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• Contre la criminalisation du mouvement social • Contre le fichage ...

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N°3393 - Semaine <strong>du</strong> 17 au 23 décembre 2010<br />

Pourquoi ont-ils touché à Cassanyes ?<br />

Perpignan: L’inauguration de <strong>la</strong> nouvel<strong>le</strong> p<strong>la</strong>ce Cassanyes a eu lieu <strong>le</strong> 18 décembre. Pour <strong>la</strong> mairie, tout va bien.<br />

Mais, qu’en est-il exactement?<br />

Depuis 2008, <strong>le</strong>s perpignanais savaient<br />

qu’un jour <strong>le</strong>s baraques de <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce<br />

Cassanyes seraient rasées.Après <strong>la</strong> stupeur<br />

des premiers jours, puis <strong>la</strong> mobilisation des<br />

commerçants sédentaires et non sédentaires<br />

et de <strong>la</strong> clientè<strong>le</strong> de <strong>la</strong> P<strong>la</strong>ce, <strong>le</strong>s perpignanais<br />

ont été provisoirement rassurés.<br />

Le projet de l’architecte Bernard<br />

Cabannes, commandité par <strong>la</strong> mairie, prévoyait<br />

<strong>la</strong> reconstruction des baraques. Il<br />

s’agissait en fait d’une simp<strong>le</strong> opération de<br />

salubrité, plutôt bien vue par <strong>le</strong>s habitants<br />

<strong>du</strong> quartier. La p<strong>la</strong>ce Cassanyes devait<br />

donc rester <strong>le</strong> marché <strong>le</strong> plus popu<strong>la</strong>ire, <strong>le</strong><br />

plus coloré et <strong>le</strong> plus touristique de<br />

Perpignan. Mais <strong>le</strong> nouveau maire est<br />

arrivé, a licencié l’architecte et est revenu<br />

sur <strong>la</strong> promesse de reconstruction. Le seul<br />

but revendiqué étant de récupérer <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce<br />

comme parking <strong>le</strong>s après-midi. Depuis <strong>le</strong>s<br />

années trente, avec l’arrivée des premiers<br />

Les dernières baraques de <strong>la</strong> P<strong>la</strong>ce Cassanyes ont été rasées <strong>le</strong> 8 novembre dernier. Nous sommes allés demander à<br />

Monique, qui y vend des fruits et légumes depuis près de trente ans, comment se passait sa reconversion.<br />

Souriants, dans <strong>la</strong> baraque…<br />

Que pensez-vous de vos nouvel<strong>le</strong>s conditions de<br />

travail ?<br />

El<strong>le</strong>s sont déplorab<strong>le</strong>s ! J’ai l’impression de régresser. Nous<br />

n’avons plus qu’un simp<strong>le</strong> étal, avec un parasol. Quant il<br />

p<strong>le</strong>ut ou quand <strong>la</strong> tramontane souff<strong>le</strong>, ce n’est pas tenab<strong>le</strong>.<br />

On n’a vraiment plus <strong>le</strong> confort qu’on avait dans <strong>la</strong><br />

baraque. Et puis on ne peut plus <strong>la</strong>isser <strong>la</strong> marchandise<br />

dans <strong>le</strong> frigo. Il faut tout monter et démonter chaque jour.<br />

C’est vous qui <strong>le</strong> faites ?<br />

En semaine oui. Obligée, mon mari travail<strong>le</strong>. Mais je me<br />

fais aider pour instal<strong>le</strong>r <strong>le</strong> parasol. Le samedi et <strong>le</strong> dimanche,<br />

c’est mon mari. Il se lève à quatre heures <strong>du</strong> matin !<br />

gitans et <strong>le</strong>ur sédentarisation dans un<br />

quartier bourgeois à l’origine, puis l’arrivée<br />

des maghrébins dans <strong>le</strong>s années soixante,<br />

<strong>le</strong> quartier Cassanyes est un lieu de rencontres<br />

et de cohabitation, même si ce<br />

n’est pas toujours faci<strong>le</strong>. Les perpignanais<br />

font <strong>le</strong>ur marché à <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce Cassanyes<br />

depuis quarante-sept ans, depuis 1963,<br />

date de l’instal<strong>la</strong>tion des deux premiers<br />

étals.<br />

Alors pourquoi casser<br />

tout ce<strong>la</strong> ?<br />

L’urbanisation de Perpignan est de plus en<br />

plus impersonnel<strong>le</strong>, de plus en plus minéra<strong>le</strong>.<br />

On sait l’échec <strong>du</strong> marché de <strong>la</strong><br />

République ! Quel espace de <strong>social</strong>isation<br />

et de partages restera-t-il si Cassanyes<br />

meurt ? On voudrait obliger <strong>le</strong>s communautés<br />

arabes et gitanes à cohabiter dans<br />

Avant, quand on avait <strong>la</strong> baraque, c’était à 6h.<br />

Votre clientè<strong>le</strong> vous a-t-el<strong>le</strong> suivie ?<br />

Pour <strong>la</strong> mairie tout est pour <strong>le</strong> mieux dans<br />

<strong>le</strong> meil<strong>le</strong>ur des mondes.<br />

Ce que vivent <strong>le</strong>s gens<br />

On nous as bernés !<br />

Je suis revenue pour mes clients. On a une clientè<strong>le</strong> exceptionnel<strong>le</strong><br />

qui nous a beaucoup soutenus, qui a signé <strong>le</strong>s<br />

pétitions, qui ne vou<strong>la</strong>it pas de <strong>la</strong> destruction. Mais on a<br />

quand même per<strong>du</strong> 20% de notre clientè<strong>le</strong>.<br />

Avez-vous eu des compensations ?<br />

Aucune subvention. On nous a accordé trois mois de loyer.<br />

Et comme vient de me dire Mme Queralt: « on vous a payé<br />

votre parasol ». Mais on ne connaît toujours pas <strong>le</strong> montant<br />

<strong>du</strong> nouveau loyer.<br />

Ah bon, Mme Queralt est là ?<br />

El<strong>le</strong> vient sûrement préparer <strong>le</strong> terrain pour l’inauguration<br />

qui aura lieu samedi 11 à 10h. Moi je n’irai pas.<br />

Et l’avenir ?<br />

Il y a deux jours, je ne me sentais plus <strong>le</strong> courage. Je ne<br />

suis pas bien comme ça. Je ne suis plus chez moi. Disons<br />

que je suis à l’essai. Pendant <strong>le</strong>s mois d’hiver. Après, pour<br />

l’été, si on ne peut pas acheter un camion frigo, on fait<br />

comment ?<br />

Est-ce-que certains commerçants ne se sont pas<br />

réinstallés ?<br />

Oh oui ! Le tripier ! Le seul tripier de Perpignan. Il n’a pas<br />

pu s’acheter <strong>le</strong> camion frigo. Et Guy l’épicier. Si gentil avec<br />

9<br />

un endroit sans vie, avec <strong>le</strong>s risques de tension<br />

qu’on connaît, qu’on ne s’y prendrait<br />

pas autrement. Et comment ne pas voir<br />

qu’au-delà de ce risque, <strong>le</strong> réaménagement<br />

de <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce aura des incidences sur <strong>le</strong><br />

commerce popu<strong>la</strong>ire? Les non-sédentaires<br />

commenceront par ne plus revenir, puis ce<br />

sont <strong>le</strong>s sédentaires de <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce, et même à<br />

terme ceux de <strong>la</strong> rue Lucia qui seront<br />

menacés. Faut-il voir là une volonté de<br />

favoriser <strong>le</strong>s grandes surfaces ? On casse<br />

un lieu de vie et on tue <strong>le</strong> commerce popu<strong>la</strong>ire.<br />

Bel<strong>le</strong> opération ! Le simp<strong>le</strong> bon sens<br />

voudrait que l’on reprenne <strong>le</strong> projet initial<br />

de Bernard Cabannes, en construisant une<br />

hal<strong>le</strong> centra<strong>le</strong>. Dédier <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce Cassanyes à<br />

un marché popu<strong>la</strong>ire, serait re<strong>la</strong>ncer <strong>le</strong><br />

commerce de proximité et maintenir l’attractivité<br />

touristique de <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce.<br />

Visib<strong>le</strong>ment, c’est un autre choix politique<br />

qui a été fait.<br />

Anne Marie Delcamp<br />

<strong>le</strong>s mémés dont il portait <strong>le</strong>s courses jusqu’à <strong>la</strong> voiture. Et<br />

d’autres. Sans compter ceux qui se posent <strong>la</strong> question<br />

comme mon voisin <strong>le</strong> traiteur qui est là depuis 35 ans.<br />

Que pensez-vous de cette transformation ?<br />

On n’était pas contre <strong>la</strong> démolition, au contraire. Certaines<br />

baraques étaient insalubres. On a pensé qu’on s’occupait<br />

enfin de nous. Mais on était contre une disparition pure et<br />

simp<strong>le</strong>. On nous avait promis <strong>la</strong> reconstruction. On avait<br />

accepté <strong>le</strong> projet de Bernard Cabannes. Puis <strong>le</strong> nouveau<br />

maire a licencié Bernard Cabannes et a mis <strong>le</strong> projet dans<br />

<strong>le</strong> p<strong>la</strong>card. Plus de reconstruction. On nous a bernés.<br />

Entretien réalisé par Anne marie Delcamp<br />

… inquiets, sous <strong>le</strong> parasol.

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