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Lebensraum - Journal César

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6 MUSIQUES DU MONDE www.cesar.fr<br />

Fiesta des Suds © Jean de Peña<br />

Avec plus de 200 disques à votre actif, où<br />

trouvez-vous l’inspiration pour créer de<br />

nouveaux morceaux sans avoir l’impression<br />

de vous répéter ?<br />

Je fais très attention à ne jamais refaire la<br />

même chose. C’est la vie qui créé les nouvelles<br />

chansons. Ce qui se passe tous les<br />

jours à côté de nous. Avant, j’écrivais en ne<br />

me servant d’aucun instrument. J’entendais<br />

les notes naturellement. Pour moi, c’était plus<br />

facile. Les années sont passées et maintenant<br />

que je sais jouer, c’est impossible de ne pas<br />

poser ma main sur un piano. Mais je compose<br />

moins vite.<br />

Quand vous composez, avez-vous toujours,<br />

comme à vos débuts, l’oreille du passionné<br />

de danse que vous êtes ?<br />

Bien sûr ! C’est la danse qui donne le mouvement<br />

rythmique. Celui qui danse ne sait<br />

peut-être pas qu’il a le rythme, c’est à nous<br />

d’imaginer les pas qu’il ferait sur la musique.<br />

Cela peut paraître compliqué mais le rythme<br />

est partout. Même dans la marche.<br />

Comment avez-vous vécu l’explosion des<br />

musiques afro-cubaines en Europe, à<br />

laquelle vous avez contribué ?<br />

A une époque, le monde entier écoutait du<br />

La Fiesta des Suds...<br />

mambo et du cha-cha-cha. Cela a même été<br />

les musiques que l’on entendait le plus en<br />

Europe. Quand je suis venu en France pour<br />

la première fois, on ne dansait que ça. Plus<br />

qu’en Espagne alors que les paroles sont la<br />

plupart du temps en espagnol. C’est depuis<br />

la France que se diffusait ces musiques. Puis<br />

celles-ci sont passées au second plan avec<br />

l’arrivée des Beatles. Au milieu des années<br />

70, grâce à deux films, la musique cubaine<br />

est revenue sur le devant de la scène mais<br />

avec un autre nom, celui de « salsa ».<br />

Vous avez accompagné des artistes de<br />

variétés françaises dans les années 70.<br />

Quels souvenirs gardez-vous de ces expériences<br />

éloignées de votre univers musical ?<br />

Quand je repense à la disparition de Claude<br />

François avec qui j’ai travaillé pendant deux<br />

ans ou de Joe Dassin, je suis encore très<br />

triste. Nous avons vécu de grands moments<br />

de joie ensemble. Quand on apprend la<br />

musique à l’école, le professeur enseigne<br />

les notes, il ne différencie pas les styles. La<br />

musique classique ou latine ou encore le jazz<br />

se jouent avec les mêmes notes. Elles sont<br />

juste placées différemment. Accompagner<br />

des vedettes d’une autre culture ne change<br />

rien parce qu’on est liés par la musique. Dans<br />

mon orchestre, il y a beaucoup de français<br />

qui ont appris avec moi et qui peuvent jouer<br />

n’importe où !<br />

Quelle est votre casquette préférée : trompettiste,<br />

chef d’orchestre, compositeur,<br />

danseur ?<br />

Quand je pratique une de ces activités, je ne<br />

me consacre qu’à celle-ci et je me sens toujours<br />

bien. C’est mon handicap ! Je ne peux<br />

pas faire une chose et penser à une autre.<br />

<strong>César</strong> • N°310 Octobre 2012<br />

La légende Tito Puentes « Il ne faut jamais oublier les gens qui vous ont tendu la main »<br />

A 82 ans, Ernesto Tito Puentes a traversé toutes les modes mambo, latin jazz, cha-cha-cha, pachanga, boogaloo ou salsa. A joué autant avec Miles<br />

Davis que Lionel Hampton, Dizzy Gillespie que Dexter Gordon et tout le ban de la musique latina. Atterri en France par hasard, « le roi du timbale » y<br />

est resté. Pour fêter ses 60 ans de carrière dans l’hexagone, il publie Gracias, un album dans lequel il exprime sa reconnaissance envers son pays<br />

d’adoption. Trompettiste, compositeur, arrangeur, chef d’orchestre, danseur, il n’en reste pas moins un personnage attachant de simplicité. Entretien<br />

avec une légende éternellement jeune.<br />

Tito Puentes © Arnaud Weil<br />

Avec un clin d’œil aux filles du Pussy Riot, tant selon Bernard Aubert « L’Internationale du son sera plus<br />

forte que Vladimir Poutine de Russie », La Fiesta des Suds entend réchauffer l’automne si d’aventure le<br />

Mistral souffle un peu trop fort. Cette mise en jambe avant une Fiesta XXL envisagée pour Marseille-Provence<br />

Capitale 2013, propose deux week-ends charnus avec des exclusivités. Goran Bregovic viendra y fêter au<br />

champagne son nouveau spectacle. Tito Puentes, 85 ans, figure de proue de la scène afro-cubaine à la tête<br />

de bon big-band tout feu tout flamme y dévoilera son dernier répertoire. Le public marseillais découvrira<br />

également les pionniers de la Mextronica (genre au croisement de la cumbia et de ses succédanés et de<br />

l’électrop hip-hop) avec le flamboyant équipage du Mexican Institute of Sound. A voir également, pour ceux<br />

qui l’auront raté cet été aux Suds à Arles, l’ensemble chaâbi algérien d’El Gusto où quand des musulmans<br />

et des juifs séparés par l’histoire se retrouvent autour de la musique emblématique de la Casbah d’Alger.<br />

Ft<br />

Pourquoi souhaitiez-vous rendre hommage<br />

à la France avec un disque ?<br />

Je ne suis pas venu m’installer en France, j’ai<br />

échoué à Paris. Après avoir joué en Italie, en<br />

Espagne, au Liban et en Syrie, l’orchestre<br />

dans lequel je jouais à l’époque avait terminé<br />

sa tournée. Je ne devais passer que deux ou<br />

trois mois ici, cela fait 60 ans que cela dure.<br />

Il ne faut jamais oublier les gens qui vous ont<br />

tendu la main. Ce disque est ma façon de les<br />

remercier pour tout ce qui m’est arrivé.<br />

Pouvez-vous nous raconter pourquoi vous<br />

avez deux ans de moins que votre âge<br />

officiel ?<br />

J’avais un contrat en Espagne mais pour<br />

avoir le droit de sortir de Cuba, il fallait avoir<br />

accompli le service militaire obligatoire. J’ai<br />

donc fait de faux papiers avec une fausse<br />

date de naissance. J’ai échangé mon fusil<br />

contre une trompette.<br />

Quel regard portez-vous sur le Cuba<br />

d’aujourd’hui ?<br />

Quand j’y retourne, je dispose de bien plus<br />

de moyens et de facilités que les Cubains qui<br />

y vivent. Je reste un mois et je ne manque<br />

de rien. C’est donc difficile de se mettre à<br />

la place des habitants. Ce n’est pas à moi<br />

d’en parler. Mais je vois qu’il y a beaucoup<br />

de choses magnifiques comme l’éducation,<br />

le respect des jeunes pour leurs aînés.<br />

Aujourd’hui (1) , je peux me balader sans qu’on<br />

me traite de « negro de mierda » (2) . Tout cela,<br />

c’est grâce au régime politique et je dis<br />

bravo.<br />

ProPos recueillis Par Matthieu Burgos<br />

(1) Tito Puentes a quitté Cuba pendant la dictature de<br />

Batista, c’est-à-dire avant la révolution castriste.<br />

(2) Equivaut à « Sale nègre ».

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