1899 - Diocèse de Quimper et du Léon
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La Patrie, au sens catholique.<br />
Je voudrais qu'à l'instruction chrétienne <strong>du</strong> foyer familial<br />
vinssent se joindre quelques notions élémentaires <strong>de</strong> l'enseignement<br />
patriotique. Je voudrais qu'en parlant à leur fils ou à leur<br />
fille <strong>de</strong> leurs obligations envers Dien, le père <strong>et</strong> la mére leur<br />
apprissent aussi, en môme temps, leurs <strong>de</strong>voirs envers leur pays.<br />
Jamais, peut-être, à aucune époque <strong>de</strong> notre histoire nationale!<br />
le besoin <strong>de</strong> c<strong>et</strong> enseignement ne se fit aussi impérieusement sentir<br />
que <strong>de</strong> nos jours.<br />
A mesure que les croyances religieuses s'amoindrissent dans<br />
les cœurs, on constate aussi une décroissance progressive <strong>de</strong><br />
l'amour <strong>du</strong> pays natal. L'idée <strong>de</strong> Patrie s'est obscurcie <strong>et</strong> la conception<br />
<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te gran<strong>de</strong> chose n'a plus sa n<strong>et</strong>t<strong>et</strong>é <strong>et</strong> sa clarté primitives.<br />
Sous Je prétexte fallacieux d'une solidarité universelle<br />
<strong>de</strong>s fauteurs <strong>de</strong> désordre aspirent à tout niveler dans la société, à<br />
supprimer toutes tes limites <strong>et</strong> toutes les frontières, à fusionner<br />
tous les peuples en une seule <strong>et</strong> immense nation, qui changerait<br />
la face <strong>du</strong> mon<strong>de</strong>. Celte utopie folle <strong>et</strong> dangereuse pénétre <strong>de</strong> plus<br />
en plus dans les masses, el nous voyons, dans nos cités in<strong>du</strong>strielles<br />
surtout, grandir la race sinistre <strong>de</strong> ces cosmopolites qu'on<br />
appelle avec raison <strong>de</strong>s Saris-Patrie.<br />
Que les parents réagissent donc contre c<strong>et</strong>te tendance funeste,<br />
qu'ils fassent comprendre <strong>de</strong> bonne heure à leurs enfants le sens<br />
la signification <strong>et</strong> la portée <strong>de</strong> ce mot <strong>de</strong> Pairie,'Vnn <strong>de</strong>s plus<br />
beaux qui existent dans la langue humaine. La Patrie, c'est le sol<br />
béni où Dieu a placé notre berceau, c'est le foyer où notre âme<br />
s'est épanouie à Ia lumière, sous les caresses <strong>et</strong> les embrassements<br />
<strong>de</strong> notre mère, c'est le coin <strong>de</strong> terre qui a abrité notre enfance <strong>et</strong><br />
dont le souvenir est encore pour nous plein <strong>de</strong> charme, quand<br />
par la pensée nous revenons, comme disait Lacordaire, * aux<br />
riants rivages <strong>de</strong> notre jeunesse ». La Patrie, c'est l'église <strong>de</strong> la<br />
paroisse, l'église <strong>de</strong> notre baptème <strong>et</strong> <strong>de</strong> notre première communion,<br />
l'église où bien <strong>de</strong>s fois nous avons suivi, au son <strong>du</strong> Rias<br />
funèbre, au milieu <strong>de</strong>s larmes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s chants <strong>de</strong> <strong>de</strong>uil <strong>de</strong> Ja litunrie<br />
catholique, la dépouille mortelle <strong>de</strong> parents <strong>et</strong> d'amis qui venaient<br />
<strong>de</strong> nous dire Ie <strong>de</strong>rnier adieu. La Patrie, c'est le clocher <strong>du</strong> village<br />
<strong>du</strong> haut <strong>du</strong>quel <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt, aux jours <strong>de</strong> fête, <strong>de</strong>s voix harmonieuses<br />
qui font battre nos cœurs d'un saint enthousiasme. La<br />
Patrie, cest I humble cim<strong>et</strong>ière où dorment, à l'ombre <strong>de</strong> la croix<br />
<strong>et</strong> dans I attente <strong>de</strong> la résurrection générale, les cendres refroidies<br />
<strong>de</strong> nos aieux, <strong>et</strong> où notre place est aussi marquée auprès <strong>de</strong> ceux<br />
dont Ies corps reposent sous la pierre <strong>du</strong> sépulcre, mais dont les<br />
âmes sont transportées dans c<strong>et</strong> au <strong>de</strong>là mvstérieux <strong>de</strong> l'Eternité<br />
La Paine, ce sont ces campagnes, avec leurs grands bois, leurs<br />
prairies verdoyantes, leurs vallées ombreuses, leurs rivières aux<br />
méandres capricieux <strong>et</strong> leurs larges horizons, pleins <strong>de</strong> saveur <strong>et</strong><br />
Archives diocésaines <strong>de</strong> <strong>Quimper</strong> <strong>et</strong> <strong>Léon</strong><br />
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<strong>de</strong> poésie. La Patrie, enfin, c'est la France, la France non point<br />
telle qu'ont essayé <strong>de</strong> la façonner le déisme impie el le rire<br />
moqueur <strong>du</strong> <strong>de</strong>rnier siècle, mais la France croyante <strong>et</strong> chrétienne,<br />
la France rayonnante <strong>de</strong>s clartés <strong>de</strong> son baptéme <strong>de</strong> Reims, fille<br />
ainée <strong>de</strong> l'Eglise el soldat <strong>de</strong> Dieu, la France <strong>de</strong> Clovis <strong>et</strong> <strong>de</strong> saint<br />
Louis, avec ses traditions <strong>de</strong> loyauté <strong>et</strong> d'honneur, avec ses triomphes<br />
<strong>et</strong> ses gloires, mais aussi avec ses épreuves <strong>et</strong> ses revers, ia<br />
France avec ses missionnaires, qui s'en vont, pionniers <strong>de</strong> la civilisation,<br />
porter sa langue <strong>et</strong> son nom, en même temps que la croix<br />
<strong>du</strong> Christ, jusqu'aux extrémités <strong>du</strong> mon<strong>de</strong>, la France avec ses<br />
ru<strong>de</strong>s marins brisés à toutes les fatigues <strong>et</strong> prêts à toutes les lu Ues,<br />
la France avec son armée, c la gran<strong>de</strong> mu<strong>et</strong>te, » impassible <strong>et</strong> fière<br />
sous le flot <strong>de</strong> ces injures venimeuses qui ne sauraient l'atteindre.<br />
Out, voilà ce qu'est pour nous la Patrie.<br />
Oh î pères <strong>et</strong> mères, inculquez donc, dès le bas-âge, c<strong>et</strong> amour,<br />
j'allais dire c<strong>et</strong>te religion, au cœur <strong>de</strong> vos enfants <strong>et</strong> faites-leur<br />
vraiment, selon la belle expression <strong>de</strong> Bossu<strong>et</strong>, t une âme française<br />
». Apprenez à vos fils qu'un jour c<strong>et</strong>te Patrie aura besoin <strong>du</strong><br />
secours <strong>de</strong> leurs bras, qu'ils auront à répondre avec empressement<br />
<strong>et</strong> joie à son appel maternel, qu'ils doivent considérer comme un<br />
honneur <strong>de</strong> la servir sous les plis glorieux <strong>de</strong> son drapeau <strong>et</strong> que,<br />
s'il le faut, ils doivent être prêts à lui faire un rempart <strong>de</strong> leur<br />
poitrine <strong>et</strong> à verser pour elle jusqu'à la <strong>de</strong>rnière goutte <strong>de</strong> leur<br />
sang. Apprenez à vos filles que celte même Patrie a été sauvée<br />
jadis par Tune <strong>de</strong> leurs sœurs, par une femme qui était, en même<br />
temps, une héroïne <strong>et</strong> une sainte, par Jeanne d'Arc, personnification<br />
noble <strong>et</strong> pure <strong>du</strong> patriotisme français, <strong>et</strong> qu'elles aussi, elles<br />
ont un moyen <strong>de</strong> la servir utilement, en s'intéressant à ses luttes,<br />
à ses succès <strong>et</strong> à ses victoires, en travaillant sur le champ <strong>de</strong> bataille<br />
<strong>de</strong> ia charité, en priant le Dieu <strong>de</strong>s armées pour leurs grands<br />
frères qui sont là-bas, aux avant-postes <strong>de</strong> la défense nationale.<br />
Je lisais <strong>de</strong>rnièrement ces paroles expressives, dans une l<strong>et</strong>tre<br />
écrite par le pére <strong>de</strong> ce capitaine Marchand, dont l'héroïsme vient<br />
d'arracher à tous les hommes <strong>de</strong> cœur un long cri d'admiration :<br />
« Mon fils a appris, dès l'enfance, par sa mère, la fidélité <strong>et</strong> le<br />
t dévouement à <strong>de</strong>ux nobles causes qu'il ne sépare pas <strong>et</strong> ne<br />
t séparera jamais : Dieu <strong>et</strong> la France. »<br />
Que telle soit aussi, parents chrétiens, votre ambition dans ce<br />
rôle sauveur <strong>de</strong> l'é<strong>du</strong>cation <strong>du</strong> foyer domestique î Votre <strong>de</strong>voir<br />
d'é<strong>du</strong>cateurs sera alors rempli dans son intégrité <strong>et</strong> dans toute<br />
son éten<strong>du</strong>e, si, par vos soins, rame <strong>de</strong> vos enfants palpite <strong>de</strong> ces<br />
<strong>de</strong>ux amours qui s'allient <strong>et</strong> se complètent dans un harmonieux<br />
accord : V Eglise <strong>et</strong> la Patrie, Dieu <strong>et</strong> la France; si, grâce à vos<br />
conseils <strong>et</strong> à vos leçons, vos fils el vos filles marchent dans la vie<br />
avec c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>vise, ce mot d'ordre <strong>et</strong> ce cri <strong>de</strong> ralliement, dont rien<br />
ne surpasse la beauté : Pro Deo <strong>et</strong> pro Patria. Et un jour, vous<br />
aurez le droit d'étre légitimement fiers <strong>de</strong> votre œuvre <strong>de</strong>vant le<br />
ciel el <strong>de</strong>vant la terre, <strong>de</strong>vant les anges <strong>et</strong> <strong>de</strong>vant les hommes, si<br />
en montrant <strong>du</strong> doigt ces enfants élevés par vous, on peut leur