Alphonse de Prémorel (1799-1888) propriétaire à ... - Jos A. Massard
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Notices biographiques<br />
<strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> (<strong>1799</strong>-<strong>1888</strong>)<br />
<strong>propriétaire</strong> <strong>à</strong> Differdange, homme <strong>de</strong> lettres, amateur d'archéologie et<br />
<strong>de</strong> sciences, pionnier <strong>de</strong> l'exploitation <strong>de</strong>s schistes bitumineux<br />
<strong>Jos</strong>. A. <strong>Massard</strong><br />
Alexis Louis <strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> Durand <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> 1 (<strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong>) est né le 14 mai<br />
<strong>1799</strong> <strong>à</strong> Brunswick où son père, le capitaine <strong>de</strong> cavalerie, français et royaliste, Pierre Louis<br />
Raoul Edmé <strong>de</strong> Durand <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> s'était exilé. Sa mère était Catherine Antoinette<br />
Wilhelmine Homann, originaire <strong>de</strong> Brunswick. La famille changeait souvent <strong>de</strong> domicile,<br />
ce dont témoignent les lieux <strong>de</strong> naissance <strong>de</strong>s onze enfants du couple: Brunswick<br />
(<strong>Alphonse</strong>, l'aîné), Celle près d'Hannovre, Charleville-Mézières, Château-Regnault<br />
(Ar<strong>de</strong>nnes), Beaurepaire (Vouziers, Ar<strong>de</strong>nnes), Echternach (Olimpe, une fille née le 27<br />
novembre 1806), Bertrix (<strong>de</strong>ux naissances successives), Tournay (près <strong>de</strong> Neufchâteau)<br />
et <strong>de</strong> nouveau Bertrix.<br />
<strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> passait son enfance <strong>à</strong> Château-Regnault chez ses parents paternels,<br />
et <strong>à</strong> Membre-sur-Semois, au château <strong>de</strong> ses grands-oncles <strong>de</strong> La Chevardière,<br />
« hobereaux ar<strong>de</strong>nnais dont la vie était plus proche <strong>de</strong> celle du paysan que celle du<br />
seigneur » où la chasse, la ten<strong>de</strong>rie, la pêche<br />
étaient pour l'adolescent <strong>de</strong>s activités<br />
quotidiennes 2 .<br />
En janvier 1815, le père et le fils se firent<br />
inscrire parmi les gar<strong>de</strong>s du corps <strong>de</strong> Louis<br />
XVIII. <strong>Alphonse</strong> fut nommé lieutenant et placé<br />
<strong>à</strong> l'École militaire <strong>de</strong> Senlis. Au moment du<br />
retour éphémère <strong>de</strong> Napoléon durant les Cent-<br />
Jours, il suivit le roi en fuite. En 1820 il fut<br />
nommé lieutenant <strong>de</strong> première classe; il passa<br />
capitaine en 1823.<br />
En 1824, il quitta la gar<strong>de</strong> du roi pour rejoindre<br />
le régiment du 7e <strong>de</strong> ligne <strong>à</strong> Strasbourg, où il<br />
passa quatre ans. Ses stations suivantes étaient<br />
Longwy, Saint-Omer et Dunkerque. En août<br />
1831, il participa <strong>à</strong> la campagne <strong>de</strong>s dix jours<br />
au cours <strong>de</strong> laquelle l'intervention <strong>de</strong> l'armée<br />
française, venant <strong>à</strong> la rescousse du jeune<br />
royaume belge, mit fin <strong>à</strong> la tentative du roi<br />
<strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong><br />
(source: Logelin-Simon 1997: 507)<br />
1 Sauf indication contraire, les données biographiques concernant <strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> ont toutes été<br />
puisées dans l'article <strong>de</strong> Logelin-Simon (1997) qui indique parmi ses sources: Bergé 1958 et Durand <strong>de</strong><br />
<strong>Prémorel</strong> 1990. A compléter par Mertens 1986, 2006 et GeneaNet 2012.<br />
2 Mertens 1997: 583.
Guillaume I er <strong>de</strong>s Pays-Bas <strong>de</strong> reconquérir la Belgique. Après cette campagne, <strong>de</strong><br />
<strong>Prémorel</strong> quitta l'armée française.<br />
En 1830, il avait épousé, <strong>à</strong> Longlaville, Marie Catherine <strong>Jos</strong>éphine <strong>de</strong> Nothomb, née <strong>à</strong><br />
Differdange en 1809, la fille <strong>de</strong> Jean Antoine <strong>de</strong> Nothomb, <strong>propriétaire</strong> <strong>de</strong> la faïencerie <strong>de</strong><br />
Longwy, et <strong>de</strong> Marie Catherine Boch. À la mort <strong>de</strong> son père, en mars 1835, l'épouse<br />
d'<strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> hérita le vaste domaine avec l'ancien couvent <strong>de</strong>s Dames nobles<br />
<strong>de</strong> l'ordre <strong>de</strong> Cîteaux 3 et les bois que <strong>de</strong> Nothomb possédait <strong>à</strong> Differdange, et où <strong>de</strong><br />
<strong>Prémorel</strong> s'installa encore la même année. Dès 1836, il s'attachait <strong>à</strong> exploiter au mieux ses<br />
nouvelles possessions. Au fil <strong>de</strong>s années, il y installa, entre autres, un four <strong>de</strong> tuilerie, un<br />
four <strong>à</strong> chaux et un lavoir <strong>de</strong> minerai <strong>de</strong> fer d'alluvion. Près <strong>de</strong> Soleuvre, où lui et sa<br />
femme possédaient un bois auquel s'étaient ajoutés <strong>de</strong>s terres et <strong>de</strong>s prés nouvellement<br />
acquis, <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> constitua, après défrichement du bois, « la gran<strong>de</strong> et belle ferme <strong>de</strong><br />
Ga<strong>de</strong>rscheuer » 4 (Gad[d]erscheuerhof ou Gad<strong>de</strong>rscheierhaff).<br />
En 1841, il fut naturalisé Luxembourgeois. En janvier 1844, il entra comme premier<br />
échevin au conseil communal <strong>de</strong> Differdange, où il siégeait jusqu'aux élections <strong>de</strong> janvier<br />
1849. En juin 1851, <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong>, qui ne parlait et ne comprenait pas le Luxembourgeois 5 ,<br />
fut candidat aux élections législatives pour le canton d'Esch; sur huit candidats et cinq<br />
postes <strong>à</strong> pourvoir, il se classa <strong>de</strong>rnier. 6 Est-ce que ce fut cette défaite ou plutôt, comme il<br />
l'écrivait lui-même, la nécessité d'assurer un avenir <strong>à</strong> ses enfants qui l'incita <strong>à</strong> récupérer sa<br />
nationalité française en 1852?<br />
Devenu citoyen étranger, le conseil communal <strong>de</strong> Differdange, où il n'avait plus guère<br />
d'amis, en profita pour exclure <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> <strong>de</strong> la distribution du bois d'affouage dont il<br />
avait pourtant besoin pour chauffer sa vaste <strong>de</strong>meure. D'autres déboires s'y ajoutant, <strong>de</strong><br />
<strong>Prémorel</strong> préféra s'installer dans son domaine <strong>de</strong> Conques, l'ancien prieuré «placé<br />
mo<strong>de</strong>stement sur le bord <strong>de</strong> la Semois» 7 , près d'Herbeumont en Belgique; au cours <strong>de</strong>s<br />
années 1857 <strong>à</strong> 1862 il ne revint qu'occasionnellement <strong>à</strong> Differdange. Il finit cependant par<br />
vendre le domaine <strong>de</strong> Conques pour investir <strong>à</strong> Differdange où, au cours <strong>de</strong>s années<br />
suivantes, il cherchait sans succès <strong>à</strong> obtenir <strong>de</strong>s concessions pour l'extraction <strong>de</strong> la<br />
minette par galeries souterraines.<br />
En 1873, <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> acquit une maison <strong>à</strong> Carignan dans les Ar<strong>de</strong>nnes françaises et fit<br />
apport <strong>de</strong> tous ses immeubles differdangeois <strong>à</strong> la « Société industrielle du Grand-Duché<br />
<strong>de</strong> Luxembourg » nouvellement fondée. Il garda cependant le bois <strong>de</strong> Lasauvage qui fut<br />
vendu en 1886 <strong>à</strong> la « Société <strong>de</strong>s Hauts Fourneaux <strong>de</strong> Longwy et <strong>de</strong> Lasauvage,<br />
Ferdinand <strong>de</strong> Saintignon et Compagnie ».<br />
<strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> est décédé le 25 avril <strong>1888</strong> <strong>à</strong> Carignan.<br />
3 Durand <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> 1997: 570.<br />
4 Durand <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> 1997: 572. — La ferme a dû passer plus tard dans la possession <strong>de</strong> la famille <strong>de</strong><br />
Tornaco, dont les héritiers l'ont vendue aux enchères en 1949, ce dont atteste la notice suivante insérée dans<br />
le « Luxemburger Wort » du 7 octobre 1949 (N° 280, p. 4): Nie<strong>de</strong>rcorn. — Gestern ließen hier die Erben<br />
<strong>de</strong>s Herrn Baron Charles <strong>de</strong> Tornaco das be<strong>de</strong>uten<strong>de</strong> Hofgut, bekannt unter <strong>de</strong>m Namen Ga<strong>de</strong>rscheuerhof,<br />
wozu 50,17 ha Land gehören, in öffentlicher Versteigerung ausbieten. Es wur<strong>de</strong> zum Preise von 1 710 000<br />
Fr. Hrn. Cerf Israel, Immobilienhändler aus Luxemburg, für Rechnung eines dritten zugeschlagen.<br />
5 Durand <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> 1997: 574.<br />
6 Courrier du Grand-Duché <strong>de</strong> Luxembourg 1851, N° 47 (11 juin): 1.<br />
7 <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> 1851, cité par Logelin-Simon 1997: 524.<br />
2
De <strong>Prémorel</strong> s'intéressait <strong>à</strong> l'archéologie 8 et aux sciences naturelles, notamment <strong>à</strong> la<br />
géologie. En 1846, la Société archéologique (future section historique <strong>de</strong> l'Institut grandducal)<br />
avait admis <strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> comme membre correspondant.<br />
Membre agrégé et donateur <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong>s sciences naturelles<br />
En 1851, <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> avait été parmi les premiers « membres agrégés » admis <strong>à</strong> la<br />
« Société <strong>de</strong>s sciences naturelles du Grand-Duché <strong>de</strong> Luxembourg » nouvellement créée.<br />
Il avait réuni dans son cabinet <strong>de</strong> nombreux fossiles provenant <strong>de</strong> la région <strong>de</strong><br />
Differdange qu'il montra avec fierté au Chevalier l'Évêque <strong>de</strong> la Basse Moûturie lors <strong>de</strong><br />
son passage <strong>à</strong> Differdange dans les années 1840. Dans son « Itinéraire du Luxembourg<br />
germanique », ce <strong>de</strong>rnier relate sa visite chez <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> <strong>de</strong> la manière suivante: « On<br />
trouve chez lui une jolie collection <strong>de</strong> minéraux et d'antiquités qu'il se fait un plaisir <strong>de</strong><br />
montrer aux amateurs. J'y ai vu une magnifique corne d'Ammon 9 et une <strong>de</strong>nt <strong>de</strong><br />
Mammouth, trouvée en 1840 [en fait, en 1839 (voir plus loin)], entre Soleuvre et<br />
Differdange. Celle-ci n'a pas moins <strong>de</strong> 2 pieds <strong>de</strong> circonférence et 9 pieds <strong>de</strong> longueur<br />
circulaire, quoiqu'elle soit privée <strong>de</strong> ses extrémités, qu'on peut évaluer <strong>à</strong> un mètre. Cette<br />
<strong>de</strong>nt détériorée par la calcination, suffit pour donner une idée <strong>de</strong> l'énormité <strong>de</strong> l'animal<br />
auquel elle a appartenu. » 10<br />
Jean-Jules Durand <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong>, fils d'<strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong>, né en 1833 <strong>à</strong> Longwy-Bas,<br />
décédé <strong>à</strong> Rochefort en 1906, 11 se rappelait que la défense avait été établie sur une table<br />
circulaire construite <strong>à</strong> cet effet, dans une salle <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Differdange, «où elle fut<br />
visitée par <strong>de</strong> nombreux archéologues venus <strong>de</strong> tous les pays. Malheureusement il [son<br />
père] ne sut prendre les mesures efficaces pour préserver cette magnifique pièce, qui,<br />
sous l'influence <strong>de</strong> l'air, ne tarda pas <strong>à</strong> s'effriter et tomber en morceaux dont les<br />
principaux ont été recueillis par les musées les plus proches.» 12<br />
Et c'est ainsi qu'en 1854 <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> a fait don d'une partie importante <strong>de</strong> la défense au<br />
cabinet d'histoire naturelle <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong>s sciences naturelles qui la décrivit en ces<br />
termes: 13 « une partie <strong>de</strong> défense <strong>de</strong> Mammouth, longue d'un mètre, découverte par luimême<br />
en 1839, dans le penchant d'une <strong>de</strong>s vallées avoisinant Differdange », avant <strong>de</strong><br />
préciser les circonstances <strong>de</strong> sa découverte:<br />
« Lorsqu'elle fut déterrée, cette défense avait 3 mètres 30 centimètres dans l'entier<br />
développement <strong>de</strong> sa courbe; il est <strong>à</strong> présumer qu'en tombant <strong>de</strong> son alvéole elle<br />
avait encore plus <strong>de</strong> longueur. Elle paraît avoir été abandonnée dans le versant par<br />
l'animal qui la portait. Ce magnifique fragment antédiluvien reposait sur un<br />
gisement <strong>de</strong> roche oolythique [sic] ferrugineuse; une couche d'argile <strong>de</strong> quelques<br />
pouces d'épaisseur l'entourait <strong>de</strong> tout[e]s parts, <strong>de</strong>ux pieds et <strong>de</strong>mi <strong>de</strong> rocaille la<br />
recouvraient.<br />
8<br />
Voir: Logelin-Simon 1997: 538ss. Voir aussi: Goe<strong>de</strong>rt 1987: 212s.<br />
9<br />
Un ammonite.<br />
10<br />
L'Évêque <strong>de</strong> la Basse-Moûturie (1844): Itinéraire du Luxembourg germanique, ou Voyage historique et<br />
pittoresque dans le Grand-Duché. - Librairie V. Hoffman, Luxembourg: 112. Voir aussi: Logelin-Simon<br />
1997: 524.<br />
11<br />
Logelin-Simon 1997: 536.<br />
12 Durand <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> 1997: 572.<br />
13 Anonyme 1854: 21.<br />
3
La partie détériorée <strong>de</strong> cette défense avait une forme légèrement aplatie. Il est bien<br />
<strong>à</strong> regretter que le contact <strong>de</strong> l'air ait successivement réduit cet échantillon <strong>à</strong> ses<br />
proportions actuelles. » 14<br />
Ce don fut même mentionné dans le « Mémorial du Grand-Duché <strong>de</strong> Luxembourg », le<br />
journal officiel du pays: 15<br />
« Le cabinet que la Société <strong>de</strong>s sciences naturelles forme près <strong>de</strong> l'Athénée, vient <strong>de</strong><br />
recevoir <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> <strong>à</strong> Differdange, membre <strong>de</strong> la société, un <strong>de</strong>s<br />
plus remarquables restes du mon<strong>de</strong> animal antédiluvien, qui aient jusqu'<strong>à</strong> présent<br />
été découverts dans le Grand-Duché.<br />
La défense <strong>de</strong> Mammouth dont il s'agit, avait au moment <strong>de</strong> la découverte par M.<br />
<strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> trois mètres trente centimètres <strong>de</strong> longueur dans l'entier développement<br />
<strong>de</strong> sa courbe; elle gisait dans le penchant d'une vallée d'érosion près <strong>de</strong> Differdange,<br />
sur une roche oolithique ferrugineuse, entourée <strong>de</strong> toutes parts d'une couche d'argile<br />
<strong>de</strong> quelques pouces d'épaisseur et recouverte <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux pieds et <strong>de</strong>mi <strong>de</strong> terre et <strong>de</strong><br />
pierraille.<br />
On peut supposer que cette énorme défense a été abandonnée par le Mammouth sur<br />
place, ou qu'elle a été charriée jusqu'<strong>à</strong> Differdange; car jusqu'<strong>à</strong> ce jour aucun autre<br />
débris d'ossements <strong>de</strong> cet animal colossal n'a été trouvé dans les environs. »<br />
La découverte <strong>de</strong> cette <strong>de</strong>nt <strong>de</strong> mammouth fut rappelée en 1865 dans un article publié par<br />
le journal luxembourgeois « L'Union ». 16<br />
Ce n'était ni la première ni la <strong>de</strong>rnière fois que nom d'<strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> a figuré sur<br />
la liste <strong>de</strong>s donateurs <strong>de</strong> la Société, mais alors avec <strong>de</strong>s dons nettement moins<br />
spectaculaires: plusieurs minéraux et roches 17 ; un fragment <strong>de</strong> lave poreuse <strong>de</strong><br />
Nie<strong>de</strong>rmennig et une masse <strong>de</strong> scories provenant d'un toit incendié chez lui, pour servir<br />
<strong>de</strong> comparaison 18 ; <strong>de</strong>ux coprolithes et une térébratule (brachiopo<strong>de</strong>) fossile. 19<br />
De <strong>Prémorel</strong> fera encore don <strong>à</strong> la bibliothèque <strong>de</strong> la société 20 d'un exemplaire <strong>de</strong> son livre<br />
« Un peu <strong>de</strong> tout <strong>à</strong> propos <strong>de</strong> la Semois » paru en 1851 <strong>à</strong> Arlon et orné <strong>de</strong> douze <strong>de</strong>ssins<br />
d'après nature faits par l'auteur lui-même. 21 Avec cet ouvrage, qui rend un «vibrant<br />
hommage» a la nature ar<strong>de</strong>nnaise 22 , <strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> a été en quelque sorte l'auteur<br />
du premier gui<strong>de</strong> touristique <strong>de</strong> la vallée <strong>de</strong> la Semois. Une réimpression anastatique <strong>de</strong><br />
14 Notons que <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> avait trouvé dans la même couche une <strong>de</strong>nt <strong>de</strong> rhinocéros qu'il a probablement<br />
gardée dans sa propre collection (<strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> 1855: 196).<br />
15 Mémorial du Grand-Duché <strong>de</strong> Luxembourg 1854, secon<strong>de</strong> partie, N° 9 (17 juin 1854): 59. (Note fournie<br />
par la Société <strong>de</strong>s sciences naturelles). Dans la même note, on apprend que « la tête <strong>de</strong> Plesiosaurus trouvée<br />
dans les environs <strong>de</strong> Grevenmacher et heureusement préservée par les soins <strong>de</strong> M. Gust. Munchen » a<br />
également été déposée au cabinet <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong>s sciences naturelles et qu'elle en forme « un <strong>de</strong>s plus<br />
précieux ornements ». — Voir aussi: Logelin-Simon 1997: 544.<br />
16 Archéologie du Grand-Duché <strong>de</strong> Luxembourg : Renseignements historiques sur le pays <strong>de</strong> Luxembourg<br />
et <strong>de</strong> ses habitants, <strong>de</strong>puis les temps les plus reculés, fournis par la littérature grecque et romaine,<br />
l'archéologie et la paléontologie. L'Union 1865, N° 69 (23 mars): 2-3.<br />
17 Anonyme 1853: 57.<br />
18 Anonyme 1854: 18s.<br />
19 Anonyme 1855: 33. Voir aussi: Logelin-Simon 1997: 549.<br />
20 Anonyme 1857: 31.<br />
21 Logelin-Simon 1997: 524s. Des extraits du livre ont été publiés dans le périodique luxembourgeois<br />
« Galerie » (<strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> 1997).<br />
22 Mertens 1997.<br />
4
cet ouvrage est parue en 1981 <strong>à</strong> Bruxelles. « Les souvenirs <strong>de</strong> Membre » qu'<strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong><br />
<strong>Prémorel</strong> a rédigés vers 1877 23 ont dû attendre jusqu'en 1986 avant d'être publiés par<br />
Clau<strong>de</strong> Mertens. 24<br />
Ces <strong>de</strong>ux écrits d'<strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> annoncent en quelque sorte l'oeuvre littéraire<br />
plus soli<strong>de</strong> <strong>de</strong> son arrière-petit-fils Adrien <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> (1889-1968), écrivain belge<br />
d'expression française, chantre <strong>de</strong>s bois et campagnes <strong>de</strong> l'Ar<strong>de</strong>nne et du Luxembourg<br />
belge 25 , fils <strong>de</strong> Gaston <strong>de</strong> Durand <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> (1857-1936) qui lui était le fils <strong>de</strong> Jean<br />
Jules <strong>de</strong> Durand <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> (1833-1906), fils d'<strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong>. 26<br />
Un naturaliste pragmatique<br />
A l'instar <strong>de</strong> ce qu'il a coutume <strong>de</strong> faire pour la Société archéologique, <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong><br />
envoie <strong>de</strong> temps en temps <strong>de</strong>s notes <strong>à</strong> la Société <strong>de</strong>s sciences naturelles qui en publie un<br />
résumé ou <strong>de</strong>s extraits plus ou moins complets.<br />
Ainsi, il attire l'attention <strong>de</strong> la Société sur la Centaurée <strong>de</strong>s montagnes (Centaurea<br />
montana), une plante qui lui semble susceptible <strong>de</strong> rendre <strong>de</strong> bons services aux<br />
agriculteurs. Il s'agit d'une espèce qui croît naturellement dans les bois montueux et dans<br />
les rochers ombragés <strong>de</strong> l'Ar<strong>de</strong>nne 27 . A l'époque elle est fréquemment plantée comme<br />
plante ornementale dans les plates-ban<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s jardins, mais, <strong>de</strong> l'avis d'<strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong><br />
<strong>Prémorel</strong> elle est en plus appelée <strong>à</strong> être cultivée comme plante fourragère. Plus hâtif que<br />
le trèfle, explique-t-il, ce végétal fournit <strong>de</strong>ux coupes abondantes et les bestiaux la<br />
mangent avec avidité. De plus ses belles fleurs bleues attirent les abeilles. « Mes bestiaux<br />
s'en sont repus, » affirme-t-il, « et cette nourriture paraît leur convenir parfaitement. » 28<br />
On sait que <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> est le <strong>propriétaire</strong> <strong>de</strong> vastes terrains dont l'exploitation agricole<br />
lui tient <strong>à</strong> coeur. Lorsqu'en octobre 1846 se constitue la « Société agricole du Grand-<br />
Duché <strong>de</strong> Luxembourg», il accepte en toute logique d'y occuper un poste d'administrateur<br />
au sein <strong>de</strong> la commission d'administration. 29<br />
Loin <strong>de</strong> ces considérations matérielles se situe une autre note <strong>à</strong> la Société <strong>de</strong>s sciences<br />
naturelles dans laquelle <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> rend compte d'une observation singulière qu'il a faite<br />
dans les Ar<strong>de</strong>nnes. Auguste Dutreux l'a résumée et commentée: 30<br />
« Sous les pierres d'une carrière exposée au midi, [<strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong>] a découvert<br />
plusieurs salamandres frayant et déposant leurs oeufs sur le dos d'un crapaud<br />
vivant.<br />
Les œufs étaient déj<strong>à</strong> au nombre d'une trentaine, alignés et si bien fixés qu'on ne<br />
pouvait les détacher facilement.<br />
23<br />
Logelin-Simon 1997: 538.<br />
24<br />
Mertens 1986; voir aussi: Mertens 1998, <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> 1999.<br />
25<br />
Wikipedia. http://fr.wikipedia.org/wiki/Adrien_<strong>de</strong>_<strong>Prémorel</strong><br />
26<br />
Geneanet 2012.<br />
27<br />
Cette formulation a été empruntée <strong>à</strong> la «Flore luxembourgeoise » <strong>de</strong> Fr. A. Tinant parue <strong>à</strong> Luxembourg<br />
en 1836 (p. 434). Des précisions sur la distribution <strong>de</strong> la Centaurée dans les Ar<strong>de</strong>nnes luxembourgeoises<br />
seront fournies par la « Flore du Grand-Duché <strong>de</strong> Luxembourg » <strong>de</strong> J.H.G. Krombach qui paraîtra <strong>à</strong><br />
Luxembourg en 1875: entre Wiltz et Kautenbach, Kautenbach, Stolzembourg (p. 327).<br />
28<br />
Dutreux 1855b.<br />
29 Courrier 1846.<br />
30 Dutreux 1855b.<br />
5
Le crapaud était d'une espèce particulière, ayant sur l'échine une raie jaune et le<br />
<strong>de</strong>ssous du ventre tacheté <strong>de</strong> noir.<br />
M. <strong>de</strong> Premorel [sic] suppose que le crapaud <strong>de</strong>vait servir <strong>de</strong> pâture aux jeunes<br />
salamandres après leur sortie <strong>de</strong> l'œuf; il ne se dissimule du reste pas qu'il est en<br />
contradiction avec les auteurs qui ont étudié les mœurs <strong>de</strong> la salamandre, et qui l'ont<br />
reconnue être ovovivipare.<br />
A l'appui <strong>de</strong> son observation, M. <strong>de</strong> Premorel [sic] nous a transmis l'animal qu'il a<br />
vu frayant; c'est bien la salamandre maculée ou terrestre ou vulgaire.<br />
En, présence d'une contradiction aussi frappante, nous <strong>de</strong>vons laisser <strong>à</strong> notre<br />
collègue toute la responsabilité <strong>de</strong> son observation. Pourrait-on, pour concilier les<br />
<strong>de</strong>ux opinions, admettre qu'exceptionnellement la salamandre se débarrasserait <strong>de</strong><br />
ses œufs avant le terme <strong>de</strong> sa gestion? »<br />
Dans sa « Bibliographie luxembourgeoise », Martin Blum a attribué <strong>à</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> une<br />
troisième note, insérée dans le même bulletin <strong>de</strong> 1855, et qu'il a intitulée « Nouvel<br />
appareil pour la chasse <strong>de</strong>s microlépidoptères »; en fait, elle n'a rien <strong>à</strong> voir avec <strong>de</strong><br />
<strong>Prémorel</strong>; elle émanait <strong>de</strong> la plume d'Auguste Dutreux, lépidoptériste chevronné. 31<br />
Il en va autrement du « Rapport sur le terrain minier <strong>de</strong> Differdange » 32 publié dans le<br />
même tome et qui est bien signé par <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong>: 33 « Ce territoire », écrit-il, « contient 1°<br />
du schiste bitumineux, 2° du minerai <strong>de</strong> fer oolithique, 3° du minerai <strong>de</strong> fer d'alluvion, 4°<br />
<strong>de</strong> la pierre <strong>de</strong> taille (calcaire oolithique coquillier), 5° <strong>de</strong>s bancs <strong>de</strong> calcaire<br />
polypier », l'exploitation du schiste bitumineux, du minerai <strong>de</strong> fer oolithique et <strong>de</strong> la<br />
pierre <strong>de</strong> taille remontant <strong>à</strong> une époque fort reculée, alors que celle du minerai d'alluvion<br />
et <strong>de</strong> calcaire polypier serait beaucoup plus récente.<br />
Début <strong>de</strong>s recherches sur l'utilisation <strong>de</strong>s schistes bitumineux<br />
On imagine bien l'intérêt que <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> porte aux gisements <strong>de</strong> minerai <strong>de</strong> fer<br />
d'alluvion puisqu'il exploite ce minerai dans son lavoir. Mais, il accor<strong>de</strong> aussi, et cela<br />
<strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s années, une attention toute spéciale au schiste bitumineux.<br />
Alors qu'<strong>à</strong> Aubange, village belge situé <strong>à</strong> une bonne dizaine <strong>de</strong> kilomètres <strong>de</strong><br />
Differdange, un certain Orianne d'Arlon s'évertuait au début <strong>de</strong>s années 1840 34 <strong>à</strong> distiller<br />
du schiste bitumineux pour obtenir <strong>de</strong> l'huile minérale, qu'il n'arrivait pas <strong>à</strong><br />
commercialiser <strong>à</strong> cause <strong>de</strong> son o<strong>de</strong>ur pénétrante 35 , <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong>, lui, préférait développer<br />
31 Blum 1981: 281.<br />
32 Dans son rapport sur les travaux <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong>s sciences naturelles <strong>de</strong>puis le 1er juillet 1854 au 1er juin<br />
1855, le secrétaire Auguste Dutreux a relevé la remise <strong>de</strong> cet essai <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong>, «qui a profité avec<br />
bonheur du siège <strong>de</strong> son habitation au milieu <strong>de</strong>s terrains oolithiques, pour consigner les résultats <strong>de</strong> ses<br />
observations sur les précieux gisements qui entourent Differdange.» (Dutreux 1855a: 7.) Dans le même<br />
rapport, il cite parmi les collections appartenant aux membres <strong>de</strong> la société celle <strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> qui «a eu le<br />
bonheur <strong>de</strong> réunir dans son cabinet grand nombre <strong>de</strong> fossiles <strong>de</strong>s plus intéressants, provenant <strong>de</strong>s environs<br />
<strong>de</strong> sa campagne» (Dutreux 1855a: 11).<br />
33 <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> 1855.<br />
34 En 1840, d'après les uns (http://www.<strong>de</strong>putefourny.be/documents/exploitpetr.pdf ,<br />
http://parlement.wallonie.be/content/print_container.php?print=quest_rep_voir.php&id_doc=25803&type=<br />
28), en 1844, selon <strong>Massard</strong> (1985) qui ne retrouve plus la référence y relative.<br />
35 Wies 1877: 96.; cf. Faber 1915: 158s.<br />
6
<strong>de</strong> nouvelles métho<strong>de</strong>s pour valoriser le schiste bitumineux dans d'autres domaines, et il a<br />
même déposé une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> en vue <strong>de</strong> l'obtention d'un brevet y relatif. Cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> a<br />
été acceptée, et par arrêté du 10 février 1846, № 304, « Sa Majesté le Roi Grand-Duc a<br />
daigné accor<strong>de</strong>r au sieur <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong>, <strong>de</strong> Differdange, un brevet d'invention <strong>de</strong> quinze<br />
années pour une nouvelle manière <strong>de</strong> brûler les schistes et <strong>de</strong> les broyer. » 36<br />
Le 9 janvier 1848 <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> a présenté <strong>à</strong> l'assemblée générale <strong>de</strong> la Société agricole du<br />
Grand-Duché un rapport sur l'utilisation agricole du schiste bitumineux, « un puissant<br />
moyen d'amélioration <strong>de</strong> la terre employé jadis et oublié ou négligé <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s siècles ».<br />
« À une époque reculée et <strong>à</strong> laquelle il est impossible d'assigner une date, »<br />
explique-t-il <strong>à</strong> son auditoire, « il s'est fait dans notre pays une gran<strong>de</strong><br />
consommation d'engrais minéral. La preuve en est dans les nombreuses et<br />
considérables excavations que l'on reconnaît sur une infinité <strong>de</strong> points du territoire<br />
du Grand-Duché. Plusieurs <strong>de</strong> ces excavations sont si anciennes, qu'il faut mettre<br />
une gran<strong>de</strong> attention pour les reconnaître: tout leur pourtour est abaissé par l'effet<br />
du temps et <strong>de</strong>s cultures successives.<br />
Vous prévoyez, Messieurs, qu'il est ici question <strong>de</strong> l'emploi <strong>de</strong>s marnes en général;<br />
mais parmi ces marnes il en est une, qui par sa composition exceptionnelle, mérite<br />
particulièrement <strong>de</strong> fixer voire attention.<br />
Je veux parler <strong>de</strong> la marne bitumineuse, <strong>à</strong> laquelle nous donnerons son nom<br />
véritable <strong>de</strong> schiste bitumineux.<br />
Les qualités <strong>de</strong> cet engrais ont été appréciées par nos <strong>de</strong>vanciers, puisqu'en<br />
plusieurs endroits il a été exploité en gran<strong>de</strong> quantité. Je ne dirai rien ici <strong>de</strong>s<br />
marnes, dont le principal mérite est <strong>de</strong> contenir du calcaire (…). Le schiste<br />
bitumineux se trouve sur certains points du Grand-Duché en quantité incalculable,<br />
et je n'hésite pas <strong>à</strong> vous affirmer, Messieurs, que nous possédons en ce minéral un<br />
engrais précieux.<br />
D'après M. Van Kerkhoff ce minéral contient: 37<br />
a. <strong>de</strong> la chaux,<br />
b. du sulfate <strong>de</strong> chaux,<br />
c. du carbonate <strong>de</strong> chaux,<br />
d. du carbonate ferreux,<br />
e. <strong>de</strong> la magnésie,<br />
f. du bitume, du carbone et <strong>de</strong> l'azote.<br />
Je ne fais pas mention ici <strong>de</strong>s quantités, car elles varient selon le lieu d'où l'on retire<br />
le minéral.<br />
36 Mémorial législatif et administratif du Grand-Duché <strong>de</strong> Luxembourg 1846, p. 304.<br />
37 D'autres analyses seront publiées au cours <strong>de</strong>s années suivantes; <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> lui-même a publié en 1855<br />
le résultat <strong>de</strong> l'analyse d'un échantillon <strong>de</strong> schiste bitumineux pris <strong>à</strong> Differdange, au lieu dit « Fuusbann » (il<br />
écrit: Fousband), analyse faite, selon sa formulation, <strong>à</strong> «l'école impériale <strong>de</strong>s mines» <strong>de</strong> Paris (<strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong><br />
1855: 197):<br />
1° Quartz et argile inattaquable aux aci<strong>de</strong>s 0,484<br />
2° Argile attaquable 0,106<br />
3° Protoxi<strong>de</strong> <strong>de</strong> fer 0,106<br />
4° Chaux 0,074<br />
5° Eau, aci<strong>de</strong> carbonique, bitume 0,230<br />
Total 1,000<br />
Des analyses encore plus poussées ont été réalisées par P.J. van Kerckhoff (van Kerckhoff 1855: 103-107).<br />
7
Toutes les substances que je viens d'énumérer et qui entrent pour moitié environ<br />
dans la composition du schiste, proviennent <strong>de</strong> la décomposition <strong>de</strong> poissons et <strong>de</strong><br />
coquillages marins, ainsi que <strong>de</strong>s débris animaux et végétaux que les eaux<br />
entraînent dans le fond <strong>de</strong>s mers.<br />
Les schistes se calcinent facilement par leur propre carbone, sans emploi d'autre<br />
combustible; ils acquièrent alors une quantité notable <strong>de</strong> plâtre, par la combinaison<br />
qui se fait entre l'aci<strong>de</strong> sulfurique et la chaux.<br />
Les schistes bitumineux se trouvent dans la partie supérieure du terrain liasique; je<br />
suis certain qu'au moyen <strong>de</strong> sondages superficiels, on le trouverait encore en<br />
beaucoup d'endroits <strong>à</strong> la profon<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> quelques pieds seulement. » 38<br />
L'orateur s'efforce ensuite <strong>de</strong> rendre compte <strong>à</strong> la Société du résultat <strong>de</strong>s expériences<br />
auxquelles il s'est livré:<br />
« Les schistes [bitumineux] ont sur les marnes l'avantage <strong>de</strong> perdre leur cohésion<br />
par la calcination et <strong>de</strong> pouvoir alors s'employer <strong>à</strong> l'amen<strong>de</strong>ment <strong>de</strong>s terres fortes,<br />
tandis que dans leur état naturel cette cohésion est une qualité, lorsqu'il est question<br />
<strong>de</strong> fertiliser par leur moyen les terres légères sablonneuses.<br />
Lorsqu'ils sont brûlés et moulus ils fournissent un produit semblable <strong>à</strong> <strong>de</strong> la cendre.<br />
Cette poussière très-fine convient alors [pour] les plantes fourragères. Semée au<br />
printemps sur les jeunes feuilles, elle s'y attache et s'y dissout facilement; dans ce<br />
cas elle remplace avantageusement le plâtre et a encore le mérite <strong>de</strong> coûter moins<br />
cher. Je me suis assuré <strong>de</strong> ce fait par plusieurs années d'expérience.<br />
Un excellent moyen <strong>de</strong> fécon<strong>de</strong>r les terres par l'addition du schiste est <strong>de</strong> le<br />
répandre sur les jeunes plantes fourragères avant les gelées. Je me suis parfaitement<br />
trouvé <strong>de</strong> le mettre sur les jeunes trèfles <strong>de</strong> l'année. — Six voitures suffisent par<br />
journal. Après la récolte du trèfle, qui est alors <strong>à</strong> peu près assurée, la terre reste<br />
couverte d'une partie du schiste non-divisé, et par ce moyen les grains reçoivent un<br />
engrais, en même temps qu'ils profitent <strong>de</strong> la bonne préparation que leur donne<br />
toujours un trèfle bien réussi.<br />
Depuis plusieurs années je poursuis une expérience qui sera décisive; mon but<br />
serait <strong>de</strong> parvenir <strong>à</strong> remplacer les engrais animaux par le schiste; <strong>à</strong> cet effet je ne<br />
donne pour tout engrais que ce minéral <strong>à</strong> l'un <strong>de</strong> mes champs, soit en le répandant<br />
sur les jeunes trèfles, soit en le donnant <strong>à</strong> la terre lors <strong>de</strong>s jachères. Les récoltes <strong>de</strong><br />
ce champ se soutiennent bien comparativement <strong>à</strong> ceux qui sont traités <strong>de</strong> la manière<br />
ordinaire.<br />
J'ai fait répandre du schiste sur les prairies naturelles et j'ai acquis la conviction, que<br />
ce minéral leur convient en les améliorant sensiblement, surtout aux prairies sèches;<br />
cela est d'autant plus intéressant qu'en général ces prairies sont d'un faible rapport,<br />
attendu qu'elles ne reçoivent jamais aucun engrais; il n'en est pas <strong>de</strong> même <strong>de</strong> celles<br />
qui sont trop humi<strong>de</strong>s, car au moyen <strong>de</strong> travaux d'assainissement on peut presque<br />
toujours les améliorer. Le schiste agit sur les prairies en détruisant la mousse et en<br />
favorisant la croissance <strong>de</strong>s trèfles el <strong>de</strong>s plantes qui donnent un foin <strong>de</strong> bonne<br />
qualité. Il faut toutefois se gar<strong>de</strong>r <strong>de</strong> répandre une trop gran<strong>de</strong> quantité <strong>de</strong> ce<br />
minéral sur les prairies, il détruirait passagèrement la végétation; quinze mètres<br />
cubes suffisent pour amen<strong>de</strong>r un hectare <strong>de</strong> prairie.<br />
38 Courrier 1852b.<br />
8
Le schiste paraît avoir <strong>de</strong>s propriétés qui ne se révéleront qu'avec le temps,<br />
Monsieur Wellenstein 39 <strong>de</strong> Dreiborn, auquel j'en ai procuré, en a fait déposer au<br />
pied <strong>de</strong> quelques ceps <strong>de</strong> vigne et il paraît que cet engrais leur a communiqué une<br />
gran<strong>de</strong> force <strong>de</strong> végétation. Notre digne vice-prési<strong>de</strong>nt 40 pourra appuyer cette<br />
assertion par son témoignage.<br />
J'ai aussi la conviction que placé au pied <strong>de</strong>s arbres fruitiers, il leur sera aussi<br />
efficace qu'il l'a été pour les vignes.<br />
Les propriétés fécondantes <strong>de</strong> la matière qui nous occupe sont appréciées <strong>de</strong>puis<br />
plus <strong>de</strong> 50 ans dans les environs <strong>de</strong> Stenay; le bon effet <strong>de</strong> ce minéral y a été révélé<br />
d'une manière assez singulière et qui prouve que nous ne sommes pas les seuls <strong>à</strong><br />
reconnaître ses qualités.<br />
C'est dans les communes <strong>de</strong> Flize, d'Emblimont et autres circonvoisines que ce<br />
minéral est abordable. Les habitants <strong>de</strong> ces communes disent hautement qu'ils lui<br />
doivent leur fortune; les cultivateurs viennent <strong>de</strong> plusieurs lieues <strong>à</strong> la ron<strong>de</strong><br />
chercher du schiste calciné et naturel et l'emportent par centaines <strong>de</strong> voitures.<br />
Par ce qui précè<strong>de</strong>, je me crois donc fondé <strong>de</strong> vous recomman<strong>de</strong>r, messieurs, un<br />
produit <strong>de</strong> notre pays si longtemps employé et oublié <strong>de</strong>puis tant d'années. »<br />
À la fin <strong>de</strong> son exposé, <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> informe ses collègues que le produit connu dans le<br />
département <strong>de</strong>s Ar<strong>de</strong>nnes sous le nom <strong>de</strong> « cendres <strong>de</strong> Flize » n'est rien d'autre que <strong>de</strong>s<br />
schistes [bitumineux] brûlés et broyés, comme il a pu le constater lui-même après s'être<br />
rendu sur place. Et dans la foulée, il propose d'envoyer aux frais <strong>de</strong> la société agricole une<br />
commission <strong>à</strong> Flize et environs, afin d'y recueillir tous les renseignements désirables sur<br />
l'emploi et les effets d'une substance qui y est expérimentée <strong>de</strong>puis un grand nombre<br />
d'années. 41<br />
L'exploitation antique <strong>de</strong>s schistes bitumineux<br />
Les recherches archéologiques que <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> mène 42 parallèlement <strong>à</strong> ses<br />
préoccupations agricoles et autres l'amèneront <strong>à</strong> penser que les Celtes se sont déj<strong>à</strong> servi<br />
du schiste bitumineux comme combustible dans leurs forges catalanes, dont la présence<br />
dans la région <strong>de</strong> Differdange était trahie par les morceaux <strong>de</strong> scories anciennes y<br />
trouvées. Ces forges, écrit-il, dans sa lettre du 5 février 1850 au prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Société<br />
archéologique, méritent <strong>de</strong> fixer l'attention par l'emploi qu'elles paraissent avoir fait du<br />
schiste bitumineux comme combustible. Il y relate qu'en parcourant le territoire <strong>de</strong><br />
communes du Sud il aurait été surpris <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong> nombreuses excavations du sol où le<br />
schiste se montrait presque <strong>à</strong> fleur <strong>de</strong> terre, et que sur le pourtour il aurait découvert <strong>de</strong>s<br />
scories <strong>de</strong> forges et <strong>de</strong>s parcelles <strong>de</strong> minerai <strong>de</strong> fer qui seraient <strong>à</strong> mettre en rapport avec<br />
<strong>de</strong>s installation métallurgiques remontant probablement <strong>à</strong> l'époque <strong>de</strong>s Celtes.<br />
39 Jean Mathias Wellenstein (*Ehnen 24.3.1795, † 1.12.1870), jurisconsulte, magistrat, homme d'Etat; après<br />
sa retraite <strong>de</strong> la législature, il s'est retiré dans sa propriété <strong>de</strong> Dreiborn pour s'y occuper d'agriculture et <strong>de</strong><br />
viticulture; frère <strong>de</strong> Nicolas Wellenstein (voir ci-<strong>de</strong>ssous). — Dans une lettre insérée dans le 39e bulletin <strong>de</strong><br />
la Société agricole, Wellenstein a témoigné <strong>de</strong> l'excellent effet produit par le schiste sur la végétation <strong>de</strong> la<br />
vigne (Anonyme / <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> 1853).<br />
40 Nicolas Wellenstein, vice-prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Société agricole (Courrier 1846), né <strong>à</strong> Ehnen le 5 mars 1783 et<br />
y décédé le 5 août 1858 (Mersch 1965: 162ss).<br />
41 Courrier 1852c.<br />
42 Voir <strong>à</strong> ce sujet: Logelin-Simon 1997: 538-545.<br />
9
Dans une autre lettre, 43 adressée au professeur Antoine Namur, secrétaire <strong>de</strong> la Société<br />
archéologique, <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong>, reste toujours persuadé que les excavations dans les couches<br />
schisteuses étaient dues aux Celtes. Mais, puisqu'on a découvert <strong>de</strong>s excavations près<br />
<strong>de</strong>squelles il ne se trouve aucune scorie, il n'exclut pas que les Celtes auraient utilisé les<br />
schistes bitumineux aussi pour l'amen<strong>de</strong>ment <strong>de</strong>s terres 44 .<br />
A la tribune <strong>de</strong> la Société géologique <strong>de</strong> France<br />
Dans le résumé <strong>de</strong> l'activité <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong>s sciences naturelles publié dans le bulletin<br />
paru en 1854, le secrétaire Auguste Dutreux mentionne trois notices sur l'emploi du<br />
schiste bitumineux que la société a reçues <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong>, sans préciser quand cela<br />
s'est passé. 45 Il est <strong>à</strong> supposer que ces notices correspon<strong>de</strong>nt aux «communications» qui<br />
ont déj<strong>à</strong> été résumées (probablement par le secrétaire) dans le bulletin paru en 1853 sous<br />
le titre « Note sur l'emploi du schiste comme combustible »: 46<br />
« Après une suite d'expériences dont M. <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> rend compte dans plusieurs<br />
communications <strong>à</strong> la société, il est parvenu <strong>à</strong> brûler, dans un fourneau <strong>de</strong> dimension<br />
ordinaire, le schiste bitumineux <strong>de</strong> Differdange. La température <strong>de</strong> l'appartement,<br />
dans lequel a eu lieu l'épreuve, a subi une élévation sensible après une heure <strong>de</strong><br />
chauffage, et <strong>de</strong> l'eau, exposée <strong>à</strong> l'action du foyer, est entrée en ébullition. Ces<br />
résultats portent M. <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> <strong>à</strong> manifester l'espoir que l'on pourra utiliser le<br />
schiste au chauffage <strong>de</strong>s appartements et <strong>à</strong> la cuisson <strong>de</strong>s légumes; il pense aussi<br />
que l'industrie pourra s'emparer <strong>de</strong> ce nouveau combustible dont le prix est presque<br />
nul, attendu la quantité incalculable qui en existe, et le peu <strong>de</strong> frais que <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />
son extraction.<br />
M. <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> engage la société <strong>à</strong> rechercher si du schiste, pris ailleurs et <strong>à</strong><br />
différentes profon<strong>de</strong>urs, ne contiendrait pas plus <strong>de</strong> principes combustibles que<br />
celui extrait <strong>à</strong> Differdange. Il pense aussi que l'on pourrait utiliser les gaz qui<br />
s'échappent pendant la combustion du schiste.<br />
M. <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> avait déj<strong>à</strong> étudié le schiste sous le rapport <strong>de</strong> ses qualités<br />
fertilisantes; il a fait <strong>à</strong> ce sujet une communication <strong>à</strong> la société d'agriculture du<br />
Grand-Duché. M. Wellenstein 47 <strong>de</strong> Dreiborn a fait connaître, par une lettre insérée<br />
dans le 39e bulletin <strong>de</strong> cette société 48 , l'excellent effet que produit le schiste sur la<br />
végétation <strong>de</strong> la vigne.<br />
Dans les environs <strong>de</strong> Sedan, l'usage du schiste naturel et brûlé est apprécié <strong>de</strong>puis<br />
plus <strong>de</strong> 40 ans; brûlé, il fait, sous le nom <strong>de</strong> cendres <strong>de</strong> Flize, l'objet d'un commerce<br />
assez étendu.<br />
43<br />
Voir: Goe<strong>de</strong>rt 1987: 212s.<br />
44<br />
De <strong>Prémorel</strong> avait déj<strong>à</strong> envisagée cette hypothèse en 1849, mais a ensuite favorisé l'idée <strong>de</strong> l'utilisation<br />
du schiste bitumineux comme combustible dans les fours catalans. Il a consigné ses idées dans un rapport<br />
<strong>de</strong>stiné <strong>à</strong> la Société archéologique : Rapport sur les débris <strong>de</strong> forges catalanes, découverts dans les<br />
environs <strong>de</strong> Differdange. Ce rapport n'a pas été publié par la Société archéolgique; <strong>de</strong>s extraits en ont été<br />
néanmoins cités par G. München dans son «Rapport sur un diverticulum romain passant <strong>de</strong> Kaap par<br />
Gasperich vers le Titelberg, découvert en 1849 » (Publications <strong>de</strong> la Société pour la recherche et la<br />
conservation <strong>de</strong>s monuments historiques dans le Grand-Duché <strong>de</strong> Luxembourg, 5, 1850, p. 91, cité par<br />
Logelin-Simon 1997: 540).<br />
45<br />
Anonyme 1854: 13<br />
46<br />
Anonyme / <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> 1853.<br />
47<br />
Jean-Mathias Wellenstein (voir plus haut).<br />
48<br />
Bulletin <strong>de</strong>s Ackerbauvereins <strong>de</strong>s Großherzogthums Luxemburg, 3. Jhg. (1850/51) (?).<br />
10
Toutes les communes qui avoisinent les endroits d'où l'on extrait le schiste, lui<br />
doivent un accroissement considérable <strong>de</strong> leurs produits agricoles. »<br />
Cette note faisait un peu figure <strong>de</strong> moutar<strong>de</strong> après dîner étant donné qu'en 1852 déj<strong>à</strong>, <strong>de</strong><br />
<strong>Prémorel</strong> a eu l'occasion d'exposer <strong>de</strong>vant un public averti ses idées sur les possibilités<br />
d'utilisation actuelle du schiste bitumineux. Cela s'est passé lors <strong>de</strong> l'assemblée<br />
extraordinaire <strong>de</strong> la « Société géologique <strong>de</strong> France » qui s'est déroulée <strong>à</strong> Metz du 5 au 17<br />
septembre 1852, où, le premier jour, sa note « Sur l'emploi comme combustible <strong>de</strong>s<br />
schistes bitumineux du lias <strong>de</strong> Differdange » a été lue <strong>à</strong> la tribune <strong>de</strong> l'assemblée où elle<br />
avait donné lieu <strong>à</strong> une brève discussion. 49<br />
En voici le texte intégral (qui a été publié encore vers la fin <strong>de</strong> la même année dans le<br />
bulletin <strong>de</strong> la Société géologique <strong>de</strong> France paru <strong>à</strong> Paris en 1852):<br />
« J'ai cherché, en plusieurs circonstances, <strong>à</strong> utiliser les schistes ou marnes<br />
bitumineuses, qui viennent affleurer notre sol et qui possè<strong>de</strong>nt une assez gran<strong>de</strong><br />
puissance en étendue, et par conséquent présentent une facile extraction; riches en<br />
principes carbonés, elles avaient été exploitées <strong>à</strong> Aubange pour l'extraction du<br />
pétrole qu'elles renferment. Mes recherches et mes nombreuses expériences m'ont<br />
démontré que ces marnes peuvent, avec avantage, être exploitées dans trois<br />
circonstances:<br />
1° Comme engrais, les marnes conviennent dans les terrains sablonneux et qui<br />
renferment peu <strong>de</strong> calcaire; lorsqu'elles ont été brulées, elles activent la végétation<br />
d'une manière très énergique et elles trouvent leur emploi sur tous les terrains.<br />
2° Pour les vignes et les arbres fruitiers, je les ai employées et en ai obtenu <strong>de</strong>s<br />
succès remarquables, succès qui ont été l'objet d'un rapport spécial au sein <strong>de</strong> la<br />
Société d'encouragement <strong>de</strong> Luxembourg 50 , et qui ont été mentionnés dans le<br />
journal du grand-duché; les marnes, dans cette circonstance, agissent en absorbant<br />
les rayons calorifiques, <strong>de</strong> manière <strong>à</strong> élever autour <strong>de</strong>s ceps une température<br />
presque double <strong>de</strong> celle ambiante.<br />
3° Comme combustible, les marnes trouvent leur emploi pour l'usage domestique et<br />
pour quelques industries; brulées avec le bois, elles activent la combustion et<br />
produisent beaucoup <strong>de</strong> chaleur; sans autre intermè<strong>de</strong>, elles peuvent servir <strong>à</strong> la<br />
préparation <strong>de</strong> la chaux, <strong>à</strong> la cuisson <strong>de</strong>s briques, et pour les hauts fourneaux. »<br />
La lecture <strong>de</strong> la note <strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> a été suivie par une « Note sur le terrain liasique du<br />
Luxembourg » dont l'auteur était J.-B. Poncelet, ingénieur ordinaire <strong>de</strong>s mines dans la<br />
province <strong>de</strong> Luxembourg. Au sujet <strong>de</strong>s schistes bitumineux, il y a relevé leur richesse en<br />
matières bitumineuses et sulfureuses et que <strong>de</strong> ce fait on les exploite beaucoup pour<br />
amen<strong>de</strong>r les terres après les avoir brûlés. Puis il continue: « Ayant été chargé par le<br />
gouvernement belge <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s expériences pour les transformer en engrais minéral<br />
fertilisant, je suis parvenu <strong>à</strong> en développer la puissance calorifique jusqu'au point <strong>de</strong> faire<br />
servir la marne bitumineuse comme combustible pour la fabrication en grand <strong>de</strong> la<br />
chaux. » 51<br />
49<br />
<strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> 1852.<br />
50<br />
S'agit-il <strong>de</strong> la Société agricole que <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> nomme ainsi pour mieux se faire comprendre par son<br />
auditoire français?<br />
51<br />
Poncelet 1852. — Poncelet qui a terminé sa carrière comme ingénieur principal <strong>de</strong>s mines, est né <strong>à</strong> Haut-<br />
Fays (province <strong>de</strong> Luxembourg) le 8 août 1805 (Blum 1981: 277).<br />
11
L'échec malgré <strong>de</strong>s supports nombreux<br />
A. <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> n'a donc pas été le seul dans la lutte pour l'utilisation du schiste<br />
bitumineux. Le public luxembourgeois avait d'ailleurs déj<strong>à</strong> pu prendre connaissance <strong>de</strong>s<br />
travaux <strong>de</strong> Poncelet grâce <strong>à</strong> l'article suivant sur l'« Emploi <strong>de</strong> la cendre <strong>de</strong> marne<br />
bitumineuse dans le Luxembourg belge » paru en 1852 dans le Courrier du Grand-Duché<br />
<strong>de</strong> Luxembourg: 52<br />
« L'attention du gouvernement [belge] ayant été attirée sur l'utilité qu'il pourrait y<br />
avoir <strong>de</strong> favoriser, dans la province du Luxembourg, l'emploi <strong>de</strong> la cendre <strong>de</strong> marne<br />
bitumineuse, le ministre <strong>de</strong> l'intérieur a chargé M. Poncelet, ingénieur <strong>de</strong>s mines<br />
dans cette province, <strong>de</strong> se livrer <strong>à</strong> <strong>de</strong>s expériences sur le meilleur mo<strong>de</strong> <strong>à</strong> suivre<br />
pour préparer cette cendre et sur les effets qu'elle produit sur ce sol. Une<br />
commission composée d'agronomes a constaté les résultats obtenus par l'usage <strong>de</strong><br />
cet engrais.<br />
Le Moniteur contient un rapport <strong>de</strong> M. Poncelet et un rapport <strong>de</strong> la commission; <strong>de</strong><br />
ces <strong>de</strong>ux rapports ressortent les avantages qu'aurait pour la culture l'emploi <strong>de</strong> cette<br />
cendre, et constatent qu'en ajoutant les frais d'extraction, <strong>de</strong> préparation et <strong>de</strong><br />
transport, cet engrais reviendrait, au dépôt <strong>de</strong> Neufchâteau <strong>à</strong> 11 fr. 50 c. le mètre<br />
cube.<br />
La commission engage donc le gouvernement <strong>à</strong> accor<strong>de</strong>r le crédit nécessaire pour<br />
l'exploitation, et elle <strong>de</strong>man<strong>de</strong> indépendamment l'allocation d'une somme <strong>de</strong> 500 fr.,<br />
afin <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s essais pour brûler la marne qui se trouve dans les environs <strong>de</strong><br />
Chiny et <strong>de</strong> Rossignol; ces <strong>de</strong>ux localités sont assez rapprochées <strong>de</strong> l'Ar<strong>de</strong>nne, pour<br />
croire que, si l'expérience était couronnée <strong>de</strong> succès, l'usage <strong>de</strong> la cendre <strong>de</strong> marne<br />
se propagerait immédiatement, <strong>à</strong> raison du prix peu élevé auquel elle pourrait être<br />
livrée: l'intervention du gouvernement ne serait alors nécessaire que pour<br />
l'établissement et la direction <strong>de</strong>s travaux d'exploitation. »<br />
En conclusion <strong>de</strong> son analyse chimique du schiste bitumineux <strong>de</strong> Differdange publiée en<br />
1855, van Kerckhoff estimait « qu'il n'y a aucun doute que cette substance ne puisse être<br />
employée avec avantage comme amen<strong>de</strong>ment soit <strong>à</strong> l'état naturel, soit <strong>à</strong> l'état calciné, et<br />
qu'elle n'offre sous le premier état un engrais naturel, mais il est tout aussi évi<strong>de</strong>nt que<br />
l'emploi qu'on pourra en faire, sera subordonné <strong>à</strong> la nature du terrain qu'on désire<br />
améliorer. » 53<br />
Dans un article sur les richesses minérales du Grand-Duché publié en 1857, le<br />
pharmacien Frédéric Fischer junior, le <strong>propriétaire</strong> <strong>de</strong> la Pharmacie du Cygne <strong>à</strong><br />
Luxembourg-Ville, a fait, dans une orthographe irritante, un plaidoyer engagé en faveur<br />
du schiste bitumineux:<br />
« An<strong>de</strong>re Län<strong>de</strong>r wuszten aus diesem Rohstoff Nutzen zu ziehen, zum Bessern <strong>de</strong>r<br />
Aecker, zur Produktion von Brennoelen, Schmieroelen, Asphalt, Paraphin.<br />
52 Courrier 1852a.<br />
53 van Kerckhoff 1855: 107. Cet auteur range les matières les plus actives par rapport <strong>à</strong> leur influence sur le<br />
sol dans l'ordre suivant: pour le schiste naturel: 1° carbonate <strong>de</strong> chaux, 2° argile, 3° sulfate <strong>de</strong> chaux, 4°<br />
azote, 5° bitume; pour le schiste calciné: 1° sulfate <strong>de</strong> chaux, 2° argile, 3° carbonate <strong>de</strong> chaux en quantité<br />
variable.<br />
12
Bisher wur<strong>de</strong>n bei uns noch keine ernste Versuche zu ihrer Anwendung gemacht;<br />
be<strong>de</strong>nkt man aber, dasz diese Schiefer oft bis zu 25% [?] Brennstoff enthalten, dasz<br />
sie am Licht angezün<strong>de</strong>t fortbrennen, dasz selbe sich in anhalten<strong>de</strong>n Schichten von<br />
mehreren Fusz Dicke, welche viele Quadratstun<strong>de</strong>n be<strong>de</strong>cken, vorfin<strong>de</strong>n, so<br />
verdient dieser Gegenstand gewisz die gröszte Aufmerksamkeit. Wüszte man<br />
diesen Brennstoff wohlfeil zu trennen, seine Heizkraft in <strong>de</strong>n Industrien<br />
anzuwen<strong>de</strong>n, so wäre unser Land reich, und es hätte keines frem<strong>de</strong>n<br />
Brennmaterials, <strong>de</strong>r Steinkohlen, nöthig. » 54<br />
Mais, en dépit <strong>de</strong> ces efforts et <strong>de</strong> ces propos enflammés, le schiste bitumineux a fait long<br />
feu — si l'on ose dire — comme combustible et comme engrais. Dans le « Rapport<br />
général <strong>de</strong> la Chambre <strong>de</strong> Commerce du 28 octobre 1862 sur la situation du commerce et<br />
<strong>de</strong> l'industrie dans le Grand-Duché <strong>de</strong> Luxembourg » 55 , il est bien fait mention <strong>de</strong>s<br />
potentialités économiques du schiste bitumineux, mais dans un tout autre domaine. On y<br />
lit en effet: « Sur beaucoup <strong>de</strong> points du pays on trouve <strong>de</strong>s dépôts <strong>de</strong> schistes<br />
bitumineux. Certains <strong>de</strong> ces dépôts donnent par la calcination dans <strong>de</strong>s fours spéciaux un<br />
excellent ciment, ce qui fait la base d'une industrie nouvelle. Le ciment fabriqué aux<br />
environs <strong>de</strong> Luxembourg a été employé, <strong>à</strong> l'exclusion <strong>de</strong> toute autre espèce, pour la<br />
construction <strong>de</strong> nos viaducs et s'est trouvé <strong>de</strong> qualités au moins égales <strong>à</strong> celles d'autres<br />
ciments dont les prix sont considérablement plus élevés ; il a ainsi fait ses preuves et nul<br />
doute que cette industrie n'ait <strong>de</strong> l'avenir. »<br />
<strong>Alphonse</strong> <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> a sans doute ressenti cette nouvelle orientation comme un désaveu.<br />
*<br />
La question <strong>de</strong>s schistes bitumineux un siècle après <strong>de</strong> <strong>Prémorel</strong> <strong>à</strong> la lumière <strong>de</strong>s<br />
travaux <strong>de</strong> Gustave Faber<br />
La question <strong>de</strong>s schistes bitumineux a continué <strong>à</strong> occuper les géologues et les chimistes<br />
du 20e siècle, parmi eux le professeur <strong>de</strong> chimie Gustave Faber, plus tard directeur <strong>de</strong><br />
l'école industrielle <strong>de</strong> Luxembourg (actuel Lycée <strong>de</strong> garçons), dont les recherches se sont<br />
étendues sur plusieurs décennies. L'une <strong>de</strong> ses premières publications a été l'article<br />
«Recherches sur le schiste bitumineux du Liasique supérieur» publié en 1915 par la<br />
Société <strong>de</strong>s Naturalistes luxembourgeois. La publication, en 1947, <strong>de</strong> son ouvrage <strong>de</strong> 170<br />
pages «Recherches en vue <strong>de</strong> la possibilité d'une exploitation industrielle du schiste<br />
bitumineux du Toarcien dans le Grand-Duché <strong>de</strong> Luxembourg» édité par le Service<br />
géologique <strong>de</strong> Luxembourg, a donné lieu <strong>à</strong> <strong>de</strong>s commentaires très flatteurs dans la presse,<br />
notamment dans les « Cahiers luxembourgeois » 56 et le « Tageblatt » 57 .<br />
L'article du « Tageblatt », paru en janvier 1948, sous le titre « Eine wissenschaftliche<br />
Neuerscheinung über unsere Oelschiefer » et signé M.L. (Michel Lucius), résume d'une<br />
54 Fischer 1857: 112s.<br />
55 Annexe au Mémorial 1862, IIe partie, p. 16. Voir aussi: Courrier du Grand-Duché <strong>de</strong> Luxembourg 1862,<br />
N° 281 (29 novembre): 3.<br />
56 Stumper 1948.<br />
57 Lucius 1948.<br />
13
manière claire et concise la question <strong>de</strong>s schistes bitumineux; il peut encore être lu <strong>de</strong> nos<br />
jours avec fruit:<br />
Je<strong>de</strong>m Beobachter fallen in <strong>de</strong>m tiefen Eisenbahneinschnitt östlich Nie<strong>de</strong>rkerschen<br />
die dünngeschieferten, tonigen Gesteine von grauer o<strong>de</strong>r braungrauer Farbe auf, die<br />
an Haufen von aufgeblätterten, grauen Papp<strong>de</strong>ckeln erinnern. Man trifft sie<br />
übrigens in <strong>de</strong>n Kantonen Esch und Kapellen in vielen Bo<strong>de</strong>nanschnitten und<br />
Gruben, wovon die ausge<strong>de</strong>hntesten zu <strong>de</strong>r Ziegelfabrik Bettemburg gehören. Nach<br />
<strong>de</strong>r Tiefe hin, wo <strong>de</strong>r Verwitterungseinfluß aufhört, ist das Gestein dunkelgrau bis<br />
schwarz, dicht gelagert, und von solch feinem und weichen Korn, daß es sich wie<br />
Holz schnei<strong>de</strong>n läßt. Die Brennbarkeit <strong>de</strong>s Gesteines ist seit langem bekannt.<br />
Papierdünne, aufgespaltete, trockene Stücke <strong>de</strong>s Gesteines brennen bereits an<br />
einem Zündholz mit gelber, russiger Flamme und mit charakteristischem<br />
Oelgeruch, wobei sehr grauer o<strong>de</strong>r rötlicher, gesteinsfester, erdiger Aschenbestand<br />
zurückbleibt.<br />
Die in diesem Gestein äußerst fein verteilte, brennbare Substanz wird generell als<br />
“Bitumen”, das Gestein daher als “bituminöser Schiefer”, weniger zutreffend auch<br />
als “Oelschiefer” bezeichnet. Das Bitumen ist eine organische Substanz, <strong>de</strong>ren<br />
Ursprung auf leben<strong>de</strong>s Protoplasma nie<strong>de</strong>rster Organismen zurückgeht, welche<br />
einst die Meere, in <strong>de</strong>nen <strong>de</strong>r Schiefer ursprünglich, als toniger Schlamm zur<br />
Ablagerung kam, bevölkerten und in welchen sie bei ihrem Absterben eingebettet<br />
wur<strong>de</strong>n.<br />
Solche wesensgleiche Gesteine wie unsere Oelschiefer bil<strong>de</strong>n das Muttergestein <strong>de</strong>r<br />
Erdöllagerstätten. Gelangt dieses Gestein nämlich in tiefere Lagen <strong>de</strong>r Erdrin<strong>de</strong>, wo<br />
es hohem Druck und gesteigerter Temperatur ausgesetzt wird, so verwan<strong>de</strong>lt sich<br />
die eingeschlossene organische Substanz in flüssige und gasförmige<br />
Kohlenwasserstoffe um, die wir als Erdöl bzw. als Erdgas bezeichnen. Bis zu<br />
diesem Stadium sind die bituminösen Schiefer unseres Gebietes noch nicht gelangt,<br />
son<strong>de</strong>rn befin<strong>de</strong>n sich in einem Zwischenstadium. Bitumen bil<strong>de</strong>t also ein<br />
Zwischenprodukt auf <strong>de</strong>m Wege zum wertvolleren Erdöl. Hier kann <strong>de</strong>r Mensch<br />
nun eingreifen und künstlich <strong>de</strong>n Umwandlungsprozeß zu En<strong>de</strong> führen, <strong>de</strong>n die<br />
Natur noch nicht vollen<strong>de</strong>t hat, in<strong>de</strong>m er durch die “<strong>de</strong>struktive Destillation” o<strong>de</strong>r<br />
das “Schwelen” bei Temperaturen von 200 bis 700 Grad das halbfertige Bitumen in<br />
fertige Kohlenwasserstoffe umwan<strong>de</strong>lt, die <strong>de</strong>m natürlichen Erdöl gleich sind.<br />
Solche Versuche reichen dann auch bei uns bis in die erste Hälfte <strong>de</strong>s vorigen<br />
Jahrhun<strong>de</strong>rts zurück, und sind mehrfach wie<strong>de</strong>rholt wor<strong>de</strong>n, haben aber zu keinem<br />
wirtschaftlich tragbaren Ergebnis geführt. Bei <strong>de</strong>r stetig sich entwickeln<strong>de</strong>n<br />
Technik ist es aber keineswegs von vorneherein ausgeschlossen, daß eine<br />
wirtschaftlich lohnen<strong>de</strong> Ausbeute nicht möglich wird. Grundlage aller weiterer<br />
Versuche bil<strong>de</strong>t prinzipiell die wissenschaftliche Erforschung unserer Oelschiefer<br />
und ihrer Oelprodukte. Hiermit befaßt sich nun eine Studie von Gustave Faber,<br />
Recherches en vue <strong>de</strong> la possibilité d'une exploitation industrielle du schiste<br />
bitumineux du Toarcien dans le Grand-Duché <strong>de</strong> Luxembourg, die als 7. Band <strong>de</strong>r<br />
“Veröffentlichungen <strong>de</strong>s geologischen Lan<strong>de</strong>saufnahmedienstes von Luxemburg"<br />
erschienen ist.<br />
Das Buch bringt die Ergebnisse zwanzigjähriger Erforschung unserer<br />
Oelschieferformation. Es ist also keine vom Zaune gebrochene Gelegenheitsschrift,<br />
son<strong>de</strong>rn eine Frucht zielbewußter, stiller Arbeit auf <strong>de</strong>m Terrain und im<br />
14
Laboratorium, getragen von <strong>de</strong>m selbstlosen Gedanken in <strong>de</strong>m heimatlichen Bo<strong>de</strong>n<br />
ein Ausgangsmaterial für die Gewinnung von Rohöl und ihrer Derivate<br />
nachzuweisen.<br />
Leuchtöl, Dieselöl, Benzin, Schmieröl wer<strong>de</strong>n einstweilen in je<strong>de</strong>r benötigten<br />
Menge aus <strong>de</strong>m Ausland eingeführt. Und doch erstrecken sich die bituminösen<br />
Schiefer in unserm Lan<strong>de</strong> bei 8 Meter mittlerer Mächtigkeit über ein Gebiet von ca.<br />
90 qkm, wovon 35 qkm im Tagebau abgebaut wer<strong>de</strong>n könnten und enthalten 45<br />
Millionen Tonnen Rohöl. Daraus könnten, neben an<strong>de</strong>rn Derivaten, 2,1 Millionen<br />
Tonnen Benzin gewonnen wer<strong>de</strong>n, was <strong>de</strong>m Hun<strong>de</strong>rtfachen unseres<br />
Jahresverbrauches von 1936 entspricht. Wür<strong>de</strong> das Rohöl <strong>de</strong>m "cracking"<br />
unterworfen, könnte die Benzinmenge noch erheblich gesteigert wer<strong>de</strong>n.<br />
Aus diesem weiten Gebiete unserer Oelschieferformation hat <strong>de</strong>r Verfasser mehrere<br />
hun<strong>de</strong>rte von Proben entnommen, welche die ganze bitumenführen<strong>de</strong><br />
Schichtenreihe in ihrer horizontalen und vertikalen Aus<strong>de</strong>hnung erfassen und <strong>de</strong>n<br />
prozentualen Gehalt an Rohöl festlegen. In einem Profil durch die senkrechte<br />
Mächtigkeit kann <strong>de</strong>r Gehalt zwischen 1,5 und 8,5 Prozent schwanken, das Mittel<br />
<strong>de</strong>r verschie<strong>de</strong>nen Profile, wovon je<strong>de</strong>s durch 17 bis 27, in etwa gleichen<br />
Abstän<strong>de</strong>n entnommenen Proben, untersucht wur<strong>de</strong>, liegt bei 4 und 5 Prozent<br />
Rohöl. Das Mittel aus 12 verschie<strong>de</strong>nen Profilen mit 197 Proben ergibt 4,12<br />
Prozent Oel. Der Gehalt an Rohöl für das ganze Gebiet liegt auch zwischen 4 und<br />
4,5 Gewichtsprozenten.<br />
Durch fraktionierte Destillation wur<strong>de</strong> dieses Rohöl in eine Reihe wertvoller<br />
Derivate, Leichtöle (Benzine), Mittelöle u. Schweröle, zerlegt. Außer<strong>de</strong>m konnte<br />
pro Tonne Schiefer, je nach <strong>de</strong>m angewandten Verfahren, 35 bis 70 cbm Gas von<br />
ca. 5200 Kalorien Heizwert gewonnen wer<strong>de</strong>n.<br />
Es ist nicht möglich hier auf das reiche Tatsachen- und Ziffernmaterial <strong>de</strong>s Buches<br />
ausführlich einzugehen; es kann nur gesagt wer<strong>de</strong>n, daß <strong>de</strong>r Gegenstand vom<br />
geologischen, chemischen, physikalischen und wirtschaftlichen Gesichtspunkt<br />
ausführlich betrachtet wird, wobei als Vergleichsobjekt stets die benachbarten<br />
Gebiete, Belgien, Frankreich, Deutschland, herangezogen wer<strong>de</strong>n.<br />
Ob die Schiefer in industriellem Umfang wirtschaftlich ausgebeutet wer<strong>de</strong>n<br />
können? Bei <strong>de</strong>n heutigen Verhältnissen, wo das Benzin bei relativ niedrigem<br />
Gestehungspreise hohe Zolleinnahmen einbringt, muß das einstweilen verneint<br />
wer<strong>de</strong>n. Aber einmal könnten die Verhältnisse sich auch so gestalten, daß wir auf<br />
unsere eigenen Hilfsquellen angewiesen sind. Dazu bleibt bei <strong>de</strong>n Fortschritten <strong>de</strong>r<br />
Industrie zur Ausbeutung <strong>de</strong>r Oelschiefer, die in an<strong>de</strong>rn Län<strong>de</strong>rn angestrebt wer<strong>de</strong>n,<br />
für uns auch die Möglichkeit verbilligter Ausbeutungsverfahren offen. Das letzte<br />
Wort ist hierin gewiß noch nicht gesprochen. Eine wissenschaftliche Arbeit ist wohl<br />
kaum je umsonst gemacht wor<strong>de</strong>n und <strong>de</strong>r Fortschritt beruht nicht auf <strong>de</strong>m Zufall<br />
o<strong>de</strong>r, <strong>de</strong>m glücklichen Einfall, son<strong>de</strong>rn auf <strong>de</strong>r gründlichen Forschung.<br />
Die vorliegen<strong>de</strong> Arbeit verdient je<strong>de</strong>nfalls alle Anerkennung. In einer Zeit, wo so<br />
viele oberflächliche Druckerzeugnisse unsere geistige Armut offenbaren, ist eine<br />
solche Studie, in welcher ein selbstloser Forscher sein Wissen und seine Zeit in <strong>de</strong>n<br />
Dienst <strong>de</strong>r Erforschung <strong>de</strong>s heimatlichen Bo<strong>de</strong>ns stellt, eine wirkliche Leistung. M.L.<br />
Mais, l<strong>à</strong> aussi, on sait que les travaux <strong>de</strong> Gustave Faber n'ont pas abouti <strong>à</strong> une<br />
exploitation <strong>de</strong>s schistes bitumineux du Grand-Duché. Ce qui n'empêche pas que <strong>de</strong>s<br />
15
projets en vue <strong>de</strong> cette exploitation refont surface avec une régularité quelque peu<br />
déconcertante, tantôt en vue <strong>de</strong> la production <strong>de</strong> pétrole 58 , tantôt pour en extraire du gaz<br />
<strong>de</strong> schiste 59 .<br />
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16
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18