Le quartier Vauban Une maison en papier Allemagne - Free

Norbert Rautenberg
Construire sans
capital : mode
d’emploi
Nous arrivons au Quartier
Vauban en bus, par une
route qui sort du centre-ville
vers le sud. L’accès principal
du quartier se situe logiquement
là où se trouvait
jadis l’entrée de la caserne.
Une petite maison sur la
droite, l’ancien poste de
garde, sert aujourd’hui de bureau pour la SUSI. Nous
y rencontrons Norbert, qui sera notre guide.
Quelle est lʼorigine de la SUSI?
“La SUSI s’est créée en début des années 90. C’était
une initiative d’étudiant-e-s, de chômeurs, de parents
isolés... bref de personnes ayant des petits revenus.
L’objectif était d’acquérir quelques anciens bâtiments
de la caserne et d’y créer des logements locatifs
relativement bon marché. D’autres idées de base
étaient la création de logements en fonction des souhaits
des locataires, l’utilisation de matériaux écologiques,
une centrale à cogénération, faire des économies
d’énergie... Mais aussi au niveau structurel :
une organisation en démocratie de base, c’est-àdire,
abolir le rapport de pouvoir traditionnel entre
propriétaires et locataires, et mettre en place une
structure participative pour les locataires leur permettant
de se joindre à la prise de décisions concernant
leur logement.
“Au niveau juridique, la SUSI comprend une association
et une société à responsabilité limitée. Moimême,
je suis employé à la SRL à mi-temps avec
trois autres collègues. Nous nous occupons de la
gestion, de la comptabilité, et de l’administration.
“En 92, après quelques difficultés avec la municipalité
qui avait des doutes par rapport au potentiel financier,
et au projet de “l’initative”, la SUSI a pu acqué-
rir quatre anciens bâtiments de troupes. Aujourd’hui,
250 personnes y habitent, réparties dans 45 logements
collectifs. Une quinzaine d’autres habitent
dans des roulottes. Ces derniers ont des contrats de
location avec la SUSI, ce qui permet de légaliser leur
situation vis-à-vis de la municipalité.”
Comment avez-vous fait pour construire
sans capital ?
“Pour garder des frais de travaux le plus bas possible,
nous avons préféré rénover au lieu de construire
du neuf. Un autre principe d’économie était ce que
nous avons appelé “l’hypothèque des muscles”.
C’est-à-dire la participation aux travaux de tou-te-s
les habitant-e-s. Chaque locataire fournissant 105
heures de travail pour la rénovation d’un habitat.
“Au début, nous avons pu collecter en six mois environ
450 000 euros de prêts de personnes qui nous
soutenaient, démontrant ainsi à la municipalité que
nous pouvions trouver de l’argent pour construire.
Comme la SUSI loue officiellement 110 pièces à des
étudiant-e-s et 117 pièces à des personnes ayant
droit à un logement H.L.M., nous avions droit à des
emprunts à taux avantageux pour la construction de
logements sociaux.
“En ce qui concerne la construction de logements
d’étudiants, nous avons touché des subventions. En
tout, nous avons construit pour 4,5 millions d’euros,
l’acquisition des bâtiments inclus. Les locataires
paient en fonction de la superficie de leur pièce. Le
loyer s’élève à 4,60 euros le m2. Nous utilisons 5/8
des revenus de la SUSI en loyer pour rembourser les
emprunts et les intérêts”.
Et comment avez-vous décidé et réalisé
les travaux ? Comment avez-vous organisé les
105 heures des locataires?
“Officiellement, un architecte dirigeait les travaux. En
fonction des besoins et des idées des habitant-e-s, et
de critères écologiques et financiers. Les décisions
étaient prises au consensus entre la coordination
des travaux et la coordination du projet, qui repré-
n°10 août-septembre 2002 23