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bulletin 01 WEB.pdf - Liège

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Le Grand Curtius<br />

Musée d’Ansembourg<br />

Musée d’Art wallon<br />

Salle Saint-Georges<br />

Musée Grétry<br />

Les musées de la Ville de <strong>Liège</strong><br />

museum@liege.be<br />

Office du tourisme<br />

Musée de la Vie wallone<br />

Gare de <strong>Liège</strong>-Palais<br />

Archéoforum<br />

Le Grand Curtius<br />

136, rue Féronstrée / +32 (0)4 221 68 40.<br />

Du mercredi au lundi, de 10 à 18 h.<br />

Conservatoire<br />

Musée d’Ansembourg<br />

114, rue Féronstrée / +32 (0)4 221 94 02.<br />

Du mardi au samedi de 13 à 18 h, dimanche de 11 à 16 h 30.<br />

Musée d’Art wallon<br />

+ Salle Saint-Georges<br />

86, rue Féronstrée / +32 (0)4 221 92 31.<br />

Du mardi au samedi de 13 à 18 h, dimanche de 11 à 18 h.<br />

Musée Grétry<br />

34, rue des Récollets / +32 (0)4 343 16 10.<br />

Mardi et vendredi de 14 à 16 h, samedi de 10 à 12 h<br />

+ sur demande.<br />

Musée d’Art moderne et d’Art contemporain<br />

+ Cabinet des Estampes et des Dessins<br />

3, parc de la Boverie / +32 (0)4 342 39 23.<br />

Du mardi au samedi de 13 à 18 h, dimanche de 11 à 16 h 30.<br />

Fonts baptismaux<br />

Opéra<br />

Théâtre de la Place<br />

Galerie Wittert, Université de <strong>Liège</strong><br />

Trésor de la cathédrale<br />

Musée Tchantchès<br />

Maison de la Science, Aquarium<br />

MADmusée<br />

Musée d’Art moderne et d’Art contemporain<br />

Cabinet des Estampes et des Dessins<br />

Maison de la Métallurgie et de l’Industrie<br />

Musée des Transports en commun du pays de <strong>Liège</strong><br />

Gare de <strong>Liège</strong>-Guillemins<br />

Musée en plein Air, Sart Tilman, Université de <strong>Liège</strong><br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

48<br />

<strong>Liège</strong>•museum n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

<strong>bulletin</strong> trimestriel des musées de la Ville de <strong>Liège</strong> n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

49


<strong>Liège</strong>•museum<br />

acquisition/conservation<br />

expositions<br />

par ailleurs<br />

Bulletin trimestriel des musées de la Ville de <strong>Liège</strong>.<br />

Éditeur responsable : Jean Pierre Hupkens.<br />

92, rue Féronstrée, be-4000 <strong>Liège</strong>.<br />

Coordination : Grégory Desauvage.<br />

museum@liege.be<br />

Imprimé à 3 000 exemplaires sur papier recyclé, sans chlore,<br />

par l’Imprimerie de la Ville de <strong>Liège</strong>.<br />

Photos : Ville de <strong>Liège</strong> (Marc Verpoorten, Yvette Lhoest) /<br />

Sauf p. 1 et 33 : Jean-Marc Huygen / Carte de <strong>Liège</strong>, p. 48<br />

(couverture) : cellule Cartographie, département d’Urbanisme,<br />

Ville de <strong>Liège</strong>.<br />

<strong>Liège</strong>, février 2<strong>01</strong>1, n° 1.<br />

Sommaire<br />

4 Patrimoine et philantropie<br />

Le Fonds David-Constant géré par la Fondation Roi Baudouin<br />

7 Onze œuvres du paysagiste Closson acquises par le Fonds Courtin-Bouché<br />

8 Les beaux restes d’une reine de Babylone<br />

Restauration de la Sémiramis de Christian köHler<br />

14 Il n’y a pas photo !<br />

Acquisition d’un dessin aquarellé montrant une vue de <strong>Liège</strong> en 1814<br />

16 Nouvelles armes<br />

Quelques acquisitions récentes au département des Armes du Grand Curtius<br />

19 Petite histoire d’une grande encyclopédie<br />

L’Encyclopédie méthodique<br />

22 Conservation & restauration<br />

23 Les collections se développent, se soignent, s’exportent<br />

24 Agenda des expositions temporaires<br />

26 Expositions temporaires<br />

29 Prix de la Création légeoise dans le domaine des arts plastiques<br />

30 En plus des expositions temporaires<br />

32 Jardin d’hiver + Wintertuin<br />

36 8 e Biennale internationale de gravure contemporaine de <strong>Liège</strong><br />

38 Regroupement et déménagement des réserves lapidaires<br />

38 Le Service éducatif et au public des musées<br />

39 Une imprimerie dans la Ville<br />

40 Flora<br />

La nouvelle solution informatique des musées de la Ville de <strong>Liège</strong><br />

42 Qui se ressemble …<br />

À propos de sculptures mosanes<br />

45 La musique est un musée vivant<br />

46 Le musée mangeable<br />

Nous devons être des cannibales<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

2<br />

Les musées sont des maisons<br />

qui abritent seulement<br />

des pensées.<br />

Marcel proust (1871-1922), Contre Sainte-Beuve.<br />

Rien ne lie un silex de 400 000 ans à une<br />

fresque de Sol LeWitt, si ce n’est le regard<br />

que nous portons sur eux. La fonction<br />

du musée est de nous signaler ce qui, ici<br />

et maintenant, est objet de pensée (avec<br />

toutes les ambiguïtés que cela suppose),<br />

de recenser et de rendre intelligible – avec<br />

et pour nos yeux du xxi e siècle – ce qui fait<br />

l’humain.<br />

C’est dire, bien sûr, la fragilité de l’institution<br />

muséale et sa dépendance à l’égard<br />

de l’histoire des idées, sa soumission à une<br />

époque et une société. Mais c’est dire en<br />

même temps la solidité de l’optimisme de<br />

ceux qui font au quotidien le musée :<br />

c’est à leur rencontre que « <strong>Liège</strong>•museum »<br />

invitera ses lecteurs, au fil des numéros.<br />

Jean-Marc Gay<br />

Directeur des musées de la Ville de <strong>Liège</strong><br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° n° 1, 1, février hiver 2<strong>01</strong>0 2<strong>01</strong>1<br />

3<br />

S’il est un génie propre à <strong>Liège</strong>, c’est celui de s’ouvrir aux courants qui parcourent<br />

le monde, de s’en enrichir et d’en assurer la propagation. Nos musées attestent<br />

de cette disposition à puiser aux sources de cultures diverses pour construire une<br />

culture spécifique et de cet état d’esprit millénaire, qu’une situation géographique<br />

exposée a contribué à développer.<br />

Ainsi le culte de Mithra est constaté à Angleur au tournant des 2 e et 3 e siècles,<br />

diverses pièces en bronze conservées au Grand Curtius nous en sont parvenues.<br />

Ce culte à mystères diffusé par les armées romaines a coexisté à <strong>Liège</strong> avec les<br />

cultes traditionnels de l’empire de Rome.<br />

Plus près de nous Lambert Lombard apporte à <strong>Liège</strong> l’esprit de la Renaissance<br />

italienne avec sa nouvelle approche humaniste, et les collections liégeoises en<br />

attestent.<br />

Sans doute cet esprit soufflait-il encore sur la ville lorsque ses émissaires sauvèrent<br />

du désastre intellectuel nazi des œuvres d’exception proposées à la vente<br />

de Lucerne en 1939, offrant dans le même temps à notre ville une prestigieuse<br />

collection.<br />

Ces trois exemples illustrent la capacité de faire voisiner paisiblement des convictions<br />

religieuses diverses, la volonté de s’enrichir en permanence d’apports extérieurs et<br />

la détermination dans la défense de choix de civilisation.<br />

Cette manière de former une société qui jamais ne se ferme, qui toujours dépasse<br />

ses propres limites, mue par la passion de s’exposer, de s’imprégner et de diffuser,<br />

est peut-être le plus sûr chemin vers la fraternité. Que cette publication en soit le<br />

modeste instrument.<br />

Jean Pierre Hupkens<br />

Échevin de la Culture<br />

Méduse, applique, fin 2 e - 3 e siècle.<br />

Angleur (<strong>Liège</strong>). Bronze.<br />

M.A.A.D. - SN/2000/AR/244.


La mise en œuvre personnalisée d’un projet philanthropique précis<br />

Née à <strong>Liège</strong> en 1917, Simone David y a toujours vécu. Diplômée en droit et en<br />

sciences sociales de l’Université de sa ville, elle a connu une brillante carrière scientifique<br />

et académique à l’Université de <strong>Liège</strong>. Elle était sensible à l’histoire de sa<br />

région, à son patrimoine architectural et artistique mais aussi à son développement.<br />

Elle était attentive au sort des plus humbles comme aux défis que devaient relever<br />

les responsables patrimoniaux, politiques, économiques et sociaux.<br />

Simone David-Constant souhaitait une mise en œuvre personnalisée de son<br />

projet de mécénat : concentrer son action dans des limites géographiques précises<br />

et pouvoir agir dans trois domaines d’action différents. Elle connaissait l’action de la<br />

Fondation Roi Baudouin pour avoir déjà contribué à quelques initiatives dans sa<br />

région, principalement patrimoniales, à travers plusieurs comptes de projet ouverts<br />

à la Fondation. C’est vers cette institution qu’elle s’est tournée pour élaborer son<br />

projet de mécénat. Institué grâce à un legs très important (capital de 10 millions<br />

d’euros), le Fonds David-Constant a été créé au sein de la Fondation Roi Baudouin<br />

au décès de Simone Constant en octobre 2003. Depuis, il est géré par la Fondation<br />

qui lui apporte son expertise, son indépendance et sa crédibilité en matière de<br />

gestion financière, d’administration, de mise en œuvre des projets ; elle joue également<br />

auprès de lui un rôle de support, de relais, de catalyseur.<br />

Simone David-Constant a choisi trois domaines lui tenant à cœur. Le droit<br />

était toute sa vie. Décider de promouvoir la recherche et les études de droit à<br />

l’Université de <strong>Liège</strong>, c’était permettre à son université de développer un centre<br />

d’excellence. Les enfants étant le meilleur capital pour l’avenir, la fondatrice voulait<br />

soutenir ceux qui intervenaient auprès des plus défavorisés, ceux qui souffraient ou<br />

risquaient de souffrir de situations d’abandon, d’exclusion ou de troubles du comportement<br />

graves compromettant leur insertion sociale et scolaire.<br />

Enfin, Simone David-Constant savait quelle place occupe le patrimoine dans<br />

le renom de <strong>Liège</strong>, et souhaitait le pérenniser pour les générations futures. Cela l’a<br />

donc incitée à soutenir la conservation, la restauration et la mise en valeur d’éléments<br />

significatifs du patrimoine liégeois pour autant qu’ils se trouvent dans l’arrondissement<br />

administratif de <strong>Liège</strong>. Il vise tout type d’œuvre : sculpture, peinture, dessin, vitrail,<br />

etc. Son objectif final est d’en assurer la sauvegarde et de contribuer à son rayonnement.<br />

Un montant de 150 000 euros est désormais disponible annuellement pour<br />

assurer la sauvegarde des éléments les plus significatifs de ce patrimoine. Depuis<br />

cinq ans, 35 œuvres ont pu être restaurées et conservées. De grands noms ont été<br />

mis à l’honneur tels Fisen, DelCour, lombarD, le loup, Closson. Un montant total<br />

de plus de 750 000 euros a déjà été redistribué pour cet axe du Fonds.<br />

L’action du Fonds en faveur des musées de la Ville de <strong>Liège</strong><br />

Les musées de la Ville de <strong>Liège</strong> ont bien compris tout son potentiel. Dès la première<br />

année, le Fonds a reçu nombre de demandes intéressantes. Sachant l’appel récurrent,<br />

les responsables des collections n’ont pas tardé à élaborer une véritable politique<br />

Anne De breuCk<br />

Chargée de mission<br />

Fondation Roi Baudouin<br />

Patrimoine et philanthropie<br />

Le Fonds David-Constant géré par la Fondation Roi Baudouin<br />

Presque tous les Liégeois ont entendu<br />

parler du Fonds David-Constant.<br />

C’est actuellement la fondation liégeoise<br />

la plus importante créée par une<br />

personne privée et la première<br />

en termes de moyens.<br />

En cinq ans d’existence, il a déjà<br />

distribué plus de deux millions et demi<br />

d’euros entre les trois axes d’action<br />

fixés par sa fondatrice : le patrimoine,<br />

l’enfance et les études de droit.<br />

Sensible au potentiel de soutien<br />

que peut signifier ce fonds pour<br />

le patrimoine de la ville, <strong>Liège</strong>•museum<br />

a souhaité consacrer une tribune<br />

expliquant l’amorce et les rouages<br />

du Fonds, afin de préciser son rayon<br />

d’action et d’informer les candidats<br />

éventuels.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

4<br />

Pieta (détail),<br />

chêne sculpté<br />

et polychromé.<br />

<strong>Liège</strong>, fin xv e s.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

5<br />

de sauvegarde de leurs œuvres sur le moyen et le long terme. Ils ont aussi saisi cette<br />

occasion pour mettre en lumière ce patrimoine renaissant de ses cendres. Les expositions<br />

Delcour ou Le Loup sont encore dans toutes les mémoires.<br />

L’action désintéressée du Fonds permet non seulement de sauver des œuvres<br />

en péril, mais également d’attirer à nouveau le regard sur un patrimoine important<br />

mais moins en vogue actuellement. Ainsi a pu être sauvée la toile de l’Allemand<br />

Christian köHler, Sémiramis, réalisée en 1852, actuellement au Grand Curtius (voir<br />

page 8).<br />

Grâce au Fonds Constant, le Cabinet des Estampes et des Dessins a pu<br />

élaborer un plan de traitement de la totalité du Fonds Closson. Ce Fonds est constitué<br />

de 604 œuvres sur papier de Gilles-François Closson (1796-1842), paysagiste<br />

né à <strong>Liège</strong> et ayant séjourné à Rome de 1825 à 1829. Sa veuve donna le fonds<br />

d’atelier à la Ville quelques années après le décès de l’artiste. Un premier<br />

projet concernant les 127 huiles sur papier cartonné fut introduit auprès<br />

du Fonds en 2007. Il fut mené à bien en deux ans. Le deuxième projet<br />

est en cours. Il concerne la restauration et le conditionnement de 146<br />

dessins à la mine de plomb sur papier calque. Ce support particulièrement<br />

fragile offre des problèmes spécifiques de présentation,<br />

conservation et lisibilité, étant donné la transparence du calque.<br />

Cette dernière tranche clôture la restauration de l’ensemble<br />

du Fonds qui sera dévoilé lors d’une exposition prévue en<br />

2<strong>01</strong>2.<br />

La Bibliothèque Ulysse Capitaine conserve 240 dessins<br />

de Remacle le loup (1696-1746), illustrateur spadois, auteur<br />

de nombreux dessins préparatoires aux Délices du Païs de<br />

<strong>Liège</strong> de saumery. Il s’agit de la plus grande collection de<br />

dessins de l’artiste dont l’importance du témoignage pour<br />

<strong>Liège</strong> et sa région n’est plus à prouver. Vingt-quatre d’entre<br />

eux ont bénéficié d’un traitement financé par le Fonds afin<br />

d’enrayer les dégradations, pliures et traces de restaurations<br />

antérieures. À l’occasion de la fin des travaux, une exposition<br />

et une publication ont été consacrées à l’artiste cet automne.<br />

Si le Fonds agit en priorité en restaurant les œuvres d’art,<br />

il peut décider d’actions exceptionnelles. Ainsi, il ne pouvait<br />

laisser passer l’occasion de soutenir l’initiative des Amis du<br />

Musée d’Art religieux et d’Art mosan d’acquérir une Pieta<br />

mosane en bois polychrome réalisée pour une chapelle du<br />

quartier nord de la ville. Grâce à l’intervention des Amis, de la<br />

Ville et du Fonds, cette œuvre de belle facture est désormais<br />

visible au Grand Curtius.<br />

Le dernier projet sélectionné par le Fonds en faveur des<br />

musées de la Ville vise à restaurer un ensemble de treize<br />

œuvres d’art ancien provenant du Musée d’Art wallon et du<br />

Musée d’Art moderne et d’Art contemporain. Il s’agit de quatre<br />

huiles sur panneau du Musée d’Art wallon et de neuf huiles<br />

sur toile ou sur bois des réserves du MAMAC, parmi lesquelles<br />

un Léonard DeFranCe et un Dirk Hals. Ces œuvres ont été<br />

sélectionnées par un comité d’experts et l’étude de leur attribution<br />

est actuellement en cours. Ce fonds d’art ancien sera<br />

intégré dans le futur pôle Beaux-Arts. L’objectif est de sortir<br />

ces œuvres, jamais ou rarement montrées, de l’anonymat. À<br />

l’été 2<strong>01</strong>1, se tiendra à la Salle Saint-Georges une exposition<br />

en préfiguration de ce nouveau pôle.


Impact et pérennité<br />

Le Fonds s’inscrit au sein du domaine d’action « Patrimoine » de la Fondation Roi<br />

Baudouin. Son développement s’appuie sur près de 25 ans d’expérience dans ce<br />

domaine. Les campagnes de restauration thématiques SOS (1989-1999) lui ont<br />

notamment permis d’acquérir une vue globale sur les besoins et d’établir un réseau<br />

de professionnels. Depuis, des mécènes ont créé des fonds nominatifs ayant<br />

également pour objectif la restauration de notre patrimoine. La Fondation a ainsi<br />

renforcé ses compétences en la matière et peut désormais proposer une méthode<br />

d’action qui leur assurera un impact maximal. Cette méthode est remise en question<br />

régulièrement en fonction de l’évolution des besoins. Le Fonds David-Constant est<br />

ainsi assuré de garder le niveau de ses interventions et peut garantir la pérennité de<br />

la mise en œuvre de ses objectifs.<br />

Agissant dans le même domaine,<br />

certains fonds peuvent joindre<br />

leurs efforts pour permettre la réalisation<br />

de projets majeurs hors d’atteinte<br />

pour un seul fonds. La restauration<br />

du retable de la Passion de<br />

l’église Saint-Denis par exemple est<br />

une entreprise tellement vaste qu’elle<br />

n’aurait jamais pu être envisagée<br />

sans la collaboration établie entre le<br />

Fonds David-Constant et le Fonds<br />

Inbev Baillet Latour.<br />

Simone David-Constant se<br />

préoccupait de l’avenir. À charge<br />

pour nous, Fondation Roi Baudouin<br />

et responsables de collections, de<br />

faire honneur à sa générosité en travaillant<br />

à la réalisation de son objectif<br />

: transmettre ce patrimoine dans<br />

les meilleures conditions et en assurer le rayonnement hors de la principauté. Que<br />

ce patrimoine puisse continuer à témoigner de la créativité et de la finesse des<br />

artistes de la principauté et de la grandeur de la Ville à travers les siècles.<br />

En pratique<br />

L’appel à candidature lancé chaque année s’adresse à tout gestionnaire ayant en<br />

charge le patrimoine à <strong>Liège</strong>. Le Comité de gestion souhaite recevoir des projets<br />

précis, clairement limités dans le temps. Les projets de plus grande ampleur peuvent<br />

par exemple être scindés en plusieurs sous-projets bien circonscrits, chaque sousprojet<br />

pouvant être présenté d’une année à l’autre. Les modalités pour y participer<br />

sont précisées sur www.kbs-frb.be. La date limite de réception des dossiers se<br />

situe généralement dans la première quinzaine du mois de février.<br />

Le Comité de gestion du Fonds examine les dossiers de candidature chaque<br />

année, lors de sa réunion de printemps, et redistribue, sur base des conseils d’experts<br />

consultés. Présidé par Michèle Alexandre-Vanwijck, professeur émérite de<br />

l’Université de <strong>Liège</strong>, il prend ses décisions de façon tout à fait autonome. Maître<br />

Alain Deliège, notaire à <strong>Liège</strong>, chargé de cours à l’Université de <strong>Liège</strong>, ancien<br />

président de la Chambre nationale du notariat belge, y représente la fondatrice.<br />

•<br />

Pour toute information spécifique :<br />

Anne De Breuck<br />

+32 (0)2 549 61 54<br />

debreuck.a@kbs-frb.be<br />

Une œuvre restaurée grâce au Fonds Constant<br />

Gilles-François-Joseph Closson,<br />

Castellamare, huile sur papier, 164 x 3<strong>01</strong> cm.<br />

Inv. K556/23.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

6<br />

Régine rémon<br />

Conservatrice du<br />

Cabinet des Estampes et des Dessins<br />

En juin dernier, à Paris, la maison de ventes<br />

Millon & Associés présentait un important<br />

ensemble d’esquisses à l’huile sur papier<br />

de Gilles-François-Joseph Closson (<strong>Liège</strong>,<br />

1796-1852). Quelques lignes définissaient<br />

l’artiste liégeois : Élève de Gros à Paris de<br />

1817 à 1824, il séjourne en Italie entre 1825<br />

et 1829. Il se passionne pour le paysage en<br />

plein air, ce dont témoignent nos esquisses.<br />

Closson explore la Nature sous tous ses<br />

aspects. Il se sert des réserves de papier<br />

immaculées pour donner un sentiment<br />

d’instantanéité à ses études inachevées.<br />

La série comportait trente pochades<br />

réalisées à l’huile sur papier ou sur toile.<br />

Le Cabinet des Estampes et des Dessins est<br />

particulièrement sensible à la production du<br />

paysagiste Closson puisqu’il conserve, grâce<br />

à un don de la veuve de l’artiste effectué en<br />

1849, pas moins de 604 œuvres sur papier :<br />

crayon sur papier à dessin ou sur papier<br />

calque, huile sur carton. Ce fonds est classé<br />

comme Trésor par la Communauté française<br />

depuis mars 2<strong>01</strong>0. Ces dernières années, il<br />

a bénéficié de plusieurs traitements particuliers<br />

: campagne photographique, inventaire<br />

informatisé, et surtout conditionnement et<br />

restauration grâce à la Ville de <strong>Liège</strong>, à la<br />

Fondation Roi Baudoin et au Fonds Constant.<br />

De plus, il a récemment fait l’objet d’une<br />

étude dans le cadre d’un mémoire en histoire<br />

de l’art.<br />

À l’annonce de cette vente publique –<br />

ce qui ne laisse guère de place aux tergiversations<br />

–, le CED s’est mobilisé afin d’éviter<br />

la dispersion de cet ensemble. Grâce à l’intervention<br />

rapide de la Fondation Roi Baudouin,<br />

le Fonds Courtin-Bouché, dont un des<br />

Onze œuvres du paysagiste Clo s s o n acquises par le Fonds Courtin-Bouché<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

7<br />

Gilles-François-Joseph Closson,<br />

Voilier dans une crique, huile sur toile, 30,9 x 42,4 cm.<br />

Inv. VII 10/446.<br />

objectifs est de préserver le patrimoine<br />

culturel moblier d’artistes belges, a décidé<br />

de procéder à l’acquisition de quelques-unes<br />

de ces huiles. Onze de ces trente œuvres ont<br />

ainsi été acquises pour être mises en dépôt<br />

au CED et rejoindre le fonds d’atelier de<br />

l’artiste.<br />

Les œuvres acquises sont réalisées sur<br />

toile ou sur papier, certaines sur papier de<br />

réemploi, présentant au revers des fragments<br />

découpés de dessins académiques, d’autres<br />

encore sur du papier peint fleuri. Les sujets<br />

sont ceux qui ont de tout temps séduit<br />

l’artiste : arbres, sous-bois, rivières, cascades,<br />

falaises, vaches ou chèvres, ou<br />

encore Voilier dans une crique, dont les<br />

gammes bleutées rappellent la sensibilité des<br />

vues de Castellamare. Le Paysage au pont,<br />

daté du 10 octobre 1822, apporte la preuve<br />

que l’artiste s’est intéressé au paysage en<br />

plein air avant son séjour à Rome.<br />

Les supports peu soignés, découpés<br />

maladroitement, les traces de punaises, le<br />

format facile à transporter et le dessin préalable<br />

sous-jacent, confortent la thèse de la<br />

peinture réalisée en plein air.<br />

Par un heureux hasard, dans le même<br />

temps, le Metropolitan Museum de New York<br />

enrichissait ses collections d’un ensemble de<br />

toiles de l’artiste liégeois.<br />

Ce faisceau d’éléments favorables à<br />

Closson nous encourage à organiser une<br />

exposition qui fera toute la lumière sur ce<br />

fonds exceptionnel et sur cet artiste talentueux,<br />

peu connu en territoire liégeois, en le<br />

contextualisant dans son époque et les<br />

manies de son siècle.


Christian Köhler, un disciple pas comme les autres<br />

Né en 1809 à Werben en Allemagne, Christian köHler est issu d’un milieu modeste.<br />

Il est engagé comme palefrenier au service du romancier K. G. S. Heun 1 . Conscient<br />

de l’intérêt de son employé pour les beaux-arts, l’écrivain le présente au peintre<br />

Wilhelm sCHaDow qui connaît à cette époque une renommée internationale pour<br />

avoir fondé, avec d’autres artistes, le mouvement nazaréen. Ce courant artistique<br />

du début du xix e siècle prône un retour à la spiritualité en peinture et encourage<br />

l’utilisation d’une technique sobre. Sa notoriété lui permettra, quelque temps plus<br />

tard, d’introduire Christian köHler à l’Académie de Berlin où il commencera sa formation<br />

artistique.<br />

En 1826, köHler devient l’élève favori de sCHaDow. Celui-ci entretient de<br />

bons rapports avec le gouvernement prussien, ce qui lui vaut d’être nommé directeur<br />

de l’Académie de Düsseldorf. Il en réorganise la structure et donne à l’établissement<br />

une renommée européenne. L’Académie profite de cet élan et établit les premiers<br />

fondements de la célèbre « École de Düsseldorf ». köHler décide de suivre son<br />

mentor et dirige, dans un premier temps, un atelier de peinture. En 1852, il est<br />

nommé professeur à l’Académie, où il enseigne le dessin ancien et la peinture, de<br />

1855 à 1858.<br />

Peintre de compositions allégoriques, historiques et bibliques, köHler s’inspire<br />

des œuvres de la Renaissance et étudie particulièrement les toiles de rapHaël. Ses<br />

figures féminines deviendront d’ailleurs un modèle du genre pour les artistes qu’il<br />

fréquente. Il réalise aussi quelques portraits remarquables, dont un de son maître<br />

sCHaDow et un autoportrait pour l’Académie. Ses peintures religieuses ont été<br />

rendues populaires par une série de gravures et de lithographies qui circulent dans<br />

toute l’Europe.<br />

En 1860, pour des raisons de santé, köHler cherche un climat plus favorable<br />

et s’établit sur la côte méditerranéenne. Il meurt à Montpellier le 30 janvier 1861.<br />

Köhler et l’art de son temps<br />

Le xix e siècle, en Allemagne comme ailleurs en Europe, voit déferler le mouvement<br />

romantique. Alors qu’il est en plein épanouissement, en 1808, au nord de l’Allemagne,<br />

un groupe d’artistes du sud des pays germanophones fait sécession et quitte<br />

l’Académie de Vienne. Parmi ces peintres figurent Friedrich overbeCk, Franz pForr,<br />

Wilhelm sCHaDow et Cornélius.<br />

Écœurés par le formalisme de l’enseignement prussien et mus par la volonté<br />

affirmée de renouveler l’art allemand, ces peintres préconisent un retour aux valeurs<br />

chrétiennes et réaffirment le noble sentiment patriotique. Ils créent la « Confrérie de<br />

saint Luc » et s’installent dans un couvent désaffecté de Rome, en 1810. Cette communauté<br />

se convertit au christianisme et donne naissance au courant nazaréen.<br />

Leurs préceptes esthétiques avantagent le fond sur la forme. La composition<br />

devient figée, les couleurs se ternissent, les sujets s’orientent vers des thématiques<br />

bibliques tandis que leur inspiration se fonde, pour les uns, sur les premières œuvres<br />

de rapHaël et le Quattrocento et, pour les autres, sur les primitifs allemands comme<br />

Grégory DesauvaGe<br />

Historien de l’art<br />

Musées de <strong>Liège</strong><br />

Les beaux restes d’une reine de Babylone<br />

Restauration de la Sémiramis de Christian Köh l e r<br />

Grâce au soutien du Fonds David-<br />

Constant, <strong>Liège</strong> redécouvre une toile<br />

de ses collections. Ce tableau<br />

(huile sur toile, 258 x 304 cm),<br />

réalisé par Christian köHler en 1852<br />

et s’intitulant Sémiramis, naguère<br />

en péril, est aujourd’hui sauvegardé<br />

à la suite d’une restauration intégrale.<br />

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9


Dürer. En 1817, l’arrivée du peintre Cornélius relance le mouvement et lui donne<br />

une popularité indiscutable en Europe. Il met en avant la peinture monumentale qui,<br />

selon lui, doit exprimer l’idéal chrétien, historique et patriotique. La technique picturale<br />

devient lisse et le tracé prédomine sur la couleur. Comme tous les membres de<br />

sa confrérie, sCHaDow revient en 1819 en Allemagne où il rencontre köHler qui se<br />

laissera gagner par l’enseignement des Nazaréens.<br />

Sous la férule de sCHaDow, l’« École de Düsseldorf » acquiert dès 1826 une<br />

réputation internationale. Elle se caractérise par une recherche de réalisme et de<br />

sensualité. Ces nouveaux acquis donneront, aux derniers souffles du mouvement<br />

romantique, l’impulsion nécessaire pour orienter la peinture vers la modernité.<br />

Christian köHler est pleinement engagé dans cet élan artistique, qui garde encore<br />

la marque visible des Nazaréens. Il exploite<br />

des sujets bibliques, allégoriques<br />

et historiques où le sens du détail est privilégié.<br />

Son attention se porte sur la composition<br />

et les personnages, l’objectif<br />

étant de restituer avec le plus de justesse<br />

les événements historiques évoqués.<br />

L’expression des visages est finement<br />

reproduite et la touche, bien que léchée,<br />

rend avec sensualité le raffinement des<br />

étoffes. Malgré cette recherche de réalisme,<br />

les scènes de ses peintures restent<br />

figées dans une certaine théâtralité et la<br />

fougue des épisodes qu’il représente<br />

semble suspendue dans le temps.<br />

L’École de Düsseldorf et <strong>Liège</strong><br />

Le mouvement connaît à <strong>Liège</strong> un accueil<br />

particulièrement chaleureux dans la seconde<br />

moitié du xix e siècle. Les raisons<br />

de ce succès tiennent, sans conteste,<br />

aux événements de 1830 et à la création<br />

toute récente de la Belgique. La peinture d’histoire et le sentiment national trouvent<br />

en ces mutations historiques un terreau fertile. De surcroît, l’École allemande a de<br />

nombreux partisans parmi les amateurs d’art liégeois. Jules HelbiG, artiste de son<br />

état, fait partie de ceux-ci. Il introduit, par le biais de la « Société pour l’Encouragement<br />

aux Beaux-Arts » 2 dont il est le secrétaire attitré, les grands artistes de l’École de<br />

Düsseldorf et les donne à voir lors de différentes expositions qui se tiennent dans les<br />

salles de l’Émulation, dans l’ancienne église Saint-André et parfois dans des annexes<br />

comme la Salle académique de l’Université. Ce phénomène prend une ampleur considérable<br />

et culmine en 1875 où 54 peintres de Düsseldorf sont présentés au public.<br />

L’attirance de HelbiG pour cette École n’est toutefois pas un hasard. D’origine<br />

allemande, il poursuit ses études artistiques dans la prestigieuse Académie de<br />

Düsseldorf. Il est donc coutumier des théories qui y sont développées et sa sensibilité<br />

le porte d’emblée vers ce courant.<br />

La pénétration des théories allemandes dans la sphère artistique liégeoise<br />

est très importante et constitue un véritable foyer d’inspiration pour les peintres de<br />

nos régions. La peinture d’Histoire devient un genre à part entière. Des artistes tels<br />

que Barthélemy vieillevoye, avec son Assassinat de La Ruelle, Bourgmestre de<br />

<strong>Liège</strong>, en 1637, Auguste CHauvin, Jules HelbiG, Victor Fassin ou encore Charles<br />

soubre, avec son tableau intitulé Famille noble devant les conseils des Troubles,<br />

sont autant d’émules qui constituèrent, avec plus ou moins de talent, une suite aux<br />

mouvances allemandes romantiques.<br />

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10<br />

États de la toile avant et après restauration.<br />

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11<br />

Sémiramis, reine de légende<br />

Le sujet que représente köHler en 1852<br />

tient tout autant du domaine biblique<br />

que de la légende. Sémiramis est la reine<br />

légendaire de Babylone, créatrice des<br />

Jardins suspendus (une des sept merveilles<br />

du monde antique). Son histoire<br />

est relatée par plusieurs auteurs dont<br />

DioDore De siCile et HéroDote, ainsi que<br />

par les textes bibliques. Son existence<br />

historique est assimilée à la reine assyrienne<br />

Sammuramat (ix e siècle av. J.-C.).<br />

Femme de pouvoir, elle entreprend<br />

d’élargir son royaume et organise des<br />

expéditions jusqu’en Égypte ou en Inde.<br />

Sa soif d’entreprendre la pousse à bâtir<br />

de nouveaux édifices à Babylone avec<br />

une munificence sans réserve. La cité<br />

acquiert dans le monde antique une incroyable<br />

popularité. Plusieurs fois durant<br />

son règne, elle fait face aux soulèvements<br />

de son peuple qu’elle réprime violemment.<br />

Sa seule présence charismatique<br />

suffit à calmer toute sédition. Rentrée de<br />

campagne militaire, son fils Ninias ourdit<br />

contre elle une conspiration qui la contraint<br />

à céder son empire, sans opposer<br />

de résistance. Après son abdication, elle<br />

se retire de toute vie publique.<br />

Sémiramis ne cessera d’inspirer les<br />

artistes de tous temps. L’image d’une femme<br />

guerrière, entreprenante, autoritaire et bâtisseuse<br />

donne à sa personnalité un relief<br />

propre à stimuler l’imagination des auteurs<br />

mais aussi des peintres 3 .<br />

La Sémiramis de <strong>Liège</strong><br />

Le drame littéraire La fille de l’air de<br />

Caldéron De la barCa, auteur espagnol du xvii e siècle, aurait inspiré köHler pour<br />

son tableau. Les théoriciens du mouvement romantique allemand (sCHleGel,<br />

lessinG, GoetHe) redécouvrent les textes de l’écrivain et les popularisent. GoetHe<br />

faisait d’ailleurs grand cas de La fille de l’air.<br />

Différents personnages de la toile constituent un répertoire de figures bibliques<br />

que köHler traite couramment. Les dames de cour entourant Sémiramis sont ainsi<br />

représentées sous les traits d’Agar et de Myriam. La reine est face au spectateur,<br />

sur un trône décoré de riches tissus. Elle s’apprête à empoigner le glaive que lui<br />

tend une servante. Les traits du visage expriment l’inquiétude et la peur, les corps<br />

se crispent. Sur la partie supérieure droite, au travers d’une fenêtre, on distingue un<br />

soldat qui pointe du doigt la ville de Babylone en feu, en proie au soulèvement du<br />

peuple. En arrière-plan, au pied du temple, la population s’échauffe.<br />

Le mouvement de révolte évoqué ici trouve un écho évident dans les événements<br />

révolutionnaires de 1848-49. Incontestablement, l’actualité inspire les peintres<br />

et constitue une réserve inépuisable, en ces temps de désordre et de bouleversement.<br />

Le patriotisme se développe et fonde les sujets que la peinture évoque.


La composition est soigneusement étudiée et s’élabore sur un triangle équilatéral<br />

central reposant sur un de ses côtés. Cette structure donne au sujet une assise<br />

stable et fixe, exempte de tout dynamisme. Cette particularité reste fidèle aux enseignements<br />

de l’École de Düsseldorf. Les couleurs, quant à elles, sont appliquées en<br />

masses unies et léchées. La recherche d’une vérité historique motive le recours au<br />

rendu sensuel des matières. Par exemple, les tissus font l’objet d’une recherche raffinée<br />

: le moiré des robes, l’éclat des ors, le satiné et la transparence des mousselines.<br />

Il est clairement perceptible que köHler cherche à faire évoluer la peinture<br />

de son temps vers une représentation plus réaliste et plus expressive. Il s’oriente<br />

d’évidence vers une recherche sensuelle et vivante du sujet. Malheureusement, ses<br />

tentatives ne parviennent pas à l’extraire totalement du courant rigoriste nazaréen et<br />

ses toiles conservent encore la froide distance des œuvres de ses maîtres.<br />

Curieuses origines<br />

Étonnamment, köHler n’en est pas à son coup d’essai lorsqu’il traite son thème<br />

babylonien. Il existe trois versions de Sémiramis. Il y travaille la première fois en<br />

1843, soit neuf ans avant la réalisation de deux autres versions. La première toile fait<br />

peu de cas de la couleur, qui semble comme fondue en une série de nuances<br />

ternes. Néanmoins, la structure est déjà clairement établie. La composition triangulaire<br />

reste de mise mais les personnages sont moins nombreux. La vue de Babylone<br />

est plus détaillée mais n’acquiert pas encore la fougue et l’expressivité des variantes<br />

suivantes. La toile a appartenu à la Maison royale de Hanovre et fut vendue aux<br />

enchères par Sotheby’s en 2005, à un collectionneur privé.<br />

Les deux autres tableaux traitent de la même thématique et sont parfaitement<br />

identiques. Ils sont réalisés la même année, en 1852. L’un appartient à la Nationalgalerie<br />

de Berlin (Staatliche Museen - W.S. 112) et l’autre fait partie des collections<br />

de <strong>Liège</strong>. L’exemplaire berlinois a été acquis par l’entremise de H. Wagener, riche<br />

banquier berlinois et fondateur de la Nationalgalerie. Féru d’art et grand collectionneur,<br />

il constitua une réserve d’œuvres des plus grands peintres qu’il légua à la ville de<br />

Berlin. La version berlinoise a participé à deux expositions d’envergure internationale.<br />

Quant au tableau liégeois, il a été acquis à la suite du « Salon pour l’encouragement<br />

aux Beaux-Arts » de <strong>Liège</strong>, en 1853, pour intégrer la collection du Musée<br />

des Beaux-Arts de <strong>Liège</strong>. Puis il fut mis en dépôt dans un bâtiment public où il subit<br />

des dégâts. À la suite de ces altérations, l’œuvre regagna les réserves du musée<br />

avant d’être restaurée.<br />

Restauration grâce au Fonds David-Constant et aspects techniques<br />

Sur base d’un dossier présenté en 2009 par le MAMAC, le Fonds David-Constant a<br />

retenu la proposition de restauration de la Sémiramis de <strong>Liège</strong>. L’état avancé des<br />

détériorations rendait sa sauvegarde urgente et indispensable. Dès l’acceptation de<br />

la proposition, le restaurateur désigné pour cette tâche, Pierre Masson, et son<br />

équipe de l’atelier Salvartes, a emporté la toile dans son atelier afin de lui donner les<br />

traitements nécessaires.<br />

La toile, d’une dimension non négligeable (258 x 304 cm), présentait, en son<br />

état initial, de graves altérations : des salissures superficielles, des traces de coulées,<br />

des vernis oxydés et brunis, une toile oxydée et fragilisée, mais surtout d’importantes<br />

déchirures d’une longueur cumulée de huit mètres et de deux pertes de toile dans<br />

la partie inférieure (droite). Le châssis de l’œuvre était, en outre, trop fragile pour<br />

soutenir le poids du doublage indispensable de la toile, vu l’importance des<br />

déchirures du support.<br />

La première opération a consisté à déposer l’œuvre de son châssis, c’est-àdire<br />

à ôter la toile de la structure de bois arrière qui la soutenait. Le revers de la toile<br />

a pu être complètement et délicatement nettoyé. Les déformations constatées sur<br />

la surface ont été réduites autant que possible par une mise à plat. Les déchirures<br />

La Nationalgalerie de Berlin ne s’est pas<br />

trompée sur l’importance de ce tableau.<br />

À deux reprises, elle l’a fait figurer dans<br />

des expositions internationales<br />

consacrées, pour l’une, à Babylone et,<br />

pour l’autre, aux peintres romantiques<br />

allemands. Le Palais des Beaux-Arts de<br />

Bruxelles accueillit la seconde en 2007<br />

et reçut un accueil favorable du public.<br />

Babylon : Mythos und Wahrheit. Catalogue d’exposition,<br />

Pergamonmuseum de Berlin, 26 juin - 5 octobre 2008,<br />

p. 75-76.<br />

Blicke auf Europa.<br />

Europa und die<br />

deutsche Malerei<br />

des 19. Jahrhunderts.Catalogue<br />

d’exposition,<br />

Neue Pinakothek<br />

de Munich, 22 juin -<br />

2 septembre 2007,<br />

p. 365.<br />

A. De neuville,<br />

À propos du Salon<br />

triennal de <strong>Liège</strong>,<br />

s. l., 1921.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

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12<br />

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13<br />

ont été reprises « fil à fil » à l’aide de points de résine époxy. Les manquements de<br />

support ont été comblés par l’incrustation de pièces de toile de structure et épaisseur<br />

comparables. Afin de consolider ces ajouts, des renforts en fibre de verre ont été<br />

posés au dos de la toile originale. Elle a ensuite été doublée à la cire-résine sur une<br />

double toile de lin et tendue sur un nouveau châssis à clés préalablement traité<br />

contre les insectes. Cette « deuxième peau » lui donne un soutien et distribuera de<br />

manière harmonieuse les tensions du textile lors de sa pose sur le châssis.<br />

Après ce traitement de conservation, l’attention a pu se porter sur la restauration<br />

de la surface de la peinture : la face visible du travail de restauration. Un<br />

nettoyage des salissures superficielles a d’abord été réalisé. Les vernis anciens<br />

oxydés et brunis ont été éliminés. La couche picturale originale ainsi dégagée, les<br />

opérations de retouches ont pu débuter. Les lacunes ont été mastiquées en respectant<br />

au mieux la structure de la couche picturale originale. Ensuite, un premier<br />

vernis a été appliqué. Les lacunes et usures ont été retouchées aux pigments-vernis<br />

qui permettent de « fondre » la retouche dans le premier vernis apposé. Ce travail<br />

délicat relève du savoir-faire et d’une observation minutieuse de la couche picturale.<br />

Après ce travail, un vernis a été appliqué au pistolet sur l’ensemble de l’œuvre afin<br />

d’en unifier l’aspect et de protéger la peinture des agressions extérieures.<br />

Un nouveau potentiel<br />

Chacune des étapes décrites ci-dessus demande un temps spécifique qui relève<br />

des impératifs chimiques ou climatiques des produits utilisés ou mis en cause. Après<br />

ces longues étapes, après plusieurs mois d’absence, la toile a réintégré le Grand<br />

Curtius. Grâce au soutien du Fonds David-Constant, le visiteur peut redécouvrir une<br />

œuvre saisissante.<br />

Ce témoin de l’École allemande du romantisme (et plus précisément de<br />

l’École de Düsseldorf) rappelle combien ce mouvement eut, dans notre cité, un<br />

écho particulier. À la fin de ce xix e siècle passionné et paradoxal, son influence sur la<br />

peinture liégeoise a été et reste importante. Soutenue par le milieu artistique local,<br />

l’École de Düsseldorf incita la peinture d’Histoire à émerger en Belgique. Dans ce<br />

mouvement, Christian köHler occupe une place de choix : élève favori d’une des<br />

figures de proue du mouvement nazaréen, il s’inspire directement de l’enseignement<br />

de son maître ; mais il n’arrête pas là sa recherche et s’oriente vers un traitement<br />

plus subtil et plus sensible de la couleur. Ses compositions, bien que figées,<br />

1. Romancier allemand (Dobrilugk, Saxe, 1771 - Berlin,<br />

1854) connu sous le pseudonyme de Heinrich Clauren. s’animent et dégagent, par un mouvement tout intérieur, une fougue et une ardeur<br />

Il est particulièrement actif dans la première moitié du xix capables de rendre l’histoire passionnée de ses sujets.<br />

La restauration récente de la Sémiramis de <strong>Liège</strong> permettra au public de<br />

porter un regard plus aigu sur la peinture de köHler et sur la place qui lui revient<br />

parmi les artistes de Düsseldorf. Si la peinture d’Histoire ne recueille pas aujourd’hui<br />

l’intérêt de tous, il est certain que le public reconnaîtra à köHler d’indéniables<br />

mérites : subtilité de pinceau, sens du coloris et rendu expressif des sentiments<br />

humains.<br />

e<br />

siècle. Fonctionnaire prussien, il écrit, durant ses heures<br />

de loisirs, des romans sentimentaux à grand succès.<br />

2. Le rôle de cette société était de valoriser les nouvelles<br />

tendances internationales de l’art. Certaines œuvres<br />

étaient achetées par la Ville de <strong>Liège</strong>.<br />

3. boCCaCe, voltaire, rossini, HuGo, DeGas, valéry :<br />

autant de grands noms qui relatèrent la destinée<br />

légendaire de cette reine de Babylone. •


Il n’y a pas photo !<br />

Soo Yang Geuzaine<br />

Historienne de l’art<br />

Musées de <strong>Liège</strong><br />

Acquisition d’un dessin aquarellé montrant une vue de <strong>Liège</strong> en 1814<br />

Ce dessin aquarellé à la plume est exécuté sur une série de feuilles de papier vergé<br />

collées les unes aux autres sur un support unique. Si le dessin a été réalisé in situ,<br />

le coloriage s’est fait en atelier, au vu des nombreux endroits qui mentionnent au<br />

crayon les teintes à appliquer.<br />

La vue, datée au revers de 1814, s’étend des abords de la basilique Saint-<br />

Martin, à gauche, à la collégiale Sainte-Croix, à droite. Elle montre, à l’avant-plan,<br />

l’ancien canal de la Meuse bordé d’un quai qui prendra le nom de Micoud d’Umons,<br />

en référence au préfet du département de l’Ourthe 2 . Cet ouvrage avait été réalisé à<br />

l’aide des matériaux provenant de la démolition de la cathédrale Saint-Lambert. Il<br />

est bordé de maisons des xvii e et xviii e siècles dont la plupart ont aujourd’hui disparu.<br />

Les façades sont en pierre calcaire de Meuse, quelques-unes sont peintes en blanc<br />

ou en jaune, selon l’usage innové à la fin du xviii e et qui perdura tard dans le xix e<br />

siècle. Les toits sont couverts d’ardoises gris-clair. C’est l’un des rares dessins<br />

détaillés de sites liégeois antérieurs à 1850. Sa précision presque photographique<br />

permet, par exemple, de mieux (re)connaître certains des fleurons architecturaux du<br />

paysage liégeois tels que la maison Ancion, l’hôtel van den Steen, l’hôtel de Méan,<br />

l’hôtel de Sélys et de distinguer ainsi les éléments anciens des bâtiments qui furent<br />

remaniés ou ajoutés postérieurement.<br />

L’aquarelle constitue également un précieux instantané de la vie quotidienne<br />

d’un quartier du centre de <strong>Liège</strong> par un beau jour d’été comme le laisse supposer<br />

l’état de la végétation et la tenue vestimentaire des passants. Sur le quai, « un défilé<br />

militaire est dépeint avec réalisme », comme le souligne Claude Gaier 3 , « en dépit<br />

d’une nécessaire schématisation dans le rendu des personnages imposée par<br />

Les acquisitions permettent d’accroître<br />

la richesse des collections et, plus<br />

encore, de faire revivre l’histoire d’une<br />

ville, <strong>Liège</strong> en l’occurrence. Il en est<br />

ainsi pour la récente entrée dans nos<br />

collections d’une vue panoramique de<br />

l’actuel boulevard de la Sauvenière<br />

et du Publémont. 1<br />

Cette vue panoramique, d’une rare<br />

fidélité, présente un caractère exceptionnel<br />

auquel plusieurs publications<br />

ont déjà fait écho.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

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14<br />

1. Œuvre acquise par les « Amis du MARAM » avec la<br />

participation de la Ville de <strong>Liège</strong> et à l’initiative d’Albert<br />

Lemeunier, conservateur.<br />

2. Théodore Gobert, <strong>Liège</strong> à travers les âges. Les rues de<br />

<strong>Liège</strong>, tome VIII, Ma-O, Bruxelles, 1977, p. 220-224.<br />

3. Claude Gaier, directeur honoraire du Musée d’Armes.<br />

4. Site internet : www.maggs.com/title/NH36054.asp.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

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15<br />

l’espace réduit dévolu à cette scène dans la composition générale ». Claude Gaier<br />

s’est interrogé quant au corps d’armée auquel appartiennent ces fantassins : « La<br />

minutie des détails figurant sur cette aquarelle donne à penser qu’il s’agit d’un<br />

détachement d’infanterie prussienne des troupes d’occupation de <strong>Liège</strong> ».<br />

Selon différentes sources relatives à cette œuvre, la signature du capitaine<br />

anglais Charles Hamilton Smith (1776-1859) 4 est visible au verso. Le Capitaine Smith,<br />

affecté aux troupes anglaises qui vainquirent Napoléon à Waterloo, participa à de<br />

nombreuses campagnes militaires et ramena des aquarelles de ses voyages.<br />


Nouvelles armes<br />

Un fusil de chasse sans chiens extérieurs<br />

Nous avons reçu un fusil de chasse hammerless (sans chiens extérieurs) de calibre<br />

20, portant la signature d’Émile Masquelier, fabricant d’armes liégeois dont l’enseigne<br />

brille encore au boulevard de la Sauvenière 1 . L’arme mesure 107,5 cm de long, les<br />

canons 68,4 cm. Elle porte le numéro de série 30455. Il s’agit d’un fusil à mécanisme<br />

de type Anson à fausses platines, décoré de gravure anglaise à bouquets ; la signature<br />

est gravée à la face inférieure de la bascule. L’arme porte, comme il est de règle,<br />

les poinçons du Banc d’Épreuves des Armes à feu de <strong>Liège</strong>, dont la marque du<br />

contrôleur, un G couronné, utilisée de 1928 à 1959, ainsi que la lettre annale γ qui<br />

indique l’année 1950. Sous les canons, on trouve la marque du fabricant de canons<br />

« Acier comprimé Cap J F » (J F = Jean Falla) et même la signature du garnisseur de<br />

canons Magilissen : « MAGI ».<br />

On note toutefois que la crosse a vraisemblablement été allongée ou restaurée<br />

au niveau de la plaque de couche, ainsi que la différence de teinte entre les deux<br />

parties de la monture. Un examen attentif révèle par ailleurs un certain nombre de<br />

discordances si on compare les dates d’activité connues des protagonistes relevés<br />

plus hauts et les poinçons du Banc d’Épreuves. La maison Masquelier a été fondée<br />

en 1876 et ne fabriquait initialement que des cartouches. Émile Masquelier s’installe<br />

rue de la Cathédrale et est inscrit au Banc d’Épreuves de 1881 à 1911. Lui succèdent<br />

« Masquelier Frères » (Charles et Ernest), inscrits au Banc de 1911 à 1925 et qui ont<br />

pu continuer à utiliser pour un temps le nom d’Émile. Vient ensuite la manufacture<br />

Charles Masquelier, active de 1925 à 1956. En 1956, la société se transforme en<br />

Masquelier SPRL avant de devenir à nouveau Charles Masquelier, qui en 1964 reprend<br />

les établissements Bury-Donckier 2 . La marque de fabrique des Masquelier, le<br />

masque triangulaire, n’est pas visible sur le fusil qui nous occupe.<br />

Philippe Joris<br />

Conservateur<br />

du département des Armes<br />

Grand Curtius<br />

Quelques acquisitions récentes au département des Armes du Grand Curtius<br />

Le département des Armes<br />

est favorisé : la réglementation<br />

est si contraignante que les<br />

détenteurs d’armes les cèdent<br />

volontiers. Les dons concernent<br />

essentiellement des armes modernes<br />

; les pistolets à silex et les<br />

arquebuses à rouet sont plus rares.<br />

Parmi les pièces entrées dans les<br />

collections en 2<strong>01</strong>0, sont présentés<br />

ici trois artefacts représentatifs.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

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16<br />

1. Les donatrices souhaitent conserver<br />

l’anonymat. Par un heureux<br />

hasard, nous avons cette même<br />

année reçu en don un autre fusil<br />

Masquelier, tout à fait original, datant<br />

de 1947 mais en moins bon état.<br />

2. Ces données proviennent notamment<br />

des archives du Banc d’Épreuves<br />

et ont été en grande partie publiées.<br />

On peut lire : Michel Druart et Guy<br />

GaDisseur, Le Qui est Qui de l’armurerie<br />

liégeoise, Éditions du Pécari, 2005 ;<br />

Bruno Joos De ter beest, Marques et<br />

poinçons d’armes à feu en Belgique,<br />

Anvers, Pandora, 1998.<br />

3. Anthony vanDerlinDen, The Belgian<br />

Browning Pistols 1889-1949,<br />

Greensboro, 20<strong>01</strong>, p. 8-16 et 72-99.<br />

4. A. FranCotte, C. Gaier et<br />

R. karlsHausen, Ars<br />

Mechanica : le grand livre<br />

de la FN, Herstal Group -<br />

La Renaissance du Livre,<br />

2007, p. 35-69.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

17<br />

Les ateliers Jean Falla, utilisant ici un acier Cap (actif à partir de 1904 ; la<br />

marque de fabrique « Acier Comprimé Cap » fut déposée en 1906), sont actifs de<br />

1931 à 1945, continués par Falla Fils jusqu’en 1953. Le poinçon du Banc d’Épreuves<br />

indiquant le calibre nominal et la longueur de la douille, « 20-70 » inscrit dans un C<br />

allongé, a été en usage à partir de 1924.<br />

À l’évidence, il ne s’agit pas (ou plus) ici d’une arme réalisée dans sa totalité<br />

par Émile Masquelier, dont le nom disparaît après 1925 au plus tard. Les canons ne<br />

seraient pas antérieurs aux années 1930, et la lettre annale du Banc d’Épreuves<br />

indique l’année 1950. Deux explications sont possibles : soit nous sommes en présence<br />

d’une arme fabriquée par Émile Masquelier, mais réparée ou reconditionnée<br />

(après avoir reçu de nouveaux canons) et éprouvée en 1950, soit nous sommes face<br />

à un assemblage de pièces disparates, comme il s’en pratiquait régulièrement à<br />

<strong>Liège</strong>. Ainsi pourrait s’expliquer notamment la différence de tonalité entre la crosse<br />

et la longuesse. Ces opérations ont du reste fort bien pu être réalisées dans les ateliers<br />

de Charles Masquelier. Quoi qu’il en soit, un fascinant puzzle !<br />

Un pistolet FN-Browning<br />

Autre entrée de choix, pourtant à première vue banale, un pistolet semi-automatique<br />

FN-Browning modèle 1900, de calibre 7,65 mm (.32). Son mérite est de porter un<br />

numéro de série très bas – 7509 –, ce qui le place dans les toutes premières années<br />

de production. Avant 1903 en tout cas, car il ne porte pas la marque d’épreuve à la<br />

poudre vive. De plus, il s’agit d’un pistolet destiné à l’armée belge, comme l’indiquent<br />

les poinçons EGB dans un ovale, un FL couronné, marque de réception du contrôleur<br />

gouvernemental, et la lettre W sur le pontet. Les plaquettes de crosse, réalisées à<br />

l’origine en ébonite, ne sont sans doute pas originales mais elles sont conformes au<br />

modèle d’époque, sans sigle FN et simplement quadrillées. Fragiles, ces pièces ont<br />

souvent été sujettes à remplacement par des modèles en bois ou semblables à<br />

celles destinées au marché civil. Autre indice d’ancienneté, les mentions « FEU » et<br />

« SUR » (pour sûreté) se détachent sur un cercle plus clair, une fioriture qui disparaîtra<br />

dans la suite 3 . Quelque 724 550 pistolets modèle 1900 ont été fabriqués en onze<br />

années de production.<br />

L’armée belge, qui l’adopta en 1900 pour ses officiers, était la deuxième armée<br />

au monde à opter pour le pistolet semi-automatique, précédée de peu par la Suisse<br />

qui avait choisi le célèbre pistolet Luger. Ailleurs, le revolver gardait droit de cité.<br />

Les relations étroites qui unissent la FN et Browning sont familières à nombre d’entre<br />

nous. Nous y revenons brièvement ici, dans la mesure où le pistolet modèle 1900<br />

inaugurait une longue et fructueuse collaboration entre l’entreprise et l’inventeur 4 .<br />

La Fabrique Nationale d’Armes de Guerre, dont l’usine fut érigée à Herstal, a<br />

été fondée en 1889 par l’association de fabricants d’armes liégeois, dans le but de<br />

satisfaire à la commande par l’État belge de 150 000 fusils à répétition système<br />

Mauser, de calibre 7,65 mm. Une commande de trente millions de cartouches devait<br />

suivre. L’outillage – dont la technicité dépassait les capacités des armuriers liégeois<br />

– fut acquis auprès de la firme berlinoise Ludwig Loewe et C°, la licence de fabrication<br />

étant obtenue auprès des Mauser Waffenwerke (propriété de L. Loewe). Une fois le<br />

contrat initial rempli, certains actionnaires, peu désireux de susciter un concurrent<br />

en leur sein, se retirèrent. Cependant, la FN acquit rapidement une réputation de<br />

qualité et reçut diverses commandes de l’étranger. De graves difficultés surgirent<br />

toutefois avec Mauser dans l’octroi des licences de fabrication. Face à cette situation,<br />

la plupart des administrateurs démissionnèrent, une brèche dans laquelle Loewe<br />

se précipita en rachetant une bonne partie des titres de la société, devenant ainsi<br />

actionnaire majoritaire et incorporant de facto la FN dans le groupe allemand. Les<br />

activités de l’entreprise herstalienne dans le domaine des armes de guerre s’en trouvèrent<br />

singulièrement contingentées.


Pour équilibrer son plan de charges, la Fabrique Nationale se tourna vers des<br />

fabrications où elle gardait sa liberté : armes de chasse et de sport, automobiles,<br />

bicyclettes, … Précisément, Hart O. Berg, directeur commercial envoyé aux États-<br />

Unis d’Amérique afin d’y étudier les dernières avancées en matière de vélocipèdes,<br />

fit là-bas la connaissance de John M. Browning. Inventeur déjà renommé, celui-ci<br />

venait de déposer un nouveau brevet pour un pistolet semi-automatique à verrouillage<br />

par la masse. La licence de fabrication fut offerte à la FN et le contrat avec les frères<br />

Browning signé dès 1897. Divers aménagements seront apportés au prototype, les<br />

premiers pistolets sortant de l’usine en 1899 : le « modèle 1900 » était né, il connut<br />

le succès que l’on sait.<br />

Nous avons acquis ce pistolet grâce au statut particulier dont jouit le département<br />

des Armes, qui lui permet de choisir les pièces qui intéressent ses collections<br />

dans la multitude d’armes saisies par les autorités judiciaires et destinées à la destruction.<br />

On ne trouve pas là de fusil de chasse de prix, ni d’arme ancienne. Mais il<br />

s’agit d’une manne inestimable en ce qui concerne les armes modernes et contemporaines,<br />

tout spécialement les armes de poing. En 2<strong>01</strong>0, nous avons ainsi récolté<br />

un revolver Colt Anaconda de calibre .44 Magnum ainsi que plusieurs modèles de<br />

pistolets Glock, dont nous ne possédions jusqu’ici qu’un seul exemplaire. Ce pistolet<br />

a fait date lors de son introduction au début des années 1980, avec sa carcasse en<br />

polymère moulé qui lui confère notamment plus de légèreté. L’arme connaît un succès<br />

qui ne se dément pas et son esthétique particulière inspire d’autres fabricants.<br />

FN et sa copie<br />

Revenons à la FN, avec une copie d’origine indéterminée (Chine ?) d’une variante du<br />

célèbre pistolet semi-automatique FN-Browning GP de calibre 9 mm, simplement<br />

marqué : BROWNING SYSTEM UTAH. On ne saurait sans doute trouver meilleur<br />

hommage rendu à ce grand classique de l’arme de poing.<br />

•<br />

Ci-dessus,<br />

le pistolet semi-automatique FN-Browning modèle 1900<br />

et, à gauche, le pistolet Glock modèle 17.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

18<br />

Éliane peDronCini<br />

Bibliothécaire<br />

à la Bibliothèque Ulysse-Capitaine<br />

(fonds patrimoniaux de la Ville de <strong>Liège</strong>)<br />

Petite histoire d’une grande encyclopédie<br />

L’Encyclopédie méthodique<br />

La Bibliothèque Ulysse Capitaine<br />

conserve dans sa réserve précieuse<br />

ancienne un exemplaire de l’Encyclopédie<br />

méthodique, dite « Panckoucke ».<br />

Cette publication, composée de 206<br />

volumes, dont 6 volumes de planches,<br />

a fait l’objet d’une campagne de<br />

restauration.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

19<br />

Le projet de l’Encyclopédie méthodique dite « Panckoucke » est lancé en 1782 par<br />

Charles-Joseph Panckoucke sous forme de souscription. Les 102 livraisons forment<br />

une cinquantaine de dictionnaires, leur nombre varie selon le titre retenu pour certains<br />

dictionnaires qui sont composés d’une partie principale et de parties annexes<br />

plus ou moins développées.<br />

Cette encyclopédie compte plus de 200 volumes publiés par Charles-Joseph<br />

Panckoucke de 1782 à 1793, en collaboration avec Clément Plomteux de 1782 à<br />

1789, puis seul de 1789 à 1793, ensuite par son gendre Henri Agasse de 1794 à<br />

1815 et enfin par Antoinette-Pauline Agasse, veuve d’Henri Agasse et fille aînée de<br />

Charles-Joseph Panckoucke, entre 1816 et 1832.<br />

Charles-Joseph Panckoucke (1736-1798)<br />

En 1757, Charles-Joseph Panckoucke reprend la librairie paternelle à Lille. En 1761,<br />

il est nommé « maître-libraire » à Paris, après avoir effectué un apprentissage chez<br />

André François Le Breton, l’imprimeur de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert.<br />

En 1768, il devient le libraire-éditeur officiel de l’Imprimerie royale et de l’Académie<br />

royale des sciences. À la fin du xviii e siècle, il est un acteur important sur le marché<br />

du livre.<br />

En 1759, il a déjà fondé son premier journal et est considéré comme ayant<br />

constitué le premier « empire de presse » français. Il achète en 1778 le « Mercure de<br />

France » qui absorbe différents périodiques. En mai 1778, il obtient le privilège exclusif<br />

des journaux politiques. Pendant la Révolution, sans aucun embarras, il est propriétaire<br />

à la fois de journaux aux opinions contraires, le « Mercure » (monarchiste) et<br />

le « Moniteur universel » (patriote). Entre autres grandes entreprises éditoriales, il publie<br />

les œuvres de Buffon et différents dictionnaires et encyclopédies ; il se charge du<br />

Supplément de la Grande Encyclopédie, de Diderot et d’Alembert, ce qui constitue<br />

pour lui une très bonne opération commerciale. Il est aussi auteur et traducteur. À<br />

Paris, il publie souvent sous la raison « (Librairie de l’) Hôtel de Thou, rue des<br />

Poitevins » ou « Bureau du Mercure, hôtel de Thou… ». À partir de 1790 , il s’associe<br />

à son gendre Henri Agasse à qui il cédera son fonds et son imprimerie en 1794.<br />

En 1768, il entreprend une réédition de la Grande Encyclopédie de Diderot<br />

et d’Alembert dont il avait racheté les droits, surnommée l’Encyclopédie du Lac,<br />

ou Encyclopédie Pellet. Or, en janvier 1778, un obscur petit libraire d’origine parisienne<br />

nommé Jean-Jacques Devéria, installé à <strong>Liège</strong> derrière le palais, pour cette<br />

opération commerciale, annonce à l’Europe son projet de compléter l’encyclopédie<br />

par une nouvelle encyclopédie dite « méthodique » intitulée Edition complette de<br />

l’Encyclopédie rangée par ordre de matiere et dans laquelle on a fondu tous les<br />

supplements, plus maniable en format in-8°, thématique, et qui de plus comprendrait<br />

toutes les nouvelles découvertes et inventions. Il recherche des associés pour cette<br />

entreprise, de préférence liégeois. Ce sera avec Bassompierre, mais leur projet<br />

n’aboutira jamais.<br />

Panckoucke est d’abord très critique envers ce projet, craignant surtout la<br />

concurrence avec son Encyclopédie du Lac. Il s’attaque d’abord à Devéria qu’il


accuse de ne pas disposer de crédit suffisant ni de la notoriété que nécessite son<br />

entreprise, puis au projet lui-même qu’il qualifie d’« entreprise chimérique ». Mais en<br />

vain : il est finalement contraint de s’associer avec lui. Puis il lui rachète les droits et<br />

lance son Encyclopédie méthodique qu’il présente comme « un superbe ouvrage et<br />

la vraie Encyclopédie ». Pour cette opération, il s’associe avec Clément Plomteux,<br />

imprimeur liégeois, avec qui il avait déjà travaillé pour les éditions in-quarto de l’Encyclopédie<br />

de Diderot et d’Alembert.<br />

Pourquoi Clément Plomteux ?<br />

Aux yeux de Panckoucke, Plomteux est un concurrent important et influent. Il est en<br />

effet imprimeur des États, commissaire de la cité, sous-mayeur et conseiller intime<br />

du prince-évêque en 1779. Il jouit donc de privilèges étendus. Sa production est<br />

importante. De plus il est gestionnaire principal de la salle de jeux de Spa et dispose<br />

de ce fait de capitaux importants. Autre avantage : il est liégeois et représente ainsi<br />

la parade à l’association des « Liégeois » Devéria et Compagnie.<br />

Les premiers volumes paraissent en 1782 à Paris et à <strong>Liège</strong>, chez Plomteux.<br />

À partir de 1788, ce dernier n’apparaît plus que comme libraire-dépositaire. En<br />

1789, l’association est rompue, à la suite de nombreux différends commerciaux, et<br />

Panckoucke doit alors racheter les droits à son associé. À partir de 1790, les<br />

volumes ne sont imprimés qu’à Paris. En 1794, Panckoucke a publié plus de 100<br />

volumes, c’est-à-dire la moitié de l’ensemble de l’œuvre. Il vend alors son entreprise<br />

à son gendre Henri Agasse. Le dernier volume qui clôture le projet paraît en 1832.<br />

Si cette publication lui apporta gloire et honneurs, elle ne fut cependant pas<br />

très rentable. En effet, la révolution réduisit considérablement le nombre des souscripteurs.<br />

Pourquoi cette encyclopédie ?<br />

L’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert était critiquée tant sur la forme que sur le<br />

fond. La structure alphabétique découpait des savoirs complémentaires ou en rapprochait<br />

d’autres, sans aucun rapport. Cette confusion ne permettait pas au lecteur<br />

de trouver une information complète et pertinente. De plus, l’étendue des connaissances<br />

s’accélérait en cette seconde partie du xviii e siècle.<br />

L’objectif de Panckoucke était de corriger cette méthode et d’élaborer un<br />

dictionnaire spécialisé propre à chaque thème. Le nombre de thèmes varia avec le<br />

temps. De 27 thèmes au départ, on en évoquait 49 dans le prospectus de 1789.<br />

Ses collaborateurs étaient issus de la jeune et nouvelle génération de scientifiques,<br />

juristes, médecins, naturalistes et ingénieurs. Peu de philosophes et gens de lettres.<br />

Le titre complet est : L’Encyclopédie méthodique ou par ordre de matières<br />

par une société de gens de lettres, de savants et d’artistes ; précédée d’un Vocabulaire<br />

universel, servant de Table pour tout l’Ouvrage, ornée des Portraits de MM.<br />

Diderot et d’Alembert, premiers Éditeurs de l’Encyclopédie. On compte 206 volumes<br />

avec une page de titre complète pour chacun, environ 125 350 pages de texte et<br />

6 300 planches. Elle est ainsi cinq fois plus grande que l’Encyclopédie de Diderot et<br />

d’Alembert (25 000 pages).<br />

Les matières traitées sont :<br />

Agriculture (7 vol.), Amusements des sciences (1 vol.), Antiquités et mythologie (5 vol.), Architecture (3 vol.), Art aratoire et du<br />

jardinage (1 vol.), Art militaire (4 vol.), Artillerie (1 vol.), Arts et métiers mécaniques (8 vol.), Assemblée nationale constituante<br />

(1 vol.), Beaux-arts (2 vol.), Botanique (13 vol.), Espèces de chasses (1 vol.), Chimie (6 vol.), Chirurgie (2 vol.), Commerce (3 vol.),<br />

Économie politique (4 vol.), Encyclopediana, ou Dictionnaire encyclopédique des ana, … (1 vol.), Arts académiques, équitation,<br />

escrimes, danse et art de nager (1 vol.), Finances (3 vol.), Forêts et bois (1 vol.), Géographie ancienne (3 vol.), Géographie<br />

moderne (3 vol.), Géographie physique (5 vol.), Atlas encyclopédique (2 vol.), Grammaire et littérature (3 vol.), Histoire (6 vol.),<br />

Histoire naturelle (14 vol.), Jurisprudence (10 vol.), Logique et métaphysique (4 vol.), Manufactures, arts et métiers (4 vol.),<br />

Marine (3 vol.), Mathématiques (3 vol.), Médecine (13 vol.), Musique (2 vol.), Espèces de pêche (1 vol.), Philosophie ancienne et<br />

moderne (3 vol.), Physique (4 vol.), Anatomie et physiologie (4 vol.), Théologie (3 vol.), Vocabulaire universel (jamais paru).<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

20<br />

Bibliographie<br />

- Suzanne tuCoo-CHala, Charles-Joseph Panckoucke<br />

et la librairie française : 1736-1798, Pau, Marrimpouey<br />

Jeune ; Paris, J. Touzot, 1977.<br />

- Pol-P. Gossiaux, « L’Encyclopédie “ liégeoise ” (1778-<br />

1792) et l’Encyclopédie nouvelle ». In : Livres et lumières<br />

au Pays de <strong>Liège</strong> : 1730-1830 / sous la direction de<br />

Daniel DroixHe, Pol-P. Gossiaux, Hervé Hasquin et<br />

Michèle mat-Hasquin, <strong>Liège</strong>, Desoer, 1980.<br />

- Dictionnaire encyclopédique du livre. Sous la direction<br />

de Pascal FouCHé, Daniel péCHoin, Philippe sCHuwer ;<br />

et la responsabilité scientifique de Pascal FouCHé,<br />

Jean-Dominique mellot, Alain nave..., Paris,<br />

Éd. du Cercle de la librairie, 2005.<br />

- Catalogue de la Bibliothèque nationale de France :<br />

notices sur l’Encyclopédie et sur Panckoucke.<br />

- www.haraldfischerverlag.de<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

21<br />

On remarque que c’est la rubrique médecine qui comporte le plus de volumes<br />

(13), auxquels il faut y ajouter les 2 volumes de chirurgie.<br />

Cette Encyclopédie méthodique présente dans les bibliothèques patrimoniales<br />

a été souvent confondue avec l’Encyclopédie de Diderot. Cela provient certainement<br />

des mentions des noms de Diderot et d’Alembert sur la page de faux-titre.<br />

Il n’est pas non plus aisé d’en constituer une collection complète. Peu d’institutions<br />

en possèdent l’intégrale.<br />

Moins bien considérée que l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, moins<br />

complète aussi, elle reste cependant un témoignage primordial de l’époque pour les<br />

changements révolutionnaires qui sont apparus dans les domaines des sciences,<br />

de la culture, de la politique et de la société.<br />


Conservation & restauration<br />

Une des missions des musées est de conserver,<br />

préserver, entretenir et donc permettre<br />

aux générations futures de découvrir la<br />

richesse des collections dans un état de<br />

conservation qui ne mette pas en péril leurs<br />

états esthétique et historique. La réalisation<br />

de cette tâche ne peut se faire sans une<br />

interdisciplinarité et une étroite collaboration<br />

– voire une complicité – avec l’ensemble du<br />

personnel du musée, du conservateur au<br />

gardien en passant par les préparateurs et<br />

les techniciens de surface. Qui mieux que<br />

ceux qui sont au contact quotidien des objets<br />

peut signaler un problème en devenir ?<br />

Tout visiteur connaît le restaurateur, muni<br />

d’instruments de précision et armé de patience,<br />

ôtant un vernis ou retouchant une<br />

peinture. Cependant, la profession de conservateur-restaurateur<br />

comprend aussi<br />

d’autres tâches, peut-être moins gratifiantes<br />

car moins visibles, et pourtant aussi importantes<br />

pour la préservation du patrimoine.<br />

Conservation préventive et curative<br />

Si la première insiste sur l’importance des<br />

conditions de conservation, la gestion des<br />

risques et l’élimination des causes de dégradations<br />

(aucun musée n’est un lieu sans danger),<br />

la seconde participe d’une sauvegarde des<br />

œuvres par une action sur le bien menacé.<br />

Par exemple les opérations de fixage de<br />

couches picturales soulevées, le collage de<br />

morceaux fracturés, le dépoussié-rage, etc.<br />

Mais la conservation est aussi présente dans<br />

la préparation des prêts et montages d’exposition<br />

: conseils quant aux conditions de<br />

conservation, d’emballage et de transport,<br />

quant à l’opportunité de prêt d’œuvres fragiles,<br />

ou encore rédaction de constats d’état.<br />

Gestion des réserves<br />

Cet iceberg souvent oublié – mais qui concerne<br />

généralement 75 % d’une collection<br />

– demande un mode de stockage adéquat,<br />

récolements et visites régulières pour s’assurer<br />

de l’état de conservation des œuvres.<br />

Retouches<br />

La restauration concerne davantage l’intervention<br />

esthétique sur un bien culturel : enlèvement<br />

des couches de vernis oxydées et<br />

brunies, retouches des lacunes, etc. Ce sont<br />

là les opérations certes les plus visibles et les<br />

plus satisfaisantes pour l’égo de l’intervenant<br />

mais qui ne constituent pas le fondement du<br />

travail du conservateur-restaurateur. En effet,<br />

la primauté doit être donnée à la conservation<br />

et les opérations de restauration sont généralement<br />

longues : le temps nécessaire pour<br />

de telles interventions peut être utilisé pour<br />

conserver un plus grand nombre d’œuvres.<br />

Gestion économique du patrimoine<br />

Dans ce domaine, une priorité est accordée<br />

à la conservation préventive et curative (et<br />

donc au mode de stockage, d’exposition, de<br />

condition climatique, etc.) qui est économiquement<br />

plus rentable que la restauration. Autrement<br />

dit, et en dehors du contexte d’une<br />

exposition temporaire, la restauration d’une<br />

seule pièce demande autant d’énergie et de<br />

moyens que la conservation de plusieurs<br />

autres. N’est-ce pas à méditer en ces temps<br />

de crise et de budgets difficiles ?<br />

Étude scientifique<br />

La conservation-restauration, c’est aussi la<br />

chance de travailler dans l’intimité des<br />

œuvres. Un traitement de conservation et/ou<br />

de restauration constitue l’opportunité de<br />

procéder à l’étude scientifique des œuvres.<br />

Corinne van Hauwermeiren<br />

Atelier de conservation & restauration<br />

Musées de <strong>Liège</strong><br />

Un duo complémentaire<br />

Un « conservateur-restaurateur » n’est pas<br />

apte à traiter tout type de bien culturel. Les<br />

formations actuellement dispensées<br />

conduisent à des professionnels compétents<br />

pour une typologie particulière d’œuvres<br />

d’art : peinture, sculpture, céramique, papier,<br />

métal, etc.<br />

L’atelier de conservation & restauration<br />

des musées de la Ville de <strong>Liège</strong> se compose<br />

d’un duo couvrant deux disciplines :<br />

Audrey Jeghers, conservatrice-restauratrice<br />

de peintures de chevalet (ÉNSAV, La Cambre)<br />

et Corinne Van Hauwermeiren (Paris I,<br />

Sorbonne), conservatrice-restauratrice de<br />

sculptures polychromes et cadres.<br />

Pour le traitement d’autres médias tels que<br />

le verre, la céramique ou le métal, le service<br />

fait appel à des prestataires extérieurs<br />

spécifiques.<br />

Nos formations respectives nous<br />

permettent toutefois de formuler les conseils<br />

de conservation préventive pour l’ensemble<br />

des biens culturels conservés au sein des<br />

collections liégeoises. Cela se fait d’ailleurs<br />

en collaboration étroite avec les préparateurs<br />

qui connaissent bien les collections depuis<br />

de nombreuses années.<br />

Exemples de travaux réalisés<br />

• Traitement de la couche picturale d’œuvres partant en exposition : la Fête à Bacchus attribuée à<br />

Jan brueGHel et Hendrick van baelen ; l’Intérieur d’église de Peter neeFs ; le Portrait de Charles Grétry.<br />

• Interventions plus ponctuelles telles que la réintégration d’une retouche décolorée :<br />

Le Château de Comblat de Paul siGnaC ; œuvres de Richard Heintz ou Edgard sCauFlaire.<br />

• Traitement des cadres de Sémiramis de köHler, du Paysage d’Anthonie waterloo, etc.<br />

• Étude technologique du Trône de Grâce (xv e siècle) avec la découverte de nombreux restes de polychromie<br />

masqués par une épaisse couche de saletés.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

22<br />

Johan muyle, Le second martyre de la Piéta, 1987.<br />

Chèvre empaillée, fauteuil roulant, sangle.<br />

Exposition Belgica 1987 à Rome, Espace 251 Nord.<br />

Photo © Damien Hustinx.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

23<br />

Pauline bovy<br />

Conservatrice, musées de <strong>Liège</strong><br />

Détachée au Cabinet de la Culture<br />

Les collections se développent, se soignent, s’exportent<br />

Vie des collections dans les musées communaux en 2<strong>01</strong>0.<br />

• 45 œuvres de Raoul ubaC (Cologne, 1910<br />

- Dieudonné, 1985), ont été léguées par<br />

Alain et Jacqueline Trutat.<br />

• 11 œuvres de Gilles-François Closson<br />

ont été acquises grâce à l’intervention du<br />

Fonds Courtin-Bouché (cf. p. 7).<br />

• Des orfèvreries aux poinçons de <strong>Liège</strong> et<br />

un remarquable cabinet « millefiori » du xvii e<br />

siècle ont été mis en dépôt au Grand<br />

Curtius par les Sœurs de la Congrégation<br />

de Saint-Charles Borromée.<br />

• Des gravures de Thierry wesel, du Groupe<br />

Impressions, des dessins d’Yvon aDam ont<br />

été donnés au Cabinet des Estampes.<br />

• À la suite de l’exposition « Éric Fourez.<br />

Peintures 2006-2009. Le même infiniment »,<br />

présentée au MAMAC en 2009, l’artiste a<br />

donné au musée une huile sur toile, Traces.<br />

• Le portrait présumé de Théophile René<br />

Laennec, inventeur du stéthoscope, réalisé<br />

par Antoine ansiaux (<strong>Liège</strong>, 1764 - Paris,<br />

1840) a été mis en dépôt.<br />

• À l’initiative du conservateur, deux armes<br />

ont rejoint le département des Armes du<br />

Grand Curtius : un pistolet-carabine Dartig<br />

et un fusil de chasse du fabricant Mahillon<br />

de Bruxelles.<br />

• La Ville de <strong>Liège</strong> est devenue propriétaire<br />

du Fonds Jacques izoarD (<strong>Liège</strong>, 1936-<br />

2008), poète et essayiste de renommée<br />

internationale.<br />

• 11 œuvres ont été acquises pour un<br />

montant total de 86 200 e.<br />

• Dans le cadre de l’exposition consacrée à<br />

Raoul ubaC, une gouache sur papier a été<br />

achetée à la galerie Maeght : Thème de<br />

l’Arbre, 1963.<br />

• La Ville a acquis une œuvre de Johan<br />

muyle (Charleroi, 1956), proposée par<br />

Espace 251 Nord, Le second martyre de la<br />

Piéta, sculpture d’assemblage (1986).<br />

L’artiste, particulièrement représentatif de la<br />

scène actuelle des arts plastiques de<br />

Belgique, connu bien au-delà de nos<br />

frontières, utilise la métaphore pour<br />

évoquer des éléments autobiographiques.<br />

• Dans le cadre de l’Espace Jeunes Artistes,<br />

Sophie leGros (Huy, 1976) a exposé en<br />

novembre 2<strong>01</strong>0 à la Salle Saint-Georges.<br />

Le grand rouge et L’abeille, acrylique et<br />

fusain sur toile, complètent depuis peu les<br />

collections contemporaines. C’est également<br />

le cas de la série Tokyo 96 de l’artiste<br />

liégeois Jean-Marie pieron, portraits des<br />

jazzmen Jack Dejohnette, Keith Jarret et<br />

Gary Peacock, ou de la Carapace n° 3 de<br />

Bénédicte van Caloen.<br />

• L’œuvre de Brigitte Corbisier achetée par<br />

la Ville figurera dans l’exposition qui lui sera<br />

consacrée cet été au Cabinet des<br />

Estampes et des Dessins. Les collections<br />

de celui-ci se sont également enrichies<br />

d’une série de gravures à la manière noire<br />

de Maria paCe.<br />

• Plusieurs œuvres des musées communaux<br />

ont été traitées en interne par les restauratrices<br />

Audrey Jeghers et Corinne Van<br />

Hauwermeiren ; d’autres ont été confiées à<br />

des restaurateurs indépendants, pour un<br />

montant total de près de 45 000 e.<br />

C’est le cas d’un ensemble de manuscrits<br />

de la Bibliothèque Ulysse Capitaine,<br />

de 13 œuvres du fonds d’art ancien,<br />

de 9 peintures du musée d’Art wallon et<br />

d’un ensemble de dessins du Cabinet des<br />

Estampes et des Dessins.<br />

• Près d’une centaine d’œuvres ont été<br />

prêtées à des expositions étrangères.


Agenda des expositions temporaires<br />

José Fosty<br />

> p. 26<br />

Les experts à Arlon<br />

> p. 26<br />

Christian Otte<br />

> p. 26<br />

Fusils de papier<br />

> p. 27<br />

Paroles de gardiens<br />

> p. 27<br />

Curtius Circus<br />

> p. 27<br />

<strong>Liège</strong> sort ses bulles<br />

> p. 28<br />

Armand Rassenfosse<br />

> p. 28<br />

Jeunes artistes<br />

> p. 29<br />

Jardin d’hiver<br />

> p. 32<br />

Biennale de Gravure<br />

> p. 36<br />

Sculptures musicales<br />

L’eau forte est à la mode<br />

> p. 29<br />

Georg Baselitz<br />

> p. 37<br />

Journée de la Femme<br />

Palimpsestes<br />

Reliure en habits<br />

février mars avril<br />

Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S<br />

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30<br />

février mars avril<br />

Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S<br />

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30<br />

février mars avril<br />

Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S<br />

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30<br />

février mars avril<br />

Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S<br />

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30<br />

février mars avril<br />

Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S<br />

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

24<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

25


José Fosty<br />

Dessins clandestins<br />

du camp de Buchenwald<br />

Grand Curtius (palais Curtius)<br />

Du 4 février au 3 avril<br />

Né à Dalhem en 1919, José Fosty se destine<br />

à une carrière artistique mais, dès l’âge de<br />

19 ans, il est mobilisé. Blessé, il est évacué<br />

sur Paris ; puis, lors de la capitulation belge,<br />

il regagne Bruxelles et rejoint le groupe du<br />

Service des renseignements et actions de la<br />

Résistance appelée « Braverie ». Il distribue<br />

des journaux clandestins. Dénoncé, il est<br />

emmené en octobre 1942 au siège de la<br />

Gestapo, puis au camp de concentration de<br />

Buchenwald, où il survivra durant trois ans,<br />

de 1942 à 1945. La résistance culturelle<br />

s’organise autour de peintres, de musiciens<br />

et de poètes, il fait la connaissance des<br />

membres du Parti communiste français.<br />

Après la guerre, il côtoie à Paris CoCteau et<br />

léGer. Rentré à Visé, il devient fabricant de<br />

jouets en bois, puis trieur de nuit à la Régie<br />

des Postes. Il continue une œuvre de<br />

peinture dans la veine surréaliste.<br />

À la fin des années nonante, José Fosty<br />

a fait don au Cabinet des Estampes de 151<br />

dessins au trait esquissés au crayon sur des<br />

supports de fortune. En cachette, à<br />

Buchenwald, l’artiste a croqué par centaines<br />

des prisonniers lisant, dormant,<br />

écrivant, au repos ou au travail ; certains<br />

lieux aussi, comme le lavoir, le réfectoire,<br />

le four crématoire, le mirador. Ses compagnons<br />

de camp lui inspirent quelques<br />

portraits : le dessinateur René salme, le<br />

poète André verDet, le violoniste Maurice<br />

Hewitt. Seuls sont conservés les croquis<br />

réalisés après septembre 1944 ; quelque<br />

300 autres ont été détruits lors d’un<br />

bombardement.<br />

RR<br />

En collaboration avec les<br />

Territoires de la Mémoire.<br />

Les experts à Arlon<br />

Enquête policière sur des fouilles<br />

Grand Curtius (palais Curtius)<br />

Du 4 février au 3 avril<br />

L’exposition présente de manière originale<br />

des objets issus des fouilles récentes (2003 à<br />

aujourd’hui) d’Orolaunum vicus, l’antique<br />

bourgade romaine d’Arlon. À la manière<br />

d’une enquête policière, les archéologues<br />

interprètent les découvertes en s’aidant des<br />

sciences auxiliaires de l’archéologie (étude<br />

des pollens et des restes végétaux, étude<br />

des déchets osseux, analyse des composantes<br />

des pâtes céramiques…).<br />

Une initiative de la DG04<br />

(Service public de Wallonie).<br />

Christian Otte<br />

Exposition monographique de l’artiste<br />

Grand Curtius (palais Curtius)<br />

Du 4 février au 3 avril<br />

« Longtemps, ma peinture a exprimé mon<br />

rapport en distorsion avec l’être humain,<br />

cette créature autant haïssable qu’admirable,<br />

repoussante qu’attirante, effroyable qu’adorable,<br />

dans ses comportements et aspirations.<br />

[…] Je me suis lassé de l’homme et de<br />

sa représentation alors que naissait en moi<br />

une tendresse pour l’animal vache. Y ai-je<br />

pressenti une métaphore d’une large frange<br />

de l’humanité ? La vache donne tout, on lui<br />

prend tout, elle est pacifique à en mourir<br />

– son regard révèle une infinie tristesse, une<br />

profonde nostalgie d’un paradis perdu, de<br />

l’époque lointaine, quand, gazelle, elle courait<br />

dans les herbages aux larges horizons, avant<br />

le temps des hommes. »<br />

Christian otte (1943-2005)<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

26<br />

Expositions temporaires<br />

Fusils de papier<br />

Catalogues anciens d’armuriers liégeois<br />

Grand Curtius (galerie des Armes)<br />

Du 4 février au 7 mars<br />

Présentation de catalogues de manufactures<br />

liégeoises du xix e siècle et du<br />

début du xx e siècle, rarement exposés<br />

à cause de leur fragilité. Ces anciens<br />

catalogues, imprimés ou réalisés à la<br />

main et coloriés, donnent une idée de<br />

l’extraordinaire variété d’armes que<br />

pouvaient alors offrir les armuriers de<br />

<strong>Liège</strong>.<br />

De gauche à droite :<br />

José Fosty<br />

Les experts à Arlon<br />

Christian otte<br />

Fusils de papier<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

27<br />

Paroles de gardiens<br />

Grand Curtius (palais Curtius)<br />

Du 9 avril au 12 juin<br />

Mise en évidence des paroles de gardiens<br />

des musées de la Ville de <strong>Liège</strong>, confrontés<br />

en permanence à l’art et à l’histoire.<br />

Comment réagit-on quand on n’est pas dans<br />

la découverte d’une œuvre, mais dans sa<br />

fréquentation imposée ? Quel regard<br />

porte-t-on sur le regard des visiteurs ?<br />

Curtius Circus<br />

Photos des étudiants l’École supérieure<br />

des Arts de la Ville de <strong>Liège</strong><br />

Grand Curtius (palais Curtius)<br />

Du 22 avril au 30 avril<br />

Projet de classe développé sur l’année et<br />

basé sur l’appropriation et la réinterprétation<br />

du Grand Curtius, de ses bâtiments et de<br />

ses collections.


<strong>Liège</strong> sort ses bulles<br />

Les 72 planches originales de bande dessinée des collections<br />

du Cabinet des Estampes et des Dessins<br />

Salle Saint-Georges<br />

Jusqu’au dimanche 27 mars 2<strong>01</strong>1<br />

À la fin des années 70, alors qu’aucune<br />

collection publique de BD n’existait encore<br />

en Belgique, l’asbl Signes et Lettres et<br />

Jean-Maurice Dehousse, ministre de la<br />

Culture française et amateur éclairé, rassemblent<br />

les grands noms de la bande<br />

dessinée. Aujourd’hui conservée au Cabinet<br />

des Estampes et des Dessins, cette collection<br />

de planches originales est une des plus<br />

importantes en Belgique.<br />

La préparation de l’exposition a conduit<br />

à réinterroger le fonds à la lumière des nouvelles<br />

sources d’information : les références<br />

scientifiques des planches rassemblées à<br />

l’occasion de leur exposition en 1996 ont<br />

considérablement évolué, notamment par le<br />

biais de l’Internet. Ainsi, la planche simplement<br />

intitulée jusqu’ici Blake et Mortimer<br />

s’est révélée être l’apparition emblématique<br />

d’Olrik dans La Marque jaune. Ce choix<br />

judicieux dans la sélection des dessins se<br />

remarque également dans d’autres planches,<br />

dont celle de Tintin et la fusée lunaire, celle<br />

de Johan et Pirlouit avec les Schroumpfs, ou<br />

celle de Lucky Luke, accompagné de Jolly<br />

Jumper, de Rantanplan et des Daltons.<br />

Ces planches originales se présentent<br />

pour la plupart sous un format A2 (42 x 59,4 cm).<br />

Elles sont particulièrement instructives pour<br />

leurs « repentirs » : lorsque l’auteur n’est pas<br />

satisfait de son tracé à l’encre noire, il applique<br />

des retouches à la gouache blanche<br />

ou recouvre l’erreur d’un papier pour redessiner<br />

un détail.<br />

Dans les marges, on trouve parfois le<br />

titre de l’histoire dont la planche est issue,<br />

ou le numéro du magazine auquel elle est<br />

destinée. Certains auteurs ont laissé des<br />

annotations à l’adresse de l’imprimeur, parfois<br />

un cachet demandant le retour de la planche<br />

après publication. Il arrive que les bulles ne<br />

soient pas encore remplies, véritables images<br />

sans son, ou que certaines pages soient déjà<br />

recouvertes d’un calque reprenant les indications<br />

de couleur pour le dessin imprimé. Pour<br />

éviter des erreurs dans l’ordre des pages, le<br />

dessinateur numérote ses planches dans la<br />

dernière case, chacun à sa manière : ainsi<br />

Franquin, au lieu de numéroter les planches<br />

au sein d’une même histoire, les numérote<br />

d’une histoire à l’autre sans interruption.<br />

Au delà du plaisir d’approcher les originaux<br />

de grands maîtres de la BD, cette<br />

exposition est l’occasion de parfaire notre<br />

compréhension de leurs méthodes de création<br />

et d’apercevoir la difficulté du travail en<br />

amont que les planches publiées ne laissent<br />

pas deviner.<br />

« <strong>Liège</strong> sort ses bulles » s’accompagne<br />

d’un programme scientifique et pédagogique<br />

ouvert à tous qui permettra d’avancer dans<br />

la connaissance des auteurs. Il a été élaboré<br />

par le Service éducatif de la Ville, l’École<br />

supérieure des Arts Saint-Luc (Ph. Sadzot),<br />

l’École supérieure des Arts de la Ville de<br />

<strong>Liège</strong> (J. Denoël) et le Service d’art contemporain<br />

de l’Université de <strong>Liège</strong> (E. Dejasse).<br />

Carmen Genten<br />

Historienne de l’art<br />

Musées de <strong>Liège</strong><br />

Armand Rassenfosse<br />

Salle Saint-Georges<br />

Du 8 avril au 5 juin 2<strong>01</strong>1<br />

Le peintre, graveur et dessinateur liégeois<br />

Armand rassenFosse (1862-1914) est un<br />

des artistes majeurs en Région wallonne,<br />

réputé principalement pour ses gravures et<br />

tableaux représentant la femme dans son<br />

intimité. Claire de Rassenfosse (1922-2009),<br />

en hommage à son grand-père, a souhaité<br />

contribuer à la mise en valeur de son œuvre<br />

en créant le Fonds Armand Rassenfosse.<br />

C’est directement de la maison-atelier de<br />

l’artiste que proviennent les œuvres exposées,<br />

centrées sur les différentes techniques<br />

que rassenFosse a particulièrement étudiées.<br />

Sont présentées certaines matrices en<br />

relation avec les planches et leurs différents<br />

états, ainsi que des outils et du matériel de<br />

son atelier de gravure qui viennent compléter<br />

l’ensemble d’une centaine d’œuvres.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

28<br />

De gauche à droite.<br />

mauriCe tillieux, Gil JourDan,<br />

Le Chinois à deux roues, pl. 20.<br />

© Tillieux, Dupuis 2<strong>01</strong>1.<br />

Expositions temporaires<br />

Armand rassenFosse, Allégorie, 1898.<br />

Aquatinte.<br />

Sophie lanGoHr, Art Make-up, 2<strong>01</strong>0.<br />

120 x 80 cm, photographie.<br />

Frédéric platéus, Solid Rock, 2<strong>01</strong>0.<br />

220 x 180 x 140 cm, MDF,<br />

peinture carrosserie, acier inoxydable.<br />

Courtesy Espace Uhoda.<br />

L’eau-forte est à la mode<br />

Cabinet des Estampes et des Dessins<br />

Jusqu’au dimanche 20 février 2<strong>01</strong>1<br />

Le constat « L’eau-forte est à la mode »,<br />

exprimé par Charles bauDelaire en 1862<br />

dans La Revue anecdotique, s’applique<br />

parfaitement à la région liégeoise, à quelques<br />

années près.<br />

Dès les années 1870, on assiste à un<br />

véritable renouveau de la gravure, sous<br />

l’impulsion de deux maîtres aquafortistes :<br />

Adrien De witte (1850-1935) et François<br />

maréCHal (1861-1945). L’un et l’autre ont<br />

libéré l’eau-forte de son rôle de simple procédé<br />

de reproduction. Convaincus que la<br />

gravure est une œuvre d’art à part entière, au<br />

même titre que la peinture ou la sculpture, ils<br />

rejoignent le point de vue de bauDelaire qui<br />

affirmait que l’eau-forte était faite « pour<br />

glorifier l’individualité de l’artiste et trahir<br />

l’homme spontané ».<br />

De witte réalise ses premières eauxfortes<br />

en 1870, sur le conseil d’un ami : « Le<br />

dessin n’est rien, il nous faut l’eau-forte ! ».<br />

maréCHal n’aborde la gravure qu’en 1888<br />

mais il aura une production impressionnante.<br />

Il sera le pilier de l’atelier de gravure créé à<br />

l’Académie des Beaux-Arts en 1921.<br />

Le CED possède le fonds le plus complet<br />

de leur abondante production gravée.<br />

RR<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

29<br />

Jeunes artistes<br />

Salle Saint-Georges<br />

The Plug / David Brognon du 3 au 28 février<br />

Tatiana Klejniak du 3 au 31 mars<br />

Kresh du 7 au 30 avril<br />

La Ville de <strong>Liège</strong> offre à des plasticiens<br />

liégeois la possibilité d’accéder à un espace<br />

d’exposition spécifique, la salle Saint-Georges.<br />

Ce projet s’adresse aux artistes, mais<br />

aussi à ceux dont la démarche artistique,<br />

indépendamment de l’âge, est récente ou<br />

nouvelle et qui n’ont pas ou ont peu exposé<br />

à titre personnel. Les œuvres présentées<br />

doivent être en accord avec les priorités d’un<br />

musée d’art contemporain.<br />

Il s’agit bien d’accroître la visibilité des<br />

artistes, mais aussi de leur donner l’occasion<br />

de se confronter à un espace précis. Toutes<br />

les disciplines des arts plastiques sont prises<br />

en compte (peinture, sculpture, arts graphiques,<br />

textile, multimédia, installation, vidéo, ...).<br />

Les candidats doivent être domiciliés et/<br />

ou résider et/ou étudier et/ou avoir étudié à<br />

<strong>Liège</strong>. Un comité de sélection se réunit plusieurs<br />

fois par an et est seul juge dans le<br />

choix des artistes sélectionnés.<br />

Renseignements : « Jeunes artistes »,<br />

Cabinet de la Culture de la Ville de <strong>Liège</strong>.<br />

92, rue Féronstrée - 4000 <strong>Liège</strong>.<br />

Téléphone : +32 (0)4 221 93 23.<br />

jeunesartistes@liege.be<br />

Prix de la Création liégeoise<br />

dans le domaine des arts plastiques<br />

Lancé en 2009 par la Ville de <strong>Liège</strong>, le Prix<br />

de la Création liégeoise dans le domaine des<br />

arts plastiques a pour vocation de découvrir,<br />

d’encourager et de soutenir un jeune talent<br />

liégeois dans les diverses formes d’expression<br />

de l’art contemporain. Le premier prix<br />

est doté de 6 000 e et le deuxième de 4 000 e.<br />

Le sujet proposé par l’artiste est libre.<br />

Le premier prix 2<strong>01</strong>0 a été décerné à<br />

Frédéric platéus (<strong>Liège</strong>, 1976). « Le point de<br />

départ usuel dans le discours sur le travail de<br />

Frédéric platéus est son affiliation au milieu<br />

du graffiti […]. Pourtant, la généalogie de cet<br />

enfant terrible est nettement plus complexe<br />

et surtout insolite. Même si la mixité des<br />

genres et l’hybridation des références sont<br />

aujourd’hui monnaie courante en art, le<br />

travail de Frédéric s’éloigne nettement des<br />

balises herméneutiques contemporaines.<br />

Il s’agit d’avantage ici d’explorer un univers<br />

parallèle, d’embarquer pour un trip visuel<br />

dans un monde de formes et couleurs<br />

mouvantes » (Devrim bayar, 2<strong>01</strong>0).<br />

Le second prix a été décerné à Sophie<br />

lanGoHr (Chênée, 1974) : elle poursuit<br />

depuis quelques années un travail sur les<br />

codes et les genres artistiques ; elle s’attache<br />

à recycler nos imageries et manipule leurs<br />

fondements idéologiques dans des perspectives<br />

décalées. L’artiste a proposé une série<br />

de photographies intitulées Art make-up où<br />

elle parodie les publicités pour les cosmétiques.<br />

Cette galerie de portraits fait aussi<br />

référence à la peinture traditionnelle, notamment<br />

en matière de cadrage et de lumière.<br />

Chaque modèle est maquillé, non pas avec<br />

des produits cosmétiques mais avec des<br />

fournitures artistiques ; le maquillage est<br />

inadapté et donc exagérément visible et<br />

l’artifice mis en évidence.<br />

Marie remaCle<br />

Historienne de l’art<br />

Cabinet de la Culture


Cinémusée : la rencontre du cinéma et du musée<br />

le 3 e mercredi du mois<br />

Au Grand Curtius<br />

Le Grand Curtius ouvre ses portes au<br />

cinéma, et plus particulièrement aux films<br />

consacrés à l’art avec « Cinémusée ».<br />

Ce projet a pu voir le jour grâce à une<br />

étroite collaboration entre le Service éducatif<br />

et au public des musées de la Ville de <strong>Liège</strong><br />

et le Centre du Film sur l’Art (C.F.A.).<br />

Le C.F.A. est une cinémathèque spécialisée<br />

qui met son catalogue à la disposition des<br />

structures culturelles. Depuis près de 30 ans,<br />

il acquiert et diffuse des documentaires sur<br />

l’art. Sans limitation d’époque ou de sujet,<br />

l’association a une politique d’ouverture et<br />

les acquisitions se font au gré des rencontres<br />

et des découvertes. Qu’il s’agisse de peinture,<br />

de sculpture, de photographie ou de<br />

musique, d’art ancien ou contemporain, le<br />

C.F.A. suit ses coups de cœur. Avec un<br />

catalogue de plus de 228 titres, il propose<br />

de véritables trésors cinématographiques<br />

que le Grand Curtius invite à découvrir.<br />

Pour sa 1ère édition, le cycle de projection<br />

« Cinémusée » présente une programmation<br />

pensée autour des collections permanentes<br />

des musées de la Ville de <strong>Liège</strong> et des<br />

expositions temporaires à venir. Il offre ainsi<br />

un programme éclectique et diversifié, tantôt<br />

consacré aux artistes, tantôt axé sur l’histoire<br />

de l’art et ses disciplines telles que la restauration<br />

d’œuvres d’art ou l’étude critique et<br />

scientifique. Analyse d’un courant, d’une<br />

œuvre ou d’un cas particulier, « Cinémusée »<br />

est dédié à la découverte de l’art sous toutes<br />

ses facettes, depuis la préhistoire jusqu’aux<br />

créations contemporaines.<br />

Édith sCHurGers<br />

Animatrice pédagogique<br />

Musées de <strong>Liège</strong><br />

Mercredi 16 février<br />

La restauration<br />

de la Ronde de Nuit<br />

16 mm, Couleur, 35’<br />

Réalisation : Théo Kok, 1977<br />

Pays : Pays-Bas<br />

Chagall - les années russes<br />

Vidéo U-Matic, Couleur, 26’<br />

Réalisation : Charles Najman, 1995<br />

Pays : France<br />

Mercredi 16 mars<br />

Le Dadaïsme<br />

16 mm, Couleur, 52’<br />

Réalisation : Adrian Maben, 1974<br />

Pays : France<br />

Mercredi 20 avril<br />

Lascaux - préhistoire de l’art<br />

Vidéo U-Matic, Couleurs, 52’<br />

Réalisation : Alain Jaubert, 1996<br />

Pays : France<br />

Mercredi 18 mai<br />

Klimt Gustave et l’art nouveau<br />

16 mm, Couleur, 56’<br />

Réalisation : Jean-Louis Fournier, 1974<br />

Pays : France<br />

- Auditorium du Grand Curtius.<br />

- De 16 h 30 à 17 h 30.<br />

- 3 e par personne, art. 27 gratuit.<br />

En famille au musée<br />

le 2 e dimanche du mois<br />

Dimanches 13 février,<br />

13 mars, 17 avril<br />

Ce parcours découverte propose d’explorer<br />

en famille les collections du Grand Curtius.<br />

La visite est adaptée aux grands comme aux<br />

petits, avec notamment un « parcours-jeux ».<br />

- Durée : 1 h.<br />

- Inscription à l’Office du Tourisme :<br />

+32 (0)4 221 92 21.<br />

- Départ à l’accueil du musée à 14 h.<br />

- 10 e par personne,<br />

6 e par enfant de moins de 12 ans.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

30<br />

En plus des expositions temporaires<br />

Visites Théma<br />

le 3 e dimanche du mois<br />

Au Grand Curtius Au Grand Curtius<br />

Ces visites explorent un thème particulier,<br />

qu’il soit essentiel à la compréhension<br />

des collections ou hors des sentiers battus.<br />

- Durée : 1 h 30.<br />

- Inscription à l’Office du Tourisme :<br />

+ 32 (4) 221 92 21.<br />

- Départ à l’accueil du musée à 14 h.<br />

- 10 e par personne.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

31<br />

Dimanche 20 février<br />

La franc-maçonnerie au Curtius<br />

La franc-maçonnerie apparaît au xvii e siècle.<br />

Un siècle plus tard elle fait son entrée en<br />

Principauté de <strong>Liège</strong>. Structurée au fil des<br />

siècles autour d’un grand nombre de rites et<br />

de traditions, les codes maçonniques restent<br />

mystérieux pour le « non-initié ».<br />

À travers les collections du Grand Curtius,<br />

découverte de l’histoire de la franc-maçonnerie<br />

et de ses membres les plus éminents<br />

qui ont marqué le paysage politique,<br />

scientifique ou culturel liégeois.<br />

Dimanche 20 mars<br />

De la plaquette de cire<br />

au livre imprimé<br />

Le livre est le fruit d’une suite d’innovations<br />

technologiques qui ont permis d’améliorer la<br />

qualité de conservation du texte et l’accès à<br />

l’information. Cette aventure est liée aux<br />

conditions politiques et économiques et à<br />

l’histoire des idées et des religions.<br />

Des tablettes de bois enduites de cire utilisées<br />

par les Romains, en passant par les<br />

enluminures de l’époque médiévale jusqu’aux<br />

livres imprimés, découverte de l’histoire du<br />

livre au travers des collections du Grand<br />

Curtius.<br />

Dimanche 24 avril<br />

Être à la mode<br />

Des grâces vestimentaires de la Renaissance<br />

aux envols échevelés du Baroque, voici une<br />

notion bien contemporaine ! Pourtant, l’histoire<br />

du costume montre qu’il existait de véritables<br />

tendances dans la manière de se vêtir au fil<br />

des siècles. Qu’en est-il pour la Renaissance<br />

et l’époque baroque ? Quelle était la garderobe<br />

des Médicis ? Que portait la « fashionista »<br />

du xvii e siècle? Autant de questions qui trouve-<br />

ront réponses grâce à cette balade guidée<br />

dans le dressing historique du Grand Curtius.<br />

Au MAMAC<br />

Musée d’Art moderne<br />

et d’Art contemporain<br />

Dimanche 13 février, 11 h.<br />

Concert « De la mélodie au rire »,<br />

avec poulenC et satie.<br />

Dimanche 13 mars, 11 h.<br />

Concert par l’Orchestre de chambre de Huy.<br />

Dimanche 10 avril, 11 h.<br />

Récital de piano « Au fil de l’eau »<br />

par Éliane Reyes.<br />

www.mamac.be<br />

Accès gratuit<br />

aux collections permanentes<br />

le 1 er dimanche du mois<br />

dans tous les musées.


Jardin d’hiver + Wintertuin<br />

« Jardin d’hiver » au MAMAC et « Wintertuin » au Bonnefantenmuseum de Maestricht :<br />

ces deux expositions se relaient et font dialoguer les deux musées en mettant en<br />

évidence leurs similitudes mais aussi leurs différences. Le MAMAC présente une<br />

sélection d’œuvres d’art contemporain, achats récents et pièces maîtresses du<br />

Bonnefantenmuseum, permettant de redécouvrir son architecture et mettant en<br />

valeur ses vastes volumes, tandis que le Bonnefantenmuseum présente un aperçu<br />

des chefs-d’œuvre d’art moderne des collections liégeoises.<br />

Neuf artistes de nationalités diverses sont exposés au MAMAC avec des<br />

œuvres datant de 1970 à 2009. Quinze artistes illustrent la période allant de l’impressionnisme<br />

au milieu du xx e siècle au Bonnefantenmuseum.<br />

L’exposition au Bonnefantenmuseum consiste en une série d’œuvres provenant<br />

surtout des collections du MAMAC mais ausi du Musée d’Art wallon et de la<br />

Communauté française. Ces œuvres ont été sélectionnées pour illustrer le foisonnement<br />

et l’évolution constante dont la peinture occidentale a fait preuve depuis la fin<br />

du xix e siècle jusqu’au milieu du xx e . Ainsi, la fin du romantisme, l’impressionnisme,<br />

le symbolisme, le fauvisme, l’expressionnisme, le surréalisme, le cubisme et le dadaïsme<br />

sont représentés par des œuvres de qualité mondialement reconnue dues à<br />

des artiste tels que monet, GauGuin, ensor, piCasso, maGritte et arp. Pour des<br />

raisons de cohérence et de clarté, l’abstraction a été résolument écartée.<br />

Commissaire des deux expositions :<br />

Alexander van Grevenstein,<br />

directeur du Bonnefantenmuseum.<br />

Un billet commun est proposé jusqu’au<br />

19 juin. Le billet d’entrée au MAMAC donne<br />

droit à l’entrée gratuite au Bonnefantenmuseum,<br />

et celui de Maestricht permet<br />

l’entrée gratuite au MAMAC.<br />

Jardin d’hiver<br />

Musée d’Art moderne et d’Art contemporain<br />

3, parc de la Boverie, <strong>Liège</strong><br />

Jusqu’au dimanche 27 février<br />

Du mardi au samedi de 13 à 18 h,<br />

le dimanche de 11 à 16 h 30. Fermé le lundi.<br />

Entrée 8 e et 4 e, gratuit pour les moins de<br />

12 ans et les groupes scolaires.<br />

Wintertuin<br />

Bonnefantenmuseum<br />

Avenue Ceramique 250, Maestricht<br />

Du 18 mars au 19 juin<br />

Du mardi au dimanche de 11 à 17 h.<br />

Fermé le lundi.<br />

Entrée 8 e et 4 e.<br />

Françoise saFin-CraHay<br />

Conservatrice au MAMAC<br />

Le titre « Jardin d’hiver » fait allusion à<br />

une installation de Marcel brooDtHaers<br />

au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles<br />

en 1974 et s’applique parfaitement au<br />

bâtiment qui abrite le MAMAC, grande<br />

serre en pleine nature.<br />

La plupart des cimaises ont été mises<br />

de côté, permettant de redécouvrir son<br />

aspect initial qui porte les contradictions<br />

de son époque (une technique de<br />

construction moderne mais habillée en<br />

néoclassique), et l’éclairage artificiel a<br />

été délibérément supprimé afin de<br />

souligner la beauté de cette lumière<br />

naturelle variable, comme à l’époque<br />

de sa construction, l’éclairage artificiel<br />

d’appoint n’ayant été installé que bien<br />

plus tard.<br />

Marcel brooDtHaers est le point de<br />

départ de l’exposition : pour la passion<br />

qu’il portait aux séries, suites de<br />

séquences, mouvements métronomiques,<br />

intervalles et répétitions<br />

constantes et régulières permettant<br />

ainsi aux différences de se manifester,<br />

dans une sorte de jeu dont l’artiste<br />

découvre le résultat par après, laissant<br />

place bien souvent au hasard.<br />

Chacun des artistes présents dans<br />

l’exposition a les mêmes préoccupations<br />

: suites mathématiques, alphabétiques,<br />

schémas rythmiques, poèmes<br />

scandés, balancements entre la vie et<br />

la mort, la nature et l’homme, l’homme<br />

et l’art…<br />

Exposition dans le cadre de<br />

<strong>Liège</strong> Métropole Culture 2<strong>01</strong>0<br />

en Communauté Wallonie-Bruxelles,<br />

à l’initiative de Laurent Jacob<br />

(directeur d’Espace 251 Nord).<br />

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<strong>Liège</strong>•museum<br />

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Mario merz, 8-5-3, 1985,<br />

coll. Bonnefantenmuseum.<br />

En soirée et en journée.<br />

Marcel brooDtHaers (Bruxelles, 1924 - Cologne, 1976)<br />

Marcel Broothaers en Zuid-limburg, 1961-1970<br />

Pawel altHamer (Varsovie, 1967)<br />

et Artur zmiJewski (Varsovie, 1966)<br />

So genannte Wellen und andere Phänomene<br />

des Geistes, 2003-2004<br />

Paul CHan (Hong-Kong, 1973 - New York)<br />

Sade for Sade’s Sake, 2009<br />

Hugo Debaere (Gand, 1958 - 1994)<br />

Man aan de muur, 1994<br />

Michael krebber (Cologne, 1954)<br />

Flaggs (Against Nature), 2003<br />

Sol lewitt (Hartford, 1928 - New York, 2007)<br />

Complex Forms n° 8, 1988<br />

Mario merz (Milan, 1925 - Turin, 2003)<br />

Lezione di Anatomia, 1979 + 8-5-3, 1985<br />

Roman siGner (Appenzell, 1938 - St. Gallen)<br />

Super-8 films, 1975-1989 + Nachtfahrt, 1999<br />

Bas De wit (Budel, 1977 - Maastricht)<br />

Toontje Lager, 2008<br />

+ Toontje Lager (Monument to), 2008


« Jardin d’hiver » au MAMAC,<br />

coll. Bonnefantenmuseum,<br />

de gauche à droite, de haut en bas.<br />

Michael krebber, Flaggs (Against Nature), 2003.<br />

Bas De wit, Toontje Lager, 2008.<br />

Sol lewitt, Complex Forms n° 8, 1988.<br />

Paul CHan, Sade for Sade’s Sake, 2009.<br />

Hugo Debaere, Man aan de muur, 1994.<br />

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<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

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8 e Biennale internationale<br />

de gravure contemporaine de <strong>Liège</strong><br />

Depuis la première édition en 1983, la Biennale<br />

de gravure a pour objectif d’offrir un panorama<br />

complexe et varié de l’art de l’estampe<br />

tel qu’il est pratiqué à travers le monde.<br />

Lors de la dernière édition, la nouvelle appellation<br />

« gravure contemporaine » reflétait la<br />

volonté de s’éloigner des clichés de l’estampe<br />

classique déclinée en noir et blanc, pour<br />

s’ouvrir vers de nouvelles techniques, de<br />

nouvelles expérimentations.<br />

Parmi les 600 dossiers réceptionnés, 58<br />

candidats ont été retenus : ils présentent au<br />

MAMAC des œuvres originales et récentes.<br />

24 pays sont représentés, dont certains sont<br />

devenus des partenaires fidèles de l’événement<br />

(Canada, Colombie, Brésil, Japon, …)<br />

mais d’autres nous rejoignent pour la première<br />

fois : l’Afrique du Sud, le Paraguay, le<br />

Kosovo. Un jury international désignera le ou<br />

la lauréate de cette 8e édition.<br />

RR<br />

Musée d’Art moderne et d’Art contemporain<br />

+ Cabinet des Estampes et des Dessins<br />

3, parc de la Boverie, 4020 <strong>Liège</strong><br />

Du 25 mars au 15 mai<br />

La gravure :<br />

art ancien, art vivant<br />

La gravure s’affirme comme un art vivant,<br />

à l’affût des technologies récentes et même<br />

initiateur de procédés nouveaux. Les techniques<br />

traditionnelles telles que l’eau-forte,<br />

le burin, la pointe sèche ou la linogravure<br />

sont toujours en vigueur, mais peuvent dorénavant<br />

être associées, voire supplantées par<br />

une pratique contemporaine : impression<br />

digitale, offset, collographie, photocopies,<br />

insertion de photographies, sans parler de<br />

l’intérêt porté aujourd’hui à l’emploi de<br />

produits non toxiques.<br />

L’utilisation de ces nouveaux procédés<br />

libère alors la gravure de beaucoup de contraintes.<br />

La matrice devient numérique et<br />

l’impression conjugue des techniques traditionnelles<br />

et informatiques. On parle alors<br />

de techniques mixtes. Cette combinaison<br />

de techniques représente une émulation<br />

évidente pour les artistes qui voient leurs<br />

possibilités expressives s’étendre presqu’à<br />

l’infini.<br />

SD<br />

Fête<br />

de la gravure<br />

Outre la Biennale, unique en son genre,<br />

<strong>Liège</strong> se distingue par la mise sur pied<br />

d’une vingtaine d’événements satellites,<br />

formant une réelle fête autour du thème<br />

de la gravure. Rassemblant en une<br />

même région un concentré d’expositions,<br />

cette manifestation démontre<br />

que l’art d’imprimer et de reproduire<br />

n’est plus le parent pauvre des arts<br />

dits nobles.<br />

Musées, centres d’expositions,<br />

galeries d’art déclinent l’art de l’estampe<br />

sous toutes ses formes, ses techniques,<br />

ses formats. Cette recherche<br />

de mise en valeur de l’art de graver fait<br />

naître un contexte de stimulation artistique<br />

peu banal en Europe.<br />

La Biennale marque la place de la gravure<br />

dans l’art contemporain par la pluralité<br />

des techniques et des options esthétiques.<br />

Dans son prolongement est née la Fête de la<br />

Gravure qui offre une vision plus aboutie et<br />

construite de quelques pratiques artistiques<br />

choisies. L’approche contemporaine reste<br />

l’option privilégiée de la sélection de ces<br />

projets, sans basculer dans le monde de la<br />

photographie ou de l’infographie.<br />

SD<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

36<br />

bra Paula almozara<br />

usa Edward bateman<br />

can Derek Michael besant<br />

ita Marina binDella<br />

bel Marina bouCHeï<br />

pry Luvier Casali<br />

fra Sabine CloCHey<br />

bel Marilyne Coppée<br />

deu Jana DaHms<br />

bel Sabine DelaHaut<br />

fra David Delesalle<br />

hrv Edvin DraGiCeviC<br />

fra Agnès Dubart<br />

bel Paul Dumont<br />

che Charles-François Duplain<br />

bel Luc étienne<br />

bel Raphaëlle GoFFaux<br />

col Juliana Gomez montes<br />

fra Anne GouJauD<br />

usa Raphael GriswolD<br />

nld Alexandra Haeseker<br />

nld Marcelle Hanselaar<br />

bel Chantal HarDy<br />

deu Willy Heyer<br />

jpn Yuji Hiratsuka<br />

bih aïda JasareviC<br />

dnk Anne Lildholdt Jensen<br />

fin Janne laine<br />

bel Ingrid leDent<br />

prt Joe lima<br />

nld Ruud mattHes<br />

fra Ludovic mennesson<br />

esp Ricardo moJarDin<br />

esp David orteGa Del Campo<br />

fra Sophie palisse<br />

kor Michelle park<br />

kos Dimitrije peCiC<br />

bel Goedele peeters<br />

deu Ute pleuGer<br />

fra Nicolas poiGnon<br />

arg Fernando Javier polito<br />

usa Diana quinby<br />

can Ross raCine<br />

fra Nathalie reba<br />

zaf Colleen ross<br />

can Stéphanie russ<br />

deu Richard sCHimanski<br />

deu Giske siGmunDstaD<br />

deu Hans-Jürgen söFFker<br />

pol Piotr staCHlewski<br />

deu Waltraut taenzler<br />

bel Hans van DiJCk<br />

bel Sofie vanGor<br />

hrv Ana vivoDa<br />

nld Hans wap<br />

bra Flavia yue<br />

pol Burdy zenon<br />

chn Wenhaï zHanG<br />

Régine rémon<br />

Conservatrice<br />

du Cabinet des Estampes et des Dessins<br />

Commissaire de la Biennale<br />

Sophie DeCHarneux<br />

Historienne de l’art<br />

Musées de <strong>Liège</strong><br />

« Georg Baselitz<br />

Le monde à l’envers, tel qu’il est »<br />

En point d’orgue des Biennales de gravure,<br />

le Cabinet des Estampes consacre ses<br />

espaces d’expositions à l’œuvre graphique<br />

d’un artiste de réputation internationale :<br />

Bram van velDe, Raoul ubaC, Marthe wéry,<br />

Geneviève asse.<br />

Pour cette 8e édition, l’exposition est<br />

consacrée à l’une des personnalités majeures<br />

de l’art allemand et européen de ce siècle :<br />

Georg baselitz. Xylographies, linogravures,<br />

pointes-sèches, eaux-fortes, aquatintes,<br />

vernis mou, le peintre-sculpteur-dessinateur<br />

décline ces techniques depuis 1963. Ses<br />

premiers « renversements », désormais<br />

célèbres, remontent à 1969. Exécutés la tête<br />

en bas, ses sujets familiers (nus, enfants,<br />

chiens, cerfs, …) illustrent le propos de<br />

l’artiste : Je représente le monde à l’envers,<br />

tel qu’il est ». L’artiste recourt à la gravure<br />

qu’il considère comme une analyse complémentaire,<br />

face à la peinture : J’ai fait des<br />

xylographies quand je ressentais la nécessité<br />

de donner une forme définitive à un tableau.<br />

La maison d’édition parisienne Catherine<br />

Putman édite les gravures de baselitz<br />

depuis 1995. La série de six nouvelles xylographies<br />

monumentales intitulées Big night<br />

participe à la relecture d’œuvres de jeunesse.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

37<br />

Ces tirages de grand format sont encrés et<br />

tirés à même le sol, non pas au moyen d’une<br />

presse habituelle mais à l’aide d’un rouleau<br />

ou au frotton.<br />

L’exposition, qui rassemble plus de<br />

quarante gravures, est une première en<br />

Belgique. Les œuvres sont gracieusement<br />

prêtées par la maison Catherine Putman.<br />

RR<br />

Georg baselitz, Abends, 2004.<br />

Eau-forte et aquatinte.<br />

© Catherine Putman, Paris.


Jean-Luc sCHütz<br />

Conservateur<br />

du département d’Archéologie<br />

Grand Curtius<br />

Regroupement et déménagement des réserves lapidaires<br />

Les œuvres en pierre des collections<br />

de la Ville de <strong>Liège</strong> ne peuvent toutes<br />

être présentées dans les musées :<br />

elles sont conservées en réserve tout en<br />

restant accessibles aux chercheurs.<br />

Un travail conséquent quoique non visible<br />

par le public vient de se terminer :<br />

leur classement et leur déménagement<br />

dans une nouvelle réserve unique.<br />

La Ville s’est dotée récemment d’un lieu<br />

sécurisé où ont été déménagés meules,<br />

mosaïques, vestiges du monument funéraire<br />

de Vervoz, sarcophages mérovingiens, fragments<br />

architecturaux issus des fouilles de la<br />

place Saint-Lambert (bases de colonnes, morceaux<br />

de chapiteaux, vestiges de l’ancienne<br />

cathédrale Saint-Lambert), croix funéraires,<br />

pierres tombales et pierres armoriées,<br />

statues, linteaux et piédroits de cheminées,<br />

briques d’âtres, marbres ainsi que des éléments<br />

architecturaux (fontaine, mascarons,<br />

dallages…). À cette liste s’ajoutent des<br />

moulages, des boiseries et des fers forgés.<br />

Les pièces à déménager étaient en<br />

grande partie stockées sur des palettes de<br />

manutention de formats différents. Le système<br />

d’entreposage des nouvelles réserves<br />

demandait l’utilisation exclusive de palettes<br />

de format standard (120 x 80 cm). Il a donc<br />

d’abord fallu remplacer un grand nombre de<br />

palettes hors normes, ou en mauvais état,<br />

par des palettes robustes de type « palettes<br />

Europe » ou « Eur-Epal ». De nombreuses<br />

palettes ont dû être reconditionnées car le<br />

matériel entreposé dans les anciennes<br />

réserves était épars. Le poids des objets<br />

devait également être pris en compte pour<br />

veiller au bon équilibrage de chaque palette.<br />

La présence d’un numéro d’inventaire<br />

sur certaines pièces a permis de reconstituer<br />

des ensembles cohérents – les fiches et les<br />

registres d’inventaire fourmillant de renseignements<br />

utiles tels que la provenance ou la<br />

datation supposée des œuvres. Pour celles<br />

sans numéro ou au numéro estompé, le parti<br />

pris a été de les ranger en fonction de plusieurs<br />

critères : styles, décors, matières,<br />

fonctions (architecture civile ou religieuse).<br />

Puis les palettes ont été numérotées<br />

(438 palettes) et photographiées. Une fois les<br />

pièces acheminées vers leur nouveau lieu<br />

d’entreposage, il ne restait plus qu’à placer<br />

les palettes sur les rayonnages et à les localiser<br />

sur un plan. La prochaine étape consistera<br />

à encoder les pièces dans la base de<br />

données Flora.<br />

Ce déménagement a été réalisé en<br />

interne, avec les préparateurs des musées et<br />

les tailleurs de pierre de la Ville.<br />

Édith sCHurGers<br />

Animatrice pédagogique<br />

Musées de <strong>Liège</strong><br />

Le Service éducatif et au public des musées<br />

Outil de médiation vers tous les types de visiteurs,<br />

pour la découverte du patrimoine, le plaisir<br />

d’apprendre, le partage des connaissances,<br />

ce Service favorise la découverte active et adaptée<br />

des collections des musées, que ce soit<br />

dans le cadre scolaire, professionnel ou du loisir.<br />

Il développe une politique de sensibilisation<br />

aux collections des musées, et plus largement<br />

aux arts et au patrimoine, grâce à des<br />

actions de médiation comme des journées<br />

d’animations spécifiques et/ou ludiques, des<br />

conférences, des rencontres… Il développe<br />

des collaborations constructives avec<br />

d’autres institutions, avec les écoles et<br />

universités, ou toute organisation menant à<br />

la création de démarches utiles et novatrices<br />

en matière de médiation culturelle. Enfin, le<br />

Service rend accessible les recherches<br />

scientifiques menées par les musées, par le<br />

biais de supports divers : dossiers pédagogiques,<br />

fiches pédagogiques, carnets de<br />

jeux.<br />

Au Grand Curtius : avec une équipe de<br />

30 guides accrédités, le musée propose des<br />

visites guidées pour tous : individuel, famille,<br />

amis, école, personne fragilisée, association.<br />

Une attention particulière est accordée aux<br />

attentes des enseignants. Une dizaine d’animations<br />

ont été pensées en fonction des<br />

programmes des différents niveaux d’enseignement<br />

en Communauté française. La prise<br />

en compte des besoins des visiteurs dits<br />

fragilisés (souffrant de handicaps) a conduit à<br />

la création d’animations qui leurs sont spécialement<br />

dédiées.<br />

Un outil de visite destiné aux plus jeunes,<br />

Petits Jeux au Grand Curtius, invite à la découverte<br />

ludique d’une vingtaine de pièces<br />

maîtresses du musée. Le Service édite aussi<br />

des fiches pédagogiques ciblant des thématiques<br />

liées aux collections du musée.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

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<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

39<br />

Une imprimerie dans la Ville<br />

Les investissements réalisés il y a quatre<br />

ans par la Ville permettent aujourd’hui de<br />

produire quelque neuf millions de tirages par<br />

an, auxquels s’ajoutent sept millions de<br />

photocopies.<br />

L’infographiste<br />

applique au fichier<br />

<strong>pdf</strong> reçu la bande de<br />

contrôle, les tracés<br />

de coupe…<br />

Le principe de la presse est<br />

basé sur le phénomène des<br />

liquides non miscibles.<br />

La plaque d’aluminium est<br />

humidifiée puis encrée.<br />

Le tirage s’effectue en<br />

continu.<br />

Les données sont copiées<br />

dans une machine gravant<br />

des matrices (plaques) en<br />

aluminium par un faisceau<br />

laser.<br />

Chaque plaque est dédiée<br />

à une couleur de base<br />

(cyan, magenta, jaune, noir).<br />

Les quatre couleurs sont imprimées<br />

successivement en un seul passage.<br />

Le tirage s’effectue feuille à feuille, à une<br />

vitesse de ± 9 000 feuilles/heure. De<br />

minuscules points d’encre sont projetés.<br />

Les imprimés sont ensuite rognés aux<br />

dimensions demandées. Une machine<br />

se charge d’assembler et de plier les<br />

documents et de les relier.<br />

L’imprimerie de la Ville travaille pour l’administration<br />

communale, mais aussi pour toutes<br />

les manifestations dans lesquelles la Ville<br />

s’engage : les comités de quartier, les<br />

écoles, la culture, le tourisme… Elle est<br />

dirigée par Daniel Libotte et Paul Bouhon<br />

en est le contremaître.<br />

Les matrices sont<br />

introduites dans la<br />

presse offset.<br />

Ces points sont imperceptibles<br />

à l’œil nu, mais parfaitement<br />

visibles avec un<br />

compte-fil. C’est ce qu’on<br />

appelle la trame.<br />

La production est enfin<br />

empaquetée et livrée.


Flora<br />

L’acquisition par la Ville de <strong>Liège</strong> d’un logiciel gérant l’ensemble des collections du<br />

patrimoine culturel va permettre aux musées, bibliothèques, centres de documentation<br />

et services d’archives de travailler en réseau et de rendre leurs collections<br />

accessibles au public via un portail web. Le choix de la Ville s’est porté sur le logiciel<br />

d’origine française Flora car il contribue à mettre le système d’information documentaire<br />

au centre des institutions patrimoniales avec un positionnement transversal<br />

unique pour les différents métiers.<br />

La mise en place de la solution informatique a été progressive et devrait être<br />

terminée au cours du second semestre de 2<strong>01</strong>1.<br />

Les services offerts<br />

Flora est un bouquet de services web, parfaitement modulables et paramétrables,<br />

dont la mise en œuvre apporte à chaque type d’utilisateurs (conservateurs, enseignants<br />

chercheurs, étudiants, archivistes, bibliothécaires, grand public, …) une offre<br />

de services personnalisables et accessibles depuis un simple navigateur.<br />

- Le service Saisie et mise à jour des descriptions permet de dresser un inventaire<br />

complet des collections, en conformité avec les normes relatives à chaque<br />

métier.<br />

- Le service Photos et documents électroniques permet d’associer aux descriptions<br />

des photos, des vidéos et tout type de documents numérisés.<br />

- Le service Communication permet de gérer les mouvements de tout type de<br />

ressources (œuvres, monographies, revues, photos, archives, …). Il assure une<br />

parfaite traçabilité de la communication des objets en termes de prêts, retours,<br />

consultations sur place…<br />

- Le service Accès public permet au grand public d’accéder aux collections et de<br />

les localiser avec précision.<br />

- Le service Exposition - Colis assure la gestion des expositions depuis la prévision<br />

de cet événement jusqu’au transport des œuvres en passant par l’enregistrement<br />

des mouvements de sortie et retour, les constats d’état, les contrats d’assurance,<br />

la mise en caisse, etc.<br />

- Le service Localisation - Récolement permet la localisation précise de chaque<br />

œuvre et l’organisation de campagne de récolement de tout ou partie d’un<br />

musée.<br />

Ils sont complétés par d’autres services tels que Thesaurus, Versement-Tri-Élimination,<br />

Statistiques, Acquisition-Abonnement, Accès professionnel, Statistiques qui<br />

fournissent aux professionnels les outils indispensables à une saine gestion.<br />

Évolution du projet<br />

Flora comporte quatre volets ou modules : un module musées, un module bibliothèques<br />

et centres de documentation, un module archives et un portail web.<br />

Dans un premier temps, le logiciel a été mis en service au département des<br />

Archives en juillet 2009. Il y gère des archives historiques et administratives. La base<br />

de données comporte à ce jour 576 000 descriptions archivistiques ainsi que les<br />

Maryse Jaspers-Colleye<br />

Cellule Informatique<br />

du département de la Culture<br />

La nouvelle solution informatique des musées de la Ville de <strong>Liège</strong><br />

Le logiciel Flora est un outil permettant<br />

une gestion efficace des collections<br />

patrimoniales. Sa mise en place a été<br />

progressive et l’installation, fin 2<strong>01</strong>1,<br />

d’un portail web fédératif en sera la<br />

phase ultime.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

40<br />

Accès public<br />

Accès<br />

professionnel<br />

Statistiques<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

41<br />

Saisie<br />

et mise à jour<br />

des descriptions<br />

Expositions<br />

Colis<br />

Photos<br />

et documents<br />

électroniques<br />

Localisation<br />

Récolement Acquisition<br />

Abonnement<br />

Base de données<br />

Recherche fédérée<br />

Infrastructure documentaire<br />

Communication<br />

Thésaurus<br />

Versement<br />

Tri<br />

Élimination<br />

images électroniques associées. Progressivement, les archives occupant aujourd’hui<br />

dix kilomètres de rayonnage seront intégrées à cette base.<br />

Le module bibliothèques est en cours de test et le module musées est<br />

opérationnel depuis le 22 juillet 2<strong>01</strong>0. La totalité des 72 000 fiches muséales, enregistrées<br />

dans différents fichiers informatiques, ont été injectées dans la nouvelle base<br />

de données. À titre d’exemple, une recherche sur les peintures de James Ensor<br />

fournit la réponse ci-contre.<br />

Quant au portail web fédératif, il donnera accès simultanément aux collections<br />

muséales, bibliothéconomiques et archivistiques dans la mesure où celles-ci sont<br />

publiques. Ainsi, une recherche sur Auguste Donnay fournira en une seule opération<br />

un extrait du registre de recensement attestant de sa présence en 1881 dans une<br />

maison située 35 rue Pont d’Avroy, la description et la photo de ses œuvres conservées<br />

dans les musées de la Ville et les ouvrages le concernant consultables à la<br />

bibliothèque Ulysse Capitaine ou dans les centres de documents des musées.<br />

En conclusion<br />

Flora est une solution intégrée 100 % web de gestion de systèmes d’information<br />

documentaires permettant de fédérer les acteurs culturels afin d’optimiser, analyser,<br />

valoriser et pérenniser l’activité des différents secteurs.<br />


Qui se ressemble…<br />

La bonne gestion des collections d’un musée passe, entre autres choses, par sa<br />

politique d’acquisitions. Au sein d’une institution comme le Grand Curtius, il incombe<br />

à chaque conservateur d’en faire la proposition auprès de la ou des instances qu’il<br />

estime les plus aptes à soutenir financièrement son projet. Plusieurs de celles-ci<br />

entrent en ligne de compte, individuellement ou conjointement : la Ville de <strong>Liège</strong>,<br />

opérateur naturel de ce type d’actions, la Fondation Roi Baudouin, à travers les<br />

différents fonds dont la gestion lui a été confiée, le mécénat privé ou, s’il échet, celui<br />

d’une association des Amis de musée. Trois d’entre elles (Les Amis du Musée d’Armes,<br />

Les Amis du Musée d’Art religieux et d’Art mosan, Les Amis de l’Institut archéologique<br />

liégeois) sont susceptibles de remplir ce rôle en appui au Grand Curtius.<br />

Une politique d’acquisitions peut couvrir plusieurs objectifs avec, comme<br />

point de départ de la réflexion à cet égard, les différents champs des collections,<br />

selon par exemple qu’il s’agit de compléter des séries existantes, d’acquérir la « perle<br />

rare » qui manque à l’une d’entre elles, d’ouvrir à propos un nouveau champ parmi<br />

celles-ci, voire de remplacer avantageusement un spécimen en moins bon état.<br />

Et dans le domaine des acquisitions, c’est le hasard, d’aucuns diront peutêtre<br />

la nécessité, qui nous a amené à plusieurs reprises à concrétiser certaines<br />

opportunités. Les exemples retenus ici n’ont pas été choisis uniquement pour leur<br />

caractère anecdotique : les circonstances de leur découverte ont apporté également<br />

de précieuses informations pour leur meilleure connaissance. La section de l’art<br />

mosan est évidemment au centre de ces récits qui concernent l‘acquisition d’œuvres<br />

relevant de sa production au xiv e siècle, moins connue que celle de son âge d’or du<br />

xii e siècle.<br />

Un jour de 1978, invité par le curé de Fexhe-le-haut-Clocher à explorer les greniers<br />

de la cure en vue d’y identifier un certain nombre de sculptures reléguées là manifestement<br />

depuis longtemps, nous y découvrîmes, sous une importante couche de<br />

poussière et de tuileaux, une statue en chêne d’un saint Jean de calvaire. Le style,<br />

à l’évidence, s’avérait être celui d’un maître mosan des années 1330, proche de<br />

l’atelier de la Vierge de La Gleize, bien connue des médiévistes. Le statut de musée<br />

diocésain qui était celui de l’ancien MARAM – et qui l’est resté aujourd’hui à travers<br />

le département d’Art religieux et d’Art mosan du Grand Curtius – permit que cette<br />

sculpture inédite et en péril rejoignît les quelques œuvres mosanes de même époque<br />

au sein de ces collections.<br />

Quelque temps plus tard, un antiquaire frappait à la porte du musée. Il était<br />

vendeur d’une statue masculine, de type juvénile, de format presque identique et<br />

dont l’exécution, jusque dans les moindres détails, révélait l’intervention de la même<br />

main que pour le saint Jean : même visage rond au menton pointu, même chevelure<br />

bouclée, mêmes drapés, en particulier celui « en tablier » devant l’abdomen, même<br />

méplat dessiné par le vêtement au niveau de la saillie du genoux… Le couvre-chef<br />

du personnage, en forme de cône, l’identifiait à un pape : cette forme était celle de<br />

la tiare aux xiii et xiv e siècles, portée par exemple par le saint Calixte à l’un des<br />

portails de la cathédrale de Reims (vers 1230). Peu de saints papes, en dehors de<br />

Albert lemeunier<br />

Conservateur<br />

du département d’Art religieux et d’Art mosan<br />

Grand Curtius<br />

À propos de sculptures mosanes<br />

Dans le domaine<br />

des acquisitions,<br />

c’est parfois le hasard,<br />

d’aucuns diront peut-être<br />

la nécessité, qui conduit<br />

à concrétiser certaines<br />

opportunités.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

42<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

43<br />

saint Pierre, saint Corneille ou saint Clément, figurent parmi les saints vénérés au<br />

Moyen Âge en région mosane. L’hypothèse qu’il s’agisse ici de saint Clément s’avérerait<br />

vraisemblable si l’on tient compte de ce que celui-ci est, depuis le xi e siècle, le<br />

titre de la paroisse d’Oreye, à quelques encablures de… Fexhe-le-haut-Clocher.<br />

L’hypothèse de l’existence d’un atelier régional pouvait donc être émise. Auraient<br />

été produits dans le même atelier le calvaire de Momalle, et une statue de saint<br />

Hubert provenant de Lavoir (Grand Curtius), proche stylistiquement et géographiquement<br />

des œuvres précédentes.<br />

Ce faisceau d’éléments concordants fut suffisamment convaincant pour que<br />

ce saint pape fût à son tour acquis, grâce à l’intervention de l’asbl « Les Amis du<br />

MARAM », en vue d’enrichir désormais, aux côtés du saint Jean et du saint Hubert,<br />

l’importante section, aujourd’hui au Grand Curtius, dévolue au xiv e siècle mosan.<br />

C’est au sein de cette même section que des rencontres fortuites permirent par<br />

ailleurs de regrouper quelques sculptures relevant du style de l’atelier qui, toujours<br />

en région mosane au cours de la même période, se spécialisa dans le travail du<br />

marbre de Carrare.<br />

Tout commença par un courrier reçu par notre prédécesseur L. Dewez, vers<br />

le milieu des années septante et émanant de W. Forsyth, médiéviste américain de<br />

renom. Ce dernier sollicitait de son correspondant qu’il voulût bien vérifier l’existence<br />

en la chapelle du Calvaire à <strong>Liège</strong>, proche de Saint-Laurent, d’un groupe médiéval<br />

en marbre de Carrare représentant la Mise au tombeau. Si cette demande avait suscité<br />

de prime abord une certaine incrédulité chez le conservateur liégeois, pourtant<br />

l’un des meilleurs connaisseurs de notre patrimoine, il s’acquitta cependant de sa<br />

mission… pour constater que son correspondant avait été parfaitement informé :<br />

cette chapelle du début du xx e siècle recelait bien, depuis 1942, l’œuvre en question.<br />

L’y laisser plus longtemps, dans des conditions de sécurité et de conservation précaires,<br />

s’avérait périlleux. Avec les autorisations requises, un moulage fut mis en place<br />

dans la chapelle, l’original trouvant refuge, pour être exposé, à l’ancien MARAM.


Quelques temps plus tard, la niche d’une « potale » endommagée située<br />

dans la campagne aux confins du village de Solières, dans la région de Huy, s’avéra<br />

abriter un saint Joseph provenant d’une Nativité. La sculpture était en marbre de<br />

Carrare et présentait des ressemblances stylistiques étonnantes avec la Mise au<br />

tombeau : même expression grave du visage, même traitement des drapés et des<br />

mains. Le saint Joseph ne tarda heureusement pas à rejoindre la Mise au tombeau.<br />

Il en fut de même peu après pour un christ en croix d’une chapelle castrale située à<br />

quelques kilomètres de là. En raison des affinités évoquées avec les œuvres précédentes,<br />

le christ (qui avait conservé une partie de sa polychromie) fut remis au Musée<br />

par son généreux propriétaire.<br />

Hasard ou nécessité, disions-nous plus haut à propos de certaines circonstances<br />

d’acquisitions… La présence des deux dernières œuvres en région hutoise allait<br />

nous rappeler que d’autres sculptures en marbre de Carrare, issues manifestement<br />

du même atelier, avaient déjà été signalées comme de provenance identique. Il<br />

s’agit de deux groupes de la Passion, de l’ancienne collégiale de Huy (Pâmoison de<br />

la Vierge, Soldats de calvaire), aujourd’hui au Metropolitan Museum. Deux autres<br />

groupes, un Ecce Homo et un Christ aux limbes, dans la collection des Princes de<br />

Ligne à Belœil, sont peut-être également de provenance hutoise.<br />

Si l’on ajoute à ce qui précède un Larron de calvaire retrouvé dans le lapidaire<br />

de l’église Saint-Jacques à <strong>Liège</strong> et entré également dans les collections de notre<br />

musée, nous avons là rassemblés certains parmi les disjecta membra les plus<br />

significatifs de la production de cet atelier mosan, peut-être hutois, spécialisé au xiv e<br />

siècle dans le travail de ce marbre précieux et recherché, non seulement en Italie,<br />

mais aussi en nos régions. Certaines influences italiennes sur cette production<br />

mosane ne seraient d’ailleurs pas à exclure en l’occurrence.<br />

Qui se ressemble…<br />

•<br />

Pages précédentes :<br />

saint Jean de Calvaire (à gauche)<br />

et saint Pape (saint Clément ?), chêne (à droite),<br />

vers 1330.<br />

Ci-dessus, de gauche à droite :<br />

Mise au tombeau, saint Joseph et Christ en croix,<br />

marbre de Carrare (détails),<br />

Région mosane, vers 1330-1340.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

44<br />

La musique est un musée vivant<br />

Touches et leviers du pianoforte carré<br />

Zumpe-Buntebart (1769) ayant appartenu<br />

au compositeur André Modeste Grétry.<br />

Photo prise lors de la restauration en 2<strong>01</strong>0<br />

par J. Van den Hemmel.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

45<br />

Patrick DHeur<br />

Pianiste-compositeur<br />

Responsable du Musée Grétry<br />

Chargé de mission auprès de la Ville de <strong>Liège</strong><br />

pour « Grétry 2<strong>01</strong>3 »<br />

Le musée contient le temps. Il ne le retient pas,<br />

bien au contraire. Il est précisément là pour le<br />

faire aboutir vers un futur plus riche, mieux compris.<br />

Parcourir un musée est un voyage dans le<br />

temps, une recherche de l’œil vers l’objet qui<br />

évoque, qui interpelle. Cet objet nous situe, nous<br />

met dans un rapport d’émotion avec lui et son<br />

temps. Il finit par nous interroger et nous invite à<br />

la réflexion. L’objet exposé ne bouge pas. Pourtant<br />

son esthétique, sa beauté et son histoire traversent<br />

notre imaginaire et tracent un mouvement<br />

invisible. L’objet est, le mouvement n’est pas.<br />

Écouter une œuvre musicale, c’est aussi<br />

pénétrer dans un musée. Un espace imaginaire<br />

où le mouvement est permanent, où chaque<br />

« objet » bouge et trouve sa fonction dans le rythme, son rôle dans l’harmonie, son<br />

envol dans les hauteurs des vibrations. Mais dans ce musée, les objets sont invisibles.<br />

Le mouvement est, l’objet n’est pas.<br />

Une œuvre musicale est créée dans le temps et c’est par le temps du rythme<br />

qu’elle sera restituée parfaitement. Elle est construite d’objets sonores qui, dispersés<br />

dans des hauteurs, s’étirent pour apparaître enfin sur une seule ligne qui avance et<br />

qui distribue les sons. Voir la musique… sur le temps qui passe.<br />

Pour entrer efficacement dans un musée, la musique doit apparaître vivante<br />

et adaptée. Vivante car c’est dans cet aspect qu’elle a son plein effet communicatif,<br />

parfait et humain, et adaptée, pour pouvoir être interprétée dans des endroits parfois<br />

inattendus. Elle ne doit pas être confondue avec un décor musical enregistré,<br />

« passe-partout » et surtout « entre nulle part » ce qui est malheureusement le second<br />

rôle que certains lui prêtent volontiers.<br />

Découvrir un espace d’exposition avec une musique vivante donne une<br />

pleine mesure à la démarche du visiteur. La musique peut aider à mieux apprécier<br />

ce qu’il va découvrir. Elle peut créer un décor qui éveillera une autre attention et<br />

imprimera un souvenir plus profond. Elle ne doit pas forcément être en rapport direct<br />

et historique avec l’objet, mais doit respecter la création d’une atmosphère propice<br />

à l’évocation du propos de l’exposition. Si son adéquation historique est possible et<br />

réalisable, alors celle-ci permet de tisser les liens secrets d’une réelle intensité qui<br />

participent à la recherche du Beau dans le domaine de l’Art. C’est la perfection des<br />

détails qui participe à la réussite d’une œuvre.<br />

La musique peut se superposer à tous les arts. C’est son originalité et sa<br />

force. Si la musique doit être vivante, ses instruments doivent l’être aussi. Pour être<br />

exposés, les instruments doivent être dans un état de conservation parfait et idéalement<br />

restaurés. Les exposer sans en jouer et les entendre est toujours une énorme<br />

déception. Le réveil de leur sonorité est un moment magique, un événement à créer,<br />

à faire découvrir et à ne jamais manquer.<br />


Pierre muylle<br />

Directeur du Mad Musée<br />

Le musée mangeable<br />

Nous devons être des cannibales<br />

Fraîchement diplômé, j’étais, il y a déjà<br />

longtemps, au Beursschouwburg, entouré<br />

de personnes expertes en matière de<br />

musées. Cette première expérience professionnelle<br />

tombait à pic et je saisis ma chance<br />

pour étudier le rôle que le MSK (musée des<br />

Beaux-Arts) pouvait avoir dans les quartiers<br />

de la périphérie de Gand. Après des mois de<br />

conversations avec des organisations et<br />

personnes de tout poil dans ces quartiers, je<br />

pouvais proposer un win for life potentiel<br />

pour le musée des beaux arts.<br />

L’un après l’autre, les chercheurs montèrent<br />

à la tribune. Que signifie le Musée de<br />

la Mine pour les fils de travailleurs immigrés à<br />

Zwartberg ? Quel rôle peuvent jouer les<br />

musées dans une ville comme Bruxelles ?<br />

Quel public le musée en tant qu’instrument<br />

peut-il encore toucher dans notre société ? Le<br />

musée, inventé pour que la bourgeoisie du<br />

xix e siècle prenne forme, a déterminé notre<br />

rapport avec l’art : comment adapter ce<br />

rapport à la vie contemporaine ?<br />

Dans les sièges en velours rouge du<br />

Beursschouwburg, nous écoutions ces<br />

interventions et ces pirouettes permettant de<br />

faire croire que chaque musée avait sa solution.<br />

Le directeur d’un musée brugeois, après<br />

une courte introduction sur les audio-guides<br />

et la problématique de leurs traductions (dont<br />

le japonais bien sûr), en arriva rapidement à<br />

ce qu’il aurait volontiers appelé le cœur de<br />

son discours, la vraie raison de sa présence<br />

à Bruxelles : un inventaire détaillé de la<br />

collection de son musée. Une liste de milliers<br />

de pièces de service en argent, de pots en<br />

étain, de dentelles, d’armes, calèches et pots<br />

de chambre… Ce n’est qu’après plusieurs<br />

interventions que le directeur a arrêté son<br />

énumération. Il regarda le public avec un air<br />

déconfit. À cette époque, ça me suffisait<br />

pour me lancer dans le combat contre le<br />

conservatisme brugeois qui empêchait de<br />

rendre notre ville plus vivante. Je me suis<br />

alors promis que jamais je ne travaillerais dans<br />

un milieu aussi fanatique et réactionnaire.<br />

Maintenant que cet homme est depuis<br />

longtemps pensionné – et que Bruges a<br />

heureusement évolué –, je me souviens de<br />

cette présentation comme du récit honnête<br />

d’un homme coupé de la réalité mais qui ne<br />

faisait absolument rien pour le cacher. Cet<br />

homme reste le symbole d’une génération<br />

pour qui le musée est une valeur intouchable.<br />

Il se demandait vraiment ce qu’il pouvait faire<br />

avec ses cuillères en argent et ses pots en<br />

étain, et avec les dentelles de son grenier, et<br />

qui s’y intéressait encore. Il était incapable de<br />

répondre à ces questions pertinentes. Dans<br />

sa position, il lui était impossible de parler du<br />

musée : il était dedans, il était le musée. Il conservait<br />

seul ces merveilles dans une grande<br />

maison dont lui seul avait la clé. Depuis sa<br />

fenêtre il voyait bien ce qui se passait dehors,<br />

et s’en réjouissait, mais il ne pouvait pas<br />

imaginer que son musée pourrait en faire<br />

partie. Avec le recul, je pense que c’était une<br />

très belle présentation. Il ne se cachait pas<br />

derrière des arguties : pas de programme<br />

éducatif pour faire passer la pilule, pas de<br />

petite histoire comme pièce de rechange du<br />

vécu.<br />

Le terme musée ne s’était jamais montré<br />

si clairement dans toute son immobilité,<br />

coupé de la réalité de façon quasi religieuse,<br />

procession de cardinaux en habit rouge<br />

avançant sous la voûte de la chapelle Sixtine<br />

pour élire un nouveau pape.<br />

Comment le musée peut-il se poser la<br />

question de son rôle dans la société, dans sa<br />

ville, sans prendre la distance nécessaire ?<br />

Les musées tentent de faire disparaître les<br />

« seuils » qui les séparent de la réalité alors<br />

que ces seuils n’existent que parce qu’ils les<br />

observent de là où ils sont. Ces seuils ne<br />

doivent pas disparaître. Laissez-les là, ces<br />

seuils, et franchissez-les vous-mêmes : dans<br />

ce sens, ils ne sont pas difficiles à franchir. Le<br />

monde ne peut plus être vu d’un point de<br />

vue fixe et unique.<br />

De plus en plus d’institutions patrimoniales<br />

se sont rendu compte qu’elles allaient ellesmêmes<br />

devenir du patrimoine si elles ne se<br />

repositionnaient pas. C’est pour cela que la<br />

notion de « communauté patrimoniale » est<br />

entrée dans le vocabulaire européen, amplifiée<br />

par le décret flamand de 2008 * sur le<br />

patrimoine culturel : faire partie d’une communauté<br />

patrimoniale implique une responsabilité<br />

concrète, une action, une activité, un<br />

engagement.<br />

Nous devons être des cannibales, dévorer<br />

et savourer notre patrimoine. Consommer<br />

dans le sens primaire du mot (rien à voir avec<br />

la valeur pécuniaire). Les communautés<br />

patrimoniales doivent utiliser les institutions<br />

pour nourrir les générations futures. Les<br />

institutions doivent utiliser les communautés<br />

patrimoniales pour établir le menu et,<br />

ensemble, assises à de longues tables,<br />

manger le service en argent, les bols en<br />

étain, les sous-plats en dentelle…<br />

* Een cultureel-erfgoedgemeenschap is een gemeenschap<br />

die bestaat uit organisaties en personen die een<br />

bijzondere waarde hechten aan het cultureel erfgoed of<br />

specifieke aspecten ervan. Ze wil dit erfgoed en haar<br />

aspecten door publieke actie behouden en doorgeven<br />

aan toekomstige generaties.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

46<br />

•<br />

Marco rauGei (it), 2008.<br />

Feutre sur papier.<br />

Coll. Mad musée.<br />

<strong>Liège</strong>•museum<br />

n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />

47

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