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lire les premières pages - Publibook

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Xavier Patrigeat<br />

Le Rêvaliste<br />

Entre rêve et réalité<br />

<strong>Publibook</strong>


Retrouvez notre catalogue sur le site des Éditions <strong>Publibook</strong> :<br />

http://www.publibook.com<br />

Ce texte publié par <strong>les</strong> Éditions <strong>Publibook</strong> est protégé par <strong>les</strong><br />

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14, rue des Volontaires<br />

75015 PARIS – France<br />

Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55<br />

IDDN.FR.010.0117028.000.R.P.2011.030.31500<br />

Cet ouvrage a fait l’objet d’une première publication aux Éditions <strong>Publibook</strong> en 2012


Inconnue…<br />

C’était sans doute l’hiver, je me souviens de cette<br />

écharpe qui me collait à la peau. Ou bien, je me trompe.<br />

C’était juste le grand vent d’automne qui me frôlait le cou.<br />

En tout cas, ce n’était pas le printemps ; ou alors, son début,<br />

avec ses grands jours de soleil et ses lendemains<br />

pluvieux. Une certitude, je ne l’ai pas connue un soir d’été<br />

à moins que ses yeux m’aient glacé le cœur et que, par<br />

précaution, je me suis camouflé dans cette longue chaussette<br />

tricotée par ma mère.<br />

Oh ! Je sais bien que je divague… Mais, il faut reconnaître<br />

que ces sensations de froideur et de bien-être se<br />

confondaient ce jour-là. Il faut dire que la petite bise<br />

n’avait pas fait autant de dégâts sur ma petite mine que ce<br />

regard posé sur moi. Elle ne cessait de me mirer et je<br />

n’osais en faire autant, par timidité sans doute. Mon visage<br />

se décomposait seconde après seconde. Et pourtant, je ne<br />

quittais pas la scène. Je restais planté là telle une proie qui<br />

se laisse mourir sans se débattre. Elle était là, ma prédatrice,<br />

mon amoureuse, qui devait me dévorer avant l’hiver<br />

ou le printemps, l’automne peut-être. Il n’y a pas de saison,<br />

ni même de temps quand la passion vous arrache <strong>les</strong><br />

yeux. Je devenais de plus en plus aveugle dirigé par ces<br />

deux pupil<strong>les</strong> qui prenaient le pouvoir sur <strong>les</strong> deux miennes.<br />

Pire encore, je prenais du plaisir à me laisser envahir.<br />

Et puis, elle baissait <strong>les</strong> yeux et me quittait sans adieu.<br />

Un instant, je me sentais seul. Mais, très vite, ses yeux me<br />

revenaient en mémoire. J’aurais voulu la suivre,<br />

9


l’embrasser ou, tout simplement, lui dire merci pour ce<br />

petit bonheur. Mais cette satanée timidité me l’interdisait.<br />

Et puis, à quoi bon ? De quel droit pouvais-je la suivre ?<br />

A-t-on déjà vu un mouton courir après une louve ?<br />

Je n’arrivais pas à quitter l’endroit. J’étais planté au<br />

beau milieu de ce parc Saint Pierre en plein centre<br />

d’Amiens et me sentais bien bête à l’instar de tous ces<br />

volati<strong>les</strong> qui prenaient leur bain sur l’étang du parc. Puis,<br />

assis sur de vieil<strong>les</strong> lattes de bois, je songeais à ce qu’il<br />

aurait pu se passer si j’avais osé. Oser lui dire que j’étais<br />

sous le charme, oser lui dire que je n’avais jamais vécu un<br />

tel moment… Bref, oser lui dire tant de choses quitte à<br />

être ridicule ! N’est-ce pas cela d’ailleurs être amoureux,<br />

n’est-ce pas tout simplement être honteux de ces gestes au<br />

point de ne pas être à la hauteur de l’événement. J’avais,<br />

sans doute, laissé passer ma chance. Que dis-je : ma vie !<br />

L’amour de ma vie venait de me quitter et je n’avais pas<br />

su réagir. Un minable, voilà ce que j’étais ! J’étais planté<br />

sur ce banc, planqué derrière ma grosse laine et je me morfondais.<br />

Il était bien temps ! Elle était déjà loin… Un stylo<br />

traînait dans mes poches ainsi qu’un papier de convocation<br />

pour un nouveau casting. Je le retournai puis je me mis à<br />

écrire tout ce que je pensais d’elle et de moi surtout qui<br />

était là comme une lopette à me lamenter sur mon sort :<br />

Il n’y a pas de rencontre s’il n’y a pas de mots !<br />

Ne serait-ce qu’un « bonjour » pour donner le tempo…<br />

Comment donc ai-je pu être alors aussi idiot ?<br />

Oui, je me sens bien nul d’avoir fuit sans un mot !<br />

N’empêche que maintenant, cloué sur ce vieux banc,<br />

Ne sachant réagir, je pleure tout mon être !<br />

Une plume à la main, je ne sais où me mettre,<br />

Et me dit que pleurer, ce n’est plus le moment !<br />

10


Après ces quelques alexandrins, je fuyais cet endroit.<br />

Le parc commençait à être désert et le jour laissait place à<br />

la pénombre. J’étais de plus en plus mal et, tête baissée et<br />

épau<strong>les</strong> lâches, je traînais mon corps jusqu’à<br />

l’appartement. Les rues étaient peuplées de jeunes qui se<br />

rendaient dans le quartier Saint-Leu sans doute pour vider<br />

quelques pintes de bières. Je croisais également quelques<br />

clochards qui mendiaient à chaque coin de rues : ils traînaient<br />

notamment le long du Boulevard Alsace-Lorraine ;<br />

et ce, jusqu’à la gare située quelques dizaines de mètres<br />

plus haut. Je <strong>les</strong> connaissais tous notamment pour avoir<br />

souvent discuté avec certains d’entre eux. Il m’arrivait, en<br />

effet, de me prendre pour l’Abbé Pierre et écouter leur<br />

problème, leur passé douloureux… Toutefois, je n’avais<br />

pas cette ambition ce jour-là. Je me souviens, d’ailleurs,<br />

avoir tracé mon chemin en entendant l’un d’eux<br />

m’interpellait. Je n’avais pas ma tête à entendre leurs palabres<br />

souvent plaintifs et misérab<strong>les</strong>. Mon cœur était lui<br />

aussi des plus misérab<strong>les</strong> et n’avait aucunement la force<br />

d’endosser d’autres conversations avec ces miséreux alcooliques.<br />

Je me faufilais alors dans la rue Ju<strong>les</strong> Barni et<br />

avançais à grands pas jusqu’à mon appartement. J’habitais<br />

le quartier dit Saint-Anne, rue Leprince. C’était un petit<br />

appartement (voire un studio) où tout était disposé très<br />

simplement : une kitchenette, un coin salon et un petit coin<br />

« dodo ».<br />

En rentrant, je me pris un café bien corsé et je me mis à<br />

écouter des musiques tristes. N’étais-je pas en train de<br />

sombrer dans une quelconque dépression passagère ? En<br />

tout cas, une chose était certaine : je n’avais le goût à rien<br />

et plus rien ne semblait avoir de goût ! Je m’assoupissais<br />

sur le canapé du salon en espérant très vite oublier ce visage<br />

qui m’entêtait depuis cette traversée du parc. Nous<br />

étions une de ces saisons où l’amoureux arrête le temps !<br />

Je ne me souviens pas de cette journée à partir de ce moment…<br />

L’alcool sans doute ! J’avais entamé une bouteille<br />

11


de whisky qui traînait dans le placard. Enfin, quand je dis<br />

« entamé », c’était bien plus que ça… Je crois que je me<br />

suis endormi sur le canapé après quelques verres bien servis<br />

! Je me rappelle simplement du bruit de la bouteille qui<br />

roulait dans l’appartement. Un appartement, d’ailleurs, qui<br />

semblait tout nouveau pour moi : Etait-ce cette rencontre<br />

qui m’avait tant troublé ? Je ne reconnaissais pas <strong>les</strong> pièces,<br />

<strong>les</strong> murs ; choqué certainement par cette aventure<br />

matinale. Enfin, je dis « matinale »… Quelle heure étaitil<br />

? Quand étions-nous ? Je n’en savais rien ! Je n’en sais<br />

toujours rien ! Ce dont je me rappelle c’est simplement ce<br />

regard qui me fuyait à chaque minute ! Allais-je le revoir<br />

un jour ou l’autre ? Etait-il du passé pour toujours ? Mes<br />

paupières se faisaient lourdes, mes yeux se fermaient ; je<br />

crois qu’ils pleuraient aussi…<br />

12


Sommeil<br />

La gueule de bois, je quittai mon lit pour me retrouver<br />

sur une île côtière. « Allongé sur le sable » comme le dit la<br />

chanson de Renaud, je profitais du soleil qui me chauffait<br />

le ventre. J’étais dans l’un de ces moments de ma vie où le<br />

farniente prend le dessus ! Rien faire était devenu mon<br />

leitmotiv dans cet endroit paradisiaque où, comme par<br />

magie, elle faisait son grand retour. Elle était là, à côté de<br />

moi. Je n’y croyais pas… Nous étions au bout du monde et<br />

mon rêve se réalisait. L’espionnant avec un verre de cocktail<br />

à la main, je la voyais chercher le soleil. Une fois<br />

allongée sur cette étendue sableuse, elle se munissait<br />

d’une paire de lunettes de soleil ainsi que d’un gros livre.<br />

Quant à moi, il fallait bien que je l’approche. Il fallait bien<br />

que je lui fasse sentir ma présence. Il fallait qu’elle se souvienne.<br />

Alors, je m’approchais avec autorité essayant de<br />

provoquer une rencontre qui aurait pu me permettre de<br />

connaître, pour la première fois, le son de sa voix. Je<br />

m’avançais. Au fil des pas, le stress de la possible rencontre<br />

me crispait quelque peu. Toutefois, je ne faisais pas<br />

marche arrière comme j’aurais très bien pu le faire auparavant.<br />

Je dominais mes faib<strong>les</strong>ses avec une certaine<br />

aisance et une grande surprise. A quelques mètres d’elle,<br />

mon rêve se brisa à cause d’une maudite branche morte<br />

qui croisait mon chemin. Moi, maladroit, je ne faisais pas<br />

dans la dentelle à tel point que je me pris <strong>les</strong> pieds dans ce<br />

vieux bois pourri. Ni une, ni deux, je m’encastrais le nez<br />

dans le mur du bar et m’assomma comme un idiot !<br />

Je me réveillais en ne voyant personne…<br />

13


J’étais seul. Pas de plage, pas de soleil. Il n’y avait<br />

qu’un lit, ma mélancolie et moi. J’avais à la fois la sensation<br />

de vertiges et de mal-être. Je ne comprenais que mal<br />

ce qu’il venait de m’arriver. J’étais seul et si loin de ce<br />

bout de sable sur lequel je venais de vivre un moment<br />

inoubliable.<br />

Lever difficile voire pénible, l’odeur de whisky imprégnait<br />

le studio. Je nettoyais la pièce à grands coups de<br />

serpillère. J’étais déjà « à la bourre ». Je préparais mon<br />

petit déjeuner tout en me rappelant ce drôle de rêve. J’étais<br />

si bien, si heureux dans ce petit paradis terrestre. Voilà que<br />

la réalité avait repris ses droits, sa priorité en me séparant<br />

de cet être qui m’obnubilait…<br />

La journée commençait et pourtant, j’avais l’impression<br />

de ne pas être dans le monde réel. J’étais comédien et je<br />

traînais de petit rôle en petit rôle. Quelques années auparavant,<br />

certains scénaristes et réalisateurs me voyaient<br />

comme la star de demain. J’y ai d’ailleurs longtemps cru<br />

jusqu’au jour où j’ai compris la cruauté de ce métier. Aujourd’hui,<br />

je me contente de faire quelques apparitions<br />

dans des courts et longs métrages ou encore jouer<br />

l’homme comblé par une quelconque machine à laver ou<br />

un je ne sais quel savon dans une quelconque publicité qui<br />

ferait le bonheur de la pause « pipi » du téléspectateur.<br />

C’était d’ailleurs pour une « réclame » que le radio-réveil<br />

m’avait éloigné de mes songes. En effet, je me dépêchais<br />

de quitter l’appartement pour me rendre sur le lieu du<br />

tournage.<br />

La matinée fut longue. Sans cesse, je pensais à cette<br />

fille dont je ne savais plus trop si elle existait ou non. A<br />

chaque « Moteur ! » lancé par le réalisateur, je restais souvent<br />

inerte songeant à ce qui venait de m’arriver. Plusieurs<br />

14


fois le cinéaste me lançait des noms d’oiseaux, agacé sans<br />

doute par mes étourderies et mon envie de quitter <strong>les</strong><br />

lieux. D’ailleurs, dès la fin du tournage, en fin d’aprèsmidi,<br />

je fonçais en laissant un petit « à demain ! » derrière<br />

moi me fichant bien de tout ce qu’il venait de dire.<br />

Sur le chemin du retour, je descendais du train et flânais<br />

dans <strong>les</strong> rues en espérant la croiser ou, tout au moins,<br />

lui trouver un sosie. Mais, rien. Pas l’ombre d’une ressemblance.<br />

Je rentrais chez moi en essayant de me faire une<br />

raison. Peu d’appétit, juste l’envie de ruminer, me dire que<br />

je n’aurai plus jamais ce bonheur. Il n’en restait qu’un<br />

regard qui flottait dans mon esprit et qui, au fil des minutes,<br />

devenait de plus en plus flou… Je fatiguais, la nuit<br />

avait été courte sans doute et, après avoir avalé quelques<br />

aspirines, je m’endormais.<br />

15


Ou suis-je ?…<br />

Il y avait un son d’harmonica qui envahissait la plage<br />

presque désertique. Le soleil tapait fort à tel point que j’en<br />

concluais d’ailleurs que nous devions être dans le milieu<br />

de la journée. Les volets des bungalows étaient, en effet,<br />

fermés et je supposais que tous <strong>les</strong> locataires étaient en<br />

pleine sieste ! Les pieds nus, j’avançais dans le sable épais<br />

m’approchant de la mer colorée par <strong>les</strong> coraux jaunes,<br />

orange, verts également. Je pensais bien me baigner dans<br />

cette eau calme. Ainsi, retirant mes affaires, je me trempais<br />

timidement le bas du corps. Surpris par la tiédeur de<br />

la température de l’eau, je me jetais rapidement dans cette<br />

étendue.<br />

Je fus vite rejoint par quelques bronzés qui<br />

m’accompagnaient dans ma trempette. Moi qui, jusqu’alors,<br />

ne pensais connaître que <strong>les</strong> mers et océans<br />

glaciaux de l’hémisphère nord de notre Terre, je<br />

m’égayais dans cette eau claire et plaisante de douceur.<br />

Et puis, l’appétit se fit sentir. Je partais à la recherche<br />

d’une brasserie. J’approchais petit à petit d’un snack-bar<br />

où l’odeur des frites et du steak dominait la pièce. Je<br />

m’asseyais au bar et fit ma commande. Avalant le sandwich<br />

avec voracité, je me rassurais en regardant <strong>les</strong> gens<br />

dévorer leur repas à leur tour. J’étais heureux et je ne me<br />

l’expliquais pas.<br />

Ballonné par ce copieux déjeuner, je filai naturellement<br />

dans un vaste appartement qui s’avérait être le mien. Je<br />

17


m’allongeais afin de commencer ma sieste… Quand soudain,<br />

quelqu’un cliqua la porte. Je me levai lourdement et<br />

fonça vers la porte légèrement aigri. « Un instant, criai-je,<br />

le temps d’enfiler un maillot de corps et je vous ouvre ! ».<br />

C’était elle, celle qui me noyait dans un doux moment de<br />

bonheur depuis mon dernier voyage là-bas ou plutôt ici sur<br />

cette île que je ne connaissais pas. Toutefois, ce moment<br />

était si magique que cette question « où suis-je ? » ne me<br />

traversait plus l’esprit. Seuls ses mots, ses gestes et son<br />

être comptaient. Je me souviens encore de son entrée et de<br />

la sensualité de sa voix : « Salut toi ! T’as bien dormi ? »<br />

m’affirmait-elle avec délice et une pointe d’ironie. Moi, je<br />

ne savais qu’approuver ses propos et je hochais de la tête<br />

sans broncher à sa question si brutale et autoritaire qui<br />

était pleine de familiarité. Mon mutisme ne semblait pas la<br />

déranger à tel point qu’elle se lâchait dans un monologue<br />

qui racontait sa matinée avec sa soi-disant amie qui l’avait<br />

emmenée visiter la région. Ce long regard paraissait<br />

l’avoir également affectée et émue. Ainsi, selon ses dires,<br />

la matinée fut belle et agréable. Je ne comprenais absolument<br />

rien : Pourquoi voulait-elle me raconter toutes ces<br />

choses ? Elle me parlait comme à son propre petit ami :<br />

c’était à la fois délirant et jouissif, à la fois incroyable et<br />

merveilleux…<br />

Après un jus d’orange, elle me proposait une baignade.<br />

Nous nous amusions et, m’allongeant sur le sable, je pensais<br />

à tout ce qui m’arrivait… Je ne comprenais pas, elle<br />

était, de nouveau, là, près de moi. Un seul détail en<br />

moins : pas de berceau et, par là même, pas de bébé.<br />

Dans un sens, je l’avais véritablement connu sur cette<br />

plage. Nos <strong>premières</strong> conversations s’étaient construites<br />

sur ce petit coin de paradis et en aucun cas dans cet affreux<br />

parc !!<br />

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