Rapport 2015-3
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GROUPES ARMÉS AU KATANGA : ÉPICENTRE DE MULTIPLES CONFLITS |23<br />
Mobilité, ressources et armes<br />
Tous les groupes se réclamant des Kata Katanga semblent être donc basés dans la<br />
moitié septentrionale de la province ; on peut dès lors s’interroger sur leur facilité à<br />
mener des raids dans sa moitié méridionale, en particulier Lubumbashi, et le territoire<br />
de Kipushi, dans lequel la capitale provinciale est enclavée, ainsi que les territoires<br />
voisins de Kasenga, Kambove et Lubudi. Si les rebelles disposent probablement<br />
d’éclaireurs disséminés dans la province, ainsi que de solides relais politico-financiers,<br />
leur facilité à « descendre » du Nord s’explique vraisemblablement par leur utilisation<br />
des parcs nationaux de l’Upemba, situé dans le centre de la province, et des<br />
Kundelungu, dans le sud-est. Ne se privant pas d’y abattre animaux, pour la viande, et<br />
arbres, pour le bois de chauffe, les Kata Katanga se servent également des deux parcs<br />
comme bases de repli après leurs attaques et de corridors leur permettant de se déplacer<br />
discrètement sur un axe nord-sud. En conséquence, les villages situés en périphérie de<br />
ces deux parcs figurent certainement parmi les plus insécurisés du Katanga 174 .<br />
Outre la faune et la flore protégées de ces parcs, les ressources des Kata Katanga<br />
semblent provenir principalement du racket des populations locales et des voyageurs,<br />
ainsi que des pillages de villages, avec un accent mis sur le vol du bétail. En outre, ils<br />
tireraient des ressources du contrôle de l’exploitation de sites miniers artisanaux. Bien<br />
que moins riche que le sud de la province, le nord recèle de nombreuses mines et<br />
carrières, contenant de l’or, du coltan, de la cassitérite et du cuivre, dont certaines sont<br />
sous le contrôle direct ou indirect de Kata Katanga 175 , en particulier des factions<br />
dirigées par Gédéon, Bakwanga, Kalenge et Mandrakwa 176 . Ce phénomène semble<br />
néanmoins moins aigu qu’au Kivu, peut-être en partie parce que les groupes<br />
sécessionnistes doivent « partager le gâteau minier » avec les FARDC 177 , tandis que,<br />
dans l’extrême-nord de la province, les FDLR semblent elles aussi tirer des revenus du<br />
pillage des ressources minérales, notamment en attaquant des transporteurs 178 .<br />
Quant à l’armement des Kata Katanga, les données récoltées par l’enquêteur du GRIP<br />
concordent avec celles parues dans les médias, notamment lors de l’intrusion de mars<br />
2013 à Lubumbashi, dans le sens où les miliciens semblent dotés d’une grande variété<br />
d’armes, dont une majorité de fabrication locale : armes de jet (lances, lance-pierres,<br />
arcs et flèches), armes blanches (machettes, couteaux) et armes à feu artisanales (fusils<br />
de chasse). Ils disposent également d’armes à feu de fabrication industrielle, dont<br />
principalement l’inévitable fusil d’assaut AK. La prise du repaire de Gédéon au mont<br />
Kibawa en août 2014 a aussi permis de découvrir des armes légères plus sophistiquées :<br />
lance-roquettes, mortiers et leurs munitions, mais qui ne semblent guère avoir été<br />
utilisées dans des opérations militaires, peut-être par absence de personnel qualifié.<br />
Selon toute vraisemblance, les armes modernes et l’équipement de communication<br />
dont disposent les insurgés proviennent des FARDC, prises au combat ou, surtout,<br />
fournies par des complices au sein de l’armée ou des autorités politiques.<br />
En tout cas, il ne semble pas y avoir de filière internationale de trafic d’armes au profit<br />
des Kata Katanga, aucune livraison suspecte en provenance des États limitrophes du<br />
Katanga ou à travers le lac Tanganyika n’ayant été constatée depuis plusieurs années.