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construites avec conviction <strong>et</strong> formulées<br />
avec Panache, résonnent encore<br />
dans l’enceinte des Nations Unies comme<br />
la plus remarquable, la plus dure estocade<br />
politique jamais portée contre<br />
l’illégalité de la guerre américaine contre<br />
l’Irak.<br />
Ce chapitre dans sa vie, faite de réalisme<br />
gestionnaire <strong>et</strong> de passions artistiques,<br />
lui a valu une inextinguible<br />
haine de l’establishment<br />
politique américain<br />
qui l’a caricaturé avec hargne<br />
<strong>et</strong> moqué à l’envi. D’ailleurs<br />
n’a-t-il pas quitté le ministère<br />
des Affaires étrangères pour<br />
rejoindre l’Intérieur, suite à<br />
un étrange marchandage entre<br />
Français <strong>et</strong> Américains à la<br />
veille des célébrations du<br />
soixantième anniversaire du<br />
Débarquement? À ce moment-là,<br />
il se murmurait dans<br />
la presse américaine que les<br />
Européens s’opposaient à la<br />
venue du secrétaire d’État à la<br />
Défense Donald Rumsfield<br />
suite à sa célèbre sortie sur la<br />
«vieille Europe» <strong>et</strong> que, pour<br />
faire avaler la pilule de ce refus,<br />
le président Chirac a accepté<br />
de précipiter le rema-<br />
niement ministériel en envoyant<br />
De Villepin au ministère<br />
de l’Intérieur. Histoire<br />
d’éviter une rencontre jugée<br />
à l’époque politiquement explosive<br />
entre un George Bush<br />
«guerrier malgré lui» son<br />
«tombeur moral», Dominique<br />
De Villepin.<br />
Ironie de l’Histoire, l’homme qui a toujours<br />
magnifié, avec le verbe ample <strong>et</strong><br />
poétique des grandiloquents, à la fois<br />
agaçant <strong>et</strong> séducteur, la grandeur de la<br />
France, se trouve à la tête de ce pays<br />
au moment où le leadership de ce dernier<br />
sur le théâtre européen est remis<br />
en cause par le « Non » français à la<br />
constitution.<br />
Il hérite, quoi qu’en disent les éditorialistes<br />
du « Non », d’une France affaiblie,<br />
marginalisée, discréditée auprès<br />
des instances européennes.<br />
C<strong>et</strong>te situation ne manquera certainement<br />
pas de rejaillir sur les alliés non<br />
européens les plus proches de la France<br />
<strong>et</strong> qui avaient choisi la porte parisienne<br />
pour défendre leurs intérêts face à<br />
des marchés européens de plus en plus<br />
fermés, <strong>et</strong> à leur concurrence de plus<br />
en plus rude. Le <strong>Maroc</strong>, pour ne citer<br />
que c<strong>et</strong> exemple, ne pâtirait-il pas de<br />
Dominique de Villepin<br />
<strong>et</strong> Jacques Chirac<br />
Les députés ne lui pardonnent pas<br />
d’avoir suggéré à Chirac en 1997 la<br />
dissolution de l’Assemblée nationale.<br />
voir son principal avocat au sein des instances<br />
européenne perdre de l’influence<br />
<strong>et</strong> du crédit, indispensables<br />
pour défendre avec efficacité ses intérêts<br />
dans des dossiers aussi épineux<br />
que la pêche, le textile ou l’agroalimentaire?<br />
Que deviendrait ce partenariat<br />
stratégique tant loué, à Rabat<br />
comme à Paris, pour stabiliser une région<br />
au bord du précipice économique<br />
<strong>et</strong> militaire?<br />
Les principaux défis qui attendent<br />
Dominique De Villepin, Premier ministre<br />
ont une clarté de cristal. Sur le<br />
plan interne d’abord, cela commence<br />
par convaincre le microcosme parisien,<br />
notamment les députés qui ne lui pardonnent<br />
toujours pas d’avoir suggéré<br />
à Chirac en 1997 la fausse bonne idée<br />
de la dissolution de l’Assemblée nationale<br />
<strong>et</strong> lui reprochent accessoirement<br />
de ne pas avoir eu de mandat<br />
électif. Cela passe ensuite par sa capacité<br />
à animer une équipe<br />
gouvernementale chargée<br />
d’imaginer un proj<strong>et</strong><br />
de <strong>société</strong> susceptible de<br />
m<strong>et</strong>tre fin à la grisaille économique<br />
ambiante qui<br />
avait enfanté le «Non» à<br />
la constitution.<br />
Cela passe enfin par son<br />
aptitude à anesthésier ses<br />
opposants, dont les plus<br />
redoutables ne se trouvent<br />
pas forcement ni au Parti<br />
socialiste ni au sein du<br />
mouvement altermondialiste,<br />
qui commence sérieusement<br />
à séduire de<br />
larges frange de la <strong>société</strong><br />
française. L’opposition<br />
à De Villepin va prendre<br />
ses quartiers au ministère<br />
de l’Intérieur <strong>et</strong> au siège<br />
de l’UMP sous la houl<strong>et</strong>te<br />
de l’ambitieux Nicolas<br />
Sarkozy, candidat déjà déclaré<br />
aux présidentielles<br />
de 2007. Quoiqu’apaisée<br />
en apparence, la relation<br />
entre les deux hommes est<br />
volcanique.<br />
Sur la plan international,<br />
Dominique De Villepin aura besoin de<br />
tout son charisme <strong>et</strong> de sa connaissance<br />
des dossiers <strong>et</strong> des crises de la planètes<br />
pour trouver les justes postures<br />
pour rassurer les partenaires européens<br />
<strong>et</strong> les alliés étrangers de Paris sur la capacité<br />
de la France à tenir son rôle.<br />
Aura-t-il l’inspiration suffisamment féconde<br />
pour sortir le pays de l’isolement<br />
<strong>et</strong> du discrédit dans lequel, contre<br />
toute attente, le résultat du referendum,<br />
l’a j<strong>et</strong>é ?❏<br />
Mustapha Tossa<br />
<strong>Maroc</strong> <strong>Hebdo</strong> International N° 655 - Du 3 au 9 Juin 2005 23