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60- Les guerres de décolonisation en Afrique

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durée . Pourtant, la résistance politique s’avérait parfois plus payante que <strong>de</strong>s opérations armées mal<br />

évaluées. Elle pouvait même décl<strong>en</strong>cher une révolte populaire salutaire. Le cas du Maroc <strong>en</strong><br />

témoigne 55 . En somme, les Etats colonisateurs aux systèmes démocratiques (France, Angleterre,<br />

Belgique) se montrai<strong>en</strong>t plus réalistes et moins opposés à la <strong>décolonisation</strong> que les puissances<br />

coloniales où gouvernai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s régimes dictatoriaux ou racistes (Portugal, Espagne, <strong>Afrique</strong> du Sud).<br />

<strong>Les</strong> mouvem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> libération prépondérants ont connu décidém<strong>en</strong>t plus <strong>de</strong> malheurs - <strong>en</strong> g<strong>en</strong>re et <strong>en</strong><br />

nombre - sous les dictateurs colonialistes.<br />

b) <strong>Les</strong> prix <strong>de</strong> la libération.<br />

C’est <strong>en</strong> recourant à la viol<strong>en</strong>ce que les fronts et mouvem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> libération croyai<strong>en</strong>t pouvoir<br />

rejoindre le camp <strong>de</strong> ceux qui fur<strong>en</strong>t libérés avant eux 56 : La Syrie et le Liban dans les années<br />

quarante pour le Maroc 57 , le Maroc et la Tunisie dans les années cinquante pour l’Algérie 58 , les<br />

territoires francophones et anglophones dans les années soixante pour les colonies portugaises 59 et le<br />

Zimbabwe dans les années quatre vingt pour la Namibie <strong>60</strong> . Voici maint<strong>en</strong>ant quelques prix <strong>de</strong> la<br />

libération, payés par <strong>de</strong>s pays ayant arraché directem<strong>en</strong>t leur souveraineté, par la révolte armée ou la<br />

guerre. Au Maroc, les « combats d’indép<strong>en</strong>dance », <strong>en</strong>tamés <strong>en</strong> août 1953, ont duré <strong>de</strong>ux ans et trois<br />

mois et ont <strong>en</strong>g<strong>en</strong>dré « plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux milles morts dont près <strong>de</strong> 1500 marocains et 49 europé<strong>en</strong>s dans<br />

la seule ville <strong>de</strong> Oued Zem ». Sans parler <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> blessés et d’invali<strong>de</strong>s rec<strong>en</strong>sés avant fin<br />

1955. 61 . En Algérie, bi<strong>en</strong> que les sources soi<strong>en</strong>t nettem<strong>en</strong>t diverg<strong>en</strong>tes, on conclut à une fourchette<br />

<strong>de</strong> 300.000 à 400.000 morts dont 250.000 algéri<strong>en</strong>s <strong>en</strong>viron et 30.000 français au moins 62 . Du côté<br />

algéri<strong>en</strong>, le FLN compte <strong>en</strong> 1964 « plus d'un million <strong>de</strong> martyrs ». En Angola, le bilan <strong>de</strong> la guerre<br />

d’indép<strong>en</strong>dance s’éleva à 50.000 morts, sur une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> 14 ans (1961-1975). Au Mozambique, le<br />

bilan était <strong>de</strong> 30.000 morts dans une guerre qui dura 11 ans (1964-1975) m<strong>en</strong>ée par le FRELIMO 63 .<br />

Mais quel bénéfice aurai<strong>en</strong>t gagné les pays qui m<strong>en</strong>èr<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s <strong>guerres</strong> d’indép<strong>en</strong>dance contre la<br />

colonisation portugaise, par rapport à leurs pairs libérés sans organisations armées et sans pertes<br />

comparables ? En réalité, le fait d’y être parv<strong>en</strong>us grâce aux sacrifices <strong>de</strong>s premiers constituait déjà<br />

le mérite et la gloire <strong>de</strong>s combattants. Car si la révolution <strong>de</strong>s œillets fut la cause directe <strong>de</strong><br />

l’émancipation quasi-simultanée <strong>de</strong> ces territoires, le motif <strong>de</strong> son décl<strong>en</strong>chem<strong>en</strong>t prov<strong>en</strong>ait bi<strong>en</strong> <strong>de</strong><br />

portugais tués dans les combats. Des facteurs suffisants pour pousser le Portugal à quitter ses colonies africaines, <strong>en</strong><br />

1975.<br />

55<br />

C’est <strong>en</strong> résistant aux m<strong>en</strong>aces du général Guillaume (Rési<strong>de</strong>nt général) durant plusieurs mois <strong>de</strong> l’année 1953 et <strong>en</strong><br />

préférant l’exil à l’abdication que le Roi Mohammed V fait décl<strong>en</strong>cher la révolte populaire pour l’indép<strong>en</strong>dance<br />

(Révolution du Roi et du peuple) le 20 août <strong>de</strong> cette même année. Révolution sans laquelle le Maroc n’aurait jamais pu<br />

être le premier pays d’<strong>Afrique</strong> à se libérer du protectorat français.<br />

56<br />

<strong>Les</strong> peuples qui fur<strong>en</strong>t obligés <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre les armes serai<strong>en</strong>t restés plus longtemps sous le joug colonial <strong>en</strong> croisant les<br />

bras, et n’aurai<strong>en</strong>t pu contribuer à l’affranchissem<strong>en</strong>t d’autres territoires <strong>en</strong> même temps qu’eux.<br />

57<br />

Indép<strong>en</strong>dant dès le 18 novembre 1955.<br />

58<br />

Indép<strong>en</strong>dante <strong>en</strong> 1962.<br />

59<br />

Indép<strong>en</strong>dantes <strong>en</strong> 1975.<br />

<strong>60</strong><br />

Indép<strong>en</strong>dante <strong>en</strong> 1990.<br />

61<br />

Ces chiffres n’étai<strong>en</strong>t pas négligeables aux yeux <strong>de</strong> la métropole, vu la primauté <strong>de</strong>s affrontem<strong>en</strong>ts meurtriers au<br />

Maroc par rapport aux autres colonies françaises <strong>de</strong> l’époque.<br />

62<br />

Selon l’histori<strong>en</strong> Guy Pervillé qui s'est appuyé sur <strong>de</strong>s données démographiques, notamm<strong>en</strong>t les rec<strong>en</strong>sem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> 1954<br />

et 1966. Voir aussi l’article <strong>de</strong> Jean-Paul Mari, in la revue française Le Nouvel Observateur du 28 février 2002.<br />

63<br />

D’autres territoires n’ont pas suivi leurs semblables dans les <strong>guerres</strong> d’indép<strong>en</strong>dance même quand ils dép<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t tous<br />

d’une même puissance coloniale. <strong>Les</strong> colonies portugaises où opérai<strong>en</strong>t le plus grand nombre <strong>de</strong> mouvem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong><br />

libération nationale ne faisai<strong>en</strong>t pas exception. Par exemple, l’île <strong>de</strong> Sao Tomé-et-Principe, bi<strong>en</strong> que liée étroitem<strong>en</strong>t avec<br />

l’Angola, n’a pas eu recours à un mouvem<strong>en</strong>t armé pour se libérer au même mom<strong>en</strong>t que les autres colonies portugaises<br />

qui m<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t une guerre d’indép<strong>en</strong>dance <strong>de</strong> longue date. Toutefois, les pays qui n’ont décl<strong>en</strong>ché ni révolution ni guerre<br />

d’indép<strong>en</strong>dance ne sont pas restés tous sans t<strong>en</strong>ter l’insurrection. Certains ont connu <strong>de</strong>s mouvem<strong>en</strong>ts nationalistes<br />

acharnés, sévèrem<strong>en</strong>t réprimés. Rappelons <strong>de</strong>ux cas notoires : Madagascar <strong>en</strong> 1947 et le K<strong>en</strong>ya <strong>en</strong>tre 1952 et 1956.<br />

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