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Un lac, Philippe Grandrieux (2008)Dans l’échange si<strong>le</strong>ncieux d’A<strong>le</strong>xi avec <strong>le</strong>s arbres et <strong>le</strong>s montagnes,nous sentons poindre un murmure que lui seul <strong>au</strong>ra commencépar entendre. Et c’est la manière même dont il se rapporteà l’espace qui l’entoure qui nous suggère d’être attentifs à cequi peut se dire <strong>au</strong> plus profond de la forêt. Quelque chose passesecrètement <strong>au</strong>x pieds des arbres qui ordonne la présence d’A<strong>le</strong>xi,et rend pour lui impossib<strong>le</strong> tout départ.Loin de traduire un enracinement et une immobilité, il y a quelquechose de vertigineux dans ce pacte passé avec la nature. Le regardde Philippe Grandrieux, attentif à la h<strong>au</strong>teur — des arbres, desmontagnes — montre ce qu’il peut y avoir de démesuré dans notrerapport <strong>au</strong> monde. L’immensité vient se loger dans chaque tremb<strong>le</strong>mentde la caméra, qui ne peut pas prendre tout ce qui se donneà el<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> est là, touche nos yeux et nos oreil<strong>le</strong>s. Le vertigeest filmé en creux. Tout ce qui est montré nous donne l’indice dece qui nous est inaccessib<strong>le</strong>. Si nous ne <strong>le</strong>s voyons pas, nous entendonsqu’<strong>au</strong>-delà des sommets — des arbres, des montagnes — il yen a de plus h<strong>au</strong>ts encore. A<strong>le</strong>xi ne peut pas partir car pour lui,ici même, tout est trop riche, trop grand.Pour <strong>au</strong>tant, quelque chose peut manquer à cette démesure et larendre suffocante. L’immensité, si el<strong>le</strong> ne parvient pas à nousdonner du souff<strong>le</strong>, peut rapidement nous paralyser. Au contact del’étranger, la sœur d’A<strong>le</strong>xi est emportée vers d’<strong>au</strong>tres terres. Ily a une langue que la nature ne connaît pas, et un amour qu’el<strong>le</strong>ne peut pas nous donner. Cet amour est suffisamment puissant pourouvrir <strong>le</strong>s e<strong>au</strong>x du lac et écarter <strong>le</strong>s montagnes. C’est parce que<strong>le</strong> monde s’est ouvert devant el<strong>le</strong>, et qu’il a cessé d’être enclavédans <strong>le</strong>s montagnes, que la sœur connaît une véritab<strong>le</strong> mue. Sa voixmontre, par sa trans<strong>format</strong>ion même, que quelque chose a bougé dans<strong>le</strong> paysage. Ce n’est pas que sa voix qui a changé, l’écho rendupar <strong>le</strong>s espaces si<strong>le</strong>ncieux est différent. Le chant porte plus loin,et fraie vers des régions encore inconnues. Le frère ne l’entendque trop bien. Ta voix. Ce n’est plus comme avant.Rodolphe Olcèse

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