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Dimanche 25 septembre

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....... LE <strong>25</strong> SEPTEMBRE 1938 IHIIMIIIIIIIIIIMIIIIII 13 «HIHIIIIIMIIIIMIIIIIMIHtlIIIIHHHHIIHIIHHHMHIIIIIIIIIIIIIHI ■HntfHHIIHUUMIItl DIMAWCHE-ILLUSTRE<br />

LE TUEUR N° 2 (SUITE)<br />

L'honorable commerçant e n<br />

question, vêtu d'une combinaison<br />

de mécanicien en toile marron, se<br />

tenait justement devant sa porte.<br />

Il jonglait avec une clef à ecrous,<br />

•symbole de sa profession.<br />

— Ah ! ce vieux Monk ! Quel<br />

plaisir ! Toujours aussi frais qu'un<br />

merlot et éveillé comme un canard<br />

qui vient de briser sa coquille. ]e<br />

suis charmé de vous serrer la<br />

main, Philip. Que] bon vent vous<br />

amène ?<br />

■— Je voudrais une camionnette,<br />

dit Philip Monk.<br />

— Comment, vous avez abandonné<br />

ce chef-d'œuvre des chefsd'œuvre<br />

?<br />

— C'est exact. Mon tacot a<br />

brûlé, il y a quelques jours, près<br />

de Newhaven.<br />

— Assurances ?<br />

, — Oui, monsieur !<br />

— Alors, il vous faut quelque<br />

chose de bien ?<br />

■— Parfaitement, monsieur !<br />

— Suivez-moi, je vais vous<br />

montrer un petit bijou qui fera envie<br />

au lord maire si la chance veut<br />

qu'il vous aperçoive sur son passage.<br />

Une douzaine de voitures attendaient<br />

un nouveau maître. En vérité,<br />

elles étaient assez propres. La<br />

plupart avaient été repeintes récemment.<br />

C'était le cas d'une petite<br />

camionnette fraîchement recouverte<br />

d'une belle couche de<br />

peinture verte. Elle appartenait à<br />

une série dont les types n'avaient<br />

pas encore eu le temps de se démoder.<br />

— C'est du gâteau, fit le garagiste.<br />

C'est comme neuf. Ça n'a<br />

pas plus de quinze mille milles<br />

dans les longerons. Les pneus sont<br />

tout neufs... je vous ferai un prix.<br />

Monk et le garagiste discutèrent<br />

pour la forme. Mais Philip Monk<br />

paraissait très épris de cette nouvelle<br />

voiture. Il donna un acompte,<br />

signa un papier et grimpa sur le<br />

siège pour prendre le volant.<br />

— Ça marche, hein, vous me le<br />

promettez ? demanda-t-il avant de<br />

passer sa première vitesse.<br />

— Si ça ne va pas, vous me la<br />

rendrez, dit le garagiste.<br />

Sur cette bonne parole, M.<br />

Monk démarra et prit la direction<br />

de son garage, où il arriva vers<br />

quatre heures de l'après-midi. Il<br />

rangea la voiture sous le hangar,<br />

jeta un coup d'ceil approbateur sur<br />

l'ensemble de ses formes et vissa<br />

sur le tableau de bord la plaque qui<br />

portait son honorable nom et un<br />

aspect de sa profession sur cette<br />

terre.<br />

Il est inutile de dire qu'en achetant<br />

cette voiture, M. Monk avait<br />

acheté toutes les petites formalités<br />

tracassières qui le mettaient<br />

en règle avec les lois de son pays.<br />

Il rentra donc se coucher, le<br />

cœur à 1 aise comme un moteur<br />

dans un bain d'huile fraîche. Il ne<br />

remarqua nullement le « copper »<br />

qui, à quelques mètres de sa porte,<br />

veillait sur la tranquillité publique.<br />

Le lendemain matin, de très<br />

bonne heure, M. Monk se leva et<br />

descendit dans la rue pour aller<br />

prendre son thé et son whisky au<br />

petit « pub » qui formait le coin<br />

de la rue.<br />

C'est ainsi qu'il lia connaissance<br />

avec Tom-le-Beau-Sujet.<br />

Ce dernier était un homme dénué<br />

de toute morgue, un de ces<br />

hommes dont on dit qu'ils sont « à<br />

la bonne franquette ». Comme<br />

Philip Monk allait descendre du<br />

trottoir pour franchir la chaussée,<br />

Tom-le-Beau-Sujet lui mit familièrement<br />

la main sur l'épaule.<br />

Il accompagna ce geste de ces<br />

quelques mots :<br />

— Est-ce à l'honorable Philip<br />

Monk que j'ai l'honneur de parler ?<br />

— Oui. Qu'est-ce que vous me<br />

voulez ?<br />

— ]e vous prie de me suivre au<br />

Yard. Ne faites pas de pétard, ça<br />

vaudra mieux pour vous.<br />

Et comme Monk ne paraissait<br />

pas convaincu, Tom-le-Beau-Sujet<br />

entr ouvrit son veston de tweed à<br />

carreaux et montra son insigne.<br />

M<br />

PHILIP MONK s'assit sur<br />

une banquette, dans un<br />

• des couloirs de Scotland<br />

Yard, à peu près à la<br />

place occupée la veille par Pennya-Liar.<br />

Il ne savait pas encore ce<br />

qu'on lui voulait, mais, en vieux<br />

renard habile à prévoir les projets<br />

vendu sa voiture pour en acheter<br />

une nouvelle.<br />

Un policeman gras et chauve lui<br />

fit signe, au bout du couloir, de<br />

venir. M. Monk se leva et d'un<br />

pas alerte entra dans un bureau<br />

meublé avec une simplicité quelconque.<br />

Deux hommes étaient assis<br />

derrière une table peinte en<br />

noir : O'Brien et un sergent de<br />

police en uniforme.<br />

— Philip Monk, commissionnaire<br />

? demande O'Brien.<br />

— Oui, monsieur !<br />

— Pourriez - vous me donner<br />

l'emploi de votre temps pendant<br />

la nuit du 4 au 5 juin, par exemple<br />

? »<br />

— ]e n'ai pas encore pu consulter<br />

mon agenda de poche, répondit<br />

Monk, mais je puis presque<br />

vous assurer qu'entre onze heures<br />

du soir et sept heures du matin je<br />

me trouvais dans mon lit.<br />

Tout en parlant, il avait sorti de<br />

sa poche un petit carnet fermé par<br />

un élastique. Il chercha à la date<br />

indiquée et ne trouva rien qui<br />

pût lui prêter un aspect un peu<br />

original.<br />

— Non, voyez-vous, rien n'est<br />

noté. Et j'ai pour habitude de<br />

noter sur ce carnet les événements<br />

qui peuvent rompre un peu la monotonie<br />

de la vie d'un petit commerçant.<br />

Cette nuit-là, monsieur,<br />

j'ai dû rentrer, comme chaque soir,<br />

chez moi, vers neuf heures, après<br />

avoir pris un verre de bière dans<br />

un « pub » de Wentworth street.<br />

C'est une habitude. l'ai dû relever<br />

mes comptes de la journée et je<br />

me suis couché. Le matin, je me<br />

suis levé sans doute vers 7 h. 30<br />

et je suis allé prendre un peu de<br />

thé et de rhum dans le même<br />

« pub ».<br />

— Des gens peuvent-ils témoigner<br />

de la véracité de votre déposition<br />

?<br />

—- ]e pense que oui, monsieur,<br />

car je suis honorablement connu<br />

dans ce « pub » que j'ai l'habitude<br />

de fréquenter chaque soir.<br />

— C'est bien, nous contrôlerons...<br />

Maintenant, monsieur Monk,<br />

vous êtes bien possesseur d'une<br />

camionnette automobile ? Est-ce<br />

une voiture neuve ?<br />

—• Pas précisément, monsieur.<br />

Cependant, c'est tout de même une<br />

bonne petite voiture et je puis vous<br />

assurer que je suis satisfait de ses<br />

services.<br />

— Ce que vous me dites de cette<br />

jolie voituie, dit M. O'Brien, excite<br />

ma curiosité. Nous allons donc<br />

nous rendre tous trois auprès de<br />

cette merveille. Scotland < Yard<br />

nous prêtera bien un taxi, n'est-ce<br />

pas, Neburn ?<br />

Le sergent de police approuva<br />

en souriant.<br />

— Vous voulez acheter ma voiture<br />

? demanda Monk.<br />

— Non, mais depuis trois semaines,<br />

des événements déplorables<br />

nous obligent à certains actes qui<br />

nous embêtent, je l'avoue franchement,<br />

car nous désirons toujours<br />

à Scotland Yard ne pas contrarier<br />

les gens par des dérangements inutiles.<br />

C'est ce que l'on ne sait pas<br />

assez, monsieur Monk, dans le<br />

grand public auquel vous avez<br />

î'honneur d'appartenir,<br />

— Et qui fait la force du Lion<br />

britannique, ajouta Monk.<br />

— Vous êtes un homme dont la<br />

conversation est agréable, répondit<br />

O'Brien en se levant.<br />

Devant le grand bâtiment en<br />

briques, un taxi attendait. O'Brien,<br />

le sergent Neburn et M. Philip<br />

Monk y prirent place. Le sergent<br />

monta à côté du conducteur.<br />

— Vous aurez la bonté de ne<br />

pas mettre les mains dans vos<br />

poches, dit O'Brien à Monk. Bien...<br />

Maintenant, donnez l'adresse de<br />

votre gsrage.<br />

Vingt minutes plus tard, l'auto<br />

de la police stoppait devant le<br />

garage de M. Monk.<br />

Celui-ci descendit le premier et,<br />

suivi des deux policiers entra sous<br />

le hangar où la camionnette était<br />

rangée.<br />

■— Mais c'est une voiture presque<br />

neuve 1 dit O'Brien, en faisant<br />

le tour de l'objet.<br />

M. Philip Monk souriait modestement.<br />

O'Brien examina avec soin la<br />

camionnette, fureta sous le hangar.<br />

Il sifflotait.<br />

— Mon cher monsieur Monk,<br />

tout est pour le mieux. Te vous<br />

serai reconnaissant, cependant, de<br />

bien vouloir me dire si vous possédiez<br />

cette voiture entre le 3 et<br />

le 4 juin, par exemple.<br />

— Certainement, bien que je n'en<br />

sois possesseur que depuis le <strong>25</strong><br />

mai, je crois.<br />

— Où avez-vous acheté cette<br />

voiture ?<br />

Monk donna l'adresse. De ce<br />

côté, du moins, il ne craignait pas<br />

grand'chose et s'il avait donné au<br />

policier la date du <strong>25</strong> mai comme<br />

celle de l'entrée en possession,<br />

c'est qu'il était d'accord avec<br />

l'homme de Limehouse à la combinaison<br />

marron. Cependant, il<br />

éprouvait dans le plus profond de<br />

ses entrailles les troubles avantcoureurs<br />

de la peur. Il se sentait<br />

déjà cerné.<br />

—• Vous êtes libre, monsieur<br />

Monk, dit le chef inspecteur de<br />

police, mais je vous prie de vous<br />

tenir à ma disposition.<br />

Les deux policiers remontèrent<br />

en voiture et M. Monk demeura<br />

seul en présence de sa camionnette<br />

dont l'apparence lui apparut de<br />

plus en plus sournoise .<br />

Quand Penny-a-Liar, qui brûlait<br />

d'impatience en attendant de<br />

toucher sa récompense, revint en<br />

Des hommes et des femmes<br />

qui connaissaient Cecchi..,<br />

fin de journée à Scotland Yard, il<br />

fut tout de suite introduit dans le<br />

bureau d'O'Brien.<br />

Il se présenta d'un air modeste<br />

et papelard, augurant bien de cette<br />

hâte à le recevoir.<br />

— Dites donc ! damné vieux<br />

fou, hurla O'Brien dès qu'il l'aperçut,<br />

avez-vous l'intention de vous<br />

payer notre tête ?... La camionnette<br />

de Monk est une camionnette<br />

neuve qui ne correspond en rien,<br />

en ri-en, hurla-t-il en détachant les<br />

deux syllabes, à la description que<br />

nous avons donnée.<br />

M. Penny-a-Liar ne fut pas du<br />

tout démonté. Sans tenir rigueur<br />

de la manière dont O'Brien lui<br />

avait souhaité la bienvenue, il répondit<br />

posément, car maintenant il<br />

luttait pour ses dix livres :<br />

il eût regardé l'antique Mathusalem.<br />

Il hocha la tête en signe d'admiration<br />

et pria le brave marchand<br />

de l'accompagner, avec la voiture,<br />

au poste de police de Whitechapel.<br />

Un coup de téléphone prévint<br />

O'Brien de cette capture et de la<br />

découverte de la fameuse camionnette.<br />

Le détective vint aussitôt.<br />

— Bonjour, monsieur Bambow,<br />

dit-il, sans prendre la peine de retirer<br />

— C'est que Monk a changé de<br />

voiture depuis hier.<br />

O'Brien, qui pensait également<br />

de cette façon, se radoucit comme<br />

par enchantement : il offrit une<br />

cigarette à Penny-a-Liar et le fit<br />

jarler. Ce dernier, prêt à vendre<br />

fa moitié de Londres au comptant<br />

et le Teste à crédit, se mit bénévolement<br />

« à table ».<br />

Quand Penny-a-Liar sortit du<br />

cabinet du chef-inspecteur, _ il<br />

n'avait pas perdu tout espoir d'entrer<br />

en possession de la somme<br />

promise.<br />

Ce ne fut que le surlendemain<br />

de cette entrevue que l'inspecteur<br />

Crab découvrit la voiture signalée<br />

au marché de Billingsgate. Elle<br />

était déjà pleine de caisses de poissons<br />

et parfaitement conforme à<br />

la description du gosse de Brighton.<br />

Jimmy Crab entra tout de suite<br />

en contact avec le rondouillard<br />

M. Bambow qui sentait la marée<br />

aussi naturellement qu'une rose<br />

sent la rose.<br />

M. Bambow ne fit aucune difficulté<br />

pour avouer'qu'il était l'heureux<br />

propriétaire de cette vénérable<br />

relique. Et quand Crab, de plus<br />

en plus indiscret, lui demanda depuis<br />

combien de temps il possédait<br />

ce joyau, M. Bambow répondit :<br />

« Depuis sa naissance. »<br />

Alors Jim Crab regarda longuement<br />

M. Bambow, un peu comme<br />

- près de sortir d'ici. A moins que,<br />

s'il vous reste un grain de raison,<br />

vous n'ayez la franchise de m'expliquer,<br />

sons omettre un détail, ce<br />

que vous fabriquiez d'indécent à<br />

deux heures du matin dans la<br />

Bîackman Street à Brighton, au<br />

cours de la nuit du 4 au 5 juin.<br />

— Je n'étais pas à Brighton<br />

dans la nuit du 4 au 5 juin, sir,<br />

répondit Monk avec assez de dignité.<br />

Je vous l'ai déjà dit, sir.<br />

son chapeau, je- suis désolé Mais je veux vous avouer que<br />

de venir troubler votre journée, je n'ai pas dit la vérité au sujet<br />

mais vous comprendrez bientôt en de la voiture. Dans la nuit du 4 au<br />

essayant de vous mettre à ma 5 juin, sir, je possédais encore<br />

place. J'irai donc au plus vite : ma vieille camionnette. Pour dire<br />

M. Monk, Philip Monk, un de vos vrai, cette nuit-là, je l'avais prêtée.<br />

meilleurs amis, sort de Scotland — A qui ? hurla O'Brien en le-<br />

Yard, il n'y a pas plus d'une heure. vant ses mains énormes au-dessus<br />

Je dois dois dire qu'un policeman de Monk.<br />

l'accompagne pour qu'il ne se — Je n'ose le dire... Le Seigneur<br />

perde pas en route. Ce policeman recommande de ne pas accabler le<br />

veillera pendant quelques jours sur vaincu et...<br />

la personne de M. Monk, en attendant<br />

que nous soyons en mesure<br />

-— Laissez le Seigneur en paix,<br />

de lui accorder chez nous l'hospi-<br />

dit O'Brien. A qui avez-vous prêté<br />

votre camionnette ?<br />

talité qu'il mérite. M. Monk nous<br />

a donné votre adresse en nous<br />

•— A Paulo Cecchi, sir.<br />

affirmant que vous désiriez acheter — Vous mentez, Monk.<br />

coûte que coûte sa vieille camion- — Je l'ai prêtée à Cecchi que je<br />

nette. Pour quelles raisons vouliez- connaissais. Il m'avait dit : « Prêvous<br />

acheter cette voiture ?... Rétez-moi votre voiture pour déméfléchissez,<br />

c'est très grave... Tout nager. » Je ne pouvais pas refu-<br />

ce que vous direz maintenant se ser, car jl avait pu me rendre ser-<br />

retournera contre vous.<br />

vice, à l'occasion. C'est moi-même<br />

— Philip Monk est un damné qui lui ai remis la camionnette vers<br />

menteur. Il vaut moins qu'une co- 9 heures du soir devant la gare<br />

quille de moule fêlée... C'est lui de Brighton. Il me l'a rapportée le<br />

qui m'a proposé d'acheter sa voi- lendemain vers 6 heures du matin.<br />

ture.<br />

— Vous serez mis en présence<br />

— Quel jour ?<br />

de Cecchi. J'ai la conviction que<br />

— Oh ! il y a longtemps de cela. vous mentez...<br />

— Pardon, fit 1 inspecteur Crab, — Non, sir. Je dis la vérité.<br />

tous ceux qui vous connaissent Cecchi pourra prétendre le con-<br />

sont d'accord pour affirmer que traire, car c'est un sacré menteur.<br />

vous ne possédez cette voiture que O'Brien ne poussa pas plus loin<br />

depuis quelques jours.<br />

l'interrogatoire de Monk. Celui-ci<br />

— La cause est jugée, dit dut passer la nuit dans le poste de<br />

O'Brien. J'ai dans ma poche un police de Whitechapel en atten-<br />

mandat d'arrêt. Je n'ai qu'un nom dant que cette nouvelle version<br />

à inscrire là.<br />

de la vente de la camionnette fût<br />

Il mit le doigt sur une feuille de vérifiée.<br />

papier qu'il avait placée sur le L'enquête, rapidement menée,<br />

bureau.<br />

tourna à sa confusion.<br />

— Alors, mettez le nom de Phi- Cecchi, qui se morfondait dans<br />

lip Monk, car c'est un damné men- la prison de Lewes, ignorait tout<br />

teur. Il m'a vendu sa voiture lundi de l'histoire de la camionnette. 11<br />

dernier.<br />

put prouver que dans la nuit du<br />

— Vous êtes libre, fit O'Brien. 4 au 5 juin il se trouvait à Soho.<br />

Vous êtes cependant invité à vous Il pensait que c'était au cours de<br />

tenir à la disposition de la justice. cette nuit que la malle qui conte-<br />

Quand il fut sorti, O'Brien nait ie corps de Joan Burlington<br />

bourra sa pipe, mais, avant de avait dû être volée pour un motif<br />

l'allumer, il la pointa comme une à coup sûr infernal, qu'il ne parve-<br />

épée vers la poitrine de son senait pas à s'expliquer.<br />

cond.<br />

— Nous approchons du but. En-<br />

O'Brien était maintenant<br />

core une balle à placer et nous<br />

convaincu de la culpabilité de<br />

aurons gagné le dernier trou.<br />

Monk, c'est-à-dire de sa partici-<br />

Quand on vint arrêter M. Monk,<br />

pation certaine dans le drame de<br />

Brighton.<br />

le jour suivant, le digne homme<br />

était fort occupé à diriger dans un<br />

appareil à jeux automatique une<br />

partie de football qui devait lui 8<br />

rapporter une pochette en soie<br />

végétale.<br />

Autour de lui, trois ou quatre EPENDANT, Paulo Cecchi ne<br />

cokneys lui prodiguaient leurs l'accusait pas. C'est avec<br />

conseils. C stupeur que dans sa prison<br />

— Votre « goal » doit avoir une il avait appris que Monk se trou-<br />

patte raide, fit une voix inconnue vait mêlé à ce crime dont il jurait<br />

dans ce petit groupe. Il y a quel- que lui, Cecchi, était le seul auteur.<br />

que chose de détraqué dans !a Pour toutes ces raisons le poli-<br />

mécanique et les « rouges » vont cier ne parvenait pas à compren-<br />

perdre.<br />

dre. Il sentait qu'il fallait abandon-<br />

M. Philip et les « supporters » ner l'idée de pénétrer ce mystère<br />

tournèrent la tête avec ensemble sans le secours des aveux du prin-<br />

dans la direction de celui qui venait cipal intéressé, M. Monk.<br />

de prendre la parole sans y être Celui-ci paraissait littéralement<br />

spécialement invité.<br />

abruti par la peur. Il vivait dans<br />

Le visage aimable de M. Monk<br />

sa cellule comme un rat dans une<br />

cage.<br />

qui était plutôt rosé se transforma<br />

en quelque chose de plâtreux qui<br />

La violence ayant échoué,<br />

ressemblait à de la peau de poulet.<br />

O'Brien prit Monk par la douceur.<br />

Il dut s'appuyer sur la vitrine où<br />

Trois jours après son arrestation,<br />

le joueur de football qu'il manœu-<br />

il le fit venir dans son bureau et<br />

lui dit :<br />

vrait resta la jambe en l'air.<br />

— Monk, je sais que vous êtes<br />

— Ah ! bonjour, bonjour, bien un voleur et un recéleur, mais je<br />

le bonjour.<br />

sais aussi que vous n'êtes pas un<br />

Le pauvre homme bafouillait et assassin. Vous avez commis une<br />

ne pouvait prononcer d'autres faute que j'ignore. A mon avis,<br />

mots que ceux de cette banale cette faute n'est pas grave, et vous<br />

formule de bienvenue qui ne ré- pouvez décharger votre conscience<br />

pondait pas du tout à sa pensée. en rendant service à la justice. Je<br />

— Je vous emmène, dit Jimmy suis autorisé à vous promettre l'in-<br />

Crab en affectant un air jovial qui dulgence du tribunal. Réfléchissez<br />

ne trompa personne.<br />

et avouez. Sinon tout finira par se<br />

M. Monk le suivit docilement : savoir et vous serez jugé comme<br />

car il n'était pas pour la bagarre, complice de Cecchi. Je vous parle<br />

non plus, d'ailleurs, que les « sup- en ami...<br />

porters », qui s éclipsèrent pru- Alors, M. Philip Monk se passa<br />

demment.<br />

la main sur le crâne et en reniflant<br />

Il se trouva bientôt, et encore comme un enfant pris en faute, il<br />

une fois, dans ces bureaux de Scot- dit les paroles que O'Brien attenland<br />

Yard dont la seule vue lui dait patiemment :<br />

donnait la nausée.<br />

— Voici, sir, comment les<br />

— Vous voilà, cher monsieur choses se sont passées.<br />

Monk, dit O'Brien ; mon cher gar-<br />

PIERRE MAC ORLAN.<br />

çon, asseyez-vous. Je vous promets<br />

bien du plaisir. Vous n'êtes pas [Illustrations de M. SAUVAYRE.)

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