Intervention du P. Vincent Leclercq - Alliance Assomptionniste
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sondages, de plus en plus de personnes disent « faire l’amour » mais sans aimer. On remarque<br />
ainsi que l’anonymat social des grandes villes et l’anonymat sexuel s’entraînent l’un l’autre<br />
- Et puis la sexualité est devenue impérative<br />
La sexualité est devenue impérative au sens où elle est de plus en plus vécue comme un<br />
remède aux principales frustrations de l’existence. Pour le philosophe Ricoeur, la sexualité<br />
serait entrée dans le domaine de la « compensation ». Elle serait instrumentalisée pour<br />
remédier à une perte de sens de notre existence.<br />
1. La sexualité est une réaction à une déception primaire. L’homme est déçu par son activité<br />
dans le travail et reporterait alors tout le sens de sa vie sur les loisirs. Dans cette perspective,<br />
pour bon nombre de nos contemporains, l’érotisme est devenu un « loisir ». La sexualité serait<br />
ainsi la revanche <strong>du</strong> loisir sur le travail.<br />
2. La sexualité serait aussi une réponse à une déception plus politique. Ne pouvant plus<br />
véritablement s’inscrire dans les dimensions historiques et collectives d’une société en panne<br />
se sens, l’indivi<strong>du</strong> n’aurait de solution que de se refugier dans la sphère de l’intime et de<br />
l’indivi<strong>du</strong>. La sexualité gèrerait la pénurie de sens social et d’intérêt pour le collectif en<br />
compensant la frustration qui en résulte par l’exercice de la sexualité. La sexualité opèrerait<br />
ainsi une revanche <strong>du</strong> privé sur le politique dont on aurait per<strong>du</strong> le sens.<br />
3. Enfin, l’érotisme serait la réponse à l’absurde et au non sens. « Quand rien n’a plus de sens<br />
– écrit Ricœur – il reste le plaisir instantané et des artifices ». La sexualité est devenue<br />
impérative pour nos contemporains, car elle serait fondamentalement une lutte contre sa<br />
propre insignifiance, une ultime tentative pour la rendre elle-même intéressante.<br />
I. 5 En quoi l’éthique chrétienne – notre vision et nos pratiques <strong>du</strong> mariage - rend-elle la<br />
sexualité intéressante ?<br />
1. Dans un contexte de dé-liaison entre la sexualité avec la procréation lorsque les modes de<br />
conjugalité et de parentalité se donnent de manière de plus en plus distincte.<br />
2. Mais aussi – comme le souligne Ricœur - dans un contexte de dé-liaison entre l’érotisme et<br />
la tendresse. En effet, comment redonner le goût de la tendresse à une sexualité tellement<br />
désespérée dans sa manière même de compenser en « désespoir de cause » ce qu’elle a ellemême<br />
écarté de tendresse?<br />
Voyez combien la sexualité, l’intimité <strong>du</strong> couple est votre. En ce sens, elle vous appartient et<br />
bien-sûr, elle ne regarde que vous. Mais elle est aussi un témoignage et une mission et un<br />
message pour le bien de tous : « le mariage est la meilleure chance de l’amour », la meilleure<br />
chance de la tendresse ou de la sexualité. La société a besoin de la tendresse de votre couple<br />
pour vivre avec le plus grand bonheur possible l’énigme de la sexualité!<br />
La sexualité se donne donc à vivre soit par « l’éthique de la tendresse» soit par « la nonéthique<br />
de l’érotisme ». Mais dire cela, c’est oublier que la sexualité échappe à la maitrise de<br />
l’homme : « finalement, quand deux être s’étreignent, ils ne savent pas ce qu’ils font ; ils ne<br />
savent pas ce qu’ils veulent, ils ne savent pas ce qu’ils cherchent… » écrit Ricoeur. 2<br />
2 Paul RICŒUR, « Sexualité, la merveille, l’errance, l’énigme », in Esprit 289, 1960, p. 207.<br />
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