Plaquette Tobie 2 - Opéra de Lyon

dramatique. Dans l’Autriche catholique, où travaillaient de nombreux
compositeurs venus de la Péninsule, dominait en revanche le modèle
plus compassé de l’oratorio volgaro italien (l’oratorio en langue vulgaire,
par opposition à l’oratorio latino, alors passé de mode). Plus contemplatif
que ses alter ego allemands ou anglais, ce type d’oratorio se rapprochait
fortement du dramma per musica tel que Métastase, poète à la
cour de Vienne pendant un demi-siècle, en avait fixé les règles ; il
n’était le plus souvent qu’une succession assez lassante d’arie da capo,
les chœurs et l’orchestre étant réduits à la portion congrue.
Cette tradition italienne était assez vivace à Salzbourg et à Vienne,
et son succès fut renforcé en 1771 par la fondation de la Wiener Tonkünstlersozietät
(Société des artistes musiciens de Vienne). Cette association
ouverte aux musiciens professionnels de Vienne avait pour dessein
premier d’assurer, le cas échéant, une pension aux veuves et aux
orphelins de ses membres. A cet effet, elle organisait chaque année
deux concerts de bienfaisance, durant l’Avent et le Carême, au cours
desquels était exécuté un oratorio. Cette pratique eut le double effet que
la Société devienne le plus important organisateur de concerts viennois
et que le genre de l’oratorio quitte définitivement l’église pour la salle
de concert. En 1775, la Société passa commande à Haydn d’un tel oratorio.
Ce fut d’ailleurs la première commande reçue, par le maître de
chapelle des princes hongrois Esterházy, qui émane de la capitale autrichienne.
Le compositeur fournit la partition à titre gracieux et assura
lui-même la création d’Il ritorno di Tobia, les 2 et 4 avril 1775, au
Kärtnertortheater de Vienne.
La K. k. priviligierte Realzeitung der Wissenschaften [Revue concrète
des sciences par privilège impérial et royal] du 6 avril rend compte de
l’événement :
« Le célèbre Herr Kapellmeister Hayden [sic] a recueilli [...] les
applaudissements de tous et témoigné une fois de plus, à son grand
avantage, de son habileté bien connue. Expression, nature et art se
mêlaient dans son œuvre si étroitement et si continuellement que les
auditeurs ne pouvaient qu’aimer l’une et admirer les autres.
En particulier, ses chœurs brillaient d’un feu qu’auparavant on avait
cru l’apanage du seul Haendel. Le public, venu nombreux, était
unanime dans ses louanges, et Haydn selon son habitude est apparu
comme le grand artiste dont les œuvres sont appréciées dans toute
l’Europe, et en qui les étrangers reconnaissent le génie original qui
fait les maîtres. La qualité de l’exécution honore d’autant plus les
musiciens d’ici et ceux venus de l’extérieur qu’ils ont abandonné
les recettes à leurs veuves et orphelins [...]*. »
Les deux concerts rapportent à la Tonkünstlersozietät un bénéfice
substantiel et valent à l’auteur les critiques les plus laudatives. Fort de
cette réussite, Haydn demande en 1778 son admission dans la prestigieuse
société. Résidant hors de Vienne, il est soumis à une cotisation
de 300 florins dont il souhaite être dispensé, eu égard aux bénéfices nets
HAYDN LE RETOUR DE TOBIE
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