10.07.2015 Views

CAMEROUN - Jeune Afrique

CAMEROUN - Jeune Afrique

CAMEROUN - Jeune Afrique

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

LE PLUS105Il y est question de sacrifices humains etde cannibalisme, de la léthargie d’unesociété malade de son passé, de l’incurieet du chaos post-colonial. Avec une véhémencemaîtrisée de la dénonciation quirappelle Naipaul. Dans Contours du jourqui vient (Plon, 2006), la romancièremet en scène le drame des enfants abandonnéspar leurs parents qui les soupçonnentd’être des « mangeurs d’âmes »:la jeune Musango, rejetée par sa mère,Léonora Miano:la véhémencemaîtrisée,la puissancepoétique, leregard presquechirurgical.tente de la retrouver. Sa quête la conduità travers les bas-fonds, peuplés d’adultesabîmés par la vie. Ce qui frappe dans lesrécits de Miano, c’est sa narration quasidocumentaire, anthropologique, admirablementservie par la force poétique deson style et la lucidité de son regard sanscomplexe et presque chirurgical. Dansson dernier roman, Les Aubes écarlates(Plon, août 2009), l’écrivaine va encoreplus loin dans son exploration du malVINCENT CAPMAN/RIVA PRESSafricain. Elle fusionne les tragédies dupassé et du présent – la traite et le sortdes enfants-soldats – pour dessiner ledestin d’un continent abandonné desdieux. Réunissant l’<strong>Afrique</strong> et sa diasporadans un même souffl e fictionnel, ceroman polyphonique se propose aussi derendre aux Africains leur mémoire, afinqu’ils puissent enfi n combler le trou noircivilisationnel et spirituel creusé par latraite négrière. Car, comme l’expliquela romancière dans une postface de sonroman, « les morts ne sont pas morts ».Ils ne cessent de se rappeler à nous.LES INCONTOURNABLESSi l’œuvre de Léonora Miano estimpressionnante, il ne faut pas oublierpour autant les autres figures, toutesaussi incontournables, des lettres camerounaisescontemporaines, parmi lesquellesEugène Ebodé, Gaston-Paul Effaet Patrice Nganang. Auteur d’une trilogietrès remarquée publiée chez Gallimarddans la collection Continents noirs – LaTransmission (2002), La Divine Colère(2004) et Silikani (2006) –, EugèneEbodé raconte l’exil, l’intime et la sexualité(« l’éjaculation comme apothéose ducorps », selon le critique Xavier Garnier),s’éloignant du thème de l’engagement.Tout comme Gaston-Paul Effa.Arrivé à l’âge de 16 ans en France (oùil est désormais professeur de philosophie),Effa est l’auteur de neuf romansqui se caractérisent par leur recherchelinguistique et esthétique. Ses ouvragesles plus connus – Tout ce bleu (Grasset,1996), Cheval-Roi (Éditions du Rocher,2001) ou Nous, enfants de la tradition(Anne Carrière, 2008) – relèvent autantdu roman autobiographique d’arrachementà l’<strong>Afrique</strong> que de la quête philosophiqueet mystique.Enfi n, avec Patrice Nganang, l’engagementest de retour. Professeur auxÉtats-Unis, cet homme de bientôt 40 ansné à Yaoundé est d’abord un essayistebrillant. Il s’est fait connaître en publiantson magistral Temps de chien (Le Serpentà plumes, 2001), dont le narrateurest un chien philosophe. À travers cettechronique à la fois burlesque et sévère,où les hommes et leurs travers sont jaugés,pesés et dénoncés par le regard d’unchien, Nganang renoue avec la dissidenceet la contestation, qui font les beauxjours des lettres camerounaises francophones.Depuis qu’elles ont repris vie,émergeant des cendres des presses etdes palais du sultan Ibrahim Njoya. ■TIRTHANKAR CHANDAJEUNE AFRIQUE N° 2555-2556 • DU 27 DÉCEMBRE 2009 AU 9 JANVIER 2010

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!