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TÉMOIGNAGE DE SYLVAIN ROY<br />
« Il a eu ce qu’il<br />
méritait, il a couru<br />
après ». C’est ce que<br />
mes frères ont dit.<br />
Sylvain Roy a étudié en communication et en<br />
journalisme à l’Université de Moncton (Nouveau-<br />
Brunswick). Il a fait de la radio et de la télévision<br />
communautaires au Nouveau-Brunswick ainsi que du<br />
journalisme. Toutefois, il a souvent occupé une variété<br />
de postes dans <strong>le</strong> domaine du service à la clientè<strong>le</strong>, des<br />
centres d’appels en passant par l’hôtel<strong>le</strong>rie.<br />
Sylvain ne sait pas exactement comment il a été infecté.<br />
À l’automne 1998, il a été agressé sexuel<strong>le</strong>ment<br />
par son ex-amant. Il a alors perdu beaucoup de sang.<br />
À cause de cette attaque, il a été hospitalisé au Royal-<br />
Victoria, où il a reçu une transfusion d’urgence. « Je<br />
ne saurai jamais si c’est mon ex qui me l’a refilé [<strong>le</strong><br />
virus du VIH], si c’est lors de la transfusion de sang<br />
ou si c’est autrement. Cela reste un mystère, car on<br />
n’est sûr de rien. C’est après un premier test, avec la<br />
Cohorte Oméga, qu’on me l’a appris. Mais je l’ai<br />
su par un deuxième test de confirmation, à l’hiver<br />
1999 », indique Sylvain, qui s’est alors retrouvé sous<br />
<strong>le</strong> choc. « C’est comme si quelqu’un m’avait<br />
poignardé », dit-il. Dévasté par la nouvel<strong>le</strong>, il s’est<br />
rendu chez sa meil<strong>le</strong>ure amie pour être réconforté.<br />
Puis, petit à petit, il a réfléchi à sa nouvel<strong>le</strong> condition<br />
de séropositif. « Devenir séropositif, c’est la plus bel<strong>le</strong><br />
chose qui pouvait m’arriver, parce que ce fut un<br />
signal; cela m’a fait réaliser qu’il me fallait m’occuper<br />
de moi, qu’il me fallait prendre soin de moi, de ma<br />
santé. […] Pour certains, <strong>le</strong> VIH est un cadeau empoisonné,<br />
mais moi, je <strong>le</strong> vois comme un cadeau qui<br />
me dit de faire attention, de ne pas exagérer, de moins<br />
boire, de bien manger, etc. »<br />
Pour sa famil<strong>le</strong>, qui avait déjà<br />
eu de la difficulté à<br />
accepter son homosexualité,<br />
l’annonce de sa séropositivité<br />
a été encore plus dure à ava<strong>le</strong>r,<br />
surtout pour sa mère. Cela a<br />
créé des tensions, des frictions<br />
au sein du clan qui comprend<br />
quatre autres frères. « On a<br />
failli me renier, continue-t-il.<br />
La réaction en était une très<br />
judéo-chrétienne : “Il a eu ce<br />
qu’il méritait, il a couru<br />
après”. C’est ce que mes frères<br />
ont dit. » Pendant l’entrevue,<br />
Sylvain Roy fait une pause, il<br />
réfléchit. « D’un autre côté, ils<br />
n’avaient pas tout à fait tort,<br />
j’ai eu bien des one night<br />
stands dans ma vie et je n’ai<br />
pas toujours été prudent. »<br />
Aujourd’hui, autant sa famil<strong>le</strong><br />
proche que sa famil<strong>le</strong> étendue<br />
sont plus à l’aise avec son état<br />
de santé, qui avait d’abord été<br />
caché par sa famil<strong>le</strong> à ses onc<strong>le</strong>s<br />
et à ses tantes.<br />
De <strong>le</strong>ur côté, ses amis ont<br />
ressenti une « grande impuissance<br />
» face à la nouvel<strong>le</strong>. Ils<br />
n’arrivaient pas à croire ce qui<br />
arrivait à Sylvain, mais ils<br />
avaient surtout « <strong>le</strong> sentiment<br />
de vouloir tuer » son ex-<br />
copain sur qui ils rejetaient <strong>le</strong><br />
blâme pour l’agression<br />
sauvage dont Sylvain avait été<br />
victime.<br />
Suite à l’infection, pendant un<br />
bon moment, Sylvain a refusé<br />
de prendre des médicaments