1er mars - Association francophone de haïku
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J’ai quitté <strong>de</strong>s yeux<br />
mon cahier pour rêver<br />
à <strong>de</strong>main - Pourquoi ?<br />
Un murmure à la table d’à côté : un homme et une femme y sont assis, que je n’ai pas<br />
entendu arriver. Ils échangent, les yeux dans les yeux - intenses, concentrés, pas <strong>de</strong> temps à perdre -<br />
<strong>de</strong>s confi<strong>de</strong>nces, <strong>de</strong>s adresses.<br />
Pour un projet commun ?<br />
Le serveur leur apporte <strong>de</strong>s tasses, fumantes. Elles sont brûlantes, ils patientent avant d’y<br />
porter leurs lèvres.<br />
D’où se connaissent-ils ?<br />
L’homme est passionné. Parfois sa voix lui échappe et il sème quelques sons barytons dans<br />
l’atmosphère, puis rappelé à l’ordre par l’éclat <strong>de</strong> sa voix, revient vite au murmure. Parfois, il se<br />
penche vers elle, rapproche son visage du sien.<br />
Secrets ?<br />
Du mon<strong>de</strong> entre encore. Le niveau sonore s’élève.<br />
Ces <strong>de</strong>ux-là vont-ils repartir ensemble ?<br />
Je referme mon carnet. Trop d’agitation. Impossible d’écrire.<br />
Je sors.<br />
Seule.<br />
Michèle Ro<strong>de</strong>t<br />
Un beau matin, en <strong>de</strong>scendant du trottoir, son pied glissa, il s’étala dans le caniveau et une douleur atroce<br />
explosa dans sa jambe. Pas moyen <strong>de</strong> se relever. Deux passantes appelèrent Police Secours. Il se<br />
retrouva à l’hôpital avec fracture complète du tibia.<br />
Allongé sur son lit, la jambe en extension, lui revint le souvenir d’une marche dans le massif du Queyras. Il<br />
avait 12, 13 ans, avec ses parents. Ils s’étaient arrêtés dans une clairière où poussaient <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong><br />
fraisiers. Il ramassèrent trois boîtes <strong>de</strong> fraises <strong>de</strong>s bois. Il lui en restait une o<strong>de</strong>ur vive.<br />
Le vent dans les pins<br />
fait <strong>de</strong> nous <strong>de</strong>s voyageurs<br />
sans attente (Hélène Boissé)<br />
Jean Antonini<br />
Hortensias. Ils ne sentent rien mais ils sont mes premiers souvenirs olfactifs. Boules blanches et<br />
roses, bleues ou violines s'épanouissant au matin, gorgées <strong>de</strong> rosée. Éponges après l'orage du soir.<br />
Ce même parfum d'eau et <strong>de</strong> terre, le plus suave que je connaisse, parle à mes sens <strong>de</strong>puis que<br />
j'observais à quatre pattes avant <strong>de</strong> savoir marcher cette haie <strong>de</strong> pompons fiers dans le jardin <strong>de</strong> ma<br />
grand-mère.<br />
Deux ans, déjà. De la fenêtre <strong>de</strong> la cuisine, L... me surprenait à contempler rêveusement ce<br />
bataillon échevelé après la tempête. « Je préfère le rosier jaune et le laurier rose » me disait-elle...<br />
Pourtant elle savait que les jours d'orage me titillait particulièrement les sens.<br />
Mon pigeonnier est parfait, l'horizon est plus vaste, mais la terre me manque.<br />
Pétale <strong>de</strong> tulipe<br />
fraîchement tombé <strong>de</strong> la tige<br />
dans mes baskets<br />
(Micheline Beaudry)<br />
Danyel Borner