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Séquence pédagogique - Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur

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4Pouvoir du jury : Aux États-Unis, le jury est seul juge des faits et donc de la culpabilité ou del’innocence de l’accusé. Ce qui a pour conséquence qu’il délibère seul, sans la présence du juge(différence essentielle avec notre système) et que le juge ne doit <strong>pas</strong> essayer de l’influencer. Cedernier point n’est évidemment <strong>pas</strong> toujours respecté. En l’occurrence, le révérend Sykes as<strong>sur</strong>e àJem qu’en faisant ses recommandations aux jurés le juge Taylor « s’est bien comporté… Il a étéparfaitement juste » (p. 323).La règle de l’unanimité : Le jury doit rendre sa décision à l’unanimité, ce qui est la règle enmatière pénale, dans tous les États des États-Unis, sauf en Louisiane et dans l’Oregon. Cettecontrainte est le point de départ du film Douze hommes en colère.On le sait, l’un des jurés, incarné par Henry Fonda, va peu à peu amener les onze autres à voter,comme lui, en faveur de l’innocence de l’accusé parce que sa culpabilité n’a <strong>pas</strong> été démontrée.L’obligation de parvenir à une décision unanime peut allonger considérablement les délibérés. Enl’occurrence, la longueur de la délibération des jurés de Maycomb – plus de quatre heures – laissepenser que tous n’étaient <strong>pas</strong> d’emblée convaincus de la culpabilité de Tom. Atticus avait doncprobablement réussi à ébranler, dans l’esprit de certains d’entre eux, la crédibilité du témoignagedes Ewell, père et fille, pourtant acquise d’avance puisqu’il s’agissait de la parole de deux Blancscontre celle d’un Noir.Il arrive que le jury ne parvienne <strong>pas</strong> à se mettre d’accord. On parle alors de hung jury, c’est-àdirede jury sans majorité. L’accusation doit alors décider si elle engage un nouveau procès, proposeun compromis (plea-bargaining) à la défense ou si elle abandonne les charges.Si, en droit français, depuis la Révolution, c’est « l’intime conviction » qui doit fonder la décisiondes jurés, le droit anglo-saxon utilise un autre concept : Beyond reasonable doubt (« Au-delà d’undoute raisonnable »). Comme l’intime conviction, ce concept mêle rationnel et subjectivité, preuvequ’on ne saurait rendre la justice de manière mécanique.Introduit vers 1780 2 , il visait à l’origine à protéger non l’accusé, mais les jurés. En effet, latradition chrétienne poussait, en cas de doute, les jurés à refuser de se prononcer <strong>sur</strong> la culpabilité.Ils risquaient de fait la damnation éternelle pour avoir commis un péché mortel en faisantcondamner un innocent. Le concept de Beyond reasonable doubt devait permettre de lever cesscrupules moraux et de faciliter la condamnation.Avec le temps et l’évolution des mentalités, il s’est transformé en frein à la condamnation,comme dans Douze hommes en colère.Quelle que soit la <strong>pas</strong>sion des Américains pour la vérité – qui devrait conduire à inculper Bob etMayella Ewell de parjure pour faux témoignages –, ici comme ailleurs, la justice ne se confond <strong>pas</strong>parfaitement avec la vérité. Atticus l’exprime parfaitement lorsqu’il est pris à partie, chez lui, par deshommes désireux de l’empêcher de défendre Tom Robinson : « …Ce type finira peut-être <strong>sur</strong> unechaise électrique, mais <strong>pas</strong> avant que toute la vérité ait été faite. » On ne saurait mieux dire qu’ilappartient au jury de prendre ses responsabilités.1 Notamment Stephen Lubet, “Reconstructing Atticus Finch”, Michigan Law Review, mai 1999, p.1339-1362 ;John Jay Osborn, “Atticus Finch–The End of Honor”, University of San Francisco Law Review, été 1996, p.1139-1142 ; Teresa Godwin Phelps, “The Margins of Maycomb: A Rereading of To Kill a Mockingbird”,Alabama Law Review, hiver 1994, p. 511-530 ; Calvin Woodward, “Listening to the Mockingbird”, AlabamaLaw Review, hiver 1994, p.563-584.2 James Q. Whitman, The Origins of Reasonable Doubt (Theological Roots of the Criminal Trial), YaleUniversity Press, 2007.

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