LE LUXE COMME VICE FÉMININ DANS LA REMONSTRANCE ...

34
prétendument réformés soulèvent l’ire de Dieu, et la France, vulnérable, se trouve alors
dans un pire état que la Rome républicaine d’antan :
Qui est celuy qui, remettant en mémoire les guerres civiles industrieusement brassees
par les rebelles, et mescréans hérétiques, et se souvenant des barbares cruautés par
eux commises, et misérablement maschinées, et qu’ils machinent encore de présent
envers leur patrie, et prince naturel, à bon droit ne dira, qu’ils ont beu du sang humain
en leurs conjurations, aussi bien que ceux de la ligue et faction Catilinaire 29 .
Les excès somptuaires attirent le désordre social et les guerres civiles, aussi « Dieu nous
menace journellement de decocher la main sur nous 30 ». Voilà une réflexion qui fait
écho aux historiens romains qui, à l’instar de Florus, déjà mentionné, attribuent au luxe
et à l’oisiveté la chute des empires 31 .
Estienne est pareillement attentif aux inconduites du clergé catholique, par trop
permissif et corrompu. Il rappelle aux clercs leur rôle de pasteurs, et les exhorte à
refuser la confession et l’accès aux églises aux femmes dissolues :
Quant aux autres qui endurent toutes vos effrenées dissolutions, et qui confessent à la
douzaine, et craignent vous dire vostre vérité de peur de perdre leur chalandise, ils
respondront devant Dieu d’autant d’ames qui par faute de leur admonition seront
damnées 32 .
Le frère mineur peste également contre les aristocrates qui composent la cour efféminée
d’Henri III et en fait l’instrument du diable :
soulèvement populaire, promettant à la plèbe l’abolition de toutes ses dettes. Le complot est percé à jour
en 62, et Catilina doit fuir Rome. Les conjurés seront arrêtés et exécutés sans procès, par décision du
Sénat.
29
A. Estienne, op. cit., p. 11.
30
Ibid.
31
Estienne emprunte au schème de pensée gréco-romain, à une différence près, toutefois : bon chrétien, il
substitue à l’ennemi extérieur la menace, plus effrayante encore, d’un Dieu omnipotent courroucé et
vengeur.
32
Ibid., p. 35.