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Dossier pédagogique ENTRE LES MURS - cineclass

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DOCUMENTS D’ACCOMPAGNEMENTFrançaisCorpus :une éducation idéale ?document 1 : STENDHAL, Le Rougeet le Noir (I, chapitre 6) (1830)Julien Sorel, jeune homme d’originemodeste mais aux grandes qualitésintellectuelles, vient d’être engagé parle maire de Verrières, M. de Rênal, pourêtre le précepteur de ses enfants. Il estprésenté à eux pour la première fois et selivre à une démonstration d’érudition quisuscite leur admiration.Enfin Julien parut. C’était un autre homme.C’eût été mal parler que de dire qu’il étaitgrave ; c’était la gravité incarnée. Il futprésenté aux enfants, et leur parla d’un airqui étonna M. de Rênal lui-même.- Je suis ici, messieurs, leur dit-il en finissantson allocution, pour vous apprendre lelatin. Vous savez ce que c’est que deréciter une leçon. Voici la sainte Bible,dit-il en leur montrant un petit volume in-32, relié en noir. C’est particulièrementl’histoire de Notre-Seigneur Jésus Christ,c’est la partie qu’on appelle le NouveauTestament. Je vous ferai souvent réciterdes leçons, faites-moi réciter la mienne.Adolphe, l’aîné des enfants, avait prisle livre. – Ouvrez-le au hasard, continuaJulien, et dites-moi les trois premiers motsd’un alinéa. Je réciterai par cœur le livresacré, règle de notre conduite à tous,jusqu’à ce que vous m’arrêtiez.Adolphe ouvrit le livre, lut deux mots, etJulien récita toute la page, avec la mêmefacilité que s’il eût parlé français. M. deRênal regardait sa femme d’un air detriomphe. Les enfants voyant l’étonnementde leurs parents, ouvraient de grandsyeux. Un domestique vint à la porte dusalon, Julien continua de parler latin. Ledomestique resta d’abord immobile, etdisparut ensuite. Bientôt la femme dechambre de madame, et la cuisinière,arrivèrent près de la porte ; alors Adolpheavait déjà ouvert le livre en huit endroits,et Julien récitait toujours avec la mêmefacilité.document 2 : Daniel PENNAC,Comme un roman (1992), p. 99Dans l’ouvrage qu’il consacre à la lecture,Daniel Pennac cite longuement le portraitqu’une ancienne étudiante fit de sonprofesseur de littérature, l’écrivain GeorgesPerros, véritable passeur de passion pourle livre :Il [Perros] arrivait le mardi matin, ébourifféde vent et de froid sur sa moto bleue etrouillée. Voûté, dans un caban marine, lapipe à la bouche ou dans la main. Il vidaitune sacoche de livres sur la table. Et c’étaitla vie. (…) Oui, c’était la vie : une demitonnede bouquins, des pipes, du tabac,un numéro de France-Soir ou de L’Equipe,des clefs, des carnets, des factures, unebougie de moto… De ce fatras, il tirait unlivre, il nous regardait, il partait d’un rire quinous mettait en appétit, et il se mettait àlire. Il marchait en lisant, une main dansla poche, l’autre, celle qui tenait le livre,un peu tendue, comme si, le lisant, ilnous l’offrait. Toutes ses lectures étaientdes cadeaux. Il ne nous demandait rienen échange. Quand l’attention de l’un oul’une d’entre nous fléchissait, il s’arrêtaitde lire une seconde, regardait le rêveur etsifflotait. Ce n’était pas une remontrance,c’est un rappel joyeux à la conscience.Il ne nous perdait jamais de vue. Mêmeau plus profond de sa lecture, il nousregardait par-dessus les lignes. Il avait unevoix sonore et lumineuse, un peu feutrée,qui remplissait parfaitement le volumedes classes, comme elle aurait combléun amphi, un théâtre, le champ de Mars,sans que jamais un mot soit prononcé audessusd’un autre. Il prenait d’instinct lesmesures de l’espace et de nos cervelles.Il était la caisse de résonance naturelle detous les livres, l’incarnation du texte, le livrefait homme. Par sa voix nous découvrionssoudain que tout cela avait été écrit pournous.<strong>Dossier</strong> <strong>pédagogique</strong> 17

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