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Rotary Magazin 02/2016

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Rotary Magazin 02/2016

THEME SCHWERPUNKT DU

THEME SCHWERPUNKT DU MOIS – ROTARY SUISSE LIECHTENSTEIN – FEBRUAR 2016 Schock im Gesicht stand, berührte sie meine Schulter und meinte ‹Ich bin okay›.» Evin weiss, wie sensibel ihre Rolle ist. «Was mich aufregt», meint sie, «sind Journalisten, die hierherkommen und versuchen, diese Frauen zum Sprechen zu bringen, um Details darüber zu bekommen, wie sie vergewaltigt wurden. Und dies nur, um eine Story zu bekommen, die sich gut verkaufen lässt.» «Die Geschichten können erzählt werden», sagt sie, «aber man darf keine Gesichter zeigen oder Namen nennen.» Einmal wurde die noch in Gefangenschaft der ISIS befindliche Familie eines Mädchens nach dem Interview, bei dem ihr Gesicht deutlich sichtbar war, umgebracht. Evin vertritt einen entschiedenen Standpunkt hinsichtlich der Bedrängnis der Jesiden, die sie «ein friedliches Volk» nennt. Daher lebt sie weiterhin im nördlichen Irak, obwohl sich die Bedingungen dort seit ihrer Ankunft nur verschlimmert haben. «Es war früher sicherer und wohlhabender hier.» Das sind turbulente Zeiten in einer turbulenten Region. Die Vereinten Nationen schätzen, dass die ISIS noch 3000 Jesiden in Gefangenschaft hält. Noch beängstigender ist für Evin, dass die ISIS auch die Kurden anvisieren möchte. «Wir trafen einige ISIS-Gefangene und fragten sie, gegen wen sie kämpfen. Sie sagten: ‹Wir bekämpfen die ungläubigen Kurden. Wenn wir welche finden, töten wir sie.›» Vor einem Jahr wurde eine ihrer Cousinen, ein junges Mädchen, in Syrien getötet. «Ermordung und Tötung sind ein normaler Teil des Lebens hier», merkt sie an. Aber Anfang des Jahres starb auch ein Neffe dort bei einer Explosion. «Mein Neffe war wie mein kleiner Bruder. Sein Tod berührt mich nach wie vor sehr.» Sie unterstützt Kurden, die nach Syrien reisen, um zu helfen. «Sie bekämpfen die ISIS, die der Feind der gesamten Menschheit ist.» Eines Tages wird sie all dies niederschreiben. Sie spürt eine Verantwortung gegenüber den Frauen, die sie trifft. Als ich sie frage, welche Frauen sie am meisten inspiriert haben, legt sie keine Denkpause ein. «Alle.» Rose George, «The Rotarian» 18 18 ROTARY EN ACTION POUR LA PAIX FAIRE FI DES FRONTIÈRES Les réfugiés traversent l’Europe, les attaques terroristes font les gros titres, et la guerre fait rage en Syrie. Rotary a une réponse à long terme aux conflits – les bourses de la paix qui œuvrent en première ligne. Lisez donc l’histoire d’Evin, une boursière de la paix qui risque sa vie pour travailler avec les femmes ayant subi les sévices de l’EI. ELLE A PRIS LE NOM D’EVIN Elle a 32 ans. Elle est Kurde aussi, quoique de Turquie et non d’Irak, et elle a des liens de parenté étroits avec les Yazidis. «Ils sont aussi Kurdes», dit-elle. Le monde connaît mal le peuple kurde et encore moins les Yazidis bien qu’ils aient fait les gros titres dans la presse ces dernières années. En Irak, ils étaient 500000, nombre d’entre eux vivant à proximité du Mont Sinjar, près de la frontière syrienne. Leur religion est une religion ancienne et syncrétique, avec des éléments zoroastriens, mithracismes et islamiques. Certains us yazidis sont proches de l’Islam: ainsi les Yazidis ne mangent pas de porc. Pourtant depuis des siècles, ils sont persécutés, surtout par les Musulmans en tant qu’«adorateurs du diable». Il n’y a pratiquement plus de Yazidis à Sinjar parce que la ville a été presque totalement détruite. Quand les forces de l’Etat islamique l’ont envahie en août 2014, elles ont massacré la population ou fait esclaves tous ceux qu’elles pouvaient attraper. Des milliers de femmes ont été vendues comme esclaves sexuelles. Le reste des habitants a fui. Certains se sont réfugiés dans le Mont Sinjar, mais ils y souffrent des températures extrêmement basses en hiver et très élevées en été; ils sont d’ailleurs déjà nombreux à avoir succombé. Elle m’envoie son nom de code par Skype. Donner son vrai nom, dire ce qu’elle fait et où, lui ferait courir des risques. Elle se trouve dans le Kurdistan irakien, de la partie nord de l’Irak, qui est au cœur des combats, des guerres et des conflits, un lieu où les autochtones déjà ont du mal à se faire une idée de la situation, ce qui est donc encore plus difficile pour les étrangers. Mais elle a un objectif dans ce chaos: elle s’engage pour les réfugiés Syriens et Yazidis qui ont été la cible de l’État islamique, torturés et expulsés de chez eux. Le chemin pris par Evin pour aider les réfugiés n’a pas été la ligne droite. Après avoir obtenu son diplôme en sciences humaines, elle s’est employée à faire connaître les violations des droits de l’homme contre les Kurdes au Kurdistan; le Kurdistan englobe des territoires de l’Irak, de la Turquie, de la Syrie et de l’Iran. Evin s’est aussi concentrée sur la construction de grands barrages par la Turquie, sur leur impact sur la population et l’environnement. Elle a d’abord parcouru le nord de l’Irak pour se rendre compte sur place des conséquences de la construction des barrages pour le Tigre et l’Euphrate qui

SCHWERPUNKT – ROTARY SUISSE LIECHTENSTEIN – FEBRUAR 2016 descendent des montagnes turques et traversent la Syrie et l’Irak jusqu’au Golfe Persique. L’Euphrate est déjà presque asséché. EVIN A BESOIN D’UN CLUB ROTARY COMME SPONSOR Comme la situation en Syrie se détériorait, elle s’est engagée comme traductrice dans une organisation humanitaire non gouvernementale. Après avoir rencontré son fiancé, un Kurde de Syrie vivant en Irak, elle s’est installée dans ce pays, s’est mariée et a commencé à travailler comme bénévole dans les camps de réfugiés où des milliers de Syriens et de Yazidis avaient trouvé refuge. Elle voulait continuer ses études, mais ne pouvait pas les financer; c’est alors qu’elle a fait la connaissance d’un étudiant irakien au Centre Rotary pour la Paix de l’Université de Chulalongkorn à Bangkok; il l’a persuadée de demander une bourse pour la Paix. Mais elle a dû faire face à un problème de taille, car il n’y avait pas de club Rotary en Irak qui aurait pu la parrainer. Elle n’a pas baissé les bras et pour finir, sa candidature a été prise en charge par le Club Rotary d’Asunción (Paraguay), et elle a été acceptée. JOUER DE LA MUSIQUE KUR- DE POUVAIT VOUS MENER EN PRISON «La bourse pour la paix a été un jalon dans ma vie», dit-elle. Elle a souvent été impressionnée, d’abord en voyageant hors de sa région vers un «monde tout nouveau», et puis par les gens qu’elle a rencontrés, qui venaient de pays qu’elle ne connaissait que par ses lectures: le Sri Lanka, l’Afghanistan, les États-Unis. Elle est allée au Cambodge, où, après avoir lu sur les Khmers Rouges, elle a rencontré des gens ayant souffert sous ce régime. «J’ai tant appris», dit-elle, et elle a partagé son propre savoir avec d’autres étudiants participant au programme. «Le Kurdistan a tant de graves problèmes que la plupart des étrangers ignorent», explique-t-elle. Par exemple, un enseignant boursier pour la paix qui promouvait la musique en tant que mécanisme de renforcement de la paix ne savait pas qu’en Turquie, jouer de la musique kurde pouvait vous mener en prison. Evin travaille aujourd’hui pour une ONG et pour des journaux, elle mène des interviews et fait des traductions. Elle va partout où on l’appelle et en tout cas, trois ou quatre fois par an en Syrie où elle passe la plupart de son temps dans les camps de Yazidis et de Syriens déplacés. Elle dit que les conditions de vie y sont mauvaises bien qu’il y ait des écoles et des organisations internationales. Les gens vivent dans des tentes; il y fait très froid en hiver et très chaud durant l’été rigoureux en Irak. Elle travaille aussi avec les Nations Unies et d’autres organisations pour documenter les récits des femmes et des jeunes filles yazidis. «Je fais de mon mieux pour transmettre leur pensée.» Evin cite ainsi le vécu d’une jeune fille. Son village a été envahi par l’EI et elle a été violée. «Ils ont tué tous les hommes; ils ont emmené les femmes et les enfants. Les jeunes filles ont été vendues dans les bazars.» Et les femmes qui n’étaient pas vendues étaient tuées. À Sinjar, récemment reprise par les combattants kurdes, des fosses communes dont une où il n’y avait que des femmes âgées ont été découvertes. L’achat, la vente et les nombreux viols de femmes et de jeunes filles par l’EI sont bien documentés en particulier par le Human Rights Watch qui a publié un rapport terrifiant l’an dernier. L’EI a ouvertement reconnu qu’il utilise la mise en esclavage et le viol comme pression politique. Les femmes sont considérées comme butin de guerre. Mais il y a une autre raison froidement stratégique pour vendre les filles: elles peuvent être utilisées pour attirer les combattants étrangers. Je demande à Evin s’il est facile pour les femmes de parler de leur traumatisme. «Cela varie d’une femme à l’autre», dit-elle. «Certaines sont très fortes ; d’autres non.» Elle a ainsi traduit pour une femme qui a commencé à rire quand elle a décrit la façon dont son frère avait été tué. Elle se rappelle qu’une autre «a été vendue plusieurs fois». Elle est tombée enceinte et a avorté. Quand elle m’en a parlé, j’ai eu le souffle coupé. Elle a touché mon épaule et m’a dit: «Cela va aller.» Evin sait que son rôle est délicat. Les récits peuvent êtres narrés dit-elle, «mais vous ne «ILS ONT TUÉ TOUS LES HOMMES. ILS ONT EMMENÉ LES FEMMES ET LES ENFANTS. LES FILLES ONT ÉTÉ VENDUES DANS LES BAZARS.» EVIN, BOURSIÈRE POUR LA PAIX pouvez pas montrer le visage de ces femmes ou dire comment elles s’appellent.» Une fois, dit-elle, après qu’une fille a été interviewée avec le visage découvert, sa famille encore otage de l’Ei – a été exterminée. «Elle a à cœur le sort des Yazidis, qu’elle appelle «un peuple pacifique»; alors elle continue à vivre en Irak du Nord malgré les conditions qui n’ont fait qu’empirer depuis son arrivée. «Auparavant, ici c’était plus sûr et plus riche aussi.» C’est une période agitée dans une région en pleine turbulence. Les Nations Unies estiment que l’EI détient encore 3000 Yazidis en captivité. Le pire pour Evin est que l’EI veut aussi s’attaquer aux Kurdes. «Nous avons rencontré des prisonniers EI et leur avons demandé contre qui ils se battaient. Ils ont répondu: «Nous combattons des infidèles appelés Kurdes. Nous les tuons s’ils passent sur notre chemin.» Il y a un an, l’une de ses cousines, une petite fille, a été tuée en Syrie. «Les meurtres et les assassinats font partie du quotidien ici», remarque-t-elle. Mais au début de l’année, mon neveu est aussi mort là-bas dans une explosion. Elle soutient les Kurdes allant en Syrie pour aider. «Ils combattent l’EI, l’ennemi de toute l’humanité.» Un jour elle écrira tout cela. Elle s’en sent responsable envers les femmes qu’elle rencontre. Quand je lui demande quelles femmes l’ont inspirée le plus, elle répond du tac au tac. «Toutes.» Rose George, «The Rotarian» 19

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