bulletin 01 WEB.pdf - Liège
bulletin 01 WEB.pdf - Liège
bulletin 01 WEB.pdf - Liège
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
Le Grand Curtius<br />
Musée d’Ansembourg<br />
Musée d’Art wallon<br />
Salle Saint-Georges<br />
Musée Grétry<br />
Les musées de la Ville de <strong>Liège</strong><br />
museum@liege.be<br />
Office du tourisme<br />
Musée de la Vie wallone<br />
Gare de <strong>Liège</strong>-Palais<br />
Archéoforum<br />
Le Grand Curtius<br />
136, rue Féronstrée / +32 (0)4 221 68 40.<br />
Du mercredi au lundi, de 10 à 18 h.<br />
Conservatoire<br />
Musée d’Ansembourg<br />
114, rue Féronstrée / +32 (0)4 221 94 02.<br />
Du mardi au samedi de 13 à 18 h, dimanche de 11 à 16 h 30.<br />
Musée d’Art wallon<br />
+ Salle Saint-Georges<br />
86, rue Féronstrée / +32 (0)4 221 92 31.<br />
Du mardi au samedi de 13 à 18 h, dimanche de 11 à 18 h.<br />
Musée Grétry<br />
34, rue des Récollets / +32 (0)4 343 16 10.<br />
Mardi et vendredi de 14 à 16 h, samedi de 10 à 12 h<br />
+ sur demande.<br />
Musée d’Art moderne et d’Art contemporain<br />
+ Cabinet des Estampes et des Dessins<br />
3, parc de la Boverie / +32 (0)4 342 39 23.<br />
Du mardi au samedi de 13 à 18 h, dimanche de 11 à 16 h 30.<br />
Fonts baptismaux<br />
Opéra<br />
Théâtre de la Place<br />
Galerie Wittert, Université de <strong>Liège</strong><br />
Trésor de la cathédrale<br />
Musée Tchantchès<br />
Maison de la Science, Aquarium<br />
MADmusée<br />
Musée d’Art moderne et d’Art contemporain<br />
Cabinet des Estampes et des Dessins<br />
Maison de la Métallurgie et de l’Industrie<br />
Musée des Transports en commun du pays de <strong>Liège</strong><br />
Gare de <strong>Liège</strong>-Guillemins<br />
Musée en plein Air, Sart Tilman, Université de <strong>Liège</strong><br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
48<br />
<strong>Liège</strong>•museum n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
<strong>bulletin</strong> trimestriel des musées de la Ville de <strong>Liège</strong> n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
49
<strong>Liège</strong>•museum<br />
acquisition/conservation<br />
expositions<br />
par ailleurs<br />
Bulletin trimestriel des musées de la Ville de <strong>Liège</strong>.<br />
Éditeur responsable : Jean Pierre Hupkens.<br />
92, rue Féronstrée, be-4000 <strong>Liège</strong>.<br />
Coordination : Grégory Desauvage.<br />
museum@liege.be<br />
Imprimé à 3 000 exemplaires sur papier recyclé, sans chlore,<br />
par l’Imprimerie de la Ville de <strong>Liège</strong>.<br />
Photos : Ville de <strong>Liège</strong> (Marc Verpoorten, Yvette Lhoest) /<br />
Sauf p. 1 et 33 : Jean-Marc Huygen / Carte de <strong>Liège</strong>, p. 48<br />
(couverture) : cellule Cartographie, département d’Urbanisme,<br />
Ville de <strong>Liège</strong>.<br />
<strong>Liège</strong>, février 2<strong>01</strong>1, n° 1.<br />
Sommaire<br />
4 Patrimoine et philantropie<br />
Le Fonds David-Constant géré par la Fondation Roi Baudouin<br />
7 Onze œuvres du paysagiste Closson acquises par le Fonds Courtin-Bouché<br />
8 Les beaux restes d’une reine de Babylone<br />
Restauration de la Sémiramis de Christian köHler<br />
14 Il n’y a pas photo !<br />
Acquisition d’un dessin aquarellé montrant une vue de <strong>Liège</strong> en 1814<br />
16 Nouvelles armes<br />
Quelques acquisitions récentes au département des Armes du Grand Curtius<br />
19 Petite histoire d’une grande encyclopédie<br />
L’Encyclopédie méthodique<br />
22 Conservation & restauration<br />
23 Les collections se développent, se soignent, s’exportent<br />
24 Agenda des expositions temporaires<br />
26 Expositions temporaires<br />
29 Prix de la Création légeoise dans le domaine des arts plastiques<br />
30 En plus des expositions temporaires<br />
32 Jardin d’hiver + Wintertuin<br />
36 8 e Biennale internationale de gravure contemporaine de <strong>Liège</strong><br />
38 Regroupement et déménagement des réserves lapidaires<br />
38 Le Service éducatif et au public des musées<br />
39 Une imprimerie dans la Ville<br />
40 Flora<br />
La nouvelle solution informatique des musées de la Ville de <strong>Liège</strong><br />
42 Qui se ressemble …<br />
À propos de sculptures mosanes<br />
45 La musique est un musée vivant<br />
46 Le musée mangeable<br />
Nous devons être des cannibales<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
2<br />
Les musées sont des maisons<br />
qui abritent seulement<br />
des pensées.<br />
Marcel proust (1871-1922), Contre Sainte-Beuve.<br />
Rien ne lie un silex de 400 000 ans à une<br />
fresque de Sol LeWitt, si ce n’est le regard<br />
que nous portons sur eux. La fonction<br />
du musée est de nous signaler ce qui, ici<br />
et maintenant, est objet de pensée (avec<br />
toutes les ambiguïtés que cela suppose),<br />
de recenser et de rendre intelligible – avec<br />
et pour nos yeux du xxi e siècle – ce qui fait<br />
l’humain.<br />
C’est dire, bien sûr, la fragilité de l’institution<br />
muséale et sa dépendance à l’égard<br />
de l’histoire des idées, sa soumission à une<br />
époque et une société. Mais c’est dire en<br />
même temps la solidité de l’optimisme de<br />
ceux qui font au quotidien le musée :<br />
c’est à leur rencontre que « <strong>Liège</strong>•museum »<br />
invitera ses lecteurs, au fil des numéros.<br />
Jean-Marc Gay<br />
Directeur des musées de la Ville de <strong>Liège</strong><br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° n° 1, 1, février hiver 2<strong>01</strong>0 2<strong>01</strong>1<br />
3<br />
S’il est un génie propre à <strong>Liège</strong>, c’est celui de s’ouvrir aux courants qui parcourent<br />
le monde, de s’en enrichir et d’en assurer la propagation. Nos musées attestent<br />
de cette disposition à puiser aux sources de cultures diverses pour construire une<br />
culture spécifique et de cet état d’esprit millénaire, qu’une situation géographique<br />
exposée a contribué à développer.<br />
Ainsi le culte de Mithra est constaté à Angleur au tournant des 2 e et 3 e siècles,<br />
diverses pièces en bronze conservées au Grand Curtius nous en sont parvenues.<br />
Ce culte à mystères diffusé par les armées romaines a coexisté à <strong>Liège</strong> avec les<br />
cultes traditionnels de l’empire de Rome.<br />
Plus près de nous Lambert Lombard apporte à <strong>Liège</strong> l’esprit de la Renaissance<br />
italienne avec sa nouvelle approche humaniste, et les collections liégeoises en<br />
attestent.<br />
Sans doute cet esprit soufflait-il encore sur la ville lorsque ses émissaires sauvèrent<br />
du désastre intellectuel nazi des œuvres d’exception proposées à la vente<br />
de Lucerne en 1939, offrant dans le même temps à notre ville une prestigieuse<br />
collection.<br />
Ces trois exemples illustrent la capacité de faire voisiner paisiblement des convictions<br />
religieuses diverses, la volonté de s’enrichir en permanence d’apports extérieurs et<br />
la détermination dans la défense de choix de civilisation.<br />
Cette manière de former une société qui jamais ne se ferme, qui toujours dépasse<br />
ses propres limites, mue par la passion de s’exposer, de s’imprégner et de diffuser,<br />
est peut-être le plus sûr chemin vers la fraternité. Que cette publication en soit le<br />
modeste instrument.<br />
Jean Pierre Hupkens<br />
Échevin de la Culture<br />
Méduse, applique, fin 2 e - 3 e siècle.<br />
Angleur (<strong>Liège</strong>). Bronze.<br />
M.A.A.D. - SN/2000/AR/244.
La mise en œuvre personnalisée d’un projet philanthropique précis<br />
Née à <strong>Liège</strong> en 1917, Simone David y a toujours vécu. Diplômée en droit et en<br />
sciences sociales de l’Université de sa ville, elle a connu une brillante carrière scientifique<br />
et académique à l’Université de <strong>Liège</strong>. Elle était sensible à l’histoire de sa<br />
région, à son patrimoine architectural et artistique mais aussi à son développement.<br />
Elle était attentive au sort des plus humbles comme aux défis que devaient relever<br />
les responsables patrimoniaux, politiques, économiques et sociaux.<br />
Simone David-Constant souhaitait une mise en œuvre personnalisée de son<br />
projet de mécénat : concentrer son action dans des limites géographiques précises<br />
et pouvoir agir dans trois domaines d’action différents. Elle connaissait l’action de la<br />
Fondation Roi Baudouin pour avoir déjà contribué à quelques initiatives dans sa<br />
région, principalement patrimoniales, à travers plusieurs comptes de projet ouverts<br />
à la Fondation. C’est vers cette institution qu’elle s’est tournée pour élaborer son<br />
projet de mécénat. Institué grâce à un legs très important (capital de 10 millions<br />
d’euros), le Fonds David-Constant a été créé au sein de la Fondation Roi Baudouin<br />
au décès de Simone Constant en octobre 2003. Depuis, il est géré par la Fondation<br />
qui lui apporte son expertise, son indépendance et sa crédibilité en matière de<br />
gestion financière, d’administration, de mise en œuvre des projets ; elle joue également<br />
auprès de lui un rôle de support, de relais, de catalyseur.<br />
Simone David-Constant a choisi trois domaines lui tenant à cœur. Le droit<br />
était toute sa vie. Décider de promouvoir la recherche et les études de droit à<br />
l’Université de <strong>Liège</strong>, c’était permettre à son université de développer un centre<br />
d’excellence. Les enfants étant le meilleur capital pour l’avenir, la fondatrice voulait<br />
soutenir ceux qui intervenaient auprès des plus défavorisés, ceux qui souffraient ou<br />
risquaient de souffrir de situations d’abandon, d’exclusion ou de troubles du comportement<br />
graves compromettant leur insertion sociale et scolaire.<br />
Enfin, Simone David-Constant savait quelle place occupe le patrimoine dans<br />
le renom de <strong>Liège</strong>, et souhaitait le pérenniser pour les générations futures. Cela l’a<br />
donc incitée à soutenir la conservation, la restauration et la mise en valeur d’éléments<br />
significatifs du patrimoine liégeois pour autant qu’ils se trouvent dans l’arrondissement<br />
administratif de <strong>Liège</strong>. Il vise tout type d’œuvre : sculpture, peinture, dessin, vitrail,<br />
etc. Son objectif final est d’en assurer la sauvegarde et de contribuer à son rayonnement.<br />
Un montant de 150 000 euros est désormais disponible annuellement pour<br />
assurer la sauvegarde des éléments les plus significatifs de ce patrimoine. Depuis<br />
cinq ans, 35 œuvres ont pu être restaurées et conservées. De grands noms ont été<br />
mis à l’honneur tels Fisen, DelCour, lombarD, le loup, Closson. Un montant total<br />
de plus de 750 000 euros a déjà été redistribué pour cet axe du Fonds.<br />
L’action du Fonds en faveur des musées de la Ville de <strong>Liège</strong><br />
Les musées de la Ville de <strong>Liège</strong> ont bien compris tout son potentiel. Dès la première<br />
année, le Fonds a reçu nombre de demandes intéressantes. Sachant l’appel récurrent,<br />
les responsables des collections n’ont pas tardé à élaborer une véritable politique<br />
Anne De breuCk<br />
Chargée de mission<br />
Fondation Roi Baudouin<br />
Patrimoine et philanthropie<br />
Le Fonds David-Constant géré par la Fondation Roi Baudouin<br />
Presque tous les Liégeois ont entendu<br />
parler du Fonds David-Constant.<br />
C’est actuellement la fondation liégeoise<br />
la plus importante créée par une<br />
personne privée et la première<br />
en termes de moyens.<br />
En cinq ans d’existence, il a déjà<br />
distribué plus de deux millions et demi<br />
d’euros entre les trois axes d’action<br />
fixés par sa fondatrice : le patrimoine,<br />
l’enfance et les études de droit.<br />
Sensible au potentiel de soutien<br />
que peut signifier ce fonds pour<br />
le patrimoine de la ville, <strong>Liège</strong>•museum<br />
a souhaité consacrer une tribune<br />
expliquant l’amorce et les rouages<br />
du Fonds, afin de préciser son rayon<br />
d’action et d’informer les candidats<br />
éventuels.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
4<br />
Pieta (détail),<br />
chêne sculpté<br />
et polychromé.<br />
<strong>Liège</strong>, fin xv e s.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
5<br />
de sauvegarde de leurs œuvres sur le moyen et le long terme. Ils ont aussi saisi cette<br />
occasion pour mettre en lumière ce patrimoine renaissant de ses cendres. Les expositions<br />
Delcour ou Le Loup sont encore dans toutes les mémoires.<br />
L’action désintéressée du Fonds permet non seulement de sauver des œuvres<br />
en péril, mais également d’attirer à nouveau le regard sur un patrimoine important<br />
mais moins en vogue actuellement. Ainsi a pu être sauvée la toile de l’Allemand<br />
Christian köHler, Sémiramis, réalisée en 1852, actuellement au Grand Curtius (voir<br />
page 8).<br />
Grâce au Fonds Constant, le Cabinet des Estampes et des Dessins a pu<br />
élaborer un plan de traitement de la totalité du Fonds Closson. Ce Fonds est constitué<br />
de 604 œuvres sur papier de Gilles-François Closson (1796-1842), paysagiste<br />
né à <strong>Liège</strong> et ayant séjourné à Rome de 1825 à 1829. Sa veuve donna le fonds<br />
d’atelier à la Ville quelques années après le décès de l’artiste. Un premier<br />
projet concernant les 127 huiles sur papier cartonné fut introduit auprès<br />
du Fonds en 2007. Il fut mené à bien en deux ans. Le deuxième projet<br />
est en cours. Il concerne la restauration et le conditionnement de 146<br />
dessins à la mine de plomb sur papier calque. Ce support particulièrement<br />
fragile offre des problèmes spécifiques de présentation,<br />
conservation et lisibilité, étant donné la transparence du calque.<br />
Cette dernière tranche clôture la restauration de l’ensemble<br />
du Fonds qui sera dévoilé lors d’une exposition prévue en<br />
2<strong>01</strong>2.<br />
La Bibliothèque Ulysse Capitaine conserve 240 dessins<br />
de Remacle le loup (1696-1746), illustrateur spadois, auteur<br />
de nombreux dessins préparatoires aux Délices du Païs de<br />
<strong>Liège</strong> de saumery. Il s’agit de la plus grande collection de<br />
dessins de l’artiste dont l’importance du témoignage pour<br />
<strong>Liège</strong> et sa région n’est plus à prouver. Vingt-quatre d’entre<br />
eux ont bénéficié d’un traitement financé par le Fonds afin<br />
d’enrayer les dégradations, pliures et traces de restaurations<br />
antérieures. À l’occasion de la fin des travaux, une exposition<br />
et une publication ont été consacrées à l’artiste cet automne.<br />
Si le Fonds agit en priorité en restaurant les œuvres d’art,<br />
il peut décider d’actions exceptionnelles. Ainsi, il ne pouvait<br />
laisser passer l’occasion de soutenir l’initiative des Amis du<br />
Musée d’Art religieux et d’Art mosan d’acquérir une Pieta<br />
mosane en bois polychrome réalisée pour une chapelle du<br />
quartier nord de la ville. Grâce à l’intervention des Amis, de la<br />
Ville et du Fonds, cette œuvre de belle facture est désormais<br />
visible au Grand Curtius.<br />
Le dernier projet sélectionné par le Fonds en faveur des<br />
musées de la Ville vise à restaurer un ensemble de treize<br />
œuvres d’art ancien provenant du Musée d’Art wallon et du<br />
Musée d’Art moderne et d’Art contemporain. Il s’agit de quatre<br />
huiles sur panneau du Musée d’Art wallon et de neuf huiles<br />
sur toile ou sur bois des réserves du MAMAC, parmi lesquelles<br />
un Léonard DeFranCe et un Dirk Hals. Ces œuvres ont été<br />
sélectionnées par un comité d’experts et l’étude de leur attribution<br />
est actuellement en cours. Ce fonds d’art ancien sera<br />
intégré dans le futur pôle Beaux-Arts. L’objectif est de sortir<br />
ces œuvres, jamais ou rarement montrées, de l’anonymat. À<br />
l’été 2<strong>01</strong>1, se tiendra à la Salle Saint-Georges une exposition<br />
en préfiguration de ce nouveau pôle.
Impact et pérennité<br />
Le Fonds s’inscrit au sein du domaine d’action « Patrimoine » de la Fondation Roi<br />
Baudouin. Son développement s’appuie sur près de 25 ans d’expérience dans ce<br />
domaine. Les campagnes de restauration thématiques SOS (1989-1999) lui ont<br />
notamment permis d’acquérir une vue globale sur les besoins et d’établir un réseau<br />
de professionnels. Depuis, des mécènes ont créé des fonds nominatifs ayant<br />
également pour objectif la restauration de notre patrimoine. La Fondation a ainsi<br />
renforcé ses compétences en la matière et peut désormais proposer une méthode<br />
d’action qui leur assurera un impact maximal. Cette méthode est remise en question<br />
régulièrement en fonction de l’évolution des besoins. Le Fonds David-Constant est<br />
ainsi assuré de garder le niveau de ses interventions et peut garantir la pérennité de<br />
la mise en œuvre de ses objectifs.<br />
Agissant dans le même domaine,<br />
certains fonds peuvent joindre<br />
leurs efforts pour permettre la réalisation<br />
de projets majeurs hors d’atteinte<br />
pour un seul fonds. La restauration<br />
du retable de la Passion de<br />
l’église Saint-Denis par exemple est<br />
une entreprise tellement vaste qu’elle<br />
n’aurait jamais pu être envisagée<br />
sans la collaboration établie entre le<br />
Fonds David-Constant et le Fonds<br />
Inbev Baillet Latour.<br />
Simone David-Constant se<br />
préoccupait de l’avenir. À charge<br />
pour nous, Fondation Roi Baudouin<br />
et responsables de collections, de<br />
faire honneur à sa générosité en travaillant<br />
à la réalisation de son objectif<br />
: transmettre ce patrimoine dans<br />
les meilleures conditions et en assurer le rayonnement hors de la principauté. Que<br />
ce patrimoine puisse continuer à témoigner de la créativité et de la finesse des<br />
artistes de la principauté et de la grandeur de la Ville à travers les siècles.<br />
En pratique<br />
L’appel à candidature lancé chaque année s’adresse à tout gestionnaire ayant en<br />
charge le patrimoine à <strong>Liège</strong>. Le Comité de gestion souhaite recevoir des projets<br />
précis, clairement limités dans le temps. Les projets de plus grande ampleur peuvent<br />
par exemple être scindés en plusieurs sous-projets bien circonscrits, chaque sousprojet<br />
pouvant être présenté d’une année à l’autre. Les modalités pour y participer<br />
sont précisées sur www.kbs-frb.be. La date limite de réception des dossiers se<br />
situe généralement dans la première quinzaine du mois de février.<br />
Le Comité de gestion du Fonds examine les dossiers de candidature chaque<br />
année, lors de sa réunion de printemps, et redistribue, sur base des conseils d’experts<br />
consultés. Présidé par Michèle Alexandre-Vanwijck, professeur émérite de<br />
l’Université de <strong>Liège</strong>, il prend ses décisions de façon tout à fait autonome. Maître<br />
Alain Deliège, notaire à <strong>Liège</strong>, chargé de cours à l’Université de <strong>Liège</strong>, ancien<br />
président de la Chambre nationale du notariat belge, y représente la fondatrice.<br />
•<br />
Pour toute information spécifique :<br />
Anne De Breuck<br />
+32 (0)2 549 61 54<br />
debreuck.a@kbs-frb.be<br />
Une œuvre restaurée grâce au Fonds Constant<br />
Gilles-François-Joseph Closson,<br />
Castellamare, huile sur papier, 164 x 3<strong>01</strong> cm.<br />
Inv. K556/23.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
6<br />
Régine rémon<br />
Conservatrice du<br />
Cabinet des Estampes et des Dessins<br />
En juin dernier, à Paris, la maison de ventes<br />
Millon & Associés présentait un important<br />
ensemble d’esquisses à l’huile sur papier<br />
de Gilles-François-Joseph Closson (<strong>Liège</strong>,<br />
1796-1852). Quelques lignes définissaient<br />
l’artiste liégeois : Élève de Gros à Paris de<br />
1817 à 1824, il séjourne en Italie entre 1825<br />
et 1829. Il se passionne pour le paysage en<br />
plein air, ce dont témoignent nos esquisses.<br />
Closson explore la Nature sous tous ses<br />
aspects. Il se sert des réserves de papier<br />
immaculées pour donner un sentiment<br />
d’instantanéité à ses études inachevées.<br />
La série comportait trente pochades<br />
réalisées à l’huile sur papier ou sur toile.<br />
Le Cabinet des Estampes et des Dessins est<br />
particulièrement sensible à la production du<br />
paysagiste Closson puisqu’il conserve, grâce<br />
à un don de la veuve de l’artiste effectué en<br />
1849, pas moins de 604 œuvres sur papier :<br />
crayon sur papier à dessin ou sur papier<br />
calque, huile sur carton. Ce fonds est classé<br />
comme Trésor par la Communauté française<br />
depuis mars 2<strong>01</strong>0. Ces dernières années, il<br />
a bénéficié de plusieurs traitements particuliers<br />
: campagne photographique, inventaire<br />
informatisé, et surtout conditionnement et<br />
restauration grâce à la Ville de <strong>Liège</strong>, à la<br />
Fondation Roi Baudoin et au Fonds Constant.<br />
De plus, il a récemment fait l’objet d’une<br />
étude dans le cadre d’un mémoire en histoire<br />
de l’art.<br />
À l’annonce de cette vente publique –<br />
ce qui ne laisse guère de place aux tergiversations<br />
–, le CED s’est mobilisé afin d’éviter<br />
la dispersion de cet ensemble. Grâce à l’intervention<br />
rapide de la Fondation Roi Baudouin,<br />
le Fonds Courtin-Bouché, dont un des<br />
Onze œuvres du paysagiste Clo s s o n acquises par le Fonds Courtin-Bouché<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
7<br />
Gilles-François-Joseph Closson,<br />
Voilier dans une crique, huile sur toile, 30,9 x 42,4 cm.<br />
Inv. VII 10/446.<br />
objectifs est de préserver le patrimoine<br />
culturel moblier d’artistes belges, a décidé<br />
de procéder à l’acquisition de quelques-unes<br />
de ces huiles. Onze de ces trente œuvres ont<br />
ainsi été acquises pour être mises en dépôt<br />
au CED et rejoindre le fonds d’atelier de<br />
l’artiste.<br />
Les œuvres acquises sont réalisées sur<br />
toile ou sur papier, certaines sur papier de<br />
réemploi, présentant au revers des fragments<br />
découpés de dessins académiques, d’autres<br />
encore sur du papier peint fleuri. Les sujets<br />
sont ceux qui ont de tout temps séduit<br />
l’artiste : arbres, sous-bois, rivières, cascades,<br />
falaises, vaches ou chèvres, ou<br />
encore Voilier dans une crique, dont les<br />
gammes bleutées rappellent la sensibilité des<br />
vues de Castellamare. Le Paysage au pont,<br />
daté du 10 octobre 1822, apporte la preuve<br />
que l’artiste s’est intéressé au paysage en<br />
plein air avant son séjour à Rome.<br />
Les supports peu soignés, découpés<br />
maladroitement, les traces de punaises, le<br />
format facile à transporter et le dessin préalable<br />
sous-jacent, confortent la thèse de la<br />
peinture réalisée en plein air.<br />
Par un heureux hasard, dans le même<br />
temps, le Metropolitan Museum de New York<br />
enrichissait ses collections d’un ensemble de<br />
toiles de l’artiste liégeois.<br />
Ce faisceau d’éléments favorables à<br />
Closson nous encourage à organiser une<br />
exposition qui fera toute la lumière sur ce<br />
fonds exceptionnel et sur cet artiste talentueux,<br />
peu connu en territoire liégeois, en le<br />
contextualisant dans son époque et les<br />
manies de son siècle.
Christian Köhler, un disciple pas comme les autres<br />
Né en 1809 à Werben en Allemagne, Christian köHler est issu d’un milieu modeste.<br />
Il est engagé comme palefrenier au service du romancier K. G. S. Heun 1 . Conscient<br />
de l’intérêt de son employé pour les beaux-arts, l’écrivain le présente au peintre<br />
Wilhelm sCHaDow qui connaît à cette époque une renommée internationale pour<br />
avoir fondé, avec d’autres artistes, le mouvement nazaréen. Ce courant artistique<br />
du début du xix e siècle prône un retour à la spiritualité en peinture et encourage<br />
l’utilisation d’une technique sobre. Sa notoriété lui permettra, quelque temps plus<br />
tard, d’introduire Christian köHler à l’Académie de Berlin où il commencera sa formation<br />
artistique.<br />
En 1826, köHler devient l’élève favori de sCHaDow. Celui-ci entretient de<br />
bons rapports avec le gouvernement prussien, ce qui lui vaut d’être nommé directeur<br />
de l’Académie de Düsseldorf. Il en réorganise la structure et donne à l’établissement<br />
une renommée européenne. L’Académie profite de cet élan et établit les premiers<br />
fondements de la célèbre « École de Düsseldorf ». köHler décide de suivre son<br />
mentor et dirige, dans un premier temps, un atelier de peinture. En 1852, il est<br />
nommé professeur à l’Académie, où il enseigne le dessin ancien et la peinture, de<br />
1855 à 1858.<br />
Peintre de compositions allégoriques, historiques et bibliques, köHler s’inspire<br />
des œuvres de la Renaissance et étudie particulièrement les toiles de rapHaël. Ses<br />
figures féminines deviendront d’ailleurs un modèle du genre pour les artistes qu’il<br />
fréquente. Il réalise aussi quelques portraits remarquables, dont un de son maître<br />
sCHaDow et un autoportrait pour l’Académie. Ses peintures religieuses ont été<br />
rendues populaires par une série de gravures et de lithographies qui circulent dans<br />
toute l’Europe.<br />
En 1860, pour des raisons de santé, köHler cherche un climat plus favorable<br />
et s’établit sur la côte méditerranéenne. Il meurt à Montpellier le 30 janvier 1861.<br />
Köhler et l’art de son temps<br />
Le xix e siècle, en Allemagne comme ailleurs en Europe, voit déferler le mouvement<br />
romantique. Alors qu’il est en plein épanouissement, en 1808, au nord de l’Allemagne,<br />
un groupe d’artistes du sud des pays germanophones fait sécession et quitte<br />
l’Académie de Vienne. Parmi ces peintres figurent Friedrich overbeCk, Franz pForr,<br />
Wilhelm sCHaDow et Cornélius.<br />
Écœurés par le formalisme de l’enseignement prussien et mus par la volonté<br />
affirmée de renouveler l’art allemand, ces peintres préconisent un retour aux valeurs<br />
chrétiennes et réaffirment le noble sentiment patriotique. Ils créent la « Confrérie de<br />
saint Luc » et s’installent dans un couvent désaffecté de Rome, en 1810. Cette communauté<br />
se convertit au christianisme et donne naissance au courant nazaréen.<br />
Leurs préceptes esthétiques avantagent le fond sur la forme. La composition<br />
devient figée, les couleurs se ternissent, les sujets s’orientent vers des thématiques<br />
bibliques tandis que leur inspiration se fonde, pour les uns, sur les premières œuvres<br />
de rapHaël et le Quattrocento et, pour les autres, sur les primitifs allemands comme<br />
Grégory DesauvaGe<br />
Historien de l’art<br />
Musées de <strong>Liège</strong><br />
Les beaux restes d’une reine de Babylone<br />
Restauration de la Sémiramis de Christian Köh l e r<br />
Grâce au soutien du Fonds David-<br />
Constant, <strong>Liège</strong> redécouvre une toile<br />
de ses collections. Ce tableau<br />
(huile sur toile, 258 x 304 cm),<br />
réalisé par Christian köHler en 1852<br />
et s’intitulant Sémiramis, naguère<br />
en péril, est aujourd’hui sauvegardé<br />
à la suite d’une restauration intégrale.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
8<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
9
Dürer. En 1817, l’arrivée du peintre Cornélius relance le mouvement et lui donne<br />
une popularité indiscutable en Europe. Il met en avant la peinture monumentale qui,<br />
selon lui, doit exprimer l’idéal chrétien, historique et patriotique. La technique picturale<br />
devient lisse et le tracé prédomine sur la couleur. Comme tous les membres de<br />
sa confrérie, sCHaDow revient en 1819 en Allemagne où il rencontre köHler qui se<br />
laissera gagner par l’enseignement des Nazaréens.<br />
Sous la férule de sCHaDow, l’« École de Düsseldorf » acquiert dès 1826 une<br />
réputation internationale. Elle se caractérise par une recherche de réalisme et de<br />
sensualité. Ces nouveaux acquis donneront, aux derniers souffles du mouvement<br />
romantique, l’impulsion nécessaire pour orienter la peinture vers la modernité.<br />
Christian köHler est pleinement engagé dans cet élan artistique, qui garde encore<br />
la marque visible des Nazaréens. Il exploite<br />
des sujets bibliques, allégoriques<br />
et historiques où le sens du détail est privilégié.<br />
Son attention se porte sur la composition<br />
et les personnages, l’objectif<br />
étant de restituer avec le plus de justesse<br />
les événements historiques évoqués.<br />
L’expression des visages est finement<br />
reproduite et la touche, bien que léchée,<br />
rend avec sensualité le raffinement des<br />
étoffes. Malgré cette recherche de réalisme,<br />
les scènes de ses peintures restent<br />
figées dans une certaine théâtralité et la<br />
fougue des épisodes qu’il représente<br />
semble suspendue dans le temps.<br />
L’École de Düsseldorf et <strong>Liège</strong><br />
Le mouvement connaît à <strong>Liège</strong> un accueil<br />
particulièrement chaleureux dans la seconde<br />
moitié du xix e siècle. Les raisons<br />
de ce succès tiennent, sans conteste,<br />
aux événements de 1830 et à la création<br />
toute récente de la Belgique. La peinture d’histoire et le sentiment national trouvent<br />
en ces mutations historiques un terreau fertile. De surcroît, l’École allemande a de<br />
nombreux partisans parmi les amateurs d’art liégeois. Jules HelbiG, artiste de son<br />
état, fait partie de ceux-ci. Il introduit, par le biais de la « Société pour l’Encouragement<br />
aux Beaux-Arts » 2 dont il est le secrétaire attitré, les grands artistes de l’École de<br />
Düsseldorf et les donne à voir lors de différentes expositions qui se tiennent dans les<br />
salles de l’Émulation, dans l’ancienne église Saint-André et parfois dans des annexes<br />
comme la Salle académique de l’Université. Ce phénomène prend une ampleur considérable<br />
et culmine en 1875 où 54 peintres de Düsseldorf sont présentés au public.<br />
L’attirance de HelbiG pour cette École n’est toutefois pas un hasard. D’origine<br />
allemande, il poursuit ses études artistiques dans la prestigieuse Académie de<br />
Düsseldorf. Il est donc coutumier des théories qui y sont développées et sa sensibilité<br />
le porte d’emblée vers ce courant.<br />
La pénétration des théories allemandes dans la sphère artistique liégeoise<br />
est très importante et constitue un véritable foyer d’inspiration pour les peintres de<br />
nos régions. La peinture d’Histoire devient un genre à part entière. Des artistes tels<br />
que Barthélemy vieillevoye, avec son Assassinat de La Ruelle, Bourgmestre de<br />
<strong>Liège</strong>, en 1637, Auguste CHauvin, Jules HelbiG, Victor Fassin ou encore Charles<br />
soubre, avec son tableau intitulé Famille noble devant les conseils des Troubles,<br />
sont autant d’émules qui constituèrent, avec plus ou moins de talent, une suite aux<br />
mouvances allemandes romantiques.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
10<br />
États de la toile avant et après restauration.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
11<br />
Sémiramis, reine de légende<br />
Le sujet que représente köHler en 1852<br />
tient tout autant du domaine biblique<br />
que de la légende. Sémiramis est la reine<br />
légendaire de Babylone, créatrice des<br />
Jardins suspendus (une des sept merveilles<br />
du monde antique). Son histoire<br />
est relatée par plusieurs auteurs dont<br />
DioDore De siCile et HéroDote, ainsi que<br />
par les textes bibliques. Son existence<br />
historique est assimilée à la reine assyrienne<br />
Sammuramat (ix e siècle av. J.-C.).<br />
Femme de pouvoir, elle entreprend<br />
d’élargir son royaume et organise des<br />
expéditions jusqu’en Égypte ou en Inde.<br />
Sa soif d’entreprendre la pousse à bâtir<br />
de nouveaux édifices à Babylone avec<br />
une munificence sans réserve. La cité<br />
acquiert dans le monde antique une incroyable<br />
popularité. Plusieurs fois durant<br />
son règne, elle fait face aux soulèvements<br />
de son peuple qu’elle réprime violemment.<br />
Sa seule présence charismatique<br />
suffit à calmer toute sédition. Rentrée de<br />
campagne militaire, son fils Ninias ourdit<br />
contre elle une conspiration qui la contraint<br />
à céder son empire, sans opposer<br />
de résistance. Après son abdication, elle<br />
se retire de toute vie publique.<br />
Sémiramis ne cessera d’inspirer les<br />
artistes de tous temps. L’image d’une femme<br />
guerrière, entreprenante, autoritaire et bâtisseuse<br />
donne à sa personnalité un relief<br />
propre à stimuler l’imagination des auteurs<br />
mais aussi des peintres 3 .<br />
La Sémiramis de <strong>Liège</strong><br />
Le drame littéraire La fille de l’air de<br />
Caldéron De la barCa, auteur espagnol du xvii e siècle, aurait inspiré köHler pour<br />
son tableau. Les théoriciens du mouvement romantique allemand (sCHleGel,<br />
lessinG, GoetHe) redécouvrent les textes de l’écrivain et les popularisent. GoetHe<br />
faisait d’ailleurs grand cas de La fille de l’air.<br />
Différents personnages de la toile constituent un répertoire de figures bibliques<br />
que köHler traite couramment. Les dames de cour entourant Sémiramis sont ainsi<br />
représentées sous les traits d’Agar et de Myriam. La reine est face au spectateur,<br />
sur un trône décoré de riches tissus. Elle s’apprête à empoigner le glaive que lui<br />
tend une servante. Les traits du visage expriment l’inquiétude et la peur, les corps<br />
se crispent. Sur la partie supérieure droite, au travers d’une fenêtre, on distingue un<br />
soldat qui pointe du doigt la ville de Babylone en feu, en proie au soulèvement du<br />
peuple. En arrière-plan, au pied du temple, la population s’échauffe.<br />
Le mouvement de révolte évoqué ici trouve un écho évident dans les événements<br />
révolutionnaires de 1848-49. Incontestablement, l’actualité inspire les peintres<br />
et constitue une réserve inépuisable, en ces temps de désordre et de bouleversement.<br />
Le patriotisme se développe et fonde les sujets que la peinture évoque.
La composition est soigneusement étudiée et s’élabore sur un triangle équilatéral<br />
central reposant sur un de ses côtés. Cette structure donne au sujet une assise<br />
stable et fixe, exempte de tout dynamisme. Cette particularité reste fidèle aux enseignements<br />
de l’École de Düsseldorf. Les couleurs, quant à elles, sont appliquées en<br />
masses unies et léchées. La recherche d’une vérité historique motive le recours au<br />
rendu sensuel des matières. Par exemple, les tissus font l’objet d’une recherche raffinée<br />
: le moiré des robes, l’éclat des ors, le satiné et la transparence des mousselines.<br />
Il est clairement perceptible que köHler cherche à faire évoluer la peinture<br />
de son temps vers une représentation plus réaliste et plus expressive. Il s’oriente<br />
d’évidence vers une recherche sensuelle et vivante du sujet. Malheureusement, ses<br />
tentatives ne parviennent pas à l’extraire totalement du courant rigoriste nazaréen et<br />
ses toiles conservent encore la froide distance des œuvres de ses maîtres.<br />
Curieuses origines<br />
Étonnamment, köHler n’en est pas à son coup d’essai lorsqu’il traite son thème<br />
babylonien. Il existe trois versions de Sémiramis. Il y travaille la première fois en<br />
1843, soit neuf ans avant la réalisation de deux autres versions. La première toile fait<br />
peu de cas de la couleur, qui semble comme fondue en une série de nuances<br />
ternes. Néanmoins, la structure est déjà clairement établie. La composition triangulaire<br />
reste de mise mais les personnages sont moins nombreux. La vue de Babylone<br />
est plus détaillée mais n’acquiert pas encore la fougue et l’expressivité des variantes<br />
suivantes. La toile a appartenu à la Maison royale de Hanovre et fut vendue aux<br />
enchères par Sotheby’s en 2005, à un collectionneur privé.<br />
Les deux autres tableaux traitent de la même thématique et sont parfaitement<br />
identiques. Ils sont réalisés la même année, en 1852. L’un appartient à la Nationalgalerie<br />
de Berlin (Staatliche Museen - W.S. 112) et l’autre fait partie des collections<br />
de <strong>Liège</strong>. L’exemplaire berlinois a été acquis par l’entremise de H. Wagener, riche<br />
banquier berlinois et fondateur de la Nationalgalerie. Féru d’art et grand collectionneur,<br />
il constitua une réserve d’œuvres des plus grands peintres qu’il légua à la ville de<br />
Berlin. La version berlinoise a participé à deux expositions d’envergure internationale.<br />
Quant au tableau liégeois, il a été acquis à la suite du « Salon pour l’encouragement<br />
aux Beaux-Arts » de <strong>Liège</strong>, en 1853, pour intégrer la collection du Musée<br />
des Beaux-Arts de <strong>Liège</strong>. Puis il fut mis en dépôt dans un bâtiment public où il subit<br />
des dégâts. À la suite de ces altérations, l’œuvre regagna les réserves du musée<br />
avant d’être restaurée.<br />
Restauration grâce au Fonds David-Constant et aspects techniques<br />
Sur base d’un dossier présenté en 2009 par le MAMAC, le Fonds David-Constant a<br />
retenu la proposition de restauration de la Sémiramis de <strong>Liège</strong>. L’état avancé des<br />
détériorations rendait sa sauvegarde urgente et indispensable. Dès l’acceptation de<br />
la proposition, le restaurateur désigné pour cette tâche, Pierre Masson, et son<br />
équipe de l’atelier Salvartes, a emporté la toile dans son atelier afin de lui donner les<br />
traitements nécessaires.<br />
La toile, d’une dimension non négligeable (258 x 304 cm), présentait, en son<br />
état initial, de graves altérations : des salissures superficielles, des traces de coulées,<br />
des vernis oxydés et brunis, une toile oxydée et fragilisée, mais surtout d’importantes<br />
déchirures d’une longueur cumulée de huit mètres et de deux pertes de toile dans<br />
la partie inférieure (droite). Le châssis de l’œuvre était, en outre, trop fragile pour<br />
soutenir le poids du doublage indispensable de la toile, vu l’importance des<br />
déchirures du support.<br />
La première opération a consisté à déposer l’œuvre de son châssis, c’est-àdire<br />
à ôter la toile de la structure de bois arrière qui la soutenait. Le revers de la toile<br />
a pu être complètement et délicatement nettoyé. Les déformations constatées sur<br />
la surface ont été réduites autant que possible par une mise à plat. Les déchirures<br />
La Nationalgalerie de Berlin ne s’est pas<br />
trompée sur l’importance de ce tableau.<br />
À deux reprises, elle l’a fait figurer dans<br />
des expositions internationales<br />
consacrées, pour l’une, à Babylone et,<br />
pour l’autre, aux peintres romantiques<br />
allemands. Le Palais des Beaux-Arts de<br />
Bruxelles accueillit la seconde en 2007<br />
et reçut un accueil favorable du public.<br />
Babylon : Mythos und Wahrheit. Catalogue d’exposition,<br />
Pergamonmuseum de Berlin, 26 juin - 5 octobre 2008,<br />
p. 75-76.<br />
Blicke auf Europa.<br />
Europa und die<br />
deutsche Malerei<br />
des 19. Jahrhunderts.Catalogue<br />
d’exposition,<br />
Neue Pinakothek<br />
de Munich, 22 juin -<br />
2 septembre 2007,<br />
p. 365.<br />
A. De neuville,<br />
À propos du Salon<br />
triennal de <strong>Liège</strong>,<br />
s. l., 1921.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
12<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
13<br />
ont été reprises « fil à fil » à l’aide de points de résine époxy. Les manquements de<br />
support ont été comblés par l’incrustation de pièces de toile de structure et épaisseur<br />
comparables. Afin de consolider ces ajouts, des renforts en fibre de verre ont été<br />
posés au dos de la toile originale. Elle a ensuite été doublée à la cire-résine sur une<br />
double toile de lin et tendue sur un nouveau châssis à clés préalablement traité<br />
contre les insectes. Cette « deuxième peau » lui donne un soutien et distribuera de<br />
manière harmonieuse les tensions du textile lors de sa pose sur le châssis.<br />
Après ce traitement de conservation, l’attention a pu se porter sur la restauration<br />
de la surface de la peinture : la face visible du travail de restauration. Un<br />
nettoyage des salissures superficielles a d’abord été réalisé. Les vernis anciens<br />
oxydés et brunis ont été éliminés. La couche picturale originale ainsi dégagée, les<br />
opérations de retouches ont pu débuter. Les lacunes ont été mastiquées en respectant<br />
au mieux la structure de la couche picturale originale. Ensuite, un premier<br />
vernis a été appliqué. Les lacunes et usures ont été retouchées aux pigments-vernis<br />
qui permettent de « fondre » la retouche dans le premier vernis apposé. Ce travail<br />
délicat relève du savoir-faire et d’une observation minutieuse de la couche picturale.<br />
Après ce travail, un vernis a été appliqué au pistolet sur l’ensemble de l’œuvre afin<br />
d’en unifier l’aspect et de protéger la peinture des agressions extérieures.<br />
Un nouveau potentiel<br />
Chacune des étapes décrites ci-dessus demande un temps spécifique qui relève<br />
des impératifs chimiques ou climatiques des produits utilisés ou mis en cause. Après<br />
ces longues étapes, après plusieurs mois d’absence, la toile a réintégré le Grand<br />
Curtius. Grâce au soutien du Fonds David-Constant, le visiteur peut redécouvrir une<br />
œuvre saisissante.<br />
Ce témoin de l’École allemande du romantisme (et plus précisément de<br />
l’École de Düsseldorf) rappelle combien ce mouvement eut, dans notre cité, un<br />
écho particulier. À la fin de ce xix e siècle passionné et paradoxal, son influence sur la<br />
peinture liégeoise a été et reste importante. Soutenue par le milieu artistique local,<br />
l’École de Düsseldorf incita la peinture d’Histoire à émerger en Belgique. Dans ce<br />
mouvement, Christian köHler occupe une place de choix : élève favori d’une des<br />
figures de proue du mouvement nazaréen, il s’inspire directement de l’enseignement<br />
de son maître ; mais il n’arrête pas là sa recherche et s’oriente vers un traitement<br />
plus subtil et plus sensible de la couleur. Ses compositions, bien que figées,<br />
1. Romancier allemand (Dobrilugk, Saxe, 1771 - Berlin,<br />
1854) connu sous le pseudonyme de Heinrich Clauren. s’animent et dégagent, par un mouvement tout intérieur, une fougue et une ardeur<br />
Il est particulièrement actif dans la première moitié du xix capables de rendre l’histoire passionnée de ses sujets.<br />
La restauration récente de la Sémiramis de <strong>Liège</strong> permettra au public de<br />
porter un regard plus aigu sur la peinture de köHler et sur la place qui lui revient<br />
parmi les artistes de Düsseldorf. Si la peinture d’Histoire ne recueille pas aujourd’hui<br />
l’intérêt de tous, il est certain que le public reconnaîtra à köHler d’indéniables<br />
mérites : subtilité de pinceau, sens du coloris et rendu expressif des sentiments<br />
humains.<br />
e<br />
siècle. Fonctionnaire prussien, il écrit, durant ses heures<br />
de loisirs, des romans sentimentaux à grand succès.<br />
2. Le rôle de cette société était de valoriser les nouvelles<br />
tendances internationales de l’art. Certaines œuvres<br />
étaient achetées par la Ville de <strong>Liège</strong>.<br />
3. boCCaCe, voltaire, rossini, HuGo, DeGas, valéry :<br />
autant de grands noms qui relatèrent la destinée<br />
légendaire de cette reine de Babylone. •
Il n’y a pas photo !<br />
Soo Yang Geuzaine<br />
Historienne de l’art<br />
Musées de <strong>Liège</strong><br />
Acquisition d’un dessin aquarellé montrant une vue de <strong>Liège</strong> en 1814<br />
Ce dessin aquarellé à la plume est exécuté sur une série de feuilles de papier vergé<br />
collées les unes aux autres sur un support unique. Si le dessin a été réalisé in situ,<br />
le coloriage s’est fait en atelier, au vu des nombreux endroits qui mentionnent au<br />
crayon les teintes à appliquer.<br />
La vue, datée au revers de 1814, s’étend des abords de la basilique Saint-<br />
Martin, à gauche, à la collégiale Sainte-Croix, à droite. Elle montre, à l’avant-plan,<br />
l’ancien canal de la Meuse bordé d’un quai qui prendra le nom de Micoud d’Umons,<br />
en référence au préfet du département de l’Ourthe 2 . Cet ouvrage avait été réalisé à<br />
l’aide des matériaux provenant de la démolition de la cathédrale Saint-Lambert. Il<br />
est bordé de maisons des xvii e et xviii e siècles dont la plupart ont aujourd’hui disparu.<br />
Les façades sont en pierre calcaire de Meuse, quelques-unes sont peintes en blanc<br />
ou en jaune, selon l’usage innové à la fin du xviii e et qui perdura tard dans le xix e<br />
siècle. Les toits sont couverts d’ardoises gris-clair. C’est l’un des rares dessins<br />
détaillés de sites liégeois antérieurs à 1850. Sa précision presque photographique<br />
permet, par exemple, de mieux (re)connaître certains des fleurons architecturaux du<br />
paysage liégeois tels que la maison Ancion, l’hôtel van den Steen, l’hôtel de Méan,<br />
l’hôtel de Sélys et de distinguer ainsi les éléments anciens des bâtiments qui furent<br />
remaniés ou ajoutés postérieurement.<br />
L’aquarelle constitue également un précieux instantané de la vie quotidienne<br />
d’un quartier du centre de <strong>Liège</strong> par un beau jour d’été comme le laisse supposer<br />
l’état de la végétation et la tenue vestimentaire des passants. Sur le quai, « un défilé<br />
militaire est dépeint avec réalisme », comme le souligne Claude Gaier 3 , « en dépit<br />
d’une nécessaire schématisation dans le rendu des personnages imposée par<br />
Les acquisitions permettent d’accroître<br />
la richesse des collections et, plus<br />
encore, de faire revivre l’histoire d’une<br />
ville, <strong>Liège</strong> en l’occurrence. Il en est<br />
ainsi pour la récente entrée dans nos<br />
collections d’une vue panoramique de<br />
l’actuel boulevard de la Sauvenière<br />
et du Publémont. 1<br />
Cette vue panoramique, d’une rare<br />
fidélité, présente un caractère exceptionnel<br />
auquel plusieurs publications<br />
ont déjà fait écho.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
14<br />
1. Œuvre acquise par les « Amis du MARAM » avec la<br />
participation de la Ville de <strong>Liège</strong> et à l’initiative d’Albert<br />
Lemeunier, conservateur.<br />
2. Théodore Gobert, <strong>Liège</strong> à travers les âges. Les rues de<br />
<strong>Liège</strong>, tome VIII, Ma-O, Bruxelles, 1977, p. 220-224.<br />
3. Claude Gaier, directeur honoraire du Musée d’Armes.<br />
4. Site internet : www.maggs.com/title/NH36054.asp.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
15<br />
l’espace réduit dévolu à cette scène dans la composition générale ». Claude Gaier<br />
s’est interrogé quant au corps d’armée auquel appartiennent ces fantassins : « La<br />
minutie des détails figurant sur cette aquarelle donne à penser qu’il s’agit d’un<br />
détachement d’infanterie prussienne des troupes d’occupation de <strong>Liège</strong> ».<br />
Selon différentes sources relatives à cette œuvre, la signature du capitaine<br />
anglais Charles Hamilton Smith (1776-1859) 4 est visible au verso. Le Capitaine Smith,<br />
affecté aux troupes anglaises qui vainquirent Napoléon à Waterloo, participa à de<br />
nombreuses campagnes militaires et ramena des aquarelles de ses voyages.<br />
•
Nouvelles armes<br />
Un fusil de chasse sans chiens extérieurs<br />
Nous avons reçu un fusil de chasse hammerless (sans chiens extérieurs) de calibre<br />
20, portant la signature d’Émile Masquelier, fabricant d’armes liégeois dont l’enseigne<br />
brille encore au boulevard de la Sauvenière 1 . L’arme mesure 107,5 cm de long, les<br />
canons 68,4 cm. Elle porte le numéro de série 30455. Il s’agit d’un fusil à mécanisme<br />
de type Anson à fausses platines, décoré de gravure anglaise à bouquets ; la signature<br />
est gravée à la face inférieure de la bascule. L’arme porte, comme il est de règle,<br />
les poinçons du Banc d’Épreuves des Armes à feu de <strong>Liège</strong>, dont la marque du<br />
contrôleur, un G couronné, utilisée de 1928 à 1959, ainsi que la lettre annale γ qui<br />
indique l’année 1950. Sous les canons, on trouve la marque du fabricant de canons<br />
« Acier comprimé Cap J F » (J F = Jean Falla) et même la signature du garnisseur de<br />
canons Magilissen : « MAGI ».<br />
On note toutefois que la crosse a vraisemblablement été allongée ou restaurée<br />
au niveau de la plaque de couche, ainsi que la différence de teinte entre les deux<br />
parties de la monture. Un examen attentif révèle par ailleurs un certain nombre de<br />
discordances si on compare les dates d’activité connues des protagonistes relevés<br />
plus hauts et les poinçons du Banc d’Épreuves. La maison Masquelier a été fondée<br />
en 1876 et ne fabriquait initialement que des cartouches. Émile Masquelier s’installe<br />
rue de la Cathédrale et est inscrit au Banc d’Épreuves de 1881 à 1911. Lui succèdent<br />
« Masquelier Frères » (Charles et Ernest), inscrits au Banc de 1911 à 1925 et qui ont<br />
pu continuer à utiliser pour un temps le nom d’Émile. Vient ensuite la manufacture<br />
Charles Masquelier, active de 1925 à 1956. En 1956, la société se transforme en<br />
Masquelier SPRL avant de devenir à nouveau Charles Masquelier, qui en 1964 reprend<br />
les établissements Bury-Donckier 2 . La marque de fabrique des Masquelier, le<br />
masque triangulaire, n’est pas visible sur le fusil qui nous occupe.<br />
Philippe Joris<br />
Conservateur<br />
du département des Armes<br />
Grand Curtius<br />
Quelques acquisitions récentes au département des Armes du Grand Curtius<br />
Le département des Armes<br />
est favorisé : la réglementation<br />
est si contraignante que les<br />
détenteurs d’armes les cèdent<br />
volontiers. Les dons concernent<br />
essentiellement des armes modernes<br />
; les pistolets à silex et les<br />
arquebuses à rouet sont plus rares.<br />
Parmi les pièces entrées dans les<br />
collections en 2<strong>01</strong>0, sont présentés<br />
ici trois artefacts représentatifs.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
16<br />
1. Les donatrices souhaitent conserver<br />
l’anonymat. Par un heureux<br />
hasard, nous avons cette même<br />
année reçu en don un autre fusil<br />
Masquelier, tout à fait original, datant<br />
de 1947 mais en moins bon état.<br />
2. Ces données proviennent notamment<br />
des archives du Banc d’Épreuves<br />
et ont été en grande partie publiées.<br />
On peut lire : Michel Druart et Guy<br />
GaDisseur, Le Qui est Qui de l’armurerie<br />
liégeoise, Éditions du Pécari, 2005 ;<br />
Bruno Joos De ter beest, Marques et<br />
poinçons d’armes à feu en Belgique,<br />
Anvers, Pandora, 1998.<br />
3. Anthony vanDerlinDen, The Belgian<br />
Browning Pistols 1889-1949,<br />
Greensboro, 20<strong>01</strong>, p. 8-16 et 72-99.<br />
4. A. FranCotte, C. Gaier et<br />
R. karlsHausen, Ars<br />
Mechanica : le grand livre<br />
de la FN, Herstal Group -<br />
La Renaissance du Livre,<br />
2007, p. 35-69.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
17<br />
Les ateliers Jean Falla, utilisant ici un acier Cap (actif à partir de 1904 ; la<br />
marque de fabrique « Acier Comprimé Cap » fut déposée en 1906), sont actifs de<br />
1931 à 1945, continués par Falla Fils jusqu’en 1953. Le poinçon du Banc d’Épreuves<br />
indiquant le calibre nominal et la longueur de la douille, « 20-70 » inscrit dans un C<br />
allongé, a été en usage à partir de 1924.<br />
À l’évidence, il ne s’agit pas (ou plus) ici d’une arme réalisée dans sa totalité<br />
par Émile Masquelier, dont le nom disparaît après 1925 au plus tard. Les canons ne<br />
seraient pas antérieurs aux années 1930, et la lettre annale du Banc d’Épreuves<br />
indique l’année 1950. Deux explications sont possibles : soit nous sommes en présence<br />
d’une arme fabriquée par Émile Masquelier, mais réparée ou reconditionnée<br />
(après avoir reçu de nouveaux canons) et éprouvée en 1950, soit nous sommes face<br />
à un assemblage de pièces disparates, comme il s’en pratiquait régulièrement à<br />
<strong>Liège</strong>. Ainsi pourrait s’expliquer notamment la différence de tonalité entre la crosse<br />
et la longuesse. Ces opérations ont du reste fort bien pu être réalisées dans les ateliers<br />
de Charles Masquelier. Quoi qu’il en soit, un fascinant puzzle !<br />
Un pistolet FN-Browning<br />
Autre entrée de choix, pourtant à première vue banale, un pistolet semi-automatique<br />
FN-Browning modèle 1900, de calibre 7,65 mm (.32). Son mérite est de porter un<br />
numéro de série très bas – 7509 –, ce qui le place dans les toutes premières années<br />
de production. Avant 1903 en tout cas, car il ne porte pas la marque d’épreuve à la<br />
poudre vive. De plus, il s’agit d’un pistolet destiné à l’armée belge, comme l’indiquent<br />
les poinçons EGB dans un ovale, un FL couronné, marque de réception du contrôleur<br />
gouvernemental, et la lettre W sur le pontet. Les plaquettes de crosse, réalisées à<br />
l’origine en ébonite, ne sont sans doute pas originales mais elles sont conformes au<br />
modèle d’époque, sans sigle FN et simplement quadrillées. Fragiles, ces pièces ont<br />
souvent été sujettes à remplacement par des modèles en bois ou semblables à<br />
celles destinées au marché civil. Autre indice d’ancienneté, les mentions « FEU » et<br />
« SUR » (pour sûreté) se détachent sur un cercle plus clair, une fioriture qui disparaîtra<br />
dans la suite 3 . Quelque 724 550 pistolets modèle 1900 ont été fabriqués en onze<br />
années de production.<br />
L’armée belge, qui l’adopta en 1900 pour ses officiers, était la deuxième armée<br />
au monde à opter pour le pistolet semi-automatique, précédée de peu par la Suisse<br />
qui avait choisi le célèbre pistolet Luger. Ailleurs, le revolver gardait droit de cité.<br />
Les relations étroites qui unissent la FN et Browning sont familières à nombre d’entre<br />
nous. Nous y revenons brièvement ici, dans la mesure où le pistolet modèle 1900<br />
inaugurait une longue et fructueuse collaboration entre l’entreprise et l’inventeur 4 .<br />
La Fabrique Nationale d’Armes de Guerre, dont l’usine fut érigée à Herstal, a<br />
été fondée en 1889 par l’association de fabricants d’armes liégeois, dans le but de<br />
satisfaire à la commande par l’État belge de 150 000 fusils à répétition système<br />
Mauser, de calibre 7,65 mm. Une commande de trente millions de cartouches devait<br />
suivre. L’outillage – dont la technicité dépassait les capacités des armuriers liégeois<br />
– fut acquis auprès de la firme berlinoise Ludwig Loewe et C°, la licence de fabrication<br />
étant obtenue auprès des Mauser Waffenwerke (propriété de L. Loewe). Une fois le<br />
contrat initial rempli, certains actionnaires, peu désireux de susciter un concurrent<br />
en leur sein, se retirèrent. Cependant, la FN acquit rapidement une réputation de<br />
qualité et reçut diverses commandes de l’étranger. De graves difficultés surgirent<br />
toutefois avec Mauser dans l’octroi des licences de fabrication. Face à cette situation,<br />
la plupart des administrateurs démissionnèrent, une brèche dans laquelle Loewe<br />
se précipita en rachetant une bonne partie des titres de la société, devenant ainsi<br />
actionnaire majoritaire et incorporant de facto la FN dans le groupe allemand. Les<br />
activités de l’entreprise herstalienne dans le domaine des armes de guerre s’en trouvèrent<br />
singulièrement contingentées.
Pour équilibrer son plan de charges, la Fabrique Nationale se tourna vers des<br />
fabrications où elle gardait sa liberté : armes de chasse et de sport, automobiles,<br />
bicyclettes, … Précisément, Hart O. Berg, directeur commercial envoyé aux États-<br />
Unis d’Amérique afin d’y étudier les dernières avancées en matière de vélocipèdes,<br />
fit là-bas la connaissance de John M. Browning. Inventeur déjà renommé, celui-ci<br />
venait de déposer un nouveau brevet pour un pistolet semi-automatique à verrouillage<br />
par la masse. La licence de fabrication fut offerte à la FN et le contrat avec les frères<br />
Browning signé dès 1897. Divers aménagements seront apportés au prototype, les<br />
premiers pistolets sortant de l’usine en 1899 : le « modèle 1900 » était né, il connut<br />
le succès que l’on sait.<br />
Nous avons acquis ce pistolet grâce au statut particulier dont jouit le département<br />
des Armes, qui lui permet de choisir les pièces qui intéressent ses collections<br />
dans la multitude d’armes saisies par les autorités judiciaires et destinées à la destruction.<br />
On ne trouve pas là de fusil de chasse de prix, ni d’arme ancienne. Mais il<br />
s’agit d’une manne inestimable en ce qui concerne les armes modernes et contemporaines,<br />
tout spécialement les armes de poing. En 2<strong>01</strong>0, nous avons ainsi récolté<br />
un revolver Colt Anaconda de calibre .44 Magnum ainsi que plusieurs modèles de<br />
pistolets Glock, dont nous ne possédions jusqu’ici qu’un seul exemplaire. Ce pistolet<br />
a fait date lors de son introduction au début des années 1980, avec sa carcasse en<br />
polymère moulé qui lui confère notamment plus de légèreté. L’arme connaît un succès<br />
qui ne se dément pas et son esthétique particulière inspire d’autres fabricants.<br />
FN et sa copie<br />
Revenons à la FN, avec une copie d’origine indéterminée (Chine ?) d’une variante du<br />
célèbre pistolet semi-automatique FN-Browning GP de calibre 9 mm, simplement<br />
marqué : BROWNING SYSTEM UTAH. On ne saurait sans doute trouver meilleur<br />
hommage rendu à ce grand classique de l’arme de poing.<br />
•<br />
Ci-dessus,<br />
le pistolet semi-automatique FN-Browning modèle 1900<br />
et, à gauche, le pistolet Glock modèle 17.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
18<br />
Éliane peDronCini<br />
Bibliothécaire<br />
à la Bibliothèque Ulysse-Capitaine<br />
(fonds patrimoniaux de la Ville de <strong>Liège</strong>)<br />
Petite histoire d’une grande encyclopédie<br />
L’Encyclopédie méthodique<br />
La Bibliothèque Ulysse Capitaine<br />
conserve dans sa réserve précieuse<br />
ancienne un exemplaire de l’Encyclopédie<br />
méthodique, dite « Panckoucke ».<br />
Cette publication, composée de 206<br />
volumes, dont 6 volumes de planches,<br />
a fait l’objet d’une campagne de<br />
restauration.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
19<br />
Le projet de l’Encyclopédie méthodique dite « Panckoucke » est lancé en 1782 par<br />
Charles-Joseph Panckoucke sous forme de souscription. Les 102 livraisons forment<br />
une cinquantaine de dictionnaires, leur nombre varie selon le titre retenu pour certains<br />
dictionnaires qui sont composés d’une partie principale et de parties annexes<br />
plus ou moins développées.<br />
Cette encyclopédie compte plus de 200 volumes publiés par Charles-Joseph<br />
Panckoucke de 1782 à 1793, en collaboration avec Clément Plomteux de 1782 à<br />
1789, puis seul de 1789 à 1793, ensuite par son gendre Henri Agasse de 1794 à<br />
1815 et enfin par Antoinette-Pauline Agasse, veuve d’Henri Agasse et fille aînée de<br />
Charles-Joseph Panckoucke, entre 1816 et 1832.<br />
Charles-Joseph Panckoucke (1736-1798)<br />
En 1757, Charles-Joseph Panckoucke reprend la librairie paternelle à Lille. En 1761,<br />
il est nommé « maître-libraire » à Paris, après avoir effectué un apprentissage chez<br />
André François Le Breton, l’imprimeur de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert.<br />
En 1768, il devient le libraire-éditeur officiel de l’Imprimerie royale et de l’Académie<br />
royale des sciences. À la fin du xviii e siècle, il est un acteur important sur le marché<br />
du livre.<br />
En 1759, il a déjà fondé son premier journal et est considéré comme ayant<br />
constitué le premier « empire de presse » français. Il achète en 1778 le « Mercure de<br />
France » qui absorbe différents périodiques. En mai 1778, il obtient le privilège exclusif<br />
des journaux politiques. Pendant la Révolution, sans aucun embarras, il est propriétaire<br />
à la fois de journaux aux opinions contraires, le « Mercure » (monarchiste) et<br />
le « Moniteur universel » (patriote). Entre autres grandes entreprises éditoriales, il publie<br />
les œuvres de Buffon et différents dictionnaires et encyclopédies ; il se charge du<br />
Supplément de la Grande Encyclopédie, de Diderot et d’Alembert, ce qui constitue<br />
pour lui une très bonne opération commerciale. Il est aussi auteur et traducteur. À<br />
Paris, il publie souvent sous la raison « (Librairie de l’) Hôtel de Thou, rue des<br />
Poitevins » ou « Bureau du Mercure, hôtel de Thou… ». À partir de 1790 , il s’associe<br />
à son gendre Henri Agasse à qui il cédera son fonds et son imprimerie en 1794.<br />
En 1768, il entreprend une réédition de la Grande Encyclopédie de Diderot<br />
et d’Alembert dont il avait racheté les droits, surnommée l’Encyclopédie du Lac,<br />
ou Encyclopédie Pellet. Or, en janvier 1778, un obscur petit libraire d’origine parisienne<br />
nommé Jean-Jacques Devéria, installé à <strong>Liège</strong> derrière le palais, pour cette<br />
opération commerciale, annonce à l’Europe son projet de compléter l’encyclopédie<br />
par une nouvelle encyclopédie dite « méthodique » intitulée Edition complette de<br />
l’Encyclopédie rangée par ordre de matiere et dans laquelle on a fondu tous les<br />
supplements, plus maniable en format in-8°, thématique, et qui de plus comprendrait<br />
toutes les nouvelles découvertes et inventions. Il recherche des associés pour cette<br />
entreprise, de préférence liégeois. Ce sera avec Bassompierre, mais leur projet<br />
n’aboutira jamais.<br />
Panckoucke est d’abord très critique envers ce projet, craignant surtout la<br />
concurrence avec son Encyclopédie du Lac. Il s’attaque d’abord à Devéria qu’il
accuse de ne pas disposer de crédit suffisant ni de la notoriété que nécessite son<br />
entreprise, puis au projet lui-même qu’il qualifie d’« entreprise chimérique ». Mais en<br />
vain : il est finalement contraint de s’associer avec lui. Puis il lui rachète les droits et<br />
lance son Encyclopédie méthodique qu’il présente comme « un superbe ouvrage et<br />
la vraie Encyclopédie ». Pour cette opération, il s’associe avec Clément Plomteux,<br />
imprimeur liégeois, avec qui il avait déjà travaillé pour les éditions in-quarto de l’Encyclopédie<br />
de Diderot et d’Alembert.<br />
Pourquoi Clément Plomteux ?<br />
Aux yeux de Panckoucke, Plomteux est un concurrent important et influent. Il est en<br />
effet imprimeur des États, commissaire de la cité, sous-mayeur et conseiller intime<br />
du prince-évêque en 1779. Il jouit donc de privilèges étendus. Sa production est<br />
importante. De plus il est gestionnaire principal de la salle de jeux de Spa et dispose<br />
de ce fait de capitaux importants. Autre avantage : il est liégeois et représente ainsi<br />
la parade à l’association des « Liégeois » Devéria et Compagnie.<br />
Les premiers volumes paraissent en 1782 à Paris et à <strong>Liège</strong>, chez Plomteux.<br />
À partir de 1788, ce dernier n’apparaît plus que comme libraire-dépositaire. En<br />
1789, l’association est rompue, à la suite de nombreux différends commerciaux, et<br />
Panckoucke doit alors racheter les droits à son associé. À partir de 1790, les<br />
volumes ne sont imprimés qu’à Paris. En 1794, Panckoucke a publié plus de 100<br />
volumes, c’est-à-dire la moitié de l’ensemble de l’œuvre. Il vend alors son entreprise<br />
à son gendre Henri Agasse. Le dernier volume qui clôture le projet paraît en 1832.<br />
Si cette publication lui apporta gloire et honneurs, elle ne fut cependant pas<br />
très rentable. En effet, la révolution réduisit considérablement le nombre des souscripteurs.<br />
Pourquoi cette encyclopédie ?<br />
L’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert était critiquée tant sur la forme que sur le<br />
fond. La structure alphabétique découpait des savoirs complémentaires ou en rapprochait<br />
d’autres, sans aucun rapport. Cette confusion ne permettait pas au lecteur<br />
de trouver une information complète et pertinente. De plus, l’étendue des connaissances<br />
s’accélérait en cette seconde partie du xviii e siècle.<br />
L’objectif de Panckoucke était de corriger cette méthode et d’élaborer un<br />
dictionnaire spécialisé propre à chaque thème. Le nombre de thèmes varia avec le<br />
temps. De 27 thèmes au départ, on en évoquait 49 dans le prospectus de 1789.<br />
Ses collaborateurs étaient issus de la jeune et nouvelle génération de scientifiques,<br />
juristes, médecins, naturalistes et ingénieurs. Peu de philosophes et gens de lettres.<br />
Le titre complet est : L’Encyclopédie méthodique ou par ordre de matières<br />
par une société de gens de lettres, de savants et d’artistes ; précédée d’un Vocabulaire<br />
universel, servant de Table pour tout l’Ouvrage, ornée des Portraits de MM.<br />
Diderot et d’Alembert, premiers Éditeurs de l’Encyclopédie. On compte 206 volumes<br />
avec une page de titre complète pour chacun, environ 125 350 pages de texte et<br />
6 300 planches. Elle est ainsi cinq fois plus grande que l’Encyclopédie de Diderot et<br />
d’Alembert (25 000 pages).<br />
Les matières traitées sont :<br />
Agriculture (7 vol.), Amusements des sciences (1 vol.), Antiquités et mythologie (5 vol.), Architecture (3 vol.), Art aratoire et du<br />
jardinage (1 vol.), Art militaire (4 vol.), Artillerie (1 vol.), Arts et métiers mécaniques (8 vol.), Assemblée nationale constituante<br />
(1 vol.), Beaux-arts (2 vol.), Botanique (13 vol.), Espèces de chasses (1 vol.), Chimie (6 vol.), Chirurgie (2 vol.), Commerce (3 vol.),<br />
Économie politique (4 vol.), Encyclopediana, ou Dictionnaire encyclopédique des ana, … (1 vol.), Arts académiques, équitation,<br />
escrimes, danse et art de nager (1 vol.), Finances (3 vol.), Forêts et bois (1 vol.), Géographie ancienne (3 vol.), Géographie<br />
moderne (3 vol.), Géographie physique (5 vol.), Atlas encyclopédique (2 vol.), Grammaire et littérature (3 vol.), Histoire (6 vol.),<br />
Histoire naturelle (14 vol.), Jurisprudence (10 vol.), Logique et métaphysique (4 vol.), Manufactures, arts et métiers (4 vol.),<br />
Marine (3 vol.), Mathématiques (3 vol.), Médecine (13 vol.), Musique (2 vol.), Espèces de pêche (1 vol.), Philosophie ancienne et<br />
moderne (3 vol.), Physique (4 vol.), Anatomie et physiologie (4 vol.), Théologie (3 vol.), Vocabulaire universel (jamais paru).<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
20<br />
Bibliographie<br />
- Suzanne tuCoo-CHala, Charles-Joseph Panckoucke<br />
et la librairie française : 1736-1798, Pau, Marrimpouey<br />
Jeune ; Paris, J. Touzot, 1977.<br />
- Pol-P. Gossiaux, « L’Encyclopédie “ liégeoise ” (1778-<br />
1792) et l’Encyclopédie nouvelle ». In : Livres et lumières<br />
au Pays de <strong>Liège</strong> : 1730-1830 / sous la direction de<br />
Daniel DroixHe, Pol-P. Gossiaux, Hervé Hasquin et<br />
Michèle mat-Hasquin, <strong>Liège</strong>, Desoer, 1980.<br />
- Dictionnaire encyclopédique du livre. Sous la direction<br />
de Pascal FouCHé, Daniel péCHoin, Philippe sCHuwer ;<br />
et la responsabilité scientifique de Pascal FouCHé,<br />
Jean-Dominique mellot, Alain nave..., Paris,<br />
Éd. du Cercle de la librairie, 2005.<br />
- Catalogue de la Bibliothèque nationale de France :<br />
notices sur l’Encyclopédie et sur Panckoucke.<br />
- www.haraldfischerverlag.de<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
21<br />
On remarque que c’est la rubrique médecine qui comporte le plus de volumes<br />
(13), auxquels il faut y ajouter les 2 volumes de chirurgie.<br />
Cette Encyclopédie méthodique présente dans les bibliothèques patrimoniales<br />
a été souvent confondue avec l’Encyclopédie de Diderot. Cela provient certainement<br />
des mentions des noms de Diderot et d’Alembert sur la page de faux-titre.<br />
Il n’est pas non plus aisé d’en constituer une collection complète. Peu d’institutions<br />
en possèdent l’intégrale.<br />
Moins bien considérée que l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, moins<br />
complète aussi, elle reste cependant un témoignage primordial de l’époque pour les<br />
changements révolutionnaires qui sont apparus dans les domaines des sciences,<br />
de la culture, de la politique et de la société.<br />
•
Conservation & restauration<br />
Une des missions des musées est de conserver,<br />
préserver, entretenir et donc permettre<br />
aux générations futures de découvrir la<br />
richesse des collections dans un état de<br />
conservation qui ne mette pas en péril leurs<br />
états esthétique et historique. La réalisation<br />
de cette tâche ne peut se faire sans une<br />
interdisciplinarité et une étroite collaboration<br />
– voire une complicité – avec l’ensemble du<br />
personnel du musée, du conservateur au<br />
gardien en passant par les préparateurs et<br />
les techniciens de surface. Qui mieux que<br />
ceux qui sont au contact quotidien des objets<br />
peut signaler un problème en devenir ?<br />
Tout visiteur connaît le restaurateur, muni<br />
d’instruments de précision et armé de patience,<br />
ôtant un vernis ou retouchant une<br />
peinture. Cependant, la profession de conservateur-restaurateur<br />
comprend aussi<br />
d’autres tâches, peut-être moins gratifiantes<br />
car moins visibles, et pourtant aussi importantes<br />
pour la préservation du patrimoine.<br />
Conservation préventive et curative<br />
Si la première insiste sur l’importance des<br />
conditions de conservation, la gestion des<br />
risques et l’élimination des causes de dégradations<br />
(aucun musée n’est un lieu sans danger),<br />
la seconde participe d’une sauvegarde des<br />
œuvres par une action sur le bien menacé.<br />
Par exemple les opérations de fixage de<br />
couches picturales soulevées, le collage de<br />
morceaux fracturés, le dépoussié-rage, etc.<br />
Mais la conservation est aussi présente dans<br />
la préparation des prêts et montages d’exposition<br />
: conseils quant aux conditions de<br />
conservation, d’emballage et de transport,<br />
quant à l’opportunité de prêt d’œuvres fragiles,<br />
ou encore rédaction de constats d’état.<br />
Gestion des réserves<br />
Cet iceberg souvent oublié – mais qui concerne<br />
généralement 75 % d’une collection<br />
– demande un mode de stockage adéquat,<br />
récolements et visites régulières pour s’assurer<br />
de l’état de conservation des œuvres.<br />
Retouches<br />
La restauration concerne davantage l’intervention<br />
esthétique sur un bien culturel : enlèvement<br />
des couches de vernis oxydées et<br />
brunies, retouches des lacunes, etc. Ce sont<br />
là les opérations certes les plus visibles et les<br />
plus satisfaisantes pour l’égo de l’intervenant<br />
mais qui ne constituent pas le fondement du<br />
travail du conservateur-restaurateur. En effet,<br />
la primauté doit être donnée à la conservation<br />
et les opérations de restauration sont généralement<br />
longues : le temps nécessaire pour<br />
de telles interventions peut être utilisé pour<br />
conserver un plus grand nombre d’œuvres.<br />
Gestion économique du patrimoine<br />
Dans ce domaine, une priorité est accordée<br />
à la conservation préventive et curative (et<br />
donc au mode de stockage, d’exposition, de<br />
condition climatique, etc.) qui est économiquement<br />
plus rentable que la restauration. Autrement<br />
dit, et en dehors du contexte d’une<br />
exposition temporaire, la restauration d’une<br />
seule pièce demande autant d’énergie et de<br />
moyens que la conservation de plusieurs<br />
autres. N’est-ce pas à méditer en ces temps<br />
de crise et de budgets difficiles ?<br />
Étude scientifique<br />
La conservation-restauration, c’est aussi la<br />
chance de travailler dans l’intimité des<br />
œuvres. Un traitement de conservation et/ou<br />
de restauration constitue l’opportunité de<br />
procéder à l’étude scientifique des œuvres.<br />
Corinne van Hauwermeiren<br />
Atelier de conservation & restauration<br />
Musées de <strong>Liège</strong><br />
Un duo complémentaire<br />
Un « conservateur-restaurateur » n’est pas<br />
apte à traiter tout type de bien culturel. Les<br />
formations actuellement dispensées<br />
conduisent à des professionnels compétents<br />
pour une typologie particulière d’œuvres<br />
d’art : peinture, sculpture, céramique, papier,<br />
métal, etc.<br />
L’atelier de conservation & restauration<br />
des musées de la Ville de <strong>Liège</strong> se compose<br />
d’un duo couvrant deux disciplines :<br />
Audrey Jeghers, conservatrice-restauratrice<br />
de peintures de chevalet (ÉNSAV, La Cambre)<br />
et Corinne Van Hauwermeiren (Paris I,<br />
Sorbonne), conservatrice-restauratrice de<br />
sculptures polychromes et cadres.<br />
Pour le traitement d’autres médias tels que<br />
le verre, la céramique ou le métal, le service<br />
fait appel à des prestataires extérieurs<br />
spécifiques.<br />
Nos formations respectives nous<br />
permettent toutefois de formuler les conseils<br />
de conservation préventive pour l’ensemble<br />
des biens culturels conservés au sein des<br />
collections liégeoises. Cela se fait d’ailleurs<br />
en collaboration étroite avec les préparateurs<br />
qui connaissent bien les collections depuis<br />
de nombreuses années.<br />
Exemples de travaux réalisés<br />
• Traitement de la couche picturale d’œuvres partant en exposition : la Fête à Bacchus attribuée à<br />
Jan brueGHel et Hendrick van baelen ; l’Intérieur d’église de Peter neeFs ; le Portrait de Charles Grétry.<br />
• Interventions plus ponctuelles telles que la réintégration d’une retouche décolorée :<br />
Le Château de Comblat de Paul siGnaC ; œuvres de Richard Heintz ou Edgard sCauFlaire.<br />
• Traitement des cadres de Sémiramis de köHler, du Paysage d’Anthonie waterloo, etc.<br />
• Étude technologique du Trône de Grâce (xv e siècle) avec la découverte de nombreux restes de polychromie<br />
masqués par une épaisse couche de saletés.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
22<br />
Johan muyle, Le second martyre de la Piéta, 1987.<br />
Chèvre empaillée, fauteuil roulant, sangle.<br />
Exposition Belgica 1987 à Rome, Espace 251 Nord.<br />
Photo © Damien Hustinx.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
23<br />
Pauline bovy<br />
Conservatrice, musées de <strong>Liège</strong><br />
Détachée au Cabinet de la Culture<br />
Les collections se développent, se soignent, s’exportent<br />
Vie des collections dans les musées communaux en 2<strong>01</strong>0.<br />
• 45 œuvres de Raoul ubaC (Cologne, 1910<br />
- Dieudonné, 1985), ont été léguées par<br />
Alain et Jacqueline Trutat.<br />
• 11 œuvres de Gilles-François Closson<br />
ont été acquises grâce à l’intervention du<br />
Fonds Courtin-Bouché (cf. p. 7).<br />
• Des orfèvreries aux poinçons de <strong>Liège</strong> et<br />
un remarquable cabinet « millefiori » du xvii e<br />
siècle ont été mis en dépôt au Grand<br />
Curtius par les Sœurs de la Congrégation<br />
de Saint-Charles Borromée.<br />
• Des gravures de Thierry wesel, du Groupe<br />
Impressions, des dessins d’Yvon aDam ont<br />
été donnés au Cabinet des Estampes.<br />
• À la suite de l’exposition « Éric Fourez.<br />
Peintures 2006-2009. Le même infiniment »,<br />
présentée au MAMAC en 2009, l’artiste a<br />
donné au musée une huile sur toile, Traces.<br />
• Le portrait présumé de Théophile René<br />
Laennec, inventeur du stéthoscope, réalisé<br />
par Antoine ansiaux (<strong>Liège</strong>, 1764 - Paris,<br />
1840) a été mis en dépôt.<br />
• À l’initiative du conservateur, deux armes<br />
ont rejoint le département des Armes du<br />
Grand Curtius : un pistolet-carabine Dartig<br />
et un fusil de chasse du fabricant Mahillon<br />
de Bruxelles.<br />
• La Ville de <strong>Liège</strong> est devenue propriétaire<br />
du Fonds Jacques izoarD (<strong>Liège</strong>, 1936-<br />
2008), poète et essayiste de renommée<br />
internationale.<br />
• 11 œuvres ont été acquises pour un<br />
montant total de 86 200 e.<br />
• Dans le cadre de l’exposition consacrée à<br />
Raoul ubaC, une gouache sur papier a été<br />
achetée à la galerie Maeght : Thème de<br />
l’Arbre, 1963.<br />
• La Ville a acquis une œuvre de Johan<br />
muyle (Charleroi, 1956), proposée par<br />
Espace 251 Nord, Le second martyre de la<br />
Piéta, sculpture d’assemblage (1986).<br />
L’artiste, particulièrement représentatif de la<br />
scène actuelle des arts plastiques de<br />
Belgique, connu bien au-delà de nos<br />
frontières, utilise la métaphore pour<br />
évoquer des éléments autobiographiques.<br />
• Dans le cadre de l’Espace Jeunes Artistes,<br />
Sophie leGros (Huy, 1976) a exposé en<br />
novembre 2<strong>01</strong>0 à la Salle Saint-Georges.<br />
Le grand rouge et L’abeille, acrylique et<br />
fusain sur toile, complètent depuis peu les<br />
collections contemporaines. C’est également<br />
le cas de la série Tokyo 96 de l’artiste<br />
liégeois Jean-Marie pieron, portraits des<br />
jazzmen Jack Dejohnette, Keith Jarret et<br />
Gary Peacock, ou de la Carapace n° 3 de<br />
Bénédicte van Caloen.<br />
• L’œuvre de Brigitte Corbisier achetée par<br />
la Ville figurera dans l’exposition qui lui sera<br />
consacrée cet été au Cabinet des<br />
Estampes et des Dessins. Les collections<br />
de celui-ci se sont également enrichies<br />
d’une série de gravures à la manière noire<br />
de Maria paCe.<br />
• Plusieurs œuvres des musées communaux<br />
ont été traitées en interne par les restauratrices<br />
Audrey Jeghers et Corinne Van<br />
Hauwermeiren ; d’autres ont été confiées à<br />
des restaurateurs indépendants, pour un<br />
montant total de près de 45 000 e.<br />
C’est le cas d’un ensemble de manuscrits<br />
de la Bibliothèque Ulysse Capitaine,<br />
de 13 œuvres du fonds d’art ancien,<br />
de 9 peintures du musée d’Art wallon et<br />
d’un ensemble de dessins du Cabinet des<br />
Estampes et des Dessins.<br />
• Près d’une centaine d’œuvres ont été<br />
prêtées à des expositions étrangères.
Agenda des expositions temporaires<br />
José Fosty<br />
> p. 26<br />
Les experts à Arlon<br />
> p. 26<br />
Christian Otte<br />
> p. 26<br />
Fusils de papier<br />
> p. 27<br />
Paroles de gardiens<br />
> p. 27<br />
Curtius Circus<br />
> p. 27<br />
<strong>Liège</strong> sort ses bulles<br />
> p. 28<br />
Armand Rassenfosse<br />
> p. 28<br />
Jeunes artistes<br />
> p. 29<br />
Jardin d’hiver<br />
> p. 32<br />
Biennale de Gravure<br />
> p. 36<br />
Sculptures musicales<br />
L’eau forte est à la mode<br />
> p. 29<br />
Georg Baselitz<br />
> p. 37<br />
Journée de la Femme<br />
Palimpsestes<br />
Reliure en habits<br />
février mars avril<br />
Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S<br />
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30<br />
février mars avril<br />
Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S<br />
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30<br />
février mars avril<br />
Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S<br />
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30<br />
février mars avril<br />
Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S<br />
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30<br />
février mars avril<br />
Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S D L Ma M J V S<br />
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
24<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
25
José Fosty<br />
Dessins clandestins<br />
du camp de Buchenwald<br />
Grand Curtius (palais Curtius)<br />
Du 4 février au 3 avril<br />
Né à Dalhem en 1919, José Fosty se destine<br />
à une carrière artistique mais, dès l’âge de<br />
19 ans, il est mobilisé. Blessé, il est évacué<br />
sur Paris ; puis, lors de la capitulation belge,<br />
il regagne Bruxelles et rejoint le groupe du<br />
Service des renseignements et actions de la<br />
Résistance appelée « Braverie ». Il distribue<br />
des journaux clandestins. Dénoncé, il est<br />
emmené en octobre 1942 au siège de la<br />
Gestapo, puis au camp de concentration de<br />
Buchenwald, où il survivra durant trois ans,<br />
de 1942 à 1945. La résistance culturelle<br />
s’organise autour de peintres, de musiciens<br />
et de poètes, il fait la connaissance des<br />
membres du Parti communiste français.<br />
Après la guerre, il côtoie à Paris CoCteau et<br />
léGer. Rentré à Visé, il devient fabricant de<br />
jouets en bois, puis trieur de nuit à la Régie<br />
des Postes. Il continue une œuvre de<br />
peinture dans la veine surréaliste.<br />
À la fin des années nonante, José Fosty<br />
a fait don au Cabinet des Estampes de 151<br />
dessins au trait esquissés au crayon sur des<br />
supports de fortune. En cachette, à<br />
Buchenwald, l’artiste a croqué par centaines<br />
des prisonniers lisant, dormant,<br />
écrivant, au repos ou au travail ; certains<br />
lieux aussi, comme le lavoir, le réfectoire,<br />
le four crématoire, le mirador. Ses compagnons<br />
de camp lui inspirent quelques<br />
portraits : le dessinateur René salme, le<br />
poète André verDet, le violoniste Maurice<br />
Hewitt. Seuls sont conservés les croquis<br />
réalisés après septembre 1944 ; quelque<br />
300 autres ont été détruits lors d’un<br />
bombardement.<br />
RR<br />
En collaboration avec les<br />
Territoires de la Mémoire.<br />
Les experts à Arlon<br />
Enquête policière sur des fouilles<br />
Grand Curtius (palais Curtius)<br />
Du 4 février au 3 avril<br />
L’exposition présente de manière originale<br />
des objets issus des fouilles récentes (2003 à<br />
aujourd’hui) d’Orolaunum vicus, l’antique<br />
bourgade romaine d’Arlon. À la manière<br />
d’une enquête policière, les archéologues<br />
interprètent les découvertes en s’aidant des<br />
sciences auxiliaires de l’archéologie (étude<br />
des pollens et des restes végétaux, étude<br />
des déchets osseux, analyse des composantes<br />
des pâtes céramiques…).<br />
Une initiative de la DG04<br />
(Service public de Wallonie).<br />
Christian Otte<br />
Exposition monographique de l’artiste<br />
Grand Curtius (palais Curtius)<br />
Du 4 février au 3 avril<br />
« Longtemps, ma peinture a exprimé mon<br />
rapport en distorsion avec l’être humain,<br />
cette créature autant haïssable qu’admirable,<br />
repoussante qu’attirante, effroyable qu’adorable,<br />
dans ses comportements et aspirations.<br />
[…] Je me suis lassé de l’homme et de<br />
sa représentation alors que naissait en moi<br />
une tendresse pour l’animal vache. Y ai-je<br />
pressenti une métaphore d’une large frange<br />
de l’humanité ? La vache donne tout, on lui<br />
prend tout, elle est pacifique à en mourir<br />
– son regard révèle une infinie tristesse, une<br />
profonde nostalgie d’un paradis perdu, de<br />
l’époque lointaine, quand, gazelle, elle courait<br />
dans les herbages aux larges horizons, avant<br />
le temps des hommes. »<br />
Christian otte (1943-2005)<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
26<br />
Expositions temporaires<br />
Fusils de papier<br />
Catalogues anciens d’armuriers liégeois<br />
Grand Curtius (galerie des Armes)<br />
Du 4 février au 7 mars<br />
Présentation de catalogues de manufactures<br />
liégeoises du xix e siècle et du<br />
début du xx e siècle, rarement exposés<br />
à cause de leur fragilité. Ces anciens<br />
catalogues, imprimés ou réalisés à la<br />
main et coloriés, donnent une idée de<br />
l’extraordinaire variété d’armes que<br />
pouvaient alors offrir les armuriers de<br />
<strong>Liège</strong>.<br />
De gauche à droite :<br />
José Fosty<br />
Les experts à Arlon<br />
Christian otte<br />
Fusils de papier<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
27<br />
Paroles de gardiens<br />
Grand Curtius (palais Curtius)<br />
Du 9 avril au 12 juin<br />
Mise en évidence des paroles de gardiens<br />
des musées de la Ville de <strong>Liège</strong>, confrontés<br />
en permanence à l’art et à l’histoire.<br />
Comment réagit-on quand on n’est pas dans<br />
la découverte d’une œuvre, mais dans sa<br />
fréquentation imposée ? Quel regard<br />
porte-t-on sur le regard des visiteurs ?<br />
Curtius Circus<br />
Photos des étudiants l’École supérieure<br />
des Arts de la Ville de <strong>Liège</strong><br />
Grand Curtius (palais Curtius)<br />
Du 22 avril au 30 avril<br />
Projet de classe développé sur l’année et<br />
basé sur l’appropriation et la réinterprétation<br />
du Grand Curtius, de ses bâtiments et de<br />
ses collections.
<strong>Liège</strong> sort ses bulles<br />
Les 72 planches originales de bande dessinée des collections<br />
du Cabinet des Estampes et des Dessins<br />
Salle Saint-Georges<br />
Jusqu’au dimanche 27 mars 2<strong>01</strong>1<br />
À la fin des années 70, alors qu’aucune<br />
collection publique de BD n’existait encore<br />
en Belgique, l’asbl Signes et Lettres et<br />
Jean-Maurice Dehousse, ministre de la<br />
Culture française et amateur éclairé, rassemblent<br />
les grands noms de la bande<br />
dessinée. Aujourd’hui conservée au Cabinet<br />
des Estampes et des Dessins, cette collection<br />
de planches originales est une des plus<br />
importantes en Belgique.<br />
La préparation de l’exposition a conduit<br />
à réinterroger le fonds à la lumière des nouvelles<br />
sources d’information : les références<br />
scientifiques des planches rassemblées à<br />
l’occasion de leur exposition en 1996 ont<br />
considérablement évolué, notamment par le<br />
biais de l’Internet. Ainsi, la planche simplement<br />
intitulée jusqu’ici Blake et Mortimer<br />
s’est révélée être l’apparition emblématique<br />
d’Olrik dans La Marque jaune. Ce choix<br />
judicieux dans la sélection des dessins se<br />
remarque également dans d’autres planches,<br />
dont celle de Tintin et la fusée lunaire, celle<br />
de Johan et Pirlouit avec les Schroumpfs, ou<br />
celle de Lucky Luke, accompagné de Jolly<br />
Jumper, de Rantanplan et des Daltons.<br />
Ces planches originales se présentent<br />
pour la plupart sous un format A2 (42 x 59,4 cm).<br />
Elles sont particulièrement instructives pour<br />
leurs « repentirs » : lorsque l’auteur n’est pas<br />
satisfait de son tracé à l’encre noire, il applique<br />
des retouches à la gouache blanche<br />
ou recouvre l’erreur d’un papier pour redessiner<br />
un détail.<br />
Dans les marges, on trouve parfois le<br />
titre de l’histoire dont la planche est issue,<br />
ou le numéro du magazine auquel elle est<br />
destinée. Certains auteurs ont laissé des<br />
annotations à l’adresse de l’imprimeur, parfois<br />
un cachet demandant le retour de la planche<br />
après publication. Il arrive que les bulles ne<br />
soient pas encore remplies, véritables images<br />
sans son, ou que certaines pages soient déjà<br />
recouvertes d’un calque reprenant les indications<br />
de couleur pour le dessin imprimé. Pour<br />
éviter des erreurs dans l’ordre des pages, le<br />
dessinateur numérote ses planches dans la<br />
dernière case, chacun à sa manière : ainsi<br />
Franquin, au lieu de numéroter les planches<br />
au sein d’une même histoire, les numérote<br />
d’une histoire à l’autre sans interruption.<br />
Au delà du plaisir d’approcher les originaux<br />
de grands maîtres de la BD, cette<br />
exposition est l’occasion de parfaire notre<br />
compréhension de leurs méthodes de création<br />
et d’apercevoir la difficulté du travail en<br />
amont que les planches publiées ne laissent<br />
pas deviner.<br />
« <strong>Liège</strong> sort ses bulles » s’accompagne<br />
d’un programme scientifique et pédagogique<br />
ouvert à tous qui permettra d’avancer dans<br />
la connaissance des auteurs. Il a été élaboré<br />
par le Service éducatif de la Ville, l’École<br />
supérieure des Arts Saint-Luc (Ph. Sadzot),<br />
l’École supérieure des Arts de la Ville de<br />
<strong>Liège</strong> (J. Denoël) et le Service d’art contemporain<br />
de l’Université de <strong>Liège</strong> (E. Dejasse).<br />
Carmen Genten<br />
Historienne de l’art<br />
Musées de <strong>Liège</strong><br />
Armand Rassenfosse<br />
Salle Saint-Georges<br />
Du 8 avril au 5 juin 2<strong>01</strong>1<br />
Le peintre, graveur et dessinateur liégeois<br />
Armand rassenFosse (1862-1914) est un<br />
des artistes majeurs en Région wallonne,<br />
réputé principalement pour ses gravures et<br />
tableaux représentant la femme dans son<br />
intimité. Claire de Rassenfosse (1922-2009),<br />
en hommage à son grand-père, a souhaité<br />
contribuer à la mise en valeur de son œuvre<br />
en créant le Fonds Armand Rassenfosse.<br />
C’est directement de la maison-atelier de<br />
l’artiste que proviennent les œuvres exposées,<br />
centrées sur les différentes techniques<br />
que rassenFosse a particulièrement étudiées.<br />
Sont présentées certaines matrices en<br />
relation avec les planches et leurs différents<br />
états, ainsi que des outils et du matériel de<br />
son atelier de gravure qui viennent compléter<br />
l’ensemble d’une centaine d’œuvres.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
28<br />
De gauche à droite.<br />
mauriCe tillieux, Gil JourDan,<br />
Le Chinois à deux roues, pl. 20.<br />
© Tillieux, Dupuis 2<strong>01</strong>1.<br />
Expositions temporaires<br />
Armand rassenFosse, Allégorie, 1898.<br />
Aquatinte.<br />
Sophie lanGoHr, Art Make-up, 2<strong>01</strong>0.<br />
120 x 80 cm, photographie.<br />
Frédéric platéus, Solid Rock, 2<strong>01</strong>0.<br />
220 x 180 x 140 cm, MDF,<br />
peinture carrosserie, acier inoxydable.<br />
Courtesy Espace Uhoda.<br />
L’eau-forte est à la mode<br />
Cabinet des Estampes et des Dessins<br />
Jusqu’au dimanche 20 février 2<strong>01</strong>1<br />
Le constat « L’eau-forte est à la mode »,<br />
exprimé par Charles bauDelaire en 1862<br />
dans La Revue anecdotique, s’applique<br />
parfaitement à la région liégeoise, à quelques<br />
années près.<br />
Dès les années 1870, on assiste à un<br />
véritable renouveau de la gravure, sous<br />
l’impulsion de deux maîtres aquafortistes :<br />
Adrien De witte (1850-1935) et François<br />
maréCHal (1861-1945). L’un et l’autre ont<br />
libéré l’eau-forte de son rôle de simple procédé<br />
de reproduction. Convaincus que la<br />
gravure est une œuvre d’art à part entière, au<br />
même titre que la peinture ou la sculpture, ils<br />
rejoignent le point de vue de bauDelaire qui<br />
affirmait que l’eau-forte était faite « pour<br />
glorifier l’individualité de l’artiste et trahir<br />
l’homme spontané ».<br />
De witte réalise ses premières eauxfortes<br />
en 1870, sur le conseil d’un ami : « Le<br />
dessin n’est rien, il nous faut l’eau-forte ! ».<br />
maréCHal n’aborde la gravure qu’en 1888<br />
mais il aura une production impressionnante.<br />
Il sera le pilier de l’atelier de gravure créé à<br />
l’Académie des Beaux-Arts en 1921.<br />
Le CED possède le fonds le plus complet<br />
de leur abondante production gravée.<br />
RR<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
29<br />
Jeunes artistes<br />
Salle Saint-Georges<br />
The Plug / David Brognon du 3 au 28 février<br />
Tatiana Klejniak du 3 au 31 mars<br />
Kresh du 7 au 30 avril<br />
La Ville de <strong>Liège</strong> offre à des plasticiens<br />
liégeois la possibilité d’accéder à un espace<br />
d’exposition spécifique, la salle Saint-Georges.<br />
Ce projet s’adresse aux artistes, mais<br />
aussi à ceux dont la démarche artistique,<br />
indépendamment de l’âge, est récente ou<br />
nouvelle et qui n’ont pas ou ont peu exposé<br />
à titre personnel. Les œuvres présentées<br />
doivent être en accord avec les priorités d’un<br />
musée d’art contemporain.<br />
Il s’agit bien d’accroître la visibilité des<br />
artistes, mais aussi de leur donner l’occasion<br />
de se confronter à un espace précis. Toutes<br />
les disciplines des arts plastiques sont prises<br />
en compte (peinture, sculpture, arts graphiques,<br />
textile, multimédia, installation, vidéo, ...).<br />
Les candidats doivent être domiciliés et/<br />
ou résider et/ou étudier et/ou avoir étudié à<br />
<strong>Liège</strong>. Un comité de sélection se réunit plusieurs<br />
fois par an et est seul juge dans le<br />
choix des artistes sélectionnés.<br />
Renseignements : « Jeunes artistes »,<br />
Cabinet de la Culture de la Ville de <strong>Liège</strong>.<br />
92, rue Féronstrée - 4000 <strong>Liège</strong>.<br />
Téléphone : +32 (0)4 221 93 23.<br />
jeunesartistes@liege.be<br />
Prix de la Création liégeoise<br />
dans le domaine des arts plastiques<br />
Lancé en 2009 par la Ville de <strong>Liège</strong>, le Prix<br />
de la Création liégeoise dans le domaine des<br />
arts plastiques a pour vocation de découvrir,<br />
d’encourager et de soutenir un jeune talent<br />
liégeois dans les diverses formes d’expression<br />
de l’art contemporain. Le premier prix<br />
est doté de 6 000 e et le deuxième de 4 000 e.<br />
Le sujet proposé par l’artiste est libre.<br />
Le premier prix 2<strong>01</strong>0 a été décerné à<br />
Frédéric platéus (<strong>Liège</strong>, 1976). « Le point de<br />
départ usuel dans le discours sur le travail de<br />
Frédéric platéus est son affiliation au milieu<br />
du graffiti […]. Pourtant, la généalogie de cet<br />
enfant terrible est nettement plus complexe<br />
et surtout insolite. Même si la mixité des<br />
genres et l’hybridation des références sont<br />
aujourd’hui monnaie courante en art, le<br />
travail de Frédéric s’éloigne nettement des<br />
balises herméneutiques contemporaines.<br />
Il s’agit d’avantage ici d’explorer un univers<br />
parallèle, d’embarquer pour un trip visuel<br />
dans un monde de formes et couleurs<br />
mouvantes » (Devrim bayar, 2<strong>01</strong>0).<br />
Le second prix a été décerné à Sophie<br />
lanGoHr (Chênée, 1974) : elle poursuit<br />
depuis quelques années un travail sur les<br />
codes et les genres artistiques ; elle s’attache<br />
à recycler nos imageries et manipule leurs<br />
fondements idéologiques dans des perspectives<br />
décalées. L’artiste a proposé une série<br />
de photographies intitulées Art make-up où<br />
elle parodie les publicités pour les cosmétiques.<br />
Cette galerie de portraits fait aussi<br />
référence à la peinture traditionnelle, notamment<br />
en matière de cadrage et de lumière.<br />
Chaque modèle est maquillé, non pas avec<br />
des produits cosmétiques mais avec des<br />
fournitures artistiques ; le maquillage est<br />
inadapté et donc exagérément visible et<br />
l’artifice mis en évidence.<br />
Marie remaCle<br />
Historienne de l’art<br />
Cabinet de la Culture
Cinémusée : la rencontre du cinéma et du musée<br />
le 3 e mercredi du mois<br />
Au Grand Curtius<br />
Le Grand Curtius ouvre ses portes au<br />
cinéma, et plus particulièrement aux films<br />
consacrés à l’art avec « Cinémusée ».<br />
Ce projet a pu voir le jour grâce à une<br />
étroite collaboration entre le Service éducatif<br />
et au public des musées de la Ville de <strong>Liège</strong><br />
et le Centre du Film sur l’Art (C.F.A.).<br />
Le C.F.A. est une cinémathèque spécialisée<br />
qui met son catalogue à la disposition des<br />
structures culturelles. Depuis près de 30 ans,<br />
il acquiert et diffuse des documentaires sur<br />
l’art. Sans limitation d’époque ou de sujet,<br />
l’association a une politique d’ouverture et<br />
les acquisitions se font au gré des rencontres<br />
et des découvertes. Qu’il s’agisse de peinture,<br />
de sculpture, de photographie ou de<br />
musique, d’art ancien ou contemporain, le<br />
C.F.A. suit ses coups de cœur. Avec un<br />
catalogue de plus de 228 titres, il propose<br />
de véritables trésors cinématographiques<br />
que le Grand Curtius invite à découvrir.<br />
Pour sa 1ère édition, le cycle de projection<br />
« Cinémusée » présente une programmation<br />
pensée autour des collections permanentes<br />
des musées de la Ville de <strong>Liège</strong> et des<br />
expositions temporaires à venir. Il offre ainsi<br />
un programme éclectique et diversifié, tantôt<br />
consacré aux artistes, tantôt axé sur l’histoire<br />
de l’art et ses disciplines telles que la restauration<br />
d’œuvres d’art ou l’étude critique et<br />
scientifique. Analyse d’un courant, d’une<br />
œuvre ou d’un cas particulier, « Cinémusée »<br />
est dédié à la découverte de l’art sous toutes<br />
ses facettes, depuis la préhistoire jusqu’aux<br />
créations contemporaines.<br />
Édith sCHurGers<br />
Animatrice pédagogique<br />
Musées de <strong>Liège</strong><br />
Mercredi 16 février<br />
La restauration<br />
de la Ronde de Nuit<br />
16 mm, Couleur, 35’<br />
Réalisation : Théo Kok, 1977<br />
Pays : Pays-Bas<br />
Chagall - les années russes<br />
Vidéo U-Matic, Couleur, 26’<br />
Réalisation : Charles Najman, 1995<br />
Pays : France<br />
Mercredi 16 mars<br />
Le Dadaïsme<br />
16 mm, Couleur, 52’<br />
Réalisation : Adrian Maben, 1974<br />
Pays : France<br />
Mercredi 20 avril<br />
Lascaux - préhistoire de l’art<br />
Vidéo U-Matic, Couleurs, 52’<br />
Réalisation : Alain Jaubert, 1996<br />
Pays : France<br />
Mercredi 18 mai<br />
Klimt Gustave et l’art nouveau<br />
16 mm, Couleur, 56’<br />
Réalisation : Jean-Louis Fournier, 1974<br />
Pays : France<br />
- Auditorium du Grand Curtius.<br />
- De 16 h 30 à 17 h 30.<br />
- 3 e par personne, art. 27 gratuit.<br />
En famille au musée<br />
le 2 e dimanche du mois<br />
Dimanches 13 février,<br />
13 mars, 17 avril<br />
Ce parcours découverte propose d’explorer<br />
en famille les collections du Grand Curtius.<br />
La visite est adaptée aux grands comme aux<br />
petits, avec notamment un « parcours-jeux ».<br />
- Durée : 1 h.<br />
- Inscription à l’Office du Tourisme :<br />
+32 (0)4 221 92 21.<br />
- Départ à l’accueil du musée à 14 h.<br />
- 10 e par personne,<br />
6 e par enfant de moins de 12 ans.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
30<br />
En plus des expositions temporaires<br />
Visites Théma<br />
le 3 e dimanche du mois<br />
Au Grand Curtius Au Grand Curtius<br />
Ces visites explorent un thème particulier,<br />
qu’il soit essentiel à la compréhension<br />
des collections ou hors des sentiers battus.<br />
- Durée : 1 h 30.<br />
- Inscription à l’Office du Tourisme :<br />
+ 32 (4) 221 92 21.<br />
- Départ à l’accueil du musée à 14 h.<br />
- 10 e par personne.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
31<br />
Dimanche 20 février<br />
La franc-maçonnerie au Curtius<br />
La franc-maçonnerie apparaît au xvii e siècle.<br />
Un siècle plus tard elle fait son entrée en<br />
Principauté de <strong>Liège</strong>. Structurée au fil des<br />
siècles autour d’un grand nombre de rites et<br />
de traditions, les codes maçonniques restent<br />
mystérieux pour le « non-initié ».<br />
À travers les collections du Grand Curtius,<br />
découverte de l’histoire de la franc-maçonnerie<br />
et de ses membres les plus éminents<br />
qui ont marqué le paysage politique,<br />
scientifique ou culturel liégeois.<br />
Dimanche 20 mars<br />
De la plaquette de cire<br />
au livre imprimé<br />
Le livre est le fruit d’une suite d’innovations<br />
technologiques qui ont permis d’améliorer la<br />
qualité de conservation du texte et l’accès à<br />
l’information. Cette aventure est liée aux<br />
conditions politiques et économiques et à<br />
l’histoire des idées et des religions.<br />
Des tablettes de bois enduites de cire utilisées<br />
par les Romains, en passant par les<br />
enluminures de l’époque médiévale jusqu’aux<br />
livres imprimés, découverte de l’histoire du<br />
livre au travers des collections du Grand<br />
Curtius.<br />
Dimanche 24 avril<br />
Être à la mode<br />
Des grâces vestimentaires de la Renaissance<br />
aux envols échevelés du Baroque, voici une<br />
notion bien contemporaine ! Pourtant, l’histoire<br />
du costume montre qu’il existait de véritables<br />
tendances dans la manière de se vêtir au fil<br />
des siècles. Qu’en est-il pour la Renaissance<br />
et l’époque baroque ? Quelle était la garderobe<br />
des Médicis ? Que portait la « fashionista »<br />
du xvii e siècle? Autant de questions qui trouve-<br />
ront réponses grâce à cette balade guidée<br />
dans le dressing historique du Grand Curtius.<br />
Au MAMAC<br />
Musée d’Art moderne<br />
et d’Art contemporain<br />
Dimanche 13 février, 11 h.<br />
Concert « De la mélodie au rire »,<br />
avec poulenC et satie.<br />
Dimanche 13 mars, 11 h.<br />
Concert par l’Orchestre de chambre de Huy.<br />
Dimanche 10 avril, 11 h.<br />
Récital de piano « Au fil de l’eau »<br />
par Éliane Reyes.<br />
www.mamac.be<br />
Accès gratuit<br />
aux collections permanentes<br />
le 1 er dimanche du mois<br />
dans tous les musées.
Jardin d’hiver + Wintertuin<br />
« Jardin d’hiver » au MAMAC et « Wintertuin » au Bonnefantenmuseum de Maestricht :<br />
ces deux expositions se relaient et font dialoguer les deux musées en mettant en<br />
évidence leurs similitudes mais aussi leurs différences. Le MAMAC présente une<br />
sélection d’œuvres d’art contemporain, achats récents et pièces maîtresses du<br />
Bonnefantenmuseum, permettant de redécouvrir son architecture et mettant en<br />
valeur ses vastes volumes, tandis que le Bonnefantenmuseum présente un aperçu<br />
des chefs-d’œuvre d’art moderne des collections liégeoises.<br />
Neuf artistes de nationalités diverses sont exposés au MAMAC avec des<br />
œuvres datant de 1970 à 2009. Quinze artistes illustrent la période allant de l’impressionnisme<br />
au milieu du xx e siècle au Bonnefantenmuseum.<br />
L’exposition au Bonnefantenmuseum consiste en une série d’œuvres provenant<br />
surtout des collections du MAMAC mais ausi du Musée d’Art wallon et de la<br />
Communauté française. Ces œuvres ont été sélectionnées pour illustrer le foisonnement<br />
et l’évolution constante dont la peinture occidentale a fait preuve depuis la fin<br />
du xix e siècle jusqu’au milieu du xx e . Ainsi, la fin du romantisme, l’impressionnisme,<br />
le symbolisme, le fauvisme, l’expressionnisme, le surréalisme, le cubisme et le dadaïsme<br />
sont représentés par des œuvres de qualité mondialement reconnue dues à<br />
des artiste tels que monet, GauGuin, ensor, piCasso, maGritte et arp. Pour des<br />
raisons de cohérence et de clarté, l’abstraction a été résolument écartée.<br />
Commissaire des deux expositions :<br />
Alexander van Grevenstein,<br />
directeur du Bonnefantenmuseum.<br />
Un billet commun est proposé jusqu’au<br />
19 juin. Le billet d’entrée au MAMAC donne<br />
droit à l’entrée gratuite au Bonnefantenmuseum,<br />
et celui de Maestricht permet<br />
l’entrée gratuite au MAMAC.<br />
Jardin d’hiver<br />
Musée d’Art moderne et d’Art contemporain<br />
3, parc de la Boverie, <strong>Liège</strong><br />
Jusqu’au dimanche 27 février<br />
Du mardi au samedi de 13 à 18 h,<br />
le dimanche de 11 à 16 h 30. Fermé le lundi.<br />
Entrée 8 e et 4 e, gratuit pour les moins de<br />
12 ans et les groupes scolaires.<br />
Wintertuin<br />
Bonnefantenmuseum<br />
Avenue Ceramique 250, Maestricht<br />
Du 18 mars au 19 juin<br />
Du mardi au dimanche de 11 à 17 h.<br />
Fermé le lundi.<br />
Entrée 8 e et 4 e.<br />
Françoise saFin-CraHay<br />
Conservatrice au MAMAC<br />
Le titre « Jardin d’hiver » fait allusion à<br />
une installation de Marcel brooDtHaers<br />
au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles<br />
en 1974 et s’applique parfaitement au<br />
bâtiment qui abrite le MAMAC, grande<br />
serre en pleine nature.<br />
La plupart des cimaises ont été mises<br />
de côté, permettant de redécouvrir son<br />
aspect initial qui porte les contradictions<br />
de son époque (une technique de<br />
construction moderne mais habillée en<br />
néoclassique), et l’éclairage artificiel a<br />
été délibérément supprimé afin de<br />
souligner la beauté de cette lumière<br />
naturelle variable, comme à l’époque<br />
de sa construction, l’éclairage artificiel<br />
d’appoint n’ayant été installé que bien<br />
plus tard.<br />
Marcel brooDtHaers est le point de<br />
départ de l’exposition : pour la passion<br />
qu’il portait aux séries, suites de<br />
séquences, mouvements métronomiques,<br />
intervalles et répétitions<br />
constantes et régulières permettant<br />
ainsi aux différences de se manifester,<br />
dans une sorte de jeu dont l’artiste<br />
découvre le résultat par après, laissant<br />
place bien souvent au hasard.<br />
Chacun des artistes présents dans<br />
l’exposition a les mêmes préoccupations<br />
: suites mathématiques, alphabétiques,<br />
schémas rythmiques, poèmes<br />
scandés, balancements entre la vie et<br />
la mort, la nature et l’homme, l’homme<br />
et l’art…<br />
Exposition dans le cadre de<br />
<strong>Liège</strong> Métropole Culture 2<strong>01</strong>0<br />
en Communauté Wallonie-Bruxelles,<br />
à l’initiative de Laurent Jacob<br />
(directeur d’Espace 251 Nord).<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
32<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
33<br />
Mario merz, 8-5-3, 1985,<br />
coll. Bonnefantenmuseum.<br />
En soirée et en journée.<br />
Marcel brooDtHaers (Bruxelles, 1924 - Cologne, 1976)<br />
Marcel Broothaers en Zuid-limburg, 1961-1970<br />
Pawel altHamer (Varsovie, 1967)<br />
et Artur zmiJewski (Varsovie, 1966)<br />
So genannte Wellen und andere Phänomene<br />
des Geistes, 2003-2004<br />
Paul CHan (Hong-Kong, 1973 - New York)<br />
Sade for Sade’s Sake, 2009<br />
Hugo Debaere (Gand, 1958 - 1994)<br />
Man aan de muur, 1994<br />
Michael krebber (Cologne, 1954)<br />
Flaggs (Against Nature), 2003<br />
Sol lewitt (Hartford, 1928 - New York, 2007)<br />
Complex Forms n° 8, 1988<br />
Mario merz (Milan, 1925 - Turin, 2003)<br />
Lezione di Anatomia, 1979 + 8-5-3, 1985<br />
Roman siGner (Appenzell, 1938 - St. Gallen)<br />
Super-8 films, 1975-1989 + Nachtfahrt, 1999<br />
Bas De wit (Budel, 1977 - Maastricht)<br />
Toontje Lager, 2008<br />
+ Toontje Lager (Monument to), 2008
« Jardin d’hiver » au MAMAC,<br />
coll. Bonnefantenmuseum,<br />
de gauche à droite, de haut en bas.<br />
Michael krebber, Flaggs (Against Nature), 2003.<br />
Bas De wit, Toontje Lager, 2008.<br />
Sol lewitt, Complex Forms n° 8, 1988.<br />
Paul CHan, Sade for Sade’s Sake, 2009.<br />
Hugo Debaere, Man aan de muur, 1994.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
34<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
35
8 e Biennale internationale<br />
de gravure contemporaine de <strong>Liège</strong><br />
Depuis la première édition en 1983, la Biennale<br />
de gravure a pour objectif d’offrir un panorama<br />
complexe et varié de l’art de l’estampe<br />
tel qu’il est pratiqué à travers le monde.<br />
Lors de la dernière édition, la nouvelle appellation<br />
« gravure contemporaine » reflétait la<br />
volonté de s’éloigner des clichés de l’estampe<br />
classique déclinée en noir et blanc, pour<br />
s’ouvrir vers de nouvelles techniques, de<br />
nouvelles expérimentations.<br />
Parmi les 600 dossiers réceptionnés, 58<br />
candidats ont été retenus : ils présentent au<br />
MAMAC des œuvres originales et récentes.<br />
24 pays sont représentés, dont certains sont<br />
devenus des partenaires fidèles de l’événement<br />
(Canada, Colombie, Brésil, Japon, …)<br />
mais d’autres nous rejoignent pour la première<br />
fois : l’Afrique du Sud, le Paraguay, le<br />
Kosovo. Un jury international désignera le ou<br />
la lauréate de cette 8e édition.<br />
RR<br />
Musée d’Art moderne et d’Art contemporain<br />
+ Cabinet des Estampes et des Dessins<br />
3, parc de la Boverie, 4020 <strong>Liège</strong><br />
Du 25 mars au 15 mai<br />
La gravure :<br />
art ancien, art vivant<br />
La gravure s’affirme comme un art vivant,<br />
à l’affût des technologies récentes et même<br />
initiateur de procédés nouveaux. Les techniques<br />
traditionnelles telles que l’eau-forte,<br />
le burin, la pointe sèche ou la linogravure<br />
sont toujours en vigueur, mais peuvent dorénavant<br />
être associées, voire supplantées par<br />
une pratique contemporaine : impression<br />
digitale, offset, collographie, photocopies,<br />
insertion de photographies, sans parler de<br />
l’intérêt porté aujourd’hui à l’emploi de<br />
produits non toxiques.<br />
L’utilisation de ces nouveaux procédés<br />
libère alors la gravure de beaucoup de contraintes.<br />
La matrice devient numérique et<br />
l’impression conjugue des techniques traditionnelles<br />
et informatiques. On parle alors<br />
de techniques mixtes. Cette combinaison<br />
de techniques représente une émulation<br />
évidente pour les artistes qui voient leurs<br />
possibilités expressives s’étendre presqu’à<br />
l’infini.<br />
SD<br />
Fête<br />
de la gravure<br />
Outre la Biennale, unique en son genre,<br />
<strong>Liège</strong> se distingue par la mise sur pied<br />
d’une vingtaine d’événements satellites,<br />
formant une réelle fête autour du thème<br />
de la gravure. Rassemblant en une<br />
même région un concentré d’expositions,<br />
cette manifestation démontre<br />
que l’art d’imprimer et de reproduire<br />
n’est plus le parent pauvre des arts<br />
dits nobles.<br />
Musées, centres d’expositions,<br />
galeries d’art déclinent l’art de l’estampe<br />
sous toutes ses formes, ses techniques,<br />
ses formats. Cette recherche<br />
de mise en valeur de l’art de graver fait<br />
naître un contexte de stimulation artistique<br />
peu banal en Europe.<br />
La Biennale marque la place de la gravure<br />
dans l’art contemporain par la pluralité<br />
des techniques et des options esthétiques.<br />
Dans son prolongement est née la Fête de la<br />
Gravure qui offre une vision plus aboutie et<br />
construite de quelques pratiques artistiques<br />
choisies. L’approche contemporaine reste<br />
l’option privilégiée de la sélection de ces<br />
projets, sans basculer dans le monde de la<br />
photographie ou de l’infographie.<br />
SD<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
36<br />
bra Paula almozara<br />
usa Edward bateman<br />
can Derek Michael besant<br />
ita Marina binDella<br />
bel Marina bouCHeï<br />
pry Luvier Casali<br />
fra Sabine CloCHey<br />
bel Marilyne Coppée<br />
deu Jana DaHms<br />
bel Sabine DelaHaut<br />
fra David Delesalle<br />
hrv Edvin DraGiCeviC<br />
fra Agnès Dubart<br />
bel Paul Dumont<br />
che Charles-François Duplain<br />
bel Luc étienne<br />
bel Raphaëlle GoFFaux<br />
col Juliana Gomez montes<br />
fra Anne GouJauD<br />
usa Raphael GriswolD<br />
nld Alexandra Haeseker<br />
nld Marcelle Hanselaar<br />
bel Chantal HarDy<br />
deu Willy Heyer<br />
jpn Yuji Hiratsuka<br />
bih aïda JasareviC<br />
dnk Anne Lildholdt Jensen<br />
fin Janne laine<br />
bel Ingrid leDent<br />
prt Joe lima<br />
nld Ruud mattHes<br />
fra Ludovic mennesson<br />
esp Ricardo moJarDin<br />
esp David orteGa Del Campo<br />
fra Sophie palisse<br />
kor Michelle park<br />
kos Dimitrije peCiC<br />
bel Goedele peeters<br />
deu Ute pleuGer<br />
fra Nicolas poiGnon<br />
arg Fernando Javier polito<br />
usa Diana quinby<br />
can Ross raCine<br />
fra Nathalie reba<br />
zaf Colleen ross<br />
can Stéphanie russ<br />
deu Richard sCHimanski<br />
deu Giske siGmunDstaD<br />
deu Hans-Jürgen söFFker<br />
pol Piotr staCHlewski<br />
deu Waltraut taenzler<br />
bel Hans van DiJCk<br />
bel Sofie vanGor<br />
hrv Ana vivoDa<br />
nld Hans wap<br />
bra Flavia yue<br />
pol Burdy zenon<br />
chn Wenhaï zHanG<br />
Régine rémon<br />
Conservatrice<br />
du Cabinet des Estampes et des Dessins<br />
Commissaire de la Biennale<br />
Sophie DeCHarneux<br />
Historienne de l’art<br />
Musées de <strong>Liège</strong><br />
« Georg Baselitz<br />
Le monde à l’envers, tel qu’il est »<br />
En point d’orgue des Biennales de gravure,<br />
le Cabinet des Estampes consacre ses<br />
espaces d’expositions à l’œuvre graphique<br />
d’un artiste de réputation internationale :<br />
Bram van velDe, Raoul ubaC, Marthe wéry,<br />
Geneviève asse.<br />
Pour cette 8e édition, l’exposition est<br />
consacrée à l’une des personnalités majeures<br />
de l’art allemand et européen de ce siècle :<br />
Georg baselitz. Xylographies, linogravures,<br />
pointes-sèches, eaux-fortes, aquatintes,<br />
vernis mou, le peintre-sculpteur-dessinateur<br />
décline ces techniques depuis 1963. Ses<br />
premiers « renversements », désormais<br />
célèbres, remontent à 1969. Exécutés la tête<br />
en bas, ses sujets familiers (nus, enfants,<br />
chiens, cerfs, …) illustrent le propos de<br />
l’artiste : Je représente le monde à l’envers,<br />
tel qu’il est ». L’artiste recourt à la gravure<br />
qu’il considère comme une analyse complémentaire,<br />
face à la peinture : J’ai fait des<br />
xylographies quand je ressentais la nécessité<br />
de donner une forme définitive à un tableau.<br />
La maison d’édition parisienne Catherine<br />
Putman édite les gravures de baselitz<br />
depuis 1995. La série de six nouvelles xylographies<br />
monumentales intitulées Big night<br />
participe à la relecture d’œuvres de jeunesse.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
37<br />
Ces tirages de grand format sont encrés et<br />
tirés à même le sol, non pas au moyen d’une<br />
presse habituelle mais à l’aide d’un rouleau<br />
ou au frotton.<br />
L’exposition, qui rassemble plus de<br />
quarante gravures, est une première en<br />
Belgique. Les œuvres sont gracieusement<br />
prêtées par la maison Catherine Putman.<br />
RR<br />
Georg baselitz, Abends, 2004.<br />
Eau-forte et aquatinte.<br />
© Catherine Putman, Paris.
Jean-Luc sCHütz<br />
Conservateur<br />
du département d’Archéologie<br />
Grand Curtius<br />
Regroupement et déménagement des réserves lapidaires<br />
Les œuvres en pierre des collections<br />
de la Ville de <strong>Liège</strong> ne peuvent toutes<br />
être présentées dans les musées :<br />
elles sont conservées en réserve tout en<br />
restant accessibles aux chercheurs.<br />
Un travail conséquent quoique non visible<br />
par le public vient de se terminer :<br />
leur classement et leur déménagement<br />
dans une nouvelle réserve unique.<br />
La Ville s’est dotée récemment d’un lieu<br />
sécurisé où ont été déménagés meules,<br />
mosaïques, vestiges du monument funéraire<br />
de Vervoz, sarcophages mérovingiens, fragments<br />
architecturaux issus des fouilles de la<br />
place Saint-Lambert (bases de colonnes, morceaux<br />
de chapiteaux, vestiges de l’ancienne<br />
cathédrale Saint-Lambert), croix funéraires,<br />
pierres tombales et pierres armoriées,<br />
statues, linteaux et piédroits de cheminées,<br />
briques d’âtres, marbres ainsi que des éléments<br />
architecturaux (fontaine, mascarons,<br />
dallages…). À cette liste s’ajoutent des<br />
moulages, des boiseries et des fers forgés.<br />
Les pièces à déménager étaient en<br />
grande partie stockées sur des palettes de<br />
manutention de formats différents. Le système<br />
d’entreposage des nouvelles réserves<br />
demandait l’utilisation exclusive de palettes<br />
de format standard (120 x 80 cm). Il a donc<br />
d’abord fallu remplacer un grand nombre de<br />
palettes hors normes, ou en mauvais état,<br />
par des palettes robustes de type « palettes<br />
Europe » ou « Eur-Epal ». De nombreuses<br />
palettes ont dû être reconditionnées car le<br />
matériel entreposé dans les anciennes<br />
réserves était épars. Le poids des objets<br />
devait également être pris en compte pour<br />
veiller au bon équilibrage de chaque palette.<br />
La présence d’un numéro d’inventaire<br />
sur certaines pièces a permis de reconstituer<br />
des ensembles cohérents – les fiches et les<br />
registres d’inventaire fourmillant de renseignements<br />
utiles tels que la provenance ou la<br />
datation supposée des œuvres. Pour celles<br />
sans numéro ou au numéro estompé, le parti<br />
pris a été de les ranger en fonction de plusieurs<br />
critères : styles, décors, matières,<br />
fonctions (architecture civile ou religieuse).<br />
Puis les palettes ont été numérotées<br />
(438 palettes) et photographiées. Une fois les<br />
pièces acheminées vers leur nouveau lieu<br />
d’entreposage, il ne restait plus qu’à placer<br />
les palettes sur les rayonnages et à les localiser<br />
sur un plan. La prochaine étape consistera<br />
à encoder les pièces dans la base de<br />
données Flora.<br />
Ce déménagement a été réalisé en<br />
interne, avec les préparateurs des musées et<br />
les tailleurs de pierre de la Ville.<br />
Édith sCHurGers<br />
Animatrice pédagogique<br />
Musées de <strong>Liège</strong><br />
Le Service éducatif et au public des musées<br />
Outil de médiation vers tous les types de visiteurs,<br />
pour la découverte du patrimoine, le plaisir<br />
d’apprendre, le partage des connaissances,<br />
ce Service favorise la découverte active et adaptée<br />
des collections des musées, que ce soit<br />
dans le cadre scolaire, professionnel ou du loisir.<br />
Il développe une politique de sensibilisation<br />
aux collections des musées, et plus largement<br />
aux arts et au patrimoine, grâce à des<br />
actions de médiation comme des journées<br />
d’animations spécifiques et/ou ludiques, des<br />
conférences, des rencontres… Il développe<br />
des collaborations constructives avec<br />
d’autres institutions, avec les écoles et<br />
universités, ou toute organisation menant à<br />
la création de démarches utiles et novatrices<br />
en matière de médiation culturelle. Enfin, le<br />
Service rend accessible les recherches<br />
scientifiques menées par les musées, par le<br />
biais de supports divers : dossiers pédagogiques,<br />
fiches pédagogiques, carnets de<br />
jeux.<br />
Au Grand Curtius : avec une équipe de<br />
30 guides accrédités, le musée propose des<br />
visites guidées pour tous : individuel, famille,<br />
amis, école, personne fragilisée, association.<br />
Une attention particulière est accordée aux<br />
attentes des enseignants. Une dizaine d’animations<br />
ont été pensées en fonction des<br />
programmes des différents niveaux d’enseignement<br />
en Communauté française. La prise<br />
en compte des besoins des visiteurs dits<br />
fragilisés (souffrant de handicaps) a conduit à<br />
la création d’animations qui leurs sont spécialement<br />
dédiées.<br />
Un outil de visite destiné aux plus jeunes,<br />
Petits Jeux au Grand Curtius, invite à la découverte<br />
ludique d’une vingtaine de pièces<br />
maîtresses du musée. Le Service édite aussi<br />
des fiches pédagogiques ciblant des thématiques<br />
liées aux collections du musée.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
38<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
39<br />
Une imprimerie dans la Ville<br />
Les investissements réalisés il y a quatre<br />
ans par la Ville permettent aujourd’hui de<br />
produire quelque neuf millions de tirages par<br />
an, auxquels s’ajoutent sept millions de<br />
photocopies.<br />
L’infographiste<br />
applique au fichier<br />
<strong>pdf</strong> reçu la bande de<br />
contrôle, les tracés<br />
de coupe…<br />
Le principe de la presse est<br />
basé sur le phénomène des<br />
liquides non miscibles.<br />
La plaque d’aluminium est<br />
humidifiée puis encrée.<br />
Le tirage s’effectue en<br />
continu.<br />
Les données sont copiées<br />
dans une machine gravant<br />
des matrices (plaques) en<br />
aluminium par un faisceau<br />
laser.<br />
Chaque plaque est dédiée<br />
à une couleur de base<br />
(cyan, magenta, jaune, noir).<br />
Les quatre couleurs sont imprimées<br />
successivement en un seul passage.<br />
Le tirage s’effectue feuille à feuille, à une<br />
vitesse de ± 9 000 feuilles/heure. De<br />
minuscules points d’encre sont projetés.<br />
Les imprimés sont ensuite rognés aux<br />
dimensions demandées. Une machine<br />
se charge d’assembler et de plier les<br />
documents et de les relier.<br />
L’imprimerie de la Ville travaille pour l’administration<br />
communale, mais aussi pour toutes<br />
les manifestations dans lesquelles la Ville<br />
s’engage : les comités de quartier, les<br />
écoles, la culture, le tourisme… Elle est<br />
dirigée par Daniel Libotte et Paul Bouhon<br />
en est le contremaître.<br />
Les matrices sont<br />
introduites dans la<br />
presse offset.<br />
Ces points sont imperceptibles<br />
à l’œil nu, mais parfaitement<br />
visibles avec un<br />
compte-fil. C’est ce qu’on<br />
appelle la trame.<br />
La production est enfin<br />
empaquetée et livrée.
Flora<br />
L’acquisition par la Ville de <strong>Liège</strong> d’un logiciel gérant l’ensemble des collections du<br />
patrimoine culturel va permettre aux musées, bibliothèques, centres de documentation<br />
et services d’archives de travailler en réseau et de rendre leurs collections<br />
accessibles au public via un portail web. Le choix de la Ville s’est porté sur le logiciel<br />
d’origine française Flora car il contribue à mettre le système d’information documentaire<br />
au centre des institutions patrimoniales avec un positionnement transversal<br />
unique pour les différents métiers.<br />
La mise en place de la solution informatique a été progressive et devrait être<br />
terminée au cours du second semestre de 2<strong>01</strong>1.<br />
Les services offerts<br />
Flora est un bouquet de services web, parfaitement modulables et paramétrables,<br />
dont la mise en œuvre apporte à chaque type d’utilisateurs (conservateurs, enseignants<br />
chercheurs, étudiants, archivistes, bibliothécaires, grand public, …) une offre<br />
de services personnalisables et accessibles depuis un simple navigateur.<br />
- Le service Saisie et mise à jour des descriptions permet de dresser un inventaire<br />
complet des collections, en conformité avec les normes relatives à chaque<br />
métier.<br />
- Le service Photos et documents électroniques permet d’associer aux descriptions<br />
des photos, des vidéos et tout type de documents numérisés.<br />
- Le service Communication permet de gérer les mouvements de tout type de<br />
ressources (œuvres, monographies, revues, photos, archives, …). Il assure une<br />
parfaite traçabilité de la communication des objets en termes de prêts, retours,<br />
consultations sur place…<br />
- Le service Accès public permet au grand public d’accéder aux collections et de<br />
les localiser avec précision.<br />
- Le service Exposition - Colis assure la gestion des expositions depuis la prévision<br />
de cet événement jusqu’au transport des œuvres en passant par l’enregistrement<br />
des mouvements de sortie et retour, les constats d’état, les contrats d’assurance,<br />
la mise en caisse, etc.<br />
- Le service Localisation - Récolement permet la localisation précise de chaque<br />
œuvre et l’organisation de campagne de récolement de tout ou partie d’un<br />
musée.<br />
Ils sont complétés par d’autres services tels que Thesaurus, Versement-Tri-Élimination,<br />
Statistiques, Acquisition-Abonnement, Accès professionnel, Statistiques qui<br />
fournissent aux professionnels les outils indispensables à une saine gestion.<br />
Évolution du projet<br />
Flora comporte quatre volets ou modules : un module musées, un module bibliothèques<br />
et centres de documentation, un module archives et un portail web.<br />
Dans un premier temps, le logiciel a été mis en service au département des<br />
Archives en juillet 2009. Il y gère des archives historiques et administratives. La base<br />
de données comporte à ce jour 576 000 descriptions archivistiques ainsi que les<br />
Maryse Jaspers-Colleye<br />
Cellule Informatique<br />
du département de la Culture<br />
La nouvelle solution informatique des musées de la Ville de <strong>Liège</strong><br />
Le logiciel Flora est un outil permettant<br />
une gestion efficace des collections<br />
patrimoniales. Sa mise en place a été<br />
progressive et l’installation, fin 2<strong>01</strong>1,<br />
d’un portail web fédératif en sera la<br />
phase ultime.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
40<br />
Accès public<br />
Accès<br />
professionnel<br />
Statistiques<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
41<br />
Saisie<br />
et mise à jour<br />
des descriptions<br />
Expositions<br />
Colis<br />
Photos<br />
et documents<br />
électroniques<br />
Localisation<br />
Récolement Acquisition<br />
Abonnement<br />
Base de données<br />
Recherche fédérée<br />
Infrastructure documentaire<br />
Communication<br />
Thésaurus<br />
Versement<br />
Tri<br />
Élimination<br />
images électroniques associées. Progressivement, les archives occupant aujourd’hui<br />
dix kilomètres de rayonnage seront intégrées à cette base.<br />
Le module bibliothèques est en cours de test et le module musées est<br />
opérationnel depuis le 22 juillet 2<strong>01</strong>0. La totalité des 72 000 fiches muséales, enregistrées<br />
dans différents fichiers informatiques, ont été injectées dans la nouvelle base<br />
de données. À titre d’exemple, une recherche sur les peintures de James Ensor<br />
fournit la réponse ci-contre.<br />
Quant au portail web fédératif, il donnera accès simultanément aux collections<br />
muséales, bibliothéconomiques et archivistiques dans la mesure où celles-ci sont<br />
publiques. Ainsi, une recherche sur Auguste Donnay fournira en une seule opération<br />
un extrait du registre de recensement attestant de sa présence en 1881 dans une<br />
maison située 35 rue Pont d’Avroy, la description et la photo de ses œuvres conservées<br />
dans les musées de la Ville et les ouvrages le concernant consultables à la<br />
bibliothèque Ulysse Capitaine ou dans les centres de documents des musées.<br />
En conclusion<br />
Flora est une solution intégrée 100 % web de gestion de systèmes d’information<br />
documentaires permettant de fédérer les acteurs culturels afin d’optimiser, analyser,<br />
valoriser et pérenniser l’activité des différents secteurs.<br />
•
Qui se ressemble…<br />
La bonne gestion des collections d’un musée passe, entre autres choses, par sa<br />
politique d’acquisitions. Au sein d’une institution comme le Grand Curtius, il incombe<br />
à chaque conservateur d’en faire la proposition auprès de la ou des instances qu’il<br />
estime les plus aptes à soutenir financièrement son projet. Plusieurs de celles-ci<br />
entrent en ligne de compte, individuellement ou conjointement : la Ville de <strong>Liège</strong>,<br />
opérateur naturel de ce type d’actions, la Fondation Roi Baudouin, à travers les<br />
différents fonds dont la gestion lui a été confiée, le mécénat privé ou, s’il échet, celui<br />
d’une association des Amis de musée. Trois d’entre elles (Les Amis du Musée d’Armes,<br />
Les Amis du Musée d’Art religieux et d’Art mosan, Les Amis de l’Institut archéologique<br />
liégeois) sont susceptibles de remplir ce rôle en appui au Grand Curtius.<br />
Une politique d’acquisitions peut couvrir plusieurs objectifs avec, comme<br />
point de départ de la réflexion à cet égard, les différents champs des collections,<br />
selon par exemple qu’il s’agit de compléter des séries existantes, d’acquérir la « perle<br />
rare » qui manque à l’une d’entre elles, d’ouvrir à propos un nouveau champ parmi<br />
celles-ci, voire de remplacer avantageusement un spécimen en moins bon état.<br />
Et dans le domaine des acquisitions, c’est le hasard, d’aucuns diront peutêtre<br />
la nécessité, qui nous a amené à plusieurs reprises à concrétiser certaines<br />
opportunités. Les exemples retenus ici n’ont pas été choisis uniquement pour leur<br />
caractère anecdotique : les circonstances de leur découverte ont apporté également<br />
de précieuses informations pour leur meilleure connaissance. La section de l’art<br />
mosan est évidemment au centre de ces récits qui concernent l‘acquisition d’œuvres<br />
relevant de sa production au xiv e siècle, moins connue que celle de son âge d’or du<br />
xii e siècle.<br />
Un jour de 1978, invité par le curé de Fexhe-le-haut-Clocher à explorer les greniers<br />
de la cure en vue d’y identifier un certain nombre de sculptures reléguées là manifestement<br />
depuis longtemps, nous y découvrîmes, sous une importante couche de<br />
poussière et de tuileaux, une statue en chêne d’un saint Jean de calvaire. Le style,<br />
à l’évidence, s’avérait être celui d’un maître mosan des années 1330, proche de<br />
l’atelier de la Vierge de La Gleize, bien connue des médiévistes. Le statut de musée<br />
diocésain qui était celui de l’ancien MARAM – et qui l’est resté aujourd’hui à travers<br />
le département d’Art religieux et d’Art mosan du Grand Curtius – permit que cette<br />
sculpture inédite et en péril rejoignît les quelques œuvres mosanes de même époque<br />
au sein de ces collections.<br />
Quelque temps plus tard, un antiquaire frappait à la porte du musée. Il était<br />
vendeur d’une statue masculine, de type juvénile, de format presque identique et<br />
dont l’exécution, jusque dans les moindres détails, révélait l’intervention de la même<br />
main que pour le saint Jean : même visage rond au menton pointu, même chevelure<br />
bouclée, mêmes drapés, en particulier celui « en tablier » devant l’abdomen, même<br />
méplat dessiné par le vêtement au niveau de la saillie du genoux… Le couvre-chef<br />
du personnage, en forme de cône, l’identifiait à un pape : cette forme était celle de<br />
la tiare aux xiii et xiv e siècles, portée par exemple par le saint Calixte à l’un des<br />
portails de la cathédrale de Reims (vers 1230). Peu de saints papes, en dehors de<br />
Albert lemeunier<br />
Conservateur<br />
du département d’Art religieux et d’Art mosan<br />
Grand Curtius<br />
À propos de sculptures mosanes<br />
Dans le domaine<br />
des acquisitions,<br />
c’est parfois le hasard,<br />
d’aucuns diront peut-être<br />
la nécessité, qui conduit<br />
à concrétiser certaines<br />
opportunités.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
42<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
43<br />
saint Pierre, saint Corneille ou saint Clément, figurent parmi les saints vénérés au<br />
Moyen Âge en région mosane. L’hypothèse qu’il s’agisse ici de saint Clément s’avérerait<br />
vraisemblable si l’on tient compte de ce que celui-ci est, depuis le xi e siècle, le<br />
titre de la paroisse d’Oreye, à quelques encablures de… Fexhe-le-haut-Clocher.<br />
L’hypothèse de l’existence d’un atelier régional pouvait donc être émise. Auraient<br />
été produits dans le même atelier le calvaire de Momalle, et une statue de saint<br />
Hubert provenant de Lavoir (Grand Curtius), proche stylistiquement et géographiquement<br />
des œuvres précédentes.<br />
Ce faisceau d’éléments concordants fut suffisamment convaincant pour que<br />
ce saint pape fût à son tour acquis, grâce à l’intervention de l’asbl « Les Amis du<br />
MARAM », en vue d’enrichir désormais, aux côtés du saint Jean et du saint Hubert,<br />
l’importante section, aujourd’hui au Grand Curtius, dévolue au xiv e siècle mosan.<br />
C’est au sein de cette même section que des rencontres fortuites permirent par<br />
ailleurs de regrouper quelques sculptures relevant du style de l’atelier qui, toujours<br />
en région mosane au cours de la même période, se spécialisa dans le travail du<br />
marbre de Carrare.<br />
Tout commença par un courrier reçu par notre prédécesseur L. Dewez, vers<br />
le milieu des années septante et émanant de W. Forsyth, médiéviste américain de<br />
renom. Ce dernier sollicitait de son correspondant qu’il voulût bien vérifier l’existence<br />
en la chapelle du Calvaire à <strong>Liège</strong>, proche de Saint-Laurent, d’un groupe médiéval<br />
en marbre de Carrare représentant la Mise au tombeau. Si cette demande avait suscité<br />
de prime abord une certaine incrédulité chez le conservateur liégeois, pourtant<br />
l’un des meilleurs connaisseurs de notre patrimoine, il s’acquitta cependant de sa<br />
mission… pour constater que son correspondant avait été parfaitement informé :<br />
cette chapelle du début du xx e siècle recelait bien, depuis 1942, l’œuvre en question.<br />
L’y laisser plus longtemps, dans des conditions de sécurité et de conservation précaires,<br />
s’avérait périlleux. Avec les autorisations requises, un moulage fut mis en place<br />
dans la chapelle, l’original trouvant refuge, pour être exposé, à l’ancien MARAM.
Quelques temps plus tard, la niche d’une « potale » endommagée située<br />
dans la campagne aux confins du village de Solières, dans la région de Huy, s’avéra<br />
abriter un saint Joseph provenant d’une Nativité. La sculpture était en marbre de<br />
Carrare et présentait des ressemblances stylistiques étonnantes avec la Mise au<br />
tombeau : même expression grave du visage, même traitement des drapés et des<br />
mains. Le saint Joseph ne tarda heureusement pas à rejoindre la Mise au tombeau.<br />
Il en fut de même peu après pour un christ en croix d’une chapelle castrale située à<br />
quelques kilomètres de là. En raison des affinités évoquées avec les œuvres précédentes,<br />
le christ (qui avait conservé une partie de sa polychromie) fut remis au Musée<br />
par son généreux propriétaire.<br />
Hasard ou nécessité, disions-nous plus haut à propos de certaines circonstances<br />
d’acquisitions… La présence des deux dernières œuvres en région hutoise allait<br />
nous rappeler que d’autres sculptures en marbre de Carrare, issues manifestement<br />
du même atelier, avaient déjà été signalées comme de provenance identique. Il<br />
s’agit de deux groupes de la Passion, de l’ancienne collégiale de Huy (Pâmoison de<br />
la Vierge, Soldats de calvaire), aujourd’hui au Metropolitan Museum. Deux autres<br />
groupes, un Ecce Homo et un Christ aux limbes, dans la collection des Princes de<br />
Ligne à Belœil, sont peut-être également de provenance hutoise.<br />
Si l’on ajoute à ce qui précède un Larron de calvaire retrouvé dans le lapidaire<br />
de l’église Saint-Jacques à <strong>Liège</strong> et entré également dans les collections de notre<br />
musée, nous avons là rassemblés certains parmi les disjecta membra les plus<br />
significatifs de la production de cet atelier mosan, peut-être hutois, spécialisé au xiv e<br />
siècle dans le travail de ce marbre précieux et recherché, non seulement en Italie,<br />
mais aussi en nos régions. Certaines influences italiennes sur cette production<br />
mosane ne seraient d’ailleurs pas à exclure en l’occurrence.<br />
Qui se ressemble…<br />
•<br />
Pages précédentes :<br />
saint Jean de Calvaire (à gauche)<br />
et saint Pape (saint Clément ?), chêne (à droite),<br />
vers 1330.<br />
Ci-dessus, de gauche à droite :<br />
Mise au tombeau, saint Joseph et Christ en croix,<br />
marbre de Carrare (détails),<br />
Région mosane, vers 1330-1340.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
44<br />
La musique est un musée vivant<br />
Touches et leviers du pianoforte carré<br />
Zumpe-Buntebart (1769) ayant appartenu<br />
au compositeur André Modeste Grétry.<br />
Photo prise lors de la restauration en 2<strong>01</strong>0<br />
par J. Van den Hemmel.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
45<br />
Patrick DHeur<br />
Pianiste-compositeur<br />
Responsable du Musée Grétry<br />
Chargé de mission auprès de la Ville de <strong>Liège</strong><br />
pour « Grétry 2<strong>01</strong>3 »<br />
Le musée contient le temps. Il ne le retient pas,<br />
bien au contraire. Il est précisément là pour le<br />
faire aboutir vers un futur plus riche, mieux compris.<br />
Parcourir un musée est un voyage dans le<br />
temps, une recherche de l’œil vers l’objet qui<br />
évoque, qui interpelle. Cet objet nous situe, nous<br />
met dans un rapport d’émotion avec lui et son<br />
temps. Il finit par nous interroger et nous invite à<br />
la réflexion. L’objet exposé ne bouge pas. Pourtant<br />
son esthétique, sa beauté et son histoire traversent<br />
notre imaginaire et tracent un mouvement<br />
invisible. L’objet est, le mouvement n’est pas.<br />
Écouter une œuvre musicale, c’est aussi<br />
pénétrer dans un musée. Un espace imaginaire<br />
où le mouvement est permanent, où chaque<br />
« objet » bouge et trouve sa fonction dans le rythme, son rôle dans l’harmonie, son<br />
envol dans les hauteurs des vibrations. Mais dans ce musée, les objets sont invisibles.<br />
Le mouvement est, l’objet n’est pas.<br />
Une œuvre musicale est créée dans le temps et c’est par le temps du rythme<br />
qu’elle sera restituée parfaitement. Elle est construite d’objets sonores qui, dispersés<br />
dans des hauteurs, s’étirent pour apparaître enfin sur une seule ligne qui avance et<br />
qui distribue les sons. Voir la musique… sur le temps qui passe.<br />
Pour entrer efficacement dans un musée, la musique doit apparaître vivante<br />
et adaptée. Vivante car c’est dans cet aspect qu’elle a son plein effet communicatif,<br />
parfait et humain, et adaptée, pour pouvoir être interprétée dans des endroits parfois<br />
inattendus. Elle ne doit pas être confondue avec un décor musical enregistré,<br />
« passe-partout » et surtout « entre nulle part » ce qui est malheureusement le second<br />
rôle que certains lui prêtent volontiers.<br />
Découvrir un espace d’exposition avec une musique vivante donne une<br />
pleine mesure à la démarche du visiteur. La musique peut aider à mieux apprécier<br />
ce qu’il va découvrir. Elle peut créer un décor qui éveillera une autre attention et<br />
imprimera un souvenir plus profond. Elle ne doit pas forcément être en rapport direct<br />
et historique avec l’objet, mais doit respecter la création d’une atmosphère propice<br />
à l’évocation du propos de l’exposition. Si son adéquation historique est possible et<br />
réalisable, alors celle-ci permet de tisser les liens secrets d’une réelle intensité qui<br />
participent à la recherche du Beau dans le domaine de l’Art. C’est la perfection des<br />
détails qui participe à la réussite d’une œuvre.<br />
La musique peut se superposer à tous les arts. C’est son originalité et sa<br />
force. Si la musique doit être vivante, ses instruments doivent l’être aussi. Pour être<br />
exposés, les instruments doivent être dans un état de conservation parfait et idéalement<br />
restaurés. Les exposer sans en jouer et les entendre est toujours une énorme<br />
déception. Le réveil de leur sonorité est un moment magique, un événement à créer,<br />
à faire découvrir et à ne jamais manquer.<br />
•
Pierre muylle<br />
Directeur du Mad Musée<br />
Le musée mangeable<br />
Nous devons être des cannibales<br />
Fraîchement diplômé, j’étais, il y a déjà<br />
longtemps, au Beursschouwburg, entouré<br />
de personnes expertes en matière de<br />
musées. Cette première expérience professionnelle<br />
tombait à pic et je saisis ma chance<br />
pour étudier le rôle que le MSK (musée des<br />
Beaux-Arts) pouvait avoir dans les quartiers<br />
de la périphérie de Gand. Après des mois de<br />
conversations avec des organisations et<br />
personnes de tout poil dans ces quartiers, je<br />
pouvais proposer un win for life potentiel<br />
pour le musée des beaux arts.<br />
L’un après l’autre, les chercheurs montèrent<br />
à la tribune. Que signifie le Musée de<br />
la Mine pour les fils de travailleurs immigrés à<br />
Zwartberg ? Quel rôle peuvent jouer les<br />
musées dans une ville comme Bruxelles ?<br />
Quel public le musée en tant qu’instrument<br />
peut-il encore toucher dans notre société ? Le<br />
musée, inventé pour que la bourgeoisie du<br />
xix e siècle prenne forme, a déterminé notre<br />
rapport avec l’art : comment adapter ce<br />
rapport à la vie contemporaine ?<br />
Dans les sièges en velours rouge du<br />
Beursschouwburg, nous écoutions ces<br />
interventions et ces pirouettes permettant de<br />
faire croire que chaque musée avait sa solution.<br />
Le directeur d’un musée brugeois, après<br />
une courte introduction sur les audio-guides<br />
et la problématique de leurs traductions (dont<br />
le japonais bien sûr), en arriva rapidement à<br />
ce qu’il aurait volontiers appelé le cœur de<br />
son discours, la vraie raison de sa présence<br />
à Bruxelles : un inventaire détaillé de la<br />
collection de son musée. Une liste de milliers<br />
de pièces de service en argent, de pots en<br />
étain, de dentelles, d’armes, calèches et pots<br />
de chambre… Ce n’est qu’après plusieurs<br />
interventions que le directeur a arrêté son<br />
énumération. Il regarda le public avec un air<br />
déconfit. À cette époque, ça me suffisait<br />
pour me lancer dans le combat contre le<br />
conservatisme brugeois qui empêchait de<br />
rendre notre ville plus vivante. Je me suis<br />
alors promis que jamais je ne travaillerais dans<br />
un milieu aussi fanatique et réactionnaire.<br />
Maintenant que cet homme est depuis<br />
longtemps pensionné – et que Bruges a<br />
heureusement évolué –, je me souviens de<br />
cette présentation comme du récit honnête<br />
d’un homme coupé de la réalité mais qui ne<br />
faisait absolument rien pour le cacher. Cet<br />
homme reste le symbole d’une génération<br />
pour qui le musée est une valeur intouchable.<br />
Il se demandait vraiment ce qu’il pouvait faire<br />
avec ses cuillères en argent et ses pots en<br />
étain, et avec les dentelles de son grenier, et<br />
qui s’y intéressait encore. Il était incapable de<br />
répondre à ces questions pertinentes. Dans<br />
sa position, il lui était impossible de parler du<br />
musée : il était dedans, il était le musée. Il conservait<br />
seul ces merveilles dans une grande<br />
maison dont lui seul avait la clé. Depuis sa<br />
fenêtre il voyait bien ce qui se passait dehors,<br />
et s’en réjouissait, mais il ne pouvait pas<br />
imaginer que son musée pourrait en faire<br />
partie. Avec le recul, je pense que c’était une<br />
très belle présentation. Il ne se cachait pas<br />
derrière des arguties : pas de programme<br />
éducatif pour faire passer la pilule, pas de<br />
petite histoire comme pièce de rechange du<br />
vécu.<br />
Le terme musée ne s’était jamais montré<br />
si clairement dans toute son immobilité,<br />
coupé de la réalité de façon quasi religieuse,<br />
procession de cardinaux en habit rouge<br />
avançant sous la voûte de la chapelle Sixtine<br />
pour élire un nouveau pape.<br />
Comment le musée peut-il se poser la<br />
question de son rôle dans la société, dans sa<br />
ville, sans prendre la distance nécessaire ?<br />
Les musées tentent de faire disparaître les<br />
« seuils » qui les séparent de la réalité alors<br />
que ces seuils n’existent que parce qu’ils les<br />
observent de là où ils sont. Ces seuils ne<br />
doivent pas disparaître. Laissez-les là, ces<br />
seuils, et franchissez-les vous-mêmes : dans<br />
ce sens, ils ne sont pas difficiles à franchir. Le<br />
monde ne peut plus être vu d’un point de<br />
vue fixe et unique.<br />
De plus en plus d’institutions patrimoniales<br />
se sont rendu compte qu’elles allaient ellesmêmes<br />
devenir du patrimoine si elles ne se<br />
repositionnaient pas. C’est pour cela que la<br />
notion de « communauté patrimoniale » est<br />
entrée dans le vocabulaire européen, amplifiée<br />
par le décret flamand de 2008 * sur le<br />
patrimoine culturel : faire partie d’une communauté<br />
patrimoniale implique une responsabilité<br />
concrète, une action, une activité, un<br />
engagement.<br />
Nous devons être des cannibales, dévorer<br />
et savourer notre patrimoine. Consommer<br />
dans le sens primaire du mot (rien à voir avec<br />
la valeur pécuniaire). Les communautés<br />
patrimoniales doivent utiliser les institutions<br />
pour nourrir les générations futures. Les<br />
institutions doivent utiliser les communautés<br />
patrimoniales pour établir le menu et,<br />
ensemble, assises à de longues tables,<br />
manger le service en argent, les bols en<br />
étain, les sous-plats en dentelle…<br />
* Een cultureel-erfgoedgemeenschap is een gemeenschap<br />
die bestaat uit organisaties en personen die een<br />
bijzondere waarde hechten aan het cultureel erfgoed of<br />
specifieke aspecten ervan. Ze wil dit erfgoed en haar<br />
aspecten door publieke actie behouden en doorgeven<br />
aan toekomstige generaties.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
46<br />
•<br />
Marco rauGei (it), 2008.<br />
Feutre sur papier.<br />
Coll. Mad musée.<br />
<strong>Liège</strong>•museum<br />
n° 1, février 2<strong>01</strong>1<br />
47