L'intégralité du colloque - CAUE
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l’exubérance des habitants à l’extérieur. Ce n’était pas pour autre chose.<br />
Il y a une évolution sur le regard, une évolution également dans la façon dont le propriétaire, le<br />
commanditaire ou l’architecte, voit son œuvre, et donc il y a une certaine distanciation à avoir sans<br />
doute, et c’est le cas ici de l’Ecole de Suresnes. Quand on regarde bien l’Ecole de Plein Air, aucun<br />
enseignant aujourd’hui ne voudrait y enseigner à nouveau. En c’est ce que, après un <strong>colloque</strong> et des<br />
séminaires avec les enseignants, nous en avons conclu. Doit-on aujourd’hui en faire un musée, ou<br />
en tout cas comment faire voir la pédagogie de ces structures ouvrant totalement sur le paysage<br />
environnant, et comment les restaurer ? C’est le premier point. Deuxième point : les propriétaires<br />
sont très différents pour les ensembles. Plus on multiplie les propriétaires et les objectifs différents<br />
dans une même propriété, plus la protection et la sauvegarde deviennent difficiles.<br />
Mais la protection ou le regard est sans doute plus difficile dans le secteur <strong>du</strong> logement social. Qu’on<br />
l’appelle logement social, qu’on l’appelle grands ensembles des Trente glorieuses, ce sont des éléments<br />
qui sont aux antipodes en tout cas de la maison indivi<strong>du</strong>elle, qui sont <strong>du</strong> logement collectif et qui<br />
révèlent là l’inaptitude aujourd’hui d’une sauvegarde pédagogique. Il est difficile aujourd’hui de donner<br />
des prescriptions à l’ANRU. Depuis juin dernier, les Services départementaux de l’Architecture et<br />
<strong>du</strong> Patrimoine doivent donner leur avis sur chaque projet établi par l’Agence Nationale pour le<br />
Renouvellement Urbain, et ceux que l’on appelle les Architectes des Bâtiments de France ont peu<br />
de connaissances aujourd’hui sur ces ensembles. Ils ont également peu de moyens d’agir directement<br />
et, en tout cas, il n’y a pas d’outils de protection totalement adaptés. Les Zones de Protection <strong>du</strong><br />
Patrimoine Architectural, Urbain et Paysager pourraient peut-être être utilisées, mais on n’en voit pas<br />
beaucoup éclore et la loi sur les Monuments historiques, pour cet ensemble des Courtillières d’Emile<br />
Aillaud, semble disproportionnée par rapport à l’édifice. Ce n’est pas uniquement un édifice, c’est un<br />
parc, une crèche, un marché et c’est d’abord un ensemble d’habitants. Comment ces habitants vivent<br />
cette mémoire ? On l’a recueilli : l’archiviste municipal a fait un travail remarquable avec un historien<br />
pour recueillir cette mémoire. Il y a également beaucoup d’études faites sur ce sujet, mais ensuite<br />
c’est à l’Architecte des Bâtiments de France de prendre les décisions nécessaires pour pérenniser<br />
ou pas cet héritage. Va-t-on couper la barre, comme dans certains projets en train de voir le jour,<br />
couper cette barre en petit morceaux ? Que va-t-on garder <strong>du</strong> tracé sinusoïdal d’Emile Aillaud ? Que<br />
va-t-on garder également de la crèche, et que va-t-on garder de l’ensemble ? Parce que, au-delà de<br />
cette cité, c’est l’ensemble qu’il y a, à l’interaction de plusieurs communes autour de Pantin, qui est<br />
intéressant, et il faut regarder cela en regard de l’ancienne imprimerie <strong>du</strong> journal «L’Illustration», une<br />
friche in<strong>du</strong>strielle reconvertie aujourd’hui partiellement en centre de formation universitaire. Il faut<br />
regarder cela également avec les autres grands ensembles qui entourent, et donc c’est l’ensemble<br />
<strong>du</strong> territoire, on le voit bien, qu’il est intéressant aujourd’hui de sauvegarder. Il faut avoir un regard<br />
différent, informatif, pédagogique et également positif sur ces vastes territoires.<br />
Ces vastes territoires sont des territoires dits de banlieues, où non seulement la connaissance est<br />
déficitaire, mais également où il y a des pressions. Pressions politiques, pressions financières parce<br />
qu’il y a des enjeux importants lorsque le maire maintenant peut recevoir directement les budgets de<br />
l’ANRU. Il y a aussi des enjeux politiques à voir, et comment le patrimoine à l’intérieur de ces enjeux<br />
peut agir de façon positive.<br />
On a bien sûr des exceptions, mais quand on voit la façon dont on les prend, il faut un travail de<br />
plusieurs générations de sensibilisation pour faire changer les choses. Je me souviens parfaitement<br />
que, dans les années 85, la protection de l’église Saint-Joseph au Havre a été voulue par les proches<br />
d’Auguste Perret, qui ne voulaient pas que Candilis construise sur des principes différents de Perret.<br />
C’est comme cela que la protection de Saint-Joseph, avec son périmètre des 500 mètres, a été<br />
obtenue. Ce n’est donc pas <strong>du</strong> tout pour la qualité de l’édifice lui-même, mais simplement pour un<br />
ARCHITECTURES ET PATRIMOINES DU XX e SIÈCLE<br />
de l’indifférence à la reconnaissance 31