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Javier Espejo Surós, « Auto-théâtralisation et folie dans le théâtre ...

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<strong>Javier</strong> <strong>Espejo</strong> <strong>Surós</strong>, <strong>«</strong> <strong>Auto</strong>-<strong>théâtralisation</strong> <strong>et</strong> <strong>folie</strong><strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>théâtre</strong> religieux castillan de la première moitié du xvi e sièc<strong>le</strong> »,Méta<strong>théâtre</strong>, <strong>théâtre</strong> <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>théâtre</strong> <strong>et</strong> la <strong>folie</strong>, 2010, p. 31-50,mis en ligne en Mars 2010,URL stab<strong>le</strong> .Col<strong>le</strong>ction : Regards croisés sur la scène européenneest publié par <strong>le</strong> Centre d’études Supérieures de la RenaissanceUniversité François-Rabelais de Tours, CNRS/UMR 6576Responsab<strong>le</strong> de la publicationPhilippe VendrixResponsab<strong>le</strong> scientifiqueJuan Carlos Garrot ZambranaMentions léga<strong>le</strong>sCopyright © 2010 - CESR. Tous droits réservés.Les utilisateurs peuvent télécharger <strong>et</strong> imprimer,pour un usage strictement privé, c<strong>et</strong>te unité documentaire.Reproduction soumise à autorisation.ISSN 1760-4745Date de créationMars 2010


Méta<strong>théâtre</strong> – <strong>Javier</strong> <strong>Espejo</strong> surÓsp. 31-50<strong>Auto</strong>-<strong>théâtralisation</strong> <strong>et</strong> <strong>folie</strong> <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>théâtre</strong> religieuxcastillan de la première moitié du x v i e sièc<strong>le</strong> 1<strong>Javier</strong> <strong>Espejo</strong> Suró sUniversitat de L<strong>le</strong>ida - Université Rennes 2 Haute Br<strong>et</strong>agne - CelamIntroductionC’est <strong>dans</strong> la préface de la deuxième édition de Le <strong>théâtre</strong> <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>théâtre</strong> sur la scènefrançaise du x v i i e sièc<strong>le</strong>, de 1996, que George Forestier invitait à se livrer à des étudessynchroniques afin d’approfondir la connaissance de la technique dramatique. Ilsemb<strong>le</strong> opportun, en eff<strong>et</strong>, de s’interroger sur <strong>le</strong>s modalités de sa présence <strong>dans</strong> lapremière scène européenne. C’est à la fin du xv e sièc<strong>le</strong> <strong>et</strong> au premier tiers du xvi equ’on r<strong>et</strong>rouve des pièces qui exploitent p<strong>le</strong>inement <strong>le</strong> procédé du <strong>théâtre</strong> <strong>dans</strong><strong>le</strong> <strong>théâtre</strong>, comme <strong>le</strong> mirac<strong>le</strong> flamand d’auteur inconnu Mari<strong>et</strong>te <strong>et</strong> Nimègue (entre1483 <strong>et</strong> 1519) ; l’anglaise Fulgens & Lucres de Henry Medwall (dont on connaît unepremière impression de ca. 1512), la Sottie des Béguins jouée en 1523 ou l’entremés – brèvesaynète – de Todo o Mundo e Ninguem (Tout <strong>le</strong> monde <strong>et</strong> Personne) <strong>dans</strong> l’<strong>Auto</strong> chamado daLusitânia (1532) du portugais Gil Vicente .Nous allons nous pencher sur plusieurs exemp<strong>le</strong>s d’apparition du procédé<strong>dans</strong> plusieurs farces religieuses castillanes rédigées <strong>et</strong> mises en scène à l’époqueévoquée. Le temps dont nous disposons nous perm<strong>et</strong>tra à peine de soulignerquelques aspects d’une réalité plus vaste <strong>et</strong> comp<strong>le</strong>xe. Il nous faut souligner qu’ence qui concerne l’Espagne, la chronologie que nous imposons nous empêche depar<strong>le</strong>r de <strong>théâtre</strong> <strong>«</strong> au sens étroit du terme », pour citer de nouveau Forestier (1996,p. 12). Il s’agit d’un moment précis de l’histoire du <strong>théâtre</strong>, antérieur à la profes-1. Je remercie Hélène Tropé <strong>et</strong> Alis Sopadzhiyan d’avoir relu <strong>et</strong> apporté des améliorations à c<strong>et</strong>exte. Toutes <strong>le</strong>s erreurs me sont imputab<strong>le</strong>s.. Voir la mise au point de Kowzan, 2006, p. 15-16.http://umr6576.cesr.univ-tours.fr/publications/m<strong>et</strong>atheatre


sionnalisation de l’acteur, à l’arrivée des compagnies italiennes <strong>et</strong> à l’apparitiondes corra<strong>le</strong>s de comedias. Nous sommes loin de Lo fingido verdadero de Lope de Vega oud’El gran teatro del Mundo de Calderón. Nous par<strong>le</strong>rons donc de <strong>théâtre</strong> <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>théâtre</strong>au sens strict ou réduit du syntagme. Nous préférons d’ail<strong>le</strong>urs nous réfugiersous des dénominations plus vastes, autrement dit, plus adaptées aux œuvresqui nous intéressent. Le romaniste Graça Abreu parlait d’auto-<strong>théâtralisation</strong> quandun personnage regarde subrepticement ou à la dérobée la performance d’autrespersonnages, de façon plus ou moins consciente ; quand <strong>le</strong> <strong>théâtre</strong> s’auto-réfèrede manière explicite ou implicite, ou même lorsque, <strong>dans</strong> une scène, un personnagecaché regarde la performance d’autres. Une seconde remarque liminaire concerne la présence abondante <strong>dans</strong> la littératureespagno<strong>le</strong>, en particulier <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>théâtre</strong>, au tournant du sièc<strong>le</strong>, d’un thème,la <strong>folie</strong>, <strong>et</strong> d’un personnage, <strong>le</strong> fou. Un panorama de c<strong>et</strong> essor a été dressé, justementici à Tours il y a déjà quelques années, par Francisco Márquez Villanueva,<strong>dans</strong> <strong>le</strong> cadre du XIX e Colloque International d’Études Humanistes, intitulé L’humanisme<strong>dans</strong> <strong>le</strong>s l<strong>et</strong>tres espagno<strong>le</strong>s (1979, p. 233-50) . C<strong>et</strong>te étude nous dispense de rappe<strong>le</strong>r ici <strong>le</strong>succès notoire que <strong>le</strong> thème de la <strong>folie</strong> a connu parmi <strong>le</strong>s écrivains, thème pour<strong>le</strong>quel on dispose d’ail<strong>le</strong>urs d’une bibliographie très fournie .L’auteur-personnageC’est à la fin du xv e sièc<strong>le</strong> que Juan del Encina, poète, compositeur, musicien,acteur <strong>et</strong> m<strong>et</strong>teur en scène au service des ducs d’Alba, Fadrique Álvarez de. <strong>«</strong> Sempre que d<strong>et</strong>erminada(s) personagen(s) representa(m) que compõe(m) um papel, empresença de outra(s), de forma mais ou menos consciente ; quando o teatro se auto-referede modo explícito ou implícito ; ou ainda quando, em cena, alguém “escondido” assiste aodesempenho de outro(s) – comentando-o ou não – fazendo parte da convenção teatral queese alguém não é visto por esse(s) outro(s) ». Cf. Abreu, 2005, p. 6. Voir aussi, Hermenegildo,1995, p. 22 <strong>et</strong> suivantes.. Pour <strong>le</strong> <strong>théâtre</strong>, voir Wertz, 1970 ; Newels, 1985. En ce qui concerne <strong>le</strong> domaine castillan, voirHermenegildo, 1995 ; Huerta Calvo, 1985-86 <strong>et</strong> 1996.. Comme souligne K<strong>le</strong>in : <strong>«</strong> S’il faut classer <strong>le</strong>s personnages, on ne regardera donc pas <strong>le</strong>ur degréd’intelligence, mais <strong>le</strong> dosage de participation <strong>et</strong> de détachement qui situe <strong>le</strong> comique, de <strong>le</strong>ursfaits <strong>et</strong> gestes, à une distance chaque fois différente du pur défou<strong>le</strong>ment comme de la pureironie. Cela explique un peu pourquoi <strong>le</strong>s hommes de la Renaissance […] entre 1450 <strong>et</strong> 1550,concevaient si volontiers la situation de l’homme <strong>dans</strong> <strong>le</strong> monde, ou de l’âme <strong>dans</strong> <strong>le</strong> corps,sous <strong>le</strong> jour essentiel<strong>le</strong>ment comique d’une histoire de fous » (K<strong>le</strong>in, 1970 : 437).34 <strong>Javier</strong> espejo surÓs – méta<strong>théâtre</strong>http://umr6576.cesr.univ-tours.fr/publications/m<strong>et</strong>atheatre


Tolède <strong>et</strong> Isabel<strong>le</strong> Pimentel, écrit <strong>et</strong> représente ses propres œuvres. Nous nousarrêterons sur <strong>le</strong>s deux pièces qui ouvrent son premier recueil de poésies lyriques(1496), écrites pour célébrer la nativité du Christ . Les deux pièces, qui en fait n’enfont qu’une, ont été représentées <strong>dans</strong> <strong>le</strong> palais des ducs, <strong>dans</strong> la localité d’Albade Tormes (Salamanque). Les conditions de première énonciation <strong>et</strong> réceptionsont très précises. Encina se présente lui-même en scène. Pour l’occasion, c<strong>et</strong>humaniste raffiné devient une sorte de bouffon, porteur de tous <strong>le</strong>s signes de <strong>folie</strong>répertoriés par Bakhtine. L’écrivain surgit <strong>dans</strong> la sal<strong>le</strong> où <strong>le</strong>s ducs se trouvent <strong>et</strong><strong>le</strong>ur offre <strong>le</strong> volume qui est <strong>le</strong> fruit de son travail littéraire. Il évoque ses querel<strong>le</strong>s<strong>et</strong> rivalités avec ses concurrents ainsi que d’autres questions relatives à la vie à lacour. Il se borne à souligner la techné acquise avec <strong>le</strong>s années <strong>dans</strong> Égloga representadaen la noche de la Natividad de nuestro Salvador :[…] Celui qui s’appelait Juan entra <strong>le</strong> premier <strong>dans</strong> la sal<strong>le</strong> où <strong>le</strong> duc <strong>et</strong> la duchesse étaienten train d’écouter matines <strong>et</strong>, parlant au nom de Juan del Enzina, il en vint à présentercent strophes de c<strong>et</strong>te fête à madame la duchesse. Et l’autre berger nommé Mateo entraensuite <strong>et</strong>, au nom des détracteurs <strong>et</strong> des autres personnes médisantes, il commença à discuteravec lui. Et Jean, fort content <strong>et</strong> fier parce que ses hôtes l’avaient pris à <strong>le</strong>ur service,vint à bout de la malice de l’autre. Et il promit que lorsque mai serait venu, il ferait paraîtrela compilation de toutes ses œuvres parce qu’on <strong>le</strong>s usurpait <strong>et</strong> corrompait […]. (p. 97)Et plus loin, <strong>dans</strong> <strong>le</strong> dialogue :JuanTenme por de los mejores[…]que si quieres de pastores,o si de trobas mayores,de todo sé, Dios loado.[…]Mas agora va labradatan por arte mi lavor,que aunque sea remirada,no avrá cosa mal trobada,si no miente el escritor (v. 122-135).. Égloga representada en la noche de la Natividad de nuestro Salvador <strong>et</strong> Égloga representada en la mesma noche deNavidad, Pérez Priego (éd.), p. 97-105 <strong>et</strong> 107-116. Pour <strong>le</strong>s traductions des pièces, exception faite dela Ce<strong>le</strong>stina (cf. infra note 24), j’ai essayé de fournir au <strong>le</strong>cteur non hispanisant une version françaisefidè<strong>le</strong> au sens du texte original sans aucune prétention littéraire.http://umr6576.cesr.univ-tours.fr/publications/m<strong>et</strong>atheatreMÉTATHÉÂTRE – javier espejo surÓs 35


Encina va laisser une empreinte sur son œuvre, dépourvue de sens en dehorsde ce contexte énonciatif. Il s’agit d’une pratique partagée avec d’autres divertissementsde cour comme <strong>le</strong>s momos, qui continuent à se tenir tandis que <strong>le</strong> <strong>théâtre</strong>se développe à la même époque . Il importe de souligner <strong>le</strong> contexte <strong>«</strong> d’émergenced’un espace théâtral » (Garcia, 1988) mais surtout l’évidence d’une prise deconscience littéraire de l’auteur par rapport à son art <strong>et</strong> à son métier, ainsi quel’eff<strong>et</strong> de dénégation qui résulte des signes scéniques analysés. Ces manifestationspatentes du <strong>«</strong> je » de l’auteur rappel<strong>le</strong>nt, <strong>dans</strong> <strong>le</strong> domaine de l’iconographie, lamusca depicta <strong>et</strong> <strong>le</strong> tab<strong>le</strong>au à l’intérieur du tab<strong>le</strong>au .Tout <strong>le</strong> monde <strong>et</strong> PersonneEn Espagne la figure du fou, doté de c<strong>et</strong>te réversibilité constante – à la fois sot<strong>et</strong> sage – est devenue une source d’inspiration féconde pour <strong>le</strong>s dramaturges. Onla r<strong>et</strong>rouve <strong>dans</strong> la Farce du Monde <strong>et</strong> Mora<strong>le</strong> (rédigée ca. 1518) par <strong>le</strong> bachelier HernánLópez de Yanguas. L’auteur y m<strong>et</strong> en scène <strong>le</strong> berger Ap<strong>et</strong>ito (Appétit) en invitantdès <strong>le</strong> début <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur à se reconnaître <strong>dans</strong> c<strong>et</strong>te figure puisqu’el<strong>le</strong> est, selon sestermes, chacun d’entre nous (<strong>«</strong> cada uno de nosotros »). Ap<strong>et</strong>ito est guidé par un<strong>«</strong> vif désir », par <strong>«</strong> un mouvement qui tend à satisfaire un besoin organique, un instinct» ; il est appelé âne insipiens (v. 200). Comme <strong>le</strong> rappel<strong>le</strong> <strong>le</strong> Psaume, <strong>«</strong> l’hommeétait en honneur, mais il ne l’a pas compris ; il s’est comporté comme <strong>le</strong>s bestiaux» . Il est un personnage dépouillé de tout ce qui confère une identité. Il n’apas de nom propre, c’est-à-dire, il n’est personne. La présence de c<strong>et</strong>te épiphaniehumaine, Mankind, Humanum Genus, Ap<strong>et</strong>ito, Género humano, Chacun, Everyman, Jedermann,coïncide avec l’essor d’une autre tradition, qui remonte à l’épisode homériquedu cyclope, cel<strong>le</strong> de Nemo . Dans l’Odyssée, IX, 366,7, on pouvait déjà lire :<strong>«</strong> Mon. Asensio, 1974 ; Díez Garr<strong>et</strong>as, 1999, p. 163-174.. À ce propos, voir Martinda<strong>le</strong>, 1972.. Sur la musca depicta, Chastel, 1984. Quant au tab<strong>le</strong>au à l’intérieur du tab<strong>le</strong>au, comme l’affirmeMichael Camil<strong>le</strong>, <strong>«</strong> se rattache à la tradition gothique » (Camil<strong>le</strong>, 1996 : 180).. Dictionnaire de l’Académie française, 9 e éd...À ce propos, voir Gilson, 1998 : 378 <strong>et</strong> ss.Voir Castelli-Gattinara, 1976. En outre, <strong>le</strong>s cervantistes se souviendront de ce passage duLicenciado Vidriera : <strong>«</strong> On lui demanda quel avait été l’homme <strong>le</strong> plus heureux du monde, “Nemo,répondit-il, car Nemo novit patrem ; Nemo sine crimine vivit ; Nemo sua sorte contentus ; Nemo ascenditin caelum” ». Cf. Nouvel<strong>le</strong>s exemplaires, p. 228. Il est intéressant de s’attarder sur la généalogie de lafigure, qui remonte au moins à la tromperie d’Ulysse au Cyclope donnant comme son nom <strong>le</strong>36 <strong>Javier</strong> espejo surÓs – méta<strong>théâtre</strong>http://umr6576.cesr.univ-tours.fr/publications/m<strong>et</strong>atheatre


nom est Personne. Mon père <strong>et</strong> ma mère <strong>et</strong> tous mes compagnons me nommentPersonne ».Dans la Farce du Monde <strong>et</strong> Mora<strong>le</strong> :Mundo ¿ Cómo te llamas ?Ap<strong>et</strong>itoAp<strong>et</strong>ito me llamo.MundoSea en ora buena, que buen nombre tienes,e mírame bien, que si te convienestenerte he comigo (v. 29-33).Dans la moralité anglaise Mundus <strong>et</strong> Infans (imprimée en 1522) :Mundus Welcome, fair child ! What is thy name ?Infans I wot not, sir, withouten blame ;But oftime my mother in her gameCal<strong>le</strong>d me Dalliance.pronom de va<strong>le</strong>ur négative Outis, <strong>«</strong> personne ». Son équiva<strong>le</strong>nt latin, Nemo, adopté par <strong>le</strong> christianismemédiéval, donnera lieu à San Nemo. Au début du xvi e sièc<strong>le</strong>, après 1507, un barbierde Strasbourg, Joerg Schan, publiait <strong>le</strong>s péripéties de Niemand (<strong>le</strong> poème a été édité, traduit enanglais, par Gerta Calmann, 1960). La version en latin donnera lieu au poème épigrammatiqueNemo de Ulrich Von Hutten, imprimé à Bâ<strong>le</strong> par Johan Froben (1518) suivant la recommandationd’Érasme. On r<strong>et</strong>rouvera Nemo, par exemp<strong>le</strong>, <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s Scenica progymnammata de Reuchlin(1513) ou, en France, <strong>dans</strong> la Prosopopeia Nemini (ca. 1513) de Geoffrey Tory. Asensio, <strong>dans</strong> sonétude sur l’<strong>Auto</strong> da Lusitânia de Gil Vicente, se demande par quel<strong>le</strong> voie l’auteur português auraiteu connaissance de la tradition de Nemo. Dans l’auto de l’auteur portugais, Todo o Mundo, <strong>«</strong> richemarchand », fait front à Nadie, <strong>«</strong> habillé comme pauvre ». C<strong>et</strong> affrontement, qu’Asensio dit <strong>«</strong> n<strong>et</strong>rouver nul<strong>le</strong> part », lui semb<strong>le</strong> une <strong>«</strong> invention » du dramaturge portugais. La seu<strong>le</strong> imitationde Gil Vicente que j’ai vu – conclut-il – est cel<strong>le</strong> de Lope de Rueda, Entremés del Mundo y No nadie(Asensio, 1991 : 283). Schevill, de sa part, signa<strong>le</strong> plusieurs <strong>«</strong> analogies » entre l’auto vicentin <strong>et</strong>l’œuvre attribuée à Lope de Rueda, pour conclure à ce suj<strong>et</strong> qu’ <strong>«</strong> on ne peut pas affirmer quela scène […] est une imitation de Gil Vicente. Il semb<strong>le</strong> beaucoup plus probab<strong>le</strong> qu’une autrefarce du Moyen Âge ou de la Renaissance, en latin, français ou en italien, était connue <strong>dans</strong>la péninsu<strong>le</strong> <strong>et</strong> influait sur ces pièces ». Il est diffici<strong>le</strong> de savoir si <strong>le</strong> Nemo imprimé en latin étaitconnu <strong>dans</strong> la péninsu<strong>le</strong>. La farce de Yanguas, cependant, aurait joui d’un grand succès puisque,en marge d’une supposée editio princeps perdue, on connaît deux rééditions, de 1524 <strong>et</strong> 1528,antérieures à Lusitânia (Schevill, 1915 : 36).http://umr6576.cesr.univ-tours.fr/publications/m<strong>et</strong>atheatreMÉTATHÉÂTRE – javier espejo surÓs 37


MundusDalliance, my swe<strong>et</strong> child, It is a name that is right wildFor when thou waxest old, It is a name of no substance,But, my fair child, what wouldst thou have (v. 52-60). Dans la portugaise Lusitânia (1532) :Ninguém Como has nome cava<strong>le</strong>iro ?Todo o MundoNinguémEu hei nome Todo o Mundo.e meu tempo todo enteirosempre é buscar dinheiroe sempre nisto me fundo.Eu ei nome NinguémE busco a conciência .Au-delà de la convention <strong>et</strong> du besoin d’identifier l’interlocuteur, on note que,pour <strong>le</strong> système de croyances <strong>et</strong> rites chrétien, c<strong>et</strong>te vacuité de l’individu exprimépar <strong>le</strong> manque de nom rapproche l’individu de l’état de perfection d’Adam avant<strong>le</strong> péché originel. C’est <strong>le</strong> pas préalab<strong>le</strong> <strong>et</strong> nécessaire à l’oblation (offrande <strong>et</strong> sacrifice); une expérience de dépouil<strong>le</strong> absolue ou kenosis, selon <strong>le</strong> <strong>le</strong>xique de l’apôtrePaul . Yanguas fait paraître en scène Ap<strong>et</strong>ito, sous <strong>le</strong>s traits d’un berger angoisséparce qu’il est déjà trop âgé pour être toujours à la recherche d’un maître à quiservir. C’est là qu’intervient l’anthropomorphisation du Monde – que nous allonstrouver <strong>dans</strong> une vingtaine d’autos de Calderón – qui réussira à lui faire croire àla vérité des apparences trompeuses. Avec ses ruses <strong>et</strong> procédés subtils (<strong>«</strong> artes ymañas soti<strong>le</strong>s »), <strong>le</strong> Monde, qui n’est pas autre que <strong>le</strong> Diab<strong>le</strong>, rend aveug<strong>le</strong> (<strong>«</strong> Ciegalos ojos del conoscimiento »). Seul en scène (<strong>«</strong> a solas », signa<strong>le</strong> la didascalie), <strong>le</strong>Diab<strong>le</strong> informe ouvertement <strong>le</strong> public sur ses stratégies <strong>et</strong> intentions. Habillé enroi, arrogant <strong>et</strong> fier, farceur – il sera accusé de <strong>«</strong> conciertacuidados, […] lladrónmuy mañoso » –, il se borne à travail<strong>le</strong>r à son propre succès <strong>et</strong> rappel<strong>le</strong> l’eff<strong>et</strong>. Lester, 2002 : 113. Voir aussi <strong>le</strong>s v. 65 <strong>et</strong> suivants où Mundus offre des vêtements à Infans.. Abreu (ed.), p. 8.. La <strong>folie</strong> carnava<strong>le</strong>sque doit se comprendre selon <strong>«</strong> <strong>le</strong> sens chrétien du mot. Être fou ou un sotest d’avoir la tête assez vide, l’esprit assez écarté des préoccupations ordinaires … pour pouvoirrecevoir <strong>le</strong> souff<strong>le</strong> de l’Esprit Saint ». Cf. Redondo, 1978 : 47-48. Sur la <strong>«</strong> Kénose », cf. l’entrée<strong>dans</strong> <strong>le</strong> Supplément au Dictionnaire de la Bib<strong>le</strong> (fasc. XXIV, cols. 7-161).. Egido, 1995 : 3-36.38 <strong>Javier</strong> espejo surÓs – méta<strong>théâtre</strong>http://umr6576.cesr.univ-tours.fr/publications/m<strong>et</strong>atheatre


persuasif de ses paro<strong>le</strong>s (<strong>«</strong>Cuán presto he enlabiado aqueste pastor » (v. 197)). Ap<strong>et</strong>ito,âne insensé (<strong>«</strong> insipiente », v. 200) , est possédé par <strong>le</strong> mal <strong>et</strong> contredit l’impératifbiblique (Génesis 3 :19). Se croyant riche, sans effort ni labeur, aristocrate <strong>et</strong> mariérien de moins qu’avec Venus, il part changer ses vêtements pour d’autres habitsplus appropriés à son nouveau statut. Il revient revêtu d’un nouveau masque, irascib<strong>le</strong><strong>et</strong> guidé par la concupiscentia tout en employant un registre de langue qui nelui correspond pas <strong>et</strong> qu’il est loin de maîtriser. Mais c’est une illusion tragique.Le déguisement <strong>et</strong> l’imitation d’un registre verbal é<strong>le</strong>vé par ce rustre berger, ôcombien comiques en cela qu’ils sont peu réussis, consacrent en quelque sortel’assomption d’une figure autre, voire la création d’un personnage à l’intérieurmême d’un personnage qui, en fait, était d’origine une prosopopée.Face aux trompeuses apparences, l’evidentia finit par s’imposer. Mais pour s<strong>et</strong>irer d’affaire <strong>le</strong> berger a besoin de regarder avec <strong>le</strong>s yeux de l’âme (<strong>«</strong> con ojos delalma »). Ce mirage tragique requiert l’intervention d’un Ermite <strong>et</strong> de la Foi pourque <strong>le</strong> berger se tourne vers son salut.Le personnage allégorique de la Foi relate ce qu’il a fait pendant la journée, <strong>le</strong>15 août, fête de l’Assomption. La narration de la montée de la Vierge au ciel (v.624-856) est une stylisation littéraire d’une expérience de type contemplative. Ladescription du voyage interplanétaire de Marie contient des champs sémantiquesde la vue <strong>et</strong> de l’ouïe en abondance. Le voyage est décrit de manière si frappante,que l’Ermite <strong>et</strong> <strong>le</strong> berger croient la vivre. Il s’agit d’une figure rhétorique, l’hypotypose,que Fumaroli décrit ainsi :Ce n’est plus seu<strong>le</strong>ment un discours que l’orateur mime selon la vraisemblance, comme<strong>dans</strong> la prosopopée : c’est l’ensemb<strong>le</strong> d’une action, avec ces circonstances <strong>et</strong> <strong>le</strong> dialoguequ’el<strong>le</strong> comporte, rendue présente par la vertu mimétique du verbe (Fumaroli, 1968 : 115).Le caractère ekphrasique du récit se voit renforcé par la référence à un obj<strong>et</strong>,image, tab<strong>le</strong>au ou bien à une relique, qui renvoie au motif iconographique de laVierge au manteau (<strong>«</strong> e lu[e]go en l<strong>le</strong>gando <strong>le</strong> hizo vestir / un manto del lustre queacá nos embía ». v. 707-708) .L’iter ad Deum d’Ap<strong>et</strong>ito – <strong>«</strong> chemin », <strong>«</strong> voie », sont des mots réitères <strong>dans</strong> l<strong>et</strong>exte – à une va<strong>le</strong>ur tautologique. Il s’agit d’une expérience de reconnaissance. <strong>Espejo</strong> <strong>Surós</strong>, 2007.. La Vierge au manteau, illustration du Speculum humanae salvationis par exemp<strong>le</strong>, est un emblème deprotection traditionnel<strong>le</strong>. Cf. Llompart, 1962 : 299-310.http://umr6576.cesr.univ-tours.fr/publications/m<strong>et</strong>atheatreMÉTATHÉÂTRE – javier espejo surÓs 39


du personnage <strong>et</strong> du spectateur, qui débute par la réactivation <strong>et</strong> la purificationde la mémoire, selon <strong>le</strong> <strong>le</strong>xique employé à l’époque par la littérature ascétique<strong>et</strong> mystique. Le public, quant à lui, doit apercevoir <strong>le</strong>s deux niveaux de l’illusionthéâtra<strong>le</strong>. L’histoire à r<strong>et</strong>enir ce n’est pas cel<strong>le</strong> d’un pauvre berger qui chercheson maître. L’œuvre que contemp<strong>le</strong> <strong>le</strong> public fait partie d’un autre spectac<strong>le</strong>,plus transcendent, celui de l’historia humanae salvationis . C’est <strong>dans</strong> ce but d’anamnesisque l’auteur fait appel à plusieurs ressources tel<strong>le</strong>s que <strong>le</strong>s abondantes citationsbibliques qui activent la <strong>«</strong> mémoire intertextuel<strong>le</strong> » (Carruthers, 2003 : 108 <strong>et</strong> ss.)du spectateur. L’histoire du berger qui se laisse tenter avant d’être sauvé est doncune sorte de mise en abyme d’autres récits, la chute <strong>et</strong> la rédemption de l’hommegrâce à son libre arbitre <strong>et</strong> la vie vertueuse de Marie, toujours éloignée du péché .Comme <strong>le</strong> remarque Drouyn au début de sa Nef des folz :Se aulcuns folz se mocquent de noz p<strong>et</strong>its espritz, pource que plusieurs folz y sont compris,ilz ont l’entendement p<strong>et</strong>it : car <strong>le</strong> sens littéral n’est pas <strong>le</strong> principal de la matière. Tel<strong>le</strong>s gens sont comme ceulx qui cuident menger <strong>le</strong>s amandez sans casser : car qui veult enung noyau trouver saveur, il lui fault briser, <strong>et</strong> alors on trouvera la saveur ; aussi qui en celivre veult trouver prouffit, arrester se doit au sens moral, qui est de <strong>folie</strong> couvert .La mise en texte exemplaire des tentations potentiel<strong>le</strong>s puis de l’édificationque <strong>le</strong> texte offre à ce Nemo vise à créer un eff<strong>et</strong> de miroir réfléchissant, tendu aupublic pour qu’il se contemp<strong>le</strong> <strong>dans</strong> <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong> de c<strong>et</strong>te <strong>folie</strong> qui fait déchoir, sereconnaisse, <strong>et</strong> dès lors, pour qu’il s’amende, se corrige.L’aparté, <strong>le</strong> monologue <strong>et</strong> l’adresse au publicL’aparté <strong>et</strong> <strong>le</strong> monologue sont des conventions théâtra<strong>le</strong>s très connues des<strong>le</strong>cteurs, spectateurs <strong>et</strong> dramaturges espagnols du début du xvi e sièc<strong>le</strong>. La <strong>le</strong>cture,ainsi que <strong>le</strong>s exercices scolaires <strong>et</strong> universitaires avaient transmis au long des siè-.Le <strong>théâtre</strong> espagnol dispose d’un exemp<strong>le</strong> paradigmatique <strong>dans</strong> la Représentation de la Naissance deNotre Seigneur de Gómez Manrique. Comme <strong>le</strong> souligne Deyermond (1992 : 298) ce qui perm<strong>et</strong>à la Représentation l’inclusion de presque toute l’Historia humanae salvationis <strong>dans</strong> 181 vers c’estl’emploi de la prophétie, de la typologie <strong>et</strong> de l’appel à la mémoire.. Muir, 1977, Crist, 1978..J. Drouyn, La Grant nef des folz du monde avec plusieurs satyres <strong>et</strong> aditions nouvel<strong>le</strong>ment adjousteez par l<strong>et</strong>ranslateur. Lyon, Guillaume Balsarin, 1499. B. M. de Lyon Rés. Inc. 794, fol. 4v.. Zink, 1986.40 <strong>Javier</strong> espejo surÓs – méta<strong>théâtre</strong>http://umr6576.cesr.univ-tours.fr/publications/m<strong>et</strong>atheatre


c<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s pièces de <strong>théâtre</strong> de Plaute <strong>et</strong> Térence où tous <strong>le</strong>s principes de l’art dulangage enseignés pendant l’année étaient mis en scène par <strong>le</strong>s étudiants . Dansl’édition de Tolède (1500) de la Ce<strong>le</strong>stina se trouve une octave rédigée par l’humaniste<strong>et</strong> éditeur Alonso de Proaza qui oriente <strong>et</strong> guide la <strong>le</strong>cture correcte à hautevoix du texte. Arrêtons-nous sur c<strong>et</strong> aspect concernant l’actio :Si tu aimes, si tu veux, en lisant l’histoire de Calixteamener tes auditeurs à beaucoup d’attentionil faut que tu saches par<strong>le</strong>r entre <strong>le</strong>s dentstantôt avec gai<strong>et</strong>é, espérance <strong>et</strong> passiontantôt avec colère <strong>et</strong> grand désespoir.Prends en lisant mil<strong>le</strong> façons <strong>et</strong> manièresQuestionne <strong>et</strong> réponds par la bouche de tous,p<strong>le</strong>ure <strong>et</strong> ris au bon moment .Comme <strong>dans</strong> ce <strong>«</strong> par<strong>le</strong>r entre <strong>le</strong>s dents » nous pourrions trouver d’autresapartés ayant pour but l’exclusion du public, même si ce n’est que brièvement .C’est <strong>le</strong> cas du par<strong>le</strong>r <strong>«</strong> à l’oreil<strong>le</strong> », si fréquent <strong>dans</strong> <strong>le</strong> genre dialogué . Dans la Farsade la Concordia (1529), par exemp<strong>le</strong>, écrite pour célébrer la Paix des Dames entre l’Espagne<strong>et</strong> France, <strong>le</strong> personnage du Correo communique l’accord entre <strong>le</strong>s deux. L’utilisation du <strong>théâtre</strong> à l’éco<strong>le</strong> est étroitement liée, on <strong>le</strong> sait, à l’enseignement de la grammaire<strong>et</strong> de la rhétorique. Il s’agit d’un drame en latin créé <strong>et</strong> dirigé par <strong>le</strong>s enseignants, dont <strong>le</strong> butest d’habituer <strong>le</strong>s étudiants à l’usage de la langue latine (en<strong>le</strong>ver la peur de par<strong>le</strong>r en public<strong>et</strong> familiariser <strong>le</strong> jeune avec <strong>le</strong>s normes de la actio). Sur <strong>le</strong>s rapports entre rhétorique <strong>et</strong> dramaturgie,voir Marc Fumaroli, 1968. Le <strong>théâtre</strong> deviendra plus tard aussi une forme privilégiéed’acculturation jésuite <strong>dans</strong> <strong>le</strong> cadre de la ratio studiorum. En outre, <strong>le</strong> <strong>théâtre</strong> classique était aussisorti des sal<strong>le</strong>s de cours grâce à l’imprimerie <strong>et</strong> la diffusion des ouvrages de Terence accompagnéesd’abondants textes liminaires. Songeons en particulier à l’édition lyonnaise de Bade,publiée en 1502, qui exercera une forte influence chez <strong>le</strong>s humanistes.. Nous citons par l’édition française de Pierre Heugas, <strong>dans</strong> Theatre espagnol…(cf. bibliographie),p. 197-198. Ce par<strong>le</strong>r entre <strong>le</strong>s dents on <strong>le</strong> r<strong>et</strong>rouvera <strong>dans</strong> d’autres pièces, tel<strong>le</strong>s que la Farcemilitaire (Farsa militar) de Diego Sánchez de Badajoz : <strong>«</strong> Carne – ¡ O, quién fuese tan dichosa !/ no ruego a Dios otra cosa / son que me dejase vello. / [Ap. ] Lo que traigo acá pensado… /Frai<strong>le</strong> – ¿ Qué habláis allá entre dientes ? » (v. 643-648).. On a souligné que l’emploi de l’aparté vise principa<strong>le</strong>ment à caractériser mora<strong>le</strong>ment <strong>et</strong>psychologiquement <strong>le</strong>s personnages. Ce n’est que <strong>dans</strong> <strong>le</strong> premier acte qu’il est utilisé pours’adresser directement au public. Cf. Lida de Malkiel, 1962, p. 144 <strong>et</strong> Bataillon, 1979, p. 517-520. Surces aspects on doit maintenant voir la mise au point de Ferreras, 2008. Pour l’étude de l’aparté<strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>théâtre</strong> espagnol on se reportera sur la fort uti<strong>le</strong> étude d’Orozco Díaz, 1981.. Vian Herrero, 2003.http://umr6576.cesr.univ-tours.fr/publications/m<strong>et</strong>atheatreMÉTATHÉÂTRE – javier espejo surÓs 41


que nous <strong>le</strong> connaissons, <strong>le</strong> personnage se confond <strong>et</strong> se construit avec l’humaniste.C’est sa présence qui confère au message toute sa force.Regardants, regardésMalgré l’énoncé qui renvoie à des circonstances politiques très précises, la Farcede la Concorde (Farsa de la Concordia, 1529), déjà citée, est une moralité au service del’esprit iréniste de la Philosophia Christi. Tout au long des cinq actes de l’œuvre,<strong>le</strong>s personnages qui interviennent occupent ou bien une position centra<strong>le</strong> sur lascène, ou bien se cachent pour écouter <strong>le</strong>s autres sans être vus par ces derniers.L’auteur disposera même d’un trip<strong>le</strong> niveau spatial. Nous trouvons des didascalies<strong>dans</strong> <strong>le</strong> texte dialogué du type <strong>«</strong> Il semb<strong>le</strong> que j’entends des femmes / taisonsnous/ viens plus près » qui nous confirment la présence de ce que nous pourrionsappe<strong>le</strong>r des spectateurs intérieurs. Le jeu de regardants <strong>et</strong> regardés se situe auxportes du procédé au sens étroit du terme .Farce dite militaireAchevons notre vertigineux survol du <strong>théâtre</strong> castillan par l’examen de laFarce militaire (Farsa militar) du curé Diego Sánchez de Badajoz . À l’époque où c<strong>et</strong>exte est composé, vers 1547 à Badajoz, un <strong>théâtre</strong> professionnel se développe <strong>dans</strong>la péninsu<strong>le</strong> depuis quelques années déjà. Le berger qui prononce <strong>le</strong> prologuenous prévient que l’œuvre qui va suivre est, littéra<strong>le</strong>ment, peuplée des fous : <strong>«</strong> pardevant<strong>et</strong> par derrière vous verrez des fous » . Il explique aux spectateurs que <strong>le</strong>Diab<strong>le</strong> est invisib<strong>le</strong> <strong>et</strong> que, par conséquent, ils ne doivent pas <strong>le</strong> <strong>«</strong> voir » quandcelui-ci apparaîtra sur scène ; or, lorsque l’acteur se couvrira – avec une cape ? –,ça voudrait dire que <strong>le</strong> Malin a un corps (forma corporal) <strong>et</strong>, donc, il devient visib<strong>le</strong>Afin que <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur soit averti du danger que représente <strong>le</strong> personnage du Diab<strong>le</strong>,. <strong>Espejo</strong> <strong>Surós</strong>, 2008.. Pour une tentative de chronologie des pièces, voir Cazal, 2002. Il convient de noter que <strong>le</strong> responsab<strong>le</strong>de la publication posthume de la Recopilación est <strong>le</strong> neveu de l’auteur, Juan Figueroa, qui pourraitêtre à l’origine de plusieurs corrections des matériaux préservés, voire de plusieurs didascalies.. <strong>«</strong> si os catáis, en todas partes / por delante y por d<strong>et</strong>rás / veréis locos sin compás / más que cuerdostreinta partes » (v. 7-10). Cit. par Sánchez de Badajoz, Farsas, p. 257-258.http://umr6576.cesr.univ-tours.fr/publications/m<strong>et</strong>atheatreMÉTATHÉÂTRE – javier espejo surÓs 43


l’auteur m<strong>et</strong> en garde <strong>le</strong> spectateur <strong>et</strong> annonce que <strong>le</strong> Malin peut devenir visib<strong>le</strong>ou invisib<strong>le</strong>, tout en en<strong>le</strong>vant une cape .Le Diab<strong>le</strong> ordonne la disposition des caractères en scène:Je serais vers l’esttoi, Chair, à ma (main) droite,<strong>le</strong> Monde contre l’Occident :espionner très sagement… (v. 401-404) .Le Diab<strong>le</strong>, qui était avant un farceur <strong>et</strong> que nous r<strong>et</strong>rouvons maintenant entant que meneur de jeu, montre l’aboutissement de quelques formes d’autoréf<strong>le</strong>xivitéinsinuées auparavant. Dans un monde si malade qu’il ressemb<strong>le</strong> à unasi<strong>le</strong> d’aliénés, celui qui commande c’est Satan. Qu’il s’agisse du <strong>théâtre</strong> ou dela vie, il faudrait être fou pour ne pas s’en rendre compte. Ou peut-être faut-ilprécisément être fou pour <strong>le</strong> comprendre.ConclusionAu début du xvi e sièc<strong>le</strong>, <strong>le</strong> topos du theatrum mundi est très répandu, en particulier<strong>dans</strong> <strong>le</strong>s milieux érasmisants. La réf<strong>le</strong>xion menées par <strong>le</strong>s humanistes<strong>dans</strong> certaines œuvres religieuses <strong>et</strong> mora<strong>le</strong>s autour de la dignitas, l’ambiva<strong>le</strong>ncede la <strong>folie</strong>, l’aveug<strong>le</strong>ment, l’erreur <strong>et</strong> la Chute de l’Homme, trouve au <strong>théâtre</strong>– lieu où par définition l’être <strong>et</strong> <strong>le</strong> paraître s’exercent à de subtils jeux de passepasse– un espace privilégié pour exprimer un message : Fabula de Homine. id est, demundana scena. Folie, allégorie <strong>et</strong> <strong>théâtre</strong> <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>théâtre</strong> sont donc mis au servicede l’édification mora<strong>le</strong> du spectateur. M<strong>et</strong>tant en scène la dia<strong>le</strong>ctique âme-corps– intérieur-extérieur ; désir spirituel –vanités mondaines, <strong>le</strong>s auteurs ont recoursà un personnage, une figure <strong>et</strong> à un procédé qui ont en commun de superposer<strong>le</strong>s niveaux de signification : <strong>le</strong> fou, l’allégorie <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>théâtre</strong> <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>théâtre</strong>...<strong>«</strong> Pero notad con cordura, / esto que quiero avisar : / que el Diabro en su figura / es invisib<strong>le</strong>criatura / y por tal lo eis de notar. / Digo, en fin, que imaginemos, / cuando va en forma brutal,/ que no es visto ni lo vemos ; / si se cubriere sabremos / que va en forma corporal » (v. 131-140).<strong>«</strong> Yo estaré hacia el oriente / tú, Carne, á mi manderecha, / el Mundo contra poniente : / espiarmuy sabiamente… », (v. 401-404).44 <strong>Javier</strong> espejo surÓs – méta<strong>théâtre</strong>http://umr6576.cesr.univ-tours.fr/publications/m<strong>et</strong>atheatre


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