Relations sémantiques N1-N2 dans les composés timbre-poste

Avec le recul du temps, il n'est pas certain que le paradigme GT des années1970, avec le 'tout-syntaxique' qu'il impliquait, ait beaucoup fait progresser lacompréhension des composés timbre-poste. Barbaud (1971) reprochait aux étudesde la période 'classique' leur caractère taxinomique et non explicatif. On pourraitretourner l'argument contre les approches GT, dont beaucoup d'auteurs se sontlancés dans l'explication – ou plutôt la modélisation, ce qui n'est pas la mêmechose – sans avoir cherché à regarder de trop près la taxinomie.Les deux études à ce jour les plus décisives sont hors de l'orbite GT. Lapremière, menée sur les composés anglais par Hatcher (1960) à partir d'une sévèrecritique de la typologie de Jespersen, et la seconde, fragment d'un plus vaste ouvrages'affirmant comme syntaxique sur le « Nom épithète » (Noailly 1990), parviennentindépendamment à une quadripartition en deux paires de relations symétriques,symbolisables comme suit (en s'inspirant de la notation de Hatcher et avec sesexemples, étant entendu que l'ordre déterminant-déterminé est à inverser pour lefrançais):(B) B inclus dans A orange seed(A) A inclus dans B seed orangeA→B B destination, but de A cane sugarA←B A destination, but de B sugar caneDe telles relations sont à un niveau d'abstraction élevé, et représentent le pointd'aboutissement d'une démarche logique. La convergence de ces deux résultatsconstitue un argument prima facie en leur faveur, mais si l'on est d'un caractèresceptique, on ne se laissera pas séduire par l'esthétique symétrie de cettecatégorisation et on pourra ressentir le besoin de confronter cette classification avecses propres données.3. Les donnéesLa démarche suivie dans la présente recherche, résolument data driven, aconsisté à partir des composés timbre-poste collectés, l'auteur faisant correspondre àchacun une paraphrase et lui attribuant une catégorie relationnelle. Un obstacle detaille est très vite apparu, celui des ambiguïtés catégorielles. Pour prendre desexemples simples, un audit qualité est-il un audit portant sur la qualité, ou bien unaudit destiné à obtenir la qualité ; une promotion canapé a-t-elle un canapé commelocalisation ou comme source ; un local poubelles est-il un local qui contient lespoubelles, ou bien un local destiné aux poubelles ? Dans certains cas, le problèmeest mineur, car il suffit de se placer à un niveau de généralité suffisant pourregrouper les deux catégories, mais dans d'autres cas, on aura affaire à deuxcatégories inconciliables quel que soit le niveau d'abstraction auquel on monte. Detelles ambiguïtés, qui sont de nature à mettre à mal le plus étanche des classements,sont en fait une caractéristique importante de la classe des composés timbre-poste,voire des composés NN en général, et un effet de leur sous-spécification sémantique.Je propose le terme relation complexe pour de tels cas d'ambiguïté : en effet, on n'asans doute pas affaire à une simple difficulté de choix taxinomique découlant del'inaptitude du linguiste à prendre des décisions, mais bien à la coexistence, voire à