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Agone n° 25 - pdf - Atheles

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LETTRE OUVERTE À MES COLLÈGUES BIBLIOTHÉCAIRES<br />

XVIII. Dans les nouvelles technologies, l’écrit a moins de place que<br />

dans le livre.<br />

XIX. Le livre défend la civilisation de l’écrit<br />

XX. Les bibliothèques sont des endroits où l’on conserve des livres,<br />

elles sont les lieux de mémoire de la civilisation de l’écrit.<br />

XXI. En vertu de « l’effet découverte » (VI), les bibliothèques ont un<br />

certain avenir dans ce rôle.<br />

On pourrait gloser longtemps sur ces vingt et une propositions médiologiques.<br />

Certaines sont tout simplement triviales, par exemple<br />

celle qui dit que les incunables imitaient les manuscrits (VII). C’est un<br />

fait. De même, nombre de pages html ont, dans les débuts de<br />

l’Internet, imité de près des pages de livres ; ce n’est que progressivement<br />

que la « mise en page » des sites web s’émancipe du livre pour inventer<br />

ses propres modèles, tel que le menu de navigation à gauche ou<br />

le mail du webmaster au bas de la page d’accueil. Mais comment pourrait-il<br />

en être autrement ? Inventer, dans ces domaines comme dans<br />

d’autres, n’est-ce pas toujours introduire de la nouveauté dans un<br />

cadre hérité ?Ce n’est pas un « effet diligence », c’est une évidence.<br />

Il est d’autres propositions médiologiques qui, si elles ne sont pas<br />

triviales, sont en revanche tout à fait discutables. Ainsi la proposition<br />

XII, selon laquelle la nature, dont Régis Debray semble naïvement croire<br />

qu’elle partage son goût des paradoxes, nous pousserait à la régression<br />

morale à chaque progrès technique. Ce fut de tout temps la<br />

position des réactionnaires que de fustiger ainsi dans « l’esprit du<br />

temps » un ferment de décadence : quand Régis Debray nous assène le<br />

« battement pulsionnel du rock, [et les] envoûtements primaires du<br />

corps », ses prédécesseurs du début du XIX e siècle tonnaient contre la<br />

valse viennoise, sensuelle et corruptrice. Le perfectionnement des instruments<br />

de musique au XX e siècle est évident. Doit-on pour autant en<br />

déduire une régression de la musique de ce siècle vers des « rythmes<br />

primaires » ? Évidemment, je ne suis pas musicien, mais je ne pense<br />

pas qu’Anton Webern ou John Cage, ces « intellectuels du rythme »,<br />

seraient de cet avis.<br />

Le problème de la lecture en gros, c’est qu’elle risque de déformer la<br />

pensée de l’auteur : ce qui précède est informe, en effet. C’est pourtant<br />

un résumé tout à fait fidèle de l’article que Régis Debray a donné au<br />

Bulletin des bibliothèques de France. Je ne suis pas philosophe, et je ne

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