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Dossier pédagogique Journal d'une femme de chambre

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Mirbeau, proche <strong>de</strong> Zola, fut <strong>de</strong>s plus ar<strong>de</strong>nts à le secon<strong>de</strong>r durant l’Affaire Dreyfus. Mais<br />

il n’a jamais adhéré aux principes <strong>de</strong> l’école naturaliste. Il se veut, il se proclame<br />

subjectif. Pour épancher sa colère, exaltant celle <strong>de</strong> Célestine, ce n’est pas assez du<br />

roman. Il choisit donc le journal, l’espace ouvert du carnet intime, l’exutoire <strong>de</strong>s<br />

sentiments personnels. Equivalent théâtral du journal: le soliloque. Non point monologue,<br />

toujours adressé au public, mais cette parole que l’on s’adresse à soi-même en<br />

parcourant la scène imaginaire <strong>de</strong>s souvenirs chargés d’affects. Cette voix qui, le jour<br />

durant, s’est neutralisée pour n’émettre que <strong>de</strong>s formules d’obéissance, cette voix<br />

blanche et captive prend la clef <strong>de</strong>s champs, saute d’un ton à l’autre, s’émerveille <strong>de</strong> ses<br />

pouvoirs. Et ce corps qui, le jour durant, s’annulait sous l’uniforme, reprend possession<br />

<strong>de</strong> lui-même dans l’ivresse d’une résurrection.<br />

Secrète revanche, mais combien savoureuse ! Les patrons faisaient figure <strong>de</strong> grands<br />

premiers rôles, « Marie » n’était qu’un accessoire dont ils jouaient négligemment. Le soir<br />

venu, convoqués par Célestine sur la scène <strong>de</strong> ses fantasmes, ils ne sont plus que <strong>de</strong>s<br />

fantoches, <strong>de</strong>s mannequins, cibles passives <strong>de</strong> sa « folie d’outrage ». Elle est<br />

protagoniste du monodrame, la star d’un one-woman-show.<br />

Au centre du plateau, comme au cœur <strong>de</strong> son obsession, exhaussée sur un socle, la<br />

bicoque abhorrée, le « château » <strong>de</strong>s Lanlaire. C’est une gran<strong>de</strong> maison <strong>de</strong> poupées :<br />

<strong>de</strong>ux mètres <strong>de</strong> long, un <strong>de</strong> haut. Quelques marches l’encadrent <strong>de</strong> part et d’autre :tapis<br />

rouge, tringles <strong>de</strong> cuivre. Fermée, c’est « l’immense bâtisse qui a l’air d’une caserne ou<br />

d’une prison » ; Ouverte, vue en coupe labyrinthique, c’est « la sale baraque que quatre<br />

domestiques ne suffiraient pas à tenir en état. Chacun <strong>de</strong> ses étages, chacune <strong>de</strong> ses<br />

pièces est synonyme <strong>de</strong> corvée. Tout est là, en modèle réduit, comme un concentré<br />

d’ennui, <strong>de</strong> besogne répétitive. Tout est là, miniaturisé, jusqu’à la baignoire<br />

quotidiennement récurée, jusqu’au pot <strong>de</strong> <strong>chambre</strong> <strong>de</strong> madame, ce précieux pot <strong>de</strong><br />

<strong>chambre</strong> <strong>de</strong> porcelaine qu’il faudrait peut-être « envoyer à Londres quand il est fêlé »… !<br />

Non mais … !<br />

A toi <strong>de</strong> jouer Célestine !<br />

Jonathan Duverger & Jean-Marie Villégier<br />

<strong>Dossier</strong> <strong>pédagogique</strong> - 6 – <strong>Journal</strong> d’une <strong>femme</strong> <strong>de</strong> <strong>chambre</strong>

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