Lebensraum - Journal César
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<strong>César</strong> • N°310 Octobre 2012 MUSIQUES DU MONDE<br />
... pimente vos nuits<br />
Fisheye © Rod Maurice<br />
Dionysos : « Se prendre<br />
au sérieux, c’est pour les<br />
fainéants »<br />
Cela fait bientôt vingt ans que Dionysos revitalise le rock français.<br />
De Si j’étais un Jedi à Cloudman, le groupe formé au lycée Camille<br />
Vernet de Valence a su créer un univers quasi-mythologique. Avec ses<br />
personnages surréalistes, ses concerts acrobatiques, les romans du<br />
charismatique Mathias Malzieu et bientôt un long métrage d’animation,<br />
Dionysos nous enivre de sa folie créative. Leur dernier album<br />
Bird’n’Roll, le 7ème, fera à coup sûr danser le Dock et les fans n’ont<br />
pas fi ni de roucouler.<br />
Après bientôt 20 ans de carrière, Dionysos<br />
a gardé cette image de porte-drapeau de<br />
la nouvelle génération du rock français.<br />
Comment le ressentez-vous ?<br />
C’est très élogieux mais à aucun moment on se<br />
considère à telle ou telle place. L’important pour<br />
nous est de cultiver jusqu’au bout nos envies en<br />
mettant en forme des dispositifs à surprises, dans<br />
nos albums et nos concerts. Pour que tout ce<br />
qu’on fait soit motivé par le plaisir, le goût du<br />
risque, de l’aventure au sens artistique du terme.<br />
J’ai parfois l’impression qu’on est encore un<br />
groupe débutant. Et quand on regarde derrière<br />
nous, on se dit que les moments diffi ciles qu’on<br />
a réussi à transcender et les jolis moments qui<br />
sont incroyablement nombreux nous donnent de<br />
la force et de l’élan pour la suite. On a quand<br />
même réalisé un nombre de rêves incroyable. La<br />
seule vraie préoccupation est que la suite soit<br />
excitante. Le jour où on commencera à s’analyser,<br />
ça sera la fi n.<br />
Mathias Malzieu, si l’univers du groupe<br />
vous doit beaucoup en tant qu’auteur, ce<br />
goût des histoires et des personnages<br />
surréalistes vient-il de votre enfance ou estce<br />
une construction collective ?<br />
C’est un mélange des deux mais ce n’est pas<br />
qu’une nostalgie de l’enfance et encore moins<br />
un plaisir régressif. En utilisant le conte, on<br />
peut tout inventer et créer à l’infi ni. Ce possible<br />
est très excitant et se rapproche de la magie.<br />
J’aime beaucoup cette phrase de Jacques Brel :<br />
« Travailler à son rêve ». C’est ce que je fais<br />
en cherchant du côté de l’enfance car c’est la<br />
période la moins marquée socialement, la plus<br />
intacte et la plus spontanée. Mais je ne fais aucun<br />
complexe de Peter Pan ! Dans le groupe, il y a<br />
un rapport au ludique, au jeu très fort. Quand<br />
j’arrive avec une chanson, quelqu’un propose tel<br />
ou tel arrangement qui la magnifi e et je me laisse<br />
surprendre. C’est assez jubilatoire car on s’amuse,<br />
même avec des morceaux sombres. Il y a une<br />
différence entre faire les choses sérieusement<br />
et se prendre au sérieux qui est une attitude de<br />
fainéant. N’oublions pas que le verbe du musicien<br />
est « jouer ».<br />
L’articulation entre roman et disque<br />
est-elle devenue indispensable à votre<br />
fonctionnement créatif ?<br />
Non, elle est très présente et fabrique des<br />
surprises. L’écriture de mes livres nous a permis<br />
de changer le rythme habituel d’un groupe,<br />
c’est-à-dire de sortir du cycle album, promotion,<br />
tournée. A l’inverse, il ne faut pas que Dionysos,<br />
cela devienne un livre puis un disque tiré de<br />
ce livre. Pour Bird’n’Roll, l’idée était de ne pas<br />
être dogmatique, dans un sens comme dans<br />
l’autre. Il n’y a que quelques chansons qui sont<br />
inspirées de mon dernier roman. Rien ne doit<br />
devenir systématique. Il n’y a pas de concept<br />
intellectualisé.<br />
Sans parler de concept, vos albums sont<br />
tout de même marqués par une certaine<br />
esthétique…<br />
Je préfère parler de mini univers mythologiques.<br />
Il y a évidement de la réfl exion et de l’esthétique<br />
mais la pulsion première est toujours très<br />
instinctive. Le terme de concept est trop froid<br />
par rapport à ce qui se passe réellement qui<br />
est beaucoup plus physique et fonctionne à la<br />
sensation. On est davantage dans l’atelier que<br />
dans le laboratoire.<br />
Les versions scéniques de vos albums sontelles<br />
elles aussi conçues comme des histoires<br />
ou les tournées sont-elles essentiellement<br />
l’occasion d’exprimer votre énergie ?<br />
Si ce n’était qu’un défouloir, cela ne parlerait<br />
qu’à nous. Le but est d’essayer de communiquer.<br />
Les concerts les plus marquants sont quand<br />
l’échange entre le groupe et le public est le plus<br />
fort. Notre travail de mise en scène de ce qui<br />
reste un concert de rock’n’roll est de choisir<br />
les arrangements des morceaux de manière à<br />
ce qu’ils soient interprétés assez différemment<br />
tous les soirs, selon l’humeur et les réactions<br />
du public. On n’est pas complètement dans<br />
l’improvisation mais cela laisse une marge pour<br />
qu’il se passe quelque chose de spécial à chaque<br />
fois. Cela reste le grand moment de vérité.<br />
Comment imaginez-vous la suite du parcours<br />
de Dionysos dans une dizaine ou une<br />
vingtaine d’années ?<br />
Je ne suis jamais allé aussi loin. Il y a la tournée<br />
en cours, jusqu’à Noël. Ensuite, il reste à finir<br />
le long métrage d’animation adapté de mon<br />
roman La Mécanique du cœur et produit par Luc<br />
Besson, dont la sortie est prévue l’an prochain.<br />
En 2014, nous repartirons en tournée sous la<br />
forme d’un ciné concert où nous jouerons la<br />
bande originale du fi lm pendant sa projection.<br />
Il y a déjà un autre projet qui voit le jour, c’est<br />
l’idée d’un spectacle de marionnettes. Je ne sais<br />
pas encore s’il sera accompagné d’un album.<br />
Cela nous amène en 2015 et entre temps, plein<br />
de choses dont on va se nourrir vont se passer.<br />
J’aime bien l’idée de ne pas trop savoir, que le<br />
champ des possibles reste ouvert.<br />
PROPOS RECUEILLIS PAR MATTHIEU BURGOS<br />
[Les coups de cœur de <strong>César</strong>]<br />
Conjunto Antibalas •<br />
Acteur du revival afrobeat, la tribu du saxophoniste<br />
Martin Perna a mis ses pas dans le sillon<br />
ouvert par Fela Kuti (elle en pince aussi pour le<br />
Harlem River Drive Orchestra d’Eddie Palmieri).<br />
15 gars de Brooklyn qui ont su s’imprégner<br />
de l’esprit et du groove qui régnait jadis du<br />
côté de la République de Kalakuta (au point<br />
de participer à la comédie musicale Fela ! sur<br />
la vie de Les rythmiques funk-soul-jazz épicés<br />
aux rythmes traditionnels yoruba sont fi dèles à<br />
la verve du highlife. Et la voix d’Abraham Mayo<br />
poursuit le fi ligrane social de l’icône panafricaine<br />
de Lagos.<br />
Roberto Fonseca •<br />
C’est la nouvelle coqueluche (hyperdouée !)<br />
piano cubain. Il fut de la légendaire équipe du<br />
Buena Vista Social Club puis de celle d’Ibrahim<br />
Ferrer avant de collaborer au Havana Cultura du<br />
DJ anglais Gil Peterson. Entouré de koras, n’gonis<br />
et autres instruments africains, il déploie des<br />
trésors de virtuosité rythmique et mélodique<br />
tissant les infl uences entre Cuba, l’Afrique et<br />
le Brésil.<br />
Mulatu Astatke •<br />
L’indispensable collection Ethiopiques de<br />
Francis Falcetto (chez l’incontournable label<br />
Buda Musique dirigé par le non moins précieux<br />
Gilles Frucheaux !) a révélé ce musicien-compositeur<br />
de grand talent, le septuagénaire éthiopien<br />
Mulatu Astatke. On lui doit une partie du<br />
fameux Ethio-jazz d’Abyssinie, né au mitan des<br />
50’s au carrefour d’une musique éthiopienne<br />
millénaire eu du jazz.<br />
Laurent Garnier •<br />
Figure historique de la scène techno, Laurent<br />
Garnier depuis la fi n des années 80 irrigue la<br />
planète de ses mixes. Globe-trotter prolifi que, il<br />
fait l’unanimité au sein de la galaxie techno par<br />
sa trajectoire, son talent, une inventivité toujours<br />
renouvelée. A l’écoute des vibrations de<br />
Détroit, des grooves africains, de la house, des<br />
attentes des dance-fl oors, tel un séismographe<br />
des tempis du monde. Respect !<br />
La Fiesta des minots •<br />
Après-midi féérique, salle des sucres, pour les<br />
minots de 6 à 14 ans, animée par le conteur<br />
Mohamed Adi. S’y succéderont : L’orchestre de<br />
percussions (avec la Cité de la Musique et le<br />
Collège Versailles) ; les danses orientales de<br />
Kabylie (avec les jeunes de la Cie de danse<br />
de Salima Iklef) ; l’ensemble vocal Les voix de<br />
la mer, (120 élèves d’écoles élémentaires de<br />
Marseille) ; Nimba Acrobatic (des acrobates<br />
entourés de musiciens de jazz africain) ; les<br />
marionnettes géantes Encore pluvieux de la<br />
Cie les déguindés ; des rondes provençales ;<br />
L’orchestre de jeunes accordéonistes : du<br />
slam et du maloya ; outre une « Boum des<br />
minots » !<br />
Ziskakan •<br />
Retour de Gilbert Pounia et du groupe<br />
Zizkakan né en 1979, avec sous le bras son<br />
nouvel album 32 Desanm (32 décembre : « La<br />
date idéale, celle qui n’existe pas ou bien dans<br />
nos cœurs » lui dixit), enregistré en Inde, un<br />
des premiers acteurs du maloya contemporain<br />
réunionnais, tissant les infl uences bariolées de<br />
l’île, devenu porte-voix de la créolité.<br />
Hervé Maury •<br />
Peintre animalier depuis 20 ans, Hervé Maury<br />
est un drôle de zèbre. Un jour, l’animal s’avisa<br />
que les voiles de bateaux usagées pouvaient<br />
faire de magnifi ques supports, « pour le bonheur<br />
de la surface, de la texture, et de la deuxième<br />
vie à offrir à un matériau qui a tant de<br />
choses à raconter de son merveilleux voyage sur<br />
l’eau et l’air ». Et d’y apprivoiser son bestiaire<br />
sur cette ample surface parfois redécoupée :<br />
7<br />
bancs de poissons, poissons, poulpes, libellules,<br />
insectes volants…<br />
Birdy Nam Nam •<br />
Ils font rythmes de tous bois. Funk, électro,<br />
jazz, soul et hip hop se télescopent sous leurs<br />
doigts. A la croisée du concert de rock star et<br />
du clubbing géant, Crazy B, Little Mike, DJ Need<br />
& DJ Pone trônent aujourd’hui au sommet de la<br />
hiérarchie du turntablism international.<br />
Mexican Institute of Sound •<br />
Derrière le Mexican Institute Of Sound il y a<br />
Camilo Lara un passionné de hip-hop fatigué<br />
d’entendre toujours les mêmes samples. Et de<br />
puiser dans le patrimoine local (la cumbia et<br />
mariachis...) ou dans d’autres creusets (il possède<br />
45 000 disques !) pour pimenter les<br />
sonorités digitales de l’électro-hip hop. Màgico !<br />
Nevchehirlian •<br />
On a déjà dit ici tout le bien qu’on pensait de<br />
l’adaptation qu’il a fait de la poésie de Jacques<br />
Prévert avec son album, Le soleil brille pour tout<br />
le monde. Exigeant, poétique et éthique.<br />
(voir cesar.fr)<br />
Antibalas © Marina Abadjieff<br />
BIRDY NAM NAM © Samuel kirszenbaum<br />
Roberto Fonseca © Carlos Pericas<br />
Mexican Institute of Sound © Camillo