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Arnaud Guillaume, constructeur du cloître de Moissac

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<strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong>, <strong>constructeur</strong> <strong>du</strong> <strong>cloître</strong> <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong><br />

par Régis <strong>de</strong> La Haye<br />

On sait que les artistes <strong>du</strong> Moyen Age travaillaient pour la seule gloire <strong>de</strong> Dieu, et qu'ils ont voulu<br />

généralement rester anonymes. Conscients <strong>de</strong> travailler pour une oeuvre commune, ils ne cherchaient<br />

pas à mettre en avant leurs personnes. Ainsi, on a toujours ignoré le nom <strong>du</strong> concepteur <strong>du</strong> <strong>cloître</strong> <strong>de</strong><br />

<strong>Moissac</strong>, et à plus forte raison <strong>de</strong>s sculpteurs qui ont réalisé l'ouvrage.<br />

On peut, aujourd'hui, lever tout au moins un coin <strong>du</strong> voile. Le nom <strong>du</strong> concepteur, <strong>du</strong> responsable <strong>de</strong><br />

la construction <strong>de</strong>s grands monuments <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> est bel et bien connu, mais il est vrai qu'il ne se laisse<br />

pas trouver facilement. Il faut, pour cela, disposer <strong>de</strong> tous les actes <strong>de</strong> l'abbaye <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> <strong>de</strong> l'époque<br />

concernée, la fin <strong>du</strong> XI e et la première moitié <strong>du</strong> XII e siècle, conservés soit en original, soit en copie, soit<br />

sous la forme d'une courte analyse. Pour les besoins <strong>de</strong> ma thèse en théologie, 1 j'ai accompli le long<br />

travail, fastidieux mais gratifiant, <strong>de</strong> les recopier tous. Une recherche attentive et détaillée, facilitée il est<br />

vrai par l'ordinateur, m'a livré le nom <strong>du</strong> <strong>constructeur</strong> <strong>du</strong> <strong>cloître</strong> : il s'agit <strong>de</strong> l'operarius <strong>du</strong> monastère.<br />

Le mot operarius couvre plusieurs sens. En latin classique, le substantif operarius désigne un ouvrier<br />

travaillant manuellement, un homme <strong>de</strong> peine ou un manoeuvre. Un chapiteau <strong>de</strong> la galerie <strong>du</strong> massif<br />

occi<strong>de</strong>ntal <strong>de</strong> la collégiale romane Saint-Servais à Maastricht montre <strong>de</strong>s tailleurs <strong>de</strong> pierre occupés à<br />

équarrir une pierre. L'épigraphie ne laisse aucun doute : ces travailleurs sont désignés comme <strong>de</strong>s<br />

OPERARII. Dans le cours <strong>de</strong> l'évolution sémantique, l'operarius <strong>de</strong>vient aussi un laboureur, 2 un homme<br />

travaillant la terre. Le mot reste dans le domaine <strong>du</strong> labeur physique, au point que le substantif féminin<br />

operaria finit par désigner une prostituée. C'est dire.<br />

Mais au Moyen Age, et plus particulièrement dans le sud <strong>de</strong> la France, et plus spécifiquement encore<br />

dans les cathédrales et les collégiales, le terme d'operarius prend une signification tout autre. Il désigne<br />

alors le maître d'ouvrage, l'organisateur <strong>du</strong> chantier et l'administrateur financier <strong>de</strong> la fabrique, 3 ou le<br />

"maître <strong>de</strong> l'oeuvre" selon le Lexicon <strong>de</strong> Blaise. 4 L'irremplaçable Du Cange définit la charge <strong>de</strong><br />

l'operarius comme la "dignitas in collegiis canonicorum et monasteriis cui operibus publicis vacare<br />

incumbit, vulgo, Maistre <strong>de</strong> l'oeuvre" (la fonction <strong>de</strong> celui qui, dans les collèges <strong>de</strong> chanoines et dans les<br />

monastères, est chargé <strong>de</strong>s constructions <strong>de</strong> la communauté). 5<br />

Le mot opus, à l'époque et dans le contexte considérés, et dans <strong>de</strong>s textes comparables et<br />

contemporains <strong>du</strong> Midi toulousain, désigne l'oeuvre <strong>de</strong> construction d'une église ou <strong>de</strong> bâtiments<br />

monastiques, voire la fabrique <strong>de</strong> l'église. C'est dans ce sens que le mot est utilisé dans la charte <strong>de</strong><br />

l'évêque Isarn <strong>de</strong> Toulouse, décidant <strong>de</strong> la réforme clunisienne <strong>de</strong> Saint-Sernin (vers 1082/83), où les<br />

termes d'opera ecclesie et opera fabrice ecclesie font référence à la construction <strong>de</strong> l'église Saint-Sernin,<br />

qui n'est pas encore achevée quand l'acte est dressé : consummata vero fabrica ecclesie, suivi d'un<br />

subjonctif présent (sit). 6<br />

C'est à ce sens <strong>du</strong> mot opus qu'il faut penser quand l'operarius <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> figure dans les chartes<br />

sous la dénomination <strong>de</strong> '<strong>de</strong> opere' ou '<strong>de</strong> opera', utilisée comme un synonyme d'operarius.<br />

1. RÉGIS DE LA HAYE, Apogée <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>. L'abbaye clunisienne Saint-Pierre <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> à l'époque <strong>de</strong> la<br />

construction <strong>de</strong> son <strong>cloître</strong> et <strong>de</strong> son grand portail (Maastricht - <strong>Moissac</strong> 1995), thèse <strong>de</strong> doctorat en théologie,<br />

rédigée sous la direction <strong>du</strong> professeur Lei Meulenberg (Universités Catholiques <strong>de</strong> Nimègue et <strong>de</strong> São Paulo),<br />

soutenue le 26 avril 1995 à l'Université Catholique <strong>de</strong> Nimègue. Exemplaires déposés aux Archives<br />

Départementales <strong>de</strong> Tarn-&-Garonne, et au Centre d'Art Roman <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>.<br />

2. J.F. NIERMEYER, Mediæ latinitatis lexicon minus (Lei<strong>de</strong>n 1976).<br />

3. GÜNTHER BINDING, Baubetrieb im Mittelalter (Darmstadt 1993), p. 53 - 54.<br />

4. ALBERT BLAISE, Lexicon latinitatis Medii Ævi (Turnhout 1975).<br />

5. CHARLES DUFRESNE, SEIGNEUR DU CANGE, Glossarium ad scriptores mediæ et infimæ latinitatis (Genève 1762).<br />

6. L'acte figure dans la Chronique d'Aymeric <strong>de</strong> Peyrac (f. 169vb - 170va), ce qui tendrait à prouver que l'abbaye<br />

<strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> en possédait une copie, aujourd'hui per<strong>du</strong>e. L'acte a été publié entre autres dans : Gallia Christiana, t.<br />

13, Instrumenta (Paris 1785), acte X, col. 10 - 11.<br />

1


L'operarius, ou la personne désignée par '<strong>de</strong> opere' ou '<strong>de</strong> opera', n'est donc pas un simple ouvrier ni<br />

un laïc, mais un moine, voire l'un <strong>de</strong>s moines les plus importants <strong>du</strong> monastère. Le moine "ouvrier" est<br />

le maître <strong>de</strong> la fabrique <strong>de</strong> l'église, le moine chargé <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> construction et <strong>de</strong> l'entretien <strong>de</strong>s<br />

bâtiments. Il est difficile <strong>de</strong> ne pas voir en lui le concepteur, l'auctor intellectualis <strong>de</strong> la construction,<br />

donc également <strong>du</strong> programme iconographique.<br />

Durant la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s grands monuments <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>, nous connaissons les noms <strong>de</strong><br />

trois "moines-ouvriers" : Dieudonné, <strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong>, et Raimond <strong>de</strong> Mala Musca.<br />

Le premier s'appelle Dieudonné. Nous ne savons pratiquement rien <strong>de</strong> lui. Son nom, Deus<strong>de</strong>t <strong>de</strong><br />

opera, ne figure qu'une seule fois dans un texte, un acte <strong>de</strong> 1097 7 rappelant un fait qui s'est déroulé <strong>du</strong><br />

temps <strong>du</strong> prieur Aton, religieux qu'il faut placer dans les années 1074 - 1085. 8 Ce texte donne aussi la<br />

première mention <strong>de</strong> son successeur dans l'office d'operarius, <strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong>.<br />

Le <strong>de</strong>uxième s'appelle <strong>Arnaud</strong>, ou encore <strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong>. Il apparaît sous l'abbatiat d'Ansquitil<br />

(1085 - 1115), et il est cité dans les chartes <strong>de</strong> l'abbaye <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> <strong>de</strong> la fin <strong>du</strong> XI e et <strong>du</strong> début <strong>du</strong> XII e<br />

siècle. En 1097 et en 1107, 9 il est cité comme Arnal<strong>du</strong>s <strong>de</strong> opere ou Arnal<strong>du</strong>s monachus <strong>de</strong> opere. Entre<br />

1114 10 et 1126, 11 nous le trouvons mentionné comme Arnal<strong>du</strong>s Willelmi operarius, ou Arnal<strong>du</strong>s<br />

Guillelmi <strong>de</strong> opera. Le contexte historique, sur lequel nous allons revenir, prouve qu'il s'agit bien d'une<br />

seule et même personne. Au regard <strong>de</strong> la fourchette chronologique <strong>de</strong>s textes où il est cité (1097 - 1126),<br />

on peut lui attribuer la construction <strong>du</strong> <strong>cloître</strong>.<br />

Le troisième "ouvrier", Raimond, appelé aussi Raimun<strong>du</strong>s <strong>de</strong> opere ou Raimun<strong>du</strong>s monachus <strong>de</strong><br />

opere, lui succè<strong>de</strong> sous l'abbatiat <strong>de</strong> Roger (1115 - 1131/35). Il est cité pour la première fois en 1129. 12<br />

Nous apprenons un peu plus tard son nom <strong>de</strong> famille ou nom <strong>de</strong> provenance : Raimun<strong>du</strong>s <strong>de</strong> Mala<br />

Musca. Au regard <strong>de</strong> la fourchette chronologique fournie par ses citations dans les chartes, <strong>de</strong> 1129 à<br />

1146, 13 on peut lui attribuer le clocher-porche, construction <strong>de</strong>s années 1130 - 1140. Vers 1150, les<br />

travaux <strong>du</strong> clocher-porche sont probablement achevés. Raimond <strong>de</strong> Mala Musca reçoit alors une<br />

nouvelle charge. En 1156, il est cité comme prieur <strong>de</strong> Saint-Pierre <strong>de</strong>s Cuisines à Toulouse. 14 En 1155,<br />

l'abbé Etienne <strong>de</strong> Roquefort vend à Pierre <strong>de</strong> Cantamerle la maio <strong>de</strong> la obra, 15 la "maison <strong>de</strong> l'oeuvre".<br />

Si l'on donne au mot occitan obra le même sens que le latin opus, on peut penser à la maison où<br />

travaillaient et logeaient les architectes, les entrepreneurs et les sculpteurs <strong>de</strong> l'abbaye, la loge. 16 Cela<br />

voudrait dire qu'en 1155 les travaux <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> l'abbaye <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> sont définitivement<br />

terminés.<br />

Dans la hiérarchie <strong>du</strong> monastère <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>, la fonction d'operarius était un office important. Il faut<br />

savoir que dans les chartes <strong>du</strong> Moyen Age, les témoins assistant à la rédaction d'une charte sont cités<br />

dans l'ordre <strong>de</strong> préséance hiérarchique. L'abbé vient toujours en tête, suivi <strong>de</strong> son alter ego, nommé par<br />

lui, le prieur. Pour les autres offices monastiques, leur place dans l'énumération <strong>de</strong>s listes <strong>de</strong> témoins<br />

permet à l'historien d'établir les préséances hiérarchiques. Or, dans l'acte <strong>de</strong> donation <strong>de</strong> 1097,<br />

l'operarius est cité immédiatement après l'abbé, le prieur et le sacriste. Dans un acte <strong>de</strong> 1085/1108, il est<br />

cité après l'abbé, le prieur, le sacriste et le cellérier. 17 Si, dans un acte <strong>de</strong> 1104 18 et dans l'acte déjà cité <strong>de</strong><br />

1114, Arnal<strong>du</strong>s Willelmi operarius passe avant le prieur et le sacriste, c'est parce qu'il est le récipiendaire<br />

<strong>de</strong> la donation. Vers 1135, dans le célèbre privilège <strong>de</strong> coutumes <strong>de</strong> Saint-Nicolas-<strong>de</strong>-la-Grave,<br />

7. Paris, BN, coll. Doat, vol. 128, f. 264r - 265v.<br />

8. Apogée <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>, p. 137.<br />

9. ADTG, G 688 (An<strong>du</strong>randy 5235).<br />

10. ADTG, G 571 (An<strong>du</strong>randy 5799).<br />

11. ADTG, G 684 (An<strong>du</strong>randy 2831).<br />

12. ADTG, G 596 (An<strong>du</strong>randy 1888).<br />

13. ADTG, G 663 (An<strong>du</strong>randy 5214).<br />

14. ADTG, G 692.<br />

15. ADTG, G 569 II, f. 6v.<br />

16. Sur les "maisons <strong>de</strong> l'oeuvre" à l'époque romane, on ne sait pratiquement rien. Le phénomène est mieux connu<br />

à l'époque gothique : ALAIN ERLANDE-BRANDENBURG, La Cathédrale (Paris 1989), p. 285 - 287 ; GÜNTHER<br />

BINDING, Baubetrieb im Mittelalter (Darmstadt 1993), p. 101 - 107.<br />

17. ADTG, G 669.<br />

18. Paris, BN, coll. Doat, vol. 128, f. 297r - 199r.<br />

2


l'operarius Raimond est cité après le prieur, mais avant le sacriste. 19 En 1140, il reprend sa place après le<br />

prieur, le sacriste et le chambrier. 20 Il n'y a pas <strong>de</strong> doute, nous avons affaire à l'un <strong>de</strong>s moines les plus<br />

importants dans la hiérarchie <strong>du</strong> monastère. Nous pouvons le placer au cinquième ou au sixième rang<br />

(selon la présence ou l'absence <strong>du</strong> chambrier), et établir la hiérarchie <strong>de</strong> l'abbaye <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> au début <strong>du</strong><br />

XII e siècle comme suit : 1. abbé, 2. prieur, 3. sacriste, 4. cellérier, 5. chambrier (le chambrier n'est pas<br />

mentioné avant 1125), 6. ouvrier. 21<br />

L'anonymat <strong>de</strong> nos "ouvriers" est difficile à percer. Les sources, à cette époque, sont particulièrement<br />

avares <strong>de</strong> données personnelles. Tout au plus peut-on suggérer quelques rapprochements, avancer<br />

quelques pistes, mais sans apporter <strong>de</strong> preuves. La combinaison <strong>de</strong>s prénoms <strong>Guillaume</strong> <strong>Arnaud</strong> ou<br />

<strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong> est présente dans une famille <strong>de</strong> la région, bienfaitrice <strong>de</strong> l'abbaye <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>. Un<br />

<strong>Guillaume</strong> <strong>Arnaud</strong> figure parmi les témoins <strong>de</strong> la donation <strong>de</strong> Pommevic en 1052. Parmi ces témoins<br />

figurent aussi Dinbert d'Esmes et Bernard Rainon. 22 Retenez bien ces noms, nous les rencontrerons<br />

encore. Bernard Rainon est le patriarche <strong>de</strong> la famille De Gandalou. Un <strong>Guillaume</strong> <strong>Arnaud</strong> est le<br />

donateur <strong>de</strong> Moirax en 1059. 23 Y a-t-il un lien généalogique avec <strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong> <strong>de</strong> la Pra<strong>de</strong>lle,<br />

donateur <strong>du</strong> quart <strong>de</strong> Gamanel et <strong>de</strong> la huitième partie <strong>de</strong> l'église <strong>de</strong> Pommevic (encore), qui, quand il se<br />

fait moine en 1097 (c'est-à-dire pour finir ses jours en l'abbaye <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>), offre son fils homonyme<br />

<strong>Arnaud</strong> ? Il le fait avec l'accord <strong>de</strong> ses seigneurs <strong>Guillaume</strong> et Dinbert d'Esmes. Seguin Raimond, et<br />

Seguin <strong>de</strong> la Lan<strong>de</strong>, son cousin, témoignent. 24 Il est clair que cette famille '<strong>de</strong> Pra<strong>de</strong>lle', établie autour <strong>du</strong><br />

confluent <strong>de</strong> la Barguelonne et <strong>de</strong> la Garonne, entretient d'excellentes relations avec l'abbaye <strong>de</strong><br />

<strong>Moissac</strong>. Nous signalons la coïnci<strong>de</strong>nce sans oser en tirer <strong>de</strong>s conclusions.<br />

Mais la coïnci<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>vient vraiment intéressante quand on voit que c'est précisément à partir <strong>de</strong><br />

cette même année 1097 qu'<strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong> figure dans nos sources écrites comme operarius. En<br />

1097, <strong>Guillaume</strong> d'Esmes confirme la donation <strong>de</strong> son père Humbert (selon la copie <strong>de</strong> Doat ; il faut<br />

certainement lire : Dinbert) d'Esmes, faite à l'abbaye <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>, et plus spécialement à "Dieudonné <strong>de</strong><br />

l'oeuvre" (Deus<strong>de</strong>t <strong>de</strong> opera), <strong>de</strong> quelques barrages <strong>de</strong> pêche dans le Tarn près <strong>de</strong>s Barthes. La<br />

confirmation est faite entre les mains <strong>de</strong> l'abbé Ansquitil, le prieur <strong>Guillaume</strong>, le sacriste Elie, enfin à<br />

l'ouvrier <strong>Arnaud</strong> "et à ses successeurs qui servent Dieu dans l'oeuvre <strong>de</strong> construction" (et successoribus<br />

ejus in opera Deo servientibus). C'est <strong>Arnaud</strong> qui est chargé <strong>de</strong> fournir au donateur la contrepartie <strong>de</strong> la<br />

cession, c'est-à-dire 30 sous. Parmi les témoins <strong>de</strong> l'acte, nous remarquons Raimond Bernard <strong>de</strong><br />

Gandalou. C'est précisément la famille <strong>de</strong> Gandalou, que nous avons déjà rencontrée, qui va marquer la<br />

suite <strong>de</strong> la carrière d'<strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong>.<br />

En 1104, Arnal<strong>du</strong>s monachus <strong>de</strong> opere procè<strong>de</strong> à plusieurs échanges <strong>de</strong> biens avec Raimond Bernard<br />

<strong>de</strong> Gandalou. Ce Raimond Bernard appartient à une vieille famille habitant Gandalou, où l'on s'appelle<br />

Raimond Bernard <strong>de</strong> père en fils, une famille qui fournira bientôt <strong>de</strong>s consuls à la ville <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>. Cette<br />

famille revient si souvent dans les chartes <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>, que le médiéviste Axel Müssigbrod a pu en<br />

dresser une généalogie. 25 <strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong> lui donne en alleu le glandage pour tous les porcs qui<br />

appartiennent à "l'oeuvre <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> Saint Pierre" (opus Sancti Petri). Quand la construction sera<br />

achevée, il pourra reprendre le droit <strong>de</strong> pacage. En outre, l'ouvrier et ses successeurs chargés <strong>de</strong> l'oeuvre<br />

<strong>de</strong> construction <strong>de</strong> Saint-Pierre (qui opus Sancti Petri tenuerint) toucheront 10 sous sur la terre <strong>de</strong><br />

Garnouillac, située entre Castelsarrasin et <strong>Moissac</strong>. Il y a là une allusion évi<strong>de</strong>nte, il nous semble, à<br />

l'édification <strong>de</strong>s bâtiments <strong>de</strong> l'abbaye <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>, en l'occurence le <strong>cloître</strong> qui se construit précisément<br />

à ce moment-là.<br />

En 1114, <strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong> reçoit <strong>de</strong>s mains <strong>de</strong> Raimon<strong>de</strong> <strong>de</strong> Gandalou et <strong>de</strong> ses fils la moitié <strong>de</strong><br />

19. ADTG, G 569 II, f. 13r - 14v.<br />

20. Paris, BN, coll. Doat, vol. 129, f. 30r - 31r.<br />

21. Sur les offices monastiques, voir : Apogée <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>, o.c., p. 135 - 138.<br />

22. Doat 128, f. 45r - 47r.<br />

23. ADTG, G 569 II, f. 10r.<br />

24. Quelques données généalogiques sur la famille De Lalan<strong>de</strong> se trouvent dans : AXEL MÜSSIGBROD, Die Abtei<br />

<strong>Moissac</strong> 1050 - 1150. Zu einem Zentrum Cluniacensischen Mönchtums in Südwestfrankreich (Münster 1988 =<br />

Münstersche Mittelalter-Schriften, Band 58), p. 177 - 180.<br />

25. Müssigbrod, p. 163 - 176.<br />

3


l'église <strong>de</strong> Saint-Germain sous Castelsarrasin. L'acte est dressé à <strong>Moissac</strong>, sur l'autel <strong>de</strong>s saints apôtres<br />

Pierre et Paul, le jour même <strong>de</strong> l'enterrement <strong>de</strong> Raimond, le mari <strong>de</strong> Raimon<strong>de</strong>.<br />

Selon une notice sans date, écrite vers 1110/1115, <strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong> reçoit <strong>de</strong> Raimond Bernard <strong>de</strong><br />

Gandalou plusieurs biens, dont une part <strong>de</strong>s revenus <strong>du</strong> marché <strong>de</strong> Gandalou, la terre <strong>de</strong> Pug Bal<strong>du</strong>s, 26 et<br />

la terre <strong>de</strong> Garnouillac, d'abord en gage, plus tard en alleu. 27<br />

Une autre notice sans date, rédigée vers 1115/1120, précise que Raimond Bernard <strong>de</strong> Gandalou<br />

donne à l'abbaye plusieurs biens, et qu'il reçoit d'<strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong> une certaine rétribution. 28<br />

En 1126, <strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong>, ouvrier (Arnal<strong>du</strong>s Willelmi operarius) reçoit <strong>de</strong> Rainald <strong>de</strong> Gandalou<br />

une importante donation à Gandalou. Après la mort <strong>de</strong> Rainald, cette donation provoque un conflit avec<br />

les fils <strong>du</strong> donateur, Raimond et Hugues.<br />

Le 27 mars 1123, c'est encore la famille <strong>de</strong> Gandalou, qui fait don <strong>de</strong> l'honneur <strong>de</strong> Kausac, à<br />

i<strong>de</strong>ntifier avec Caunac, actuellement sur la rive gauche <strong>de</strong> la Garonne mais dans la commune <strong>de</strong><br />

Castelsarrasin, et dont le texte précise qu'il se compose d'une condamine, d'un "cabeth" dans la Garonne,<br />

d'une île et <strong>de</strong> trois casales. L'honneur <strong>de</strong> Caunac, est-il dit dans le texte, "appartient à l'obédience"<br />

d'<strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong>. 29<br />

Avec "l'obédience" d'<strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong>, nous touchons (à part les probables relations familiales) à<br />

l'autre explication <strong>de</strong> l'étroitesse <strong>de</strong>s relations entre l'operarius <strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong> et la famille <strong>de</strong><br />

Gandalou. Quel est donc le lien particulier <strong>de</strong> l'operarius avec Gandalou? Nous l'apprenons en 1109,<br />

quand Raimond Bernard <strong>de</strong> Gandalou donne à l'abbaye <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> sa terre <strong>de</strong> Garnouillac, située entre<br />

Notre-Dame d'Alem et les Nauses, au bord <strong>de</strong> la route <strong>de</strong> Toulouse. La rétribution que l'abbaye doit lui<br />

donner est remise par <strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong>, "obédiencier <strong>de</strong> Gandalou". 30 <strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong> était donc<br />

obédiencier <strong>de</strong> Gandalou ! Une "obédience" indique toute fonction assignée à un religieux par ses<br />

supérieurs, mais plus précisément l'administration d'une paroisse. 31 Un obédiencier était un moine<br />

<strong>de</strong>sservant une église appartenant à l'abbaye. Qu'un aussi important membre <strong>de</strong> la hiérarchie soit<br />

obédiencier dans un petit village <strong>de</strong>s alentours <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> ne doit pas nous étonner. A la fin <strong>du</strong> XI e<br />

siècle, le sacriste Elie, troisième personnage <strong>de</strong> l'abbaye, est obédiencier <strong>de</strong> Boudou. 32 On se tromperait<br />

en croyant que les moines <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> n'exerçaient pas <strong>de</strong> charges pastorales. 33<br />

Enfin, comment résister au plaisir <strong>de</strong> citer la toute <strong>de</strong>rnière mention d'<strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong>, dans un<br />

acte sans date sur l'engagement <strong>du</strong> four banal à Armand <strong>de</strong> Mora, acte que les archivistes Bourbon et<br />

Dumas <strong>de</strong> Rauly ont faussement daté au X e siècle, 34 ce qui est absolument impossible pour <strong>de</strong>s raisons<br />

paléographiques, mais plus encore en raison <strong>de</strong>s personnes citées dans le texte, qui appartiennent toutes<br />

aux années 1120 et 1130. Parmi les témoins figure Arnal<strong>du</strong>s Guillelmus <strong>de</strong> claustro : "<strong>Arnaud</strong><br />

<strong>Guillaume</strong> <strong>du</strong> <strong>cloître</strong>" ...!<br />

<strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong> figure encore comme simple témoin dans au moins quatre actes, qu'il n'est pas<br />

utile <strong>de</strong> détailler ici.<br />

Les actes que nous venons d'étudier nous montrent comment <strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong>, l'un <strong>de</strong>s moines les<br />

plus importants dans la hiérarchie <strong>de</strong> l'abbaye <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>, issu probablement d'une gran<strong>de</strong> famille <strong>de</strong> la<br />

vallée <strong>de</strong> la Garonne à l'ouest <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>, liée à la vieille famille d'Esmes, succè<strong>de</strong> au moine Dieudonné<br />

dans la charge d'operarius <strong>de</strong> l'abbaye <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>. Il con<strong>du</strong>it les travaux <strong>de</strong> construction <strong>du</strong> <strong>cloître</strong>, tout<br />

en assumant en même temps la charge d'obédiencier <strong>de</strong> Gandalou, où il reçoit, pour l'abbaye <strong>de</strong><br />

26. Il s'agit probablement <strong>de</strong> Pech Arotbaut, limite méridionale <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> selon les plus anciennes coutumes <strong>de</strong><br />

<strong>Moissac</strong>, à i<strong>de</strong>ntifier avec Fleury, sur l'actuelle limite entre <strong>Moissac</strong> et Castelsarrasin. Quelques éléments : A.<br />

LAGRÈZE-FOSSAT, Etu<strong>de</strong>s historiques sur <strong>Moissac</strong>, t. 1 (Paris 1870), p. 313 - 314.<br />

27. ADTG, G 684.<br />

28. ADTG, G 569 II, f. 1r.<br />

29. ADTG, G 571 (An<strong>du</strong>randy 5799).<br />

30. ADTG, G 684.<br />

31. R. Naz, Dictionnaire <strong>de</strong> Droit Canonique, t. 6 (Paris 1957), col. 1045.<br />

32. Apogée <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>, p. 145.<br />

33. Apogée <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>, p. 144 - 146.<br />

34. GEORGES BOURBON, CHARLES DUMAS DE RAULY, Inventaire-sommaire <strong>de</strong>s archives départementales<br />

antérieures à 1790. Tarn-et-Garonne. Archives religieuses. Séries G et H (Montauban 1894), G 566 (pièce<br />

4


<strong>Moissac</strong>, plusieurs donations faites notamment par la famille <strong>de</strong> Gandalou. Comme je l'ai signalé à<br />

plusieurs reprises dans ma thèse, les relations familiales entre dignitaires moines et laïcs expliquent<br />

souvent davantage les acquisitions <strong>de</strong> l'abbaye qu'une préten<strong>du</strong>e "politique" d'acquisitions. 35<br />

Les actes nous décrivent en même temps le paysage autour <strong>de</strong> Gandalou, entre les Barthes et Caunac.<br />

A l'est, dans le Tarn, près <strong>de</strong>s Barthes, <strong>de</strong>s barrages en bois, construits dans le lit <strong>du</strong> fleuve, sont <strong>de</strong>stinés<br />

à faciliter la pêche. Les textes parlent <strong>de</strong> "pêcheries" (paxeria, <strong>de</strong> l'occitan : paisièra). Plus à l'ouest, la<br />

vallée <strong>du</strong> Tarn et les premières terrasses autour <strong>de</strong> Gandalou sont couvertes <strong>de</strong> bois (boscus, nemus,<br />

saltus). Les bois s'appellent Le Breuil et Le Ramet, toponymes qui ont dû disparaître avec les bois qui<br />

les portaient. Dans ces bois on trouve <strong>de</strong> nombreux porcs appartenant soit à la famille De Gandalou, soit<br />

à l'abbaye et loués par elle. Vers 1100, ces surfaces boisées sont déjà rognées par <strong>de</strong>s "artigues" ou<br />

défrichements. Du côté <strong>de</strong> Lavala<strong>de</strong>, dans la vallée inondable <strong>du</strong> Tarn, se trouvent <strong>de</strong>s marais. Dans ces<br />

terrains marécageux sont aménagés <strong>de</strong>s prés et <strong>de</strong>s jardins. Plus loin, vers l'ouest, nous arrivons à la<br />

Garonne. C'est là que se trouve Caunac, qui appartient à la paroisse <strong>de</strong> Gandalou. Il y a là une<br />

condamine, c'est-à-dire un champ <strong>de</strong> bonne terre, un "cabeth" dans la Garonne, et enfin une île.<br />

Certaines parcelles autour <strong>de</strong> Gandalou sont clôturées (<strong>de</strong>fensio). Il y a <strong>de</strong>s maisons et <strong>de</strong>s enclos<br />

(casal), et enfin <strong>de</strong>s vignes. D'autres terres, celles <strong>de</strong> Garnouillac par exemple, sont labourées. Les<br />

boeufs <strong>du</strong> monastère <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> (boves Sancti Petri) labourent <strong>de</strong>s terres ensemencées <strong>de</strong> blé. Il y a un<br />

marché à Gandalou, dont les revenus sont partagés entre la famille De Gandalou et le monastère <strong>de</strong><br />

<strong>Moissac</strong>, en l'occurence l'operarius, dans sa fonction d'obédiencier <strong>de</strong> Gandalou. Les échanges<br />

commerciaux se font encore en gran<strong>de</strong> partie en nature. La famille De Gandalou reçoit <strong>du</strong> monastère <strong>de</strong><br />

<strong>Moissac</strong> un cheval d'une valeur <strong>de</strong> 60 sous, un palefroi d'une valeur <strong>de</strong> 60 sous, une mule d'une valeur<br />

<strong>de</strong> 100 sous ou un cheval d'une valeur <strong>de</strong> 20 sous. Le territoire <strong>de</strong> Gandalou est traversé par la voie <strong>de</strong><br />

<strong>Moissac</strong> à Toulouse (strata publica), qui traverse entre autres la terre <strong>de</strong> Garnouillac, juste au nord <strong>de</strong><br />

Notre-Dame d'Alem, qui s'appelait encore Notre-Dame <strong>de</strong> l'Herm.<br />

La vie quotidienne à Gandalou, même dans les plus gran<strong>de</strong>s familles comme celle <strong>de</strong> Raimond<br />

Bernard <strong>de</strong> Gandalou, est marquée par l'agriculture et la pêche dans les eaux <strong>du</strong> Tarn et <strong>de</strong> la Garonne.<br />

Un peu d'élevage (porcs, boeufs) est surtout <strong>de</strong>stiné à entretenir <strong>de</strong>s forêts qui sont encore fort éten<strong>du</strong>es,<br />

et au labourage <strong>de</strong>s quelques terres défrichées. La pêche est plus importante. On sait que les moines<br />

clunisiens, qui s'abstenaient <strong>de</strong> vian<strong>de</strong>, mangeaient beaucoup <strong>de</strong> poisson, 36 et ce n'est pas pour rien que<br />

les plus anciennes coutumes <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>, celles <strong>du</strong> XII e siècle, comportent plusieurs articles sur la pêche<br />

et la fourniture <strong>de</strong> poisson à la ville et à l'abbaye. 37 Enfin, conformément à la Règle <strong>de</strong> saint Benoît, 38 les<br />

moines avaient le droit <strong>de</strong> boire <strong>du</strong> vin. Les vignes <strong>de</strong> Gandalou ont pu fournir l'abbaye <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>.<br />

Nous trouvons beaucoup moins <strong>de</strong> données personnelles sur le successeur d'<strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong> :<br />

Raimond <strong>de</strong> Mala Musca. Sa première mention figure dans un acte <strong>du</strong> 1 er mai 1129 (et non pas 1130,<br />

date que l'on trouve jusque dans les bonnes publications), c'est-à-dire le procès-verbal <strong>du</strong> plaid tenu par<br />

Alphonse-Jourdain, comte <strong>de</strong> Toulouse, dans un conflit opposant Bertrand <strong>de</strong> Montincens, abbé séculier<br />

<strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>, à Roger, abbé régulier, à propos <strong>de</strong> la possession <strong>de</strong> l'église et <strong>de</strong>s clochers, où Raimun<strong>du</strong>s<br />

<strong>de</strong> opere figure parmi les témoins. 39 C'est sous son nom complet, et avec l'indication <strong>de</strong> son office,<br />

Raimun<strong>du</strong>s <strong>de</strong> Mala Musca operarius, qu'il figure parmi les témoins <strong>du</strong> serment ren<strong>du</strong> par Oddon,<br />

vicomte <strong>de</strong> Lomagne, sur les coutumes <strong>de</strong> Saint-Nicolas. 40 Plus tard, notre operarius témoigne dans un<br />

acte <strong>de</strong> 1140, 41 reçoit un bien en 1142, 42 et, le 4 février 1146, reçoit l'église <strong>de</strong> Saint-Maurice, sur<br />

l'Aveyron, près <strong>de</strong> Lafrançaise, 43 ce qui constitue en même temps sa <strong>de</strong>rnière mention.<br />

35. Par exemple : Apogée <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>, p. 215.<br />

36. Dictionnaire d'Histoire et <strong>de</strong> Géographie Ecclésiastique, t. XIII, col. 136 (G. <strong>de</strong> Valous).<br />

37. Coutumes dites "Charte <strong>de</strong> Gausbert <strong>de</strong> Fumel" (milieu XII e siècle), art. 37 - 40 : A. LAGRÈZE-FOSSAT, Etu<strong>de</strong>s<br />

historiques sur <strong>Moissac</strong>, t. 1, p. 85 - 87 ; coutumes dites <strong>de</strong> Raymond VI, art. 33 - 34 : Doat 127, f. 1r - 27v.<br />

38. Règle <strong>de</strong> Saint Benoît, ch. 40.<br />

39. ADTG, G 596 (An<strong>du</strong>randy 1888).<br />

40. ADTG, G 569 II, f. 13r - 14v.<br />

41. Doat 129, f. 30r - 31r.<br />

42. Doat 129, f. 32r - 33r.<br />

43. ADTG, G 633 (An<strong>du</strong>randy 5214).<br />

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Enfin, les chartes <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> nous livrent encore le nom d'une personne qui a eu un rapport direct<br />

avec le chantier <strong>du</strong> <strong>cloître</strong>. Lors <strong>de</strong> la rédaction <strong>de</strong> l'acte <strong>de</strong> 1097, <strong>Arnaud</strong> <strong>Guillaume</strong> se fait accompagner<br />

par un nommé Orset, lui aussi surnommé <strong>de</strong> opera. Ce personnage, vu sa place dans la liste <strong>de</strong>s témoins<br />

<strong>de</strong> l'acte, a dû être un responsable important <strong>du</strong> chantier <strong>du</strong> <strong>cloître</strong>. Plus tard, dans l'acte déjà cité <strong>de</strong><br />

1114 figure un nommé Orset <strong>de</strong> Saint-Sauveur. Cet Orset est cité parmi les laïcs ; il n'est donc pas moine<br />

<strong>de</strong> l'abbaye <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong>. Etant donné qu'il s'agit <strong>du</strong> seul Orset figurant dans les chartes <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong><br />

jusqu'à la secon<strong>de</strong> moitié <strong>du</strong> XII e siècle, on peut supposer qu'il s'agit d'une seule et même personne.<br />

Les conclusions <strong>de</strong> cette recherche dans les actes <strong>de</strong> <strong>Moissac</strong> ne sont pas sans importance. Certes, il<br />

est toujours intéressant <strong>de</strong> pouvoir attacher un nom à une oeuvre, surtout quand il s'agit <strong>de</strong> l'une <strong>de</strong>s<br />

oeuvres artistiques les plus importantes <strong>de</strong> la chrétienté médiévale. Mais il est plus intéressant encore <strong>de</strong><br />

constater que le <strong>cloître</strong> et le clocher-porche ont été réalisés par <strong>de</strong>ux moines maîtres d'ouvrage différents,<br />

vivant à <strong>de</strong>ux époques différentes, dans un contexte historique différent, nourris, comme je l'ai exposé<br />

dans ma thèse, <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux théologies différentes. C'est cela aussi qui fait l'intérêt <strong>de</strong>s monuments <strong>de</strong><br />

<strong>Moissac</strong>.<br />

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