû être construits, pièce par pièce… Les pierres
de lithographie ramenées de Syrie ou d’Irak !
Mais, malgré la motivation, certaines choses
sont devenues inaccessibles ou simplement
introuvables. Il s’agit principalement de petit
matériel comme certains outils ou matériels
consommables (dont la tarlatane, si banale ici,
mais inexistante au Liban).
Cependant, les besoins matériels ne sont pas
les seules préoccupations de cet atelier ouvert
à tous. Il faut lutter contre le découragement
ambiant et le moral en berne, la dépression
qui touche beaucoup d’artistes. Il y a un besoin
https://solidaritebeirutprintmakingstudio.weebly.com
solidaritybeirutprintmaking@gmail.com
urgent de réenchantement ! En tant que graveurs,
et surtout étant amenés à voyager dans le cadre
du travail ou d’échanger via les réseaux sociaux,
nous avons réalisé que la gravure est un langage
universel qui fédère et rassemble instantanément,
indépendamment de la langue, de la culture,
de la religion. On peut parler de la « famille
des graveurs », toujours prête à collaborer,
à échanger et à partager. Cela s’est vérifié
une fois de plus au moment de lancer cet appel
à la solidarité, avec un premier événement qui
a eu lieu à la Journée de l’estampe à Paris. Cette
action a remporté un franc succès, aussi bien en
termes d’engouement du public – se concrétisant
par de nombreuses ventes – qu’en termes
de solidarité manifestée par les artistes qui ont
généreusement déposé une œuvre ou plus.
Cet élan dépasse la simple collecte de fonds,
bien sûr nécessaire pour pérenniser un lieu
et encourager un magnifique projet qui semble
ne pas avoir d’équivalent au Liban. Il apporte
aussi et surtout un réconfort et un soutien
psychologique à ces artistes qui se sentent isolés,
en leur faisant retrouver l’envie de faire vivre
ce fabuleux médium qu’est la gravure.
D’autres projets sont à l’étude, en collaboration
avec le Beirut Printmaking Studio et la galerie
Artlab à Beyrouth, et verront le jour à la suite
de cette action, avec toujours cette même envie
et cet objectif de jeter des ponts entre les lieux
de la gravure et les artistes d’ici et de là-bas.
Sabine Delahaut, Jean-Michel Uyttersprot
et toute l’équipe de la revue Actuel.
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Tarifs 2020
Tarifs 2020
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Belgique Europe Monde
Pour 4 numéros, s’abonner à la revue Actuel, l’estampe contemporaine
un Hors-Série Gratuit
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ShopVostok est une boutique spécialisée dans le
matériel de sérigraphie et d’impression artisanale.
Elle a été conçue comme un lieu de rencontres pour
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La vente de matériel, d’accessoires et de
consommables ne représente qu’une partie
de son activité. Elle propose aussi de nombreux
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