L'EXPLOITATION DE LA PROSTITUTION : UN ... - Fondation Scelles
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Katia, Moldavie :<br />
« J’étais désespérée<br />
mais je continuais à<br />
chercher, j’interrogeais<br />
tout le monde mais il<br />
n’y avait rien, rien, rien.<br />
En hiver 2000, j’ai rencontré<br />
une fille de mon<br />
village que je n’avais<br />
pas revue depuis<br />
l’école ! Elle avait<br />
entendu que je<br />
cherchais du travail, je<br />
ne sais pas comment<br />
ni par qui mais vous<br />
savez, tout se sait très<br />
vite chez nous !<br />
Un jour, elle est venue<br />
chez ma sœur pour<br />
me rencontrer et me<br />
parler(….) Elle m’a dit<br />
qu’un de ses bons amis<br />
avait un ami qui avait la<br />
possibilité de me<br />
donner du travail en<br />
France dans mon<br />
métier, la couture.<br />
Je l’ai cru car vous<br />
savez la moitié de la<br />
Moldavie ne vit plus<br />
en Moldavie. Les gens<br />
saisissent n’importe<br />
quelle occasion pour<br />
s’en sortir, alors oui j’y<br />
ai cru ».<br />
« La prostituée n’est<br />
pas considérée comme<br />
une personne, mais<br />
comme une chose,<br />
un objet, une esclave,<br />
alors que le « client »<br />
est l’acheteur, le maître<br />
qui possède le pouvoir<br />
magique - l’argent -<br />
grâce auquel en toute<br />
impunité, il impose ses<br />
fantasmes fussent-ils<br />
abjects et dégradants ».<br />
Jean <strong>Scelles</strong><br />
Renforçant cette tendance dangereusement libérale, d’autres instances<br />
internationales vont jusqu’à appeler à une reconnaissance économique du<br />
« travail du sexe ». Ainsi en 2001, l’Organisation Mondiale de la<br />
Santé (OMS) réclamait la légalisation et la décriminalisation du « travail<br />
du sexe » afin de réduire l’épidémie du sida. Cette même année, la Cour<br />
européenne de justice accordait à des femmes venues d’Europe de l’Est,<br />
le droit de migrer pour travailler dans l’industrie du sexe néerlandaise aux<br />
mêmes conditions que n’importe quelle profession libérale.<br />
D’autres encore ont même tenté de faire reconnaître l’existence d’une<br />
forme de traite volontaire. La traite deviendrait admissible et tolérable dès<br />
lors que la personne donnerait son consentement et qu’elle dirait savoir<br />
être destinée à la prostitution. Comme si le consentement de la personne<br />
pouvait rendre la traite acceptable. Pour reprendre les mots de la féministe<br />
canadienne Elaine Audet, « le critère de référence pour juger ce qui est<br />
acceptable ou non est le mal fait à la personne, pas son consentement ».<br />
Les Nations Unies, l’Union européenne et le Conseil de l’Europe ont<br />
ainsi peu à peu abandonné toute référence à une pénalisation du<br />
proxénétisme et de fait, tout engagement et toute volonté de lutter<br />
contre le développement de la prostitution. La communauté<br />
internationale se contente dès lors de définir un cadre juridique légal<br />
visant à mettre en place une politique commune de lutte contre la traite<br />
des êtres humains sur la base du plus petit dénominateur commun. Quant<br />
au reste, les organes européens et internationaux, rompant avec l’esprit de<br />
la Convention de 1949, l’abandonnent à la compétence des Etats...<br />
Or, les mêmes divergences idéologiques apparaissent au niveau des<br />
Etats, en particulier en Europe, scindée en deux camps contraires : pays<br />
abolitionnistes et réglementaristes.<br />
2. L’ABOLITIONNISME ET SES AMBIGUÏTÉS<br />
Fondé sur la Convention des Nations Unies de 1949, le système<br />
abolitionniste tolère la prostitution mais non sa réglementation. La<br />
personne prostituée est considérée comme une victime que l’Etat doit<br />
aider à se réinsérer, et le proxénétisme, dans sa définition la plus large,<br />
est interdit. Pour autant, son application laisse à désirer et certains<br />
pays n’en font pas toujours une utilisation très stricte. Ainsi l’Espagne,<br />
depuis le Code pénal de 1996, établit dans la loi une distinction entre<br />
« prostitution contrainte » et « prostitution libre », en ne sanctionnant<br />
le proxénétisme que s’il s’exerce dans des conditions démontrant la<br />
violence, la contrainte, l’abus de vulnérabilité (âge, situation de<br />
supériorité...). Et certaines fédérations autonomes, comme la Catalogne,<br />
ont légalisé les maisons closes, alors que le pays lui-même demeure<br />
FONDATION SCELLES L’exploitation de la prostitution : un fléau mondial 32