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Compte-rendu de la rencontre du mercredi 6 avril 2011 avec ...

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FORMATION SUR LE FILMCRIA CUERVOS <strong>de</strong> Carlos SauraLe <strong>mercredi</strong> 6 <strong>avril</strong> <strong>2011</strong>, l’association Collège au Cinéma 37 a invité à Tours Nico<strong>la</strong>s Lasnibat,réalisateur chilien, critique <strong>de</strong> cinéma et diplômé <strong>de</strong> <strong>la</strong> FEMIS, pour parler aux enseignants <strong>du</strong> film CriaCuervos programmé pour les élèves <strong>de</strong> 4 ème /3 ème en Indre-et-Loire.Nico<strong>la</strong>s Lasnibat rep<strong>la</strong>ce le film <strong>de</strong> Carlos Saura dans son contexte historique. Cria Cuervos est réaliséen 1975, <strong>la</strong> même année où le caudillo Francisco Franco décè<strong>de</strong>. Ce <strong>de</strong>rnier était un passionné <strong>de</strong>cinéma et le voyait comme un moyen <strong>de</strong> propagan<strong>de</strong>. De ce fait, il écrit le scénario <strong>de</strong> Raza, porté àl’écran en 1942 par José Luis Saenz <strong>de</strong> Heredia.I – IMPRESSIONSB<strong>la</strong>ndine Stévenard, enseignante <strong>de</strong> lettres au collège St Grégoire <strong>de</strong> Tours, exploitera le côtépolitique et réaliste <strong>du</strong> film <strong>avec</strong> ses élèves et ajoute que d’autres films lui ont montré que les élèves neréagissent pas comme les enseignants.Malgré <strong>la</strong> fin <strong>du</strong> franquisme en 1975, Nico<strong>la</strong>s Lasnibat trouve que <strong>la</strong> présence <strong>de</strong> Franco est encorevive dans l’inconscient <strong>de</strong>s vil<strong>la</strong>geois espagnols. Catherine Félix ajoute que l’histoire <strong>de</strong>s disparus enEspagne lui rappelle celle <strong>du</strong> Chili.Un réalisateur chilien <strong>avec</strong> qui Nico<strong>la</strong>s Lasnibat travaille a vécu trente ans en Espagne ; il vou<strong>la</strong>itréaliser un film sur les disparus <strong>de</strong> ce pays mais n’a pu le faire. Ayant travaillé sur une carte visant àlocaliser les endroits où ont été enlevé ces « disparus », il ironise sur cette Espagne « ma<strong>la</strong><strong>de</strong> » quiapparaît comme « ayant <strong>la</strong> varicelle ». Nico<strong>la</strong>s a fait un film sur l’histoire <strong>du</strong> Chili qui a rencontré unsuccès chez les Espagnols. Ces <strong>de</strong>rniers ont reconnu une part <strong>de</strong> leur histoire et d’eux-mêmes dans cetteoeuvre.II – LE PERSONNAGE D’ANALe premier p<strong>la</strong>n <strong>du</strong> film <strong>avec</strong> les photos <strong>de</strong> famille montre qu’Ana est née dans <strong>la</strong> souffrance <strong>avec</strong> <strong>de</strong>sforceps. Pour Nico<strong>la</strong>s Lasnibat, il semble que Carlos Saura, dans <strong>la</strong> volonté d’entourer son personnageprincipal d’une aura mystérieuse, se soit inspiré d’une icône <strong>du</strong> fantastique, Dracu<strong>la</strong>:- dès <strong>la</strong> première scène, Ana recule précipitamment quand <strong>la</strong> lumière se pose sur ses pieds,- dans un jeu entre Ana et sa mère, cette <strong>de</strong>rnière l’embrasse dans le cou puis fait mine <strong>de</strong> <strong>la</strong>mordre (Nosferatu <strong>de</strong> Murnau),- Ana a un hamster pouvant faire penser aux rats qu’ont les vampires.L’autre séquence montrant Ana comme une vampire est celle où elle se barbouille le visage <strong>de</strong> <strong>la</strong> terreaprès avoir enterré son cochon d’In<strong>de</strong> Roni.Quelques films qui font référence aux escaliers, dont <strong>la</strong> présence est très importante dans ce longmétrage:Dracu<strong>la</strong> <strong>de</strong> Ted Browning (1931)La splen<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s Amberson (The magnificent Amberson) d’Orson Welles (1942)La belle au bois dormant (Sleeping Beauty) <strong>de</strong> Disney (1959)Le p<strong>la</strong>n <strong>du</strong> père d’Ana dans son cercueil ressemble fortement à l’image <strong>de</strong> Franco à son enterrement.Les filles s’approchent <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s a<strong>du</strong>ltes dans une scène où elles se déguisent et repro<strong>du</strong>isent unedispute qu’elles ont sans doute observée.Cria Cuervos suit le personnage d’Ana, c’est le fil con<strong>du</strong>cteur. Toute <strong>la</strong> tension <strong>du</strong> film se tient dans sondésir <strong>de</strong> donner <strong>la</strong> mort. Est-elle capable <strong>de</strong> passer à l’acte ?A <strong>la</strong> fin <strong>du</strong> film, Irène, <strong>la</strong> sœur d’Ana, en racontant son rêve questionne le spectateur sur cet universintérieur particulier et étrange qu’elle semble nourrir également.III- UNE RÉALITÉ ESPAGNOLECarlos Saura montre par <strong>la</strong> fiction une réalité <strong>de</strong> l’Espagne sous Franco. Il évoque tout au long <strong>du</strong> film<strong>la</strong> religion, l’image <strong>de</strong> l’homme, <strong>la</strong> condition <strong>de</strong> <strong>la</strong> femme, <strong>la</strong> censure, <strong>la</strong> Mémoire et l’Histoire qui luisemblent chères, ainsi que <strong>la</strong> rigidité d’un système visant à formater les indivi<strong>du</strong>s. L’apparition unique<strong>de</strong> l’école à <strong>la</strong> fin <strong>du</strong> film souligne l’absence auparavant d’une réelle é<strong>du</strong>cation, d’une vraie « école <strong>de</strong><strong>la</strong> vie ».Document Association Collège au Cinéma 37


Sous sa dictature, Franco impose le catholicisme comme un modèle à suivre, un outil pour cadrer lesgens <strong>avec</strong> ce « mythe » effrayant <strong>du</strong> paradis et <strong>de</strong> l’enfer.La présence forte <strong>de</strong> <strong>la</strong> religion dans le cadre où évoluent les personnages nous est montré dès ledébut <strong>du</strong> film par cette question récurrente <strong>de</strong> Maité : « Quand vais-je faire ma premièrecommunion ? ». Ana, quant à elle, porte une croix qui appartenait à sa mère autour <strong>du</strong> cou.Les hommes apparaissent vêtus <strong>de</strong> l’uniforme <strong>de</strong>s soldats <strong>de</strong> Franco. Ils s’imposent, font leur loi et ne sejustifient en rien dans leurs actes. La Liberté est leur liberté. Les autres doivent suivre les règles. CarlosSaura souligne leur hypocrisie. Ils sont a<strong>du</strong>ltères et ne suivent pas <strong>la</strong> morale qu’ils imposent aux autres.La mère d’Ana était une femme au foyer. Elle a renoncé à son métier, un métier artistique qui plus est.Ce<strong>la</strong> nous renvoie à <strong>la</strong> méfiance <strong>de</strong> Franco pour l’Art et sa capacité à faire passer un message. Lamère se révolte mais le dictat <strong>de</strong> son mari et sa souffrance <strong>la</strong> tueront.La tante d’Ana, Paulina, est un véritable substitut <strong>du</strong> père. Représentant, l’ordre, <strong>la</strong> rigueur et l’autorité,elle symbolise également une censure. Elle empêche Rosa (représentante <strong>du</strong> peuple) <strong>de</strong> parler à Ana<strong>de</strong> sa mère ou <strong>de</strong> son passé.La grand-mère d’Ana est le vestige d’une Espagne avant l’arrivée <strong>de</strong> Franco au pouvoir. Personne ne<strong>la</strong> regar<strong>de</strong> mais elle est bien là. Elle fixe son histoire morcelée sur les murs <strong>de</strong> <strong>la</strong> maison (toutes sesphotos) et ne semble pas en accord <strong>avec</strong> Ana (née sous le régime <strong>de</strong> Franco) sur ses souvenirs. Elleparaît effacée, mais on ne peut <strong>la</strong> faire disparaître. Elle ne veut pas mourir.Carlos Saura nous rappelle ici que <strong>la</strong> véritable histoire <strong>de</strong> l’Espagne n’a jamais été enseignée à sagénération. Malgré les efforts <strong>du</strong> franquisme pour <strong>la</strong> faire disparaître, elle subsiste encore. Elle esttrouble mais bien présente.IV – QUELQUES RÉFÉRENCES CINÉMATOGRAPHIQUESa) La scène où Rosa montre ses seins peut être mise en parallèle à une scène d’Amarcord <strong>de</strong> Fe<strong>de</strong>ricoFellini (1974).b) La musique :Lorsque Porque te vas (interprétée par <strong>la</strong> chanteuse, Jeannette) commence, Ana se retrouve dans sabulle, dans son mon<strong>de</strong>. Cette chanson a un son pop pour symboliser une liberté fraîchement obtenue.c) La métaphore <strong>du</strong> verre <strong>de</strong> <strong>la</strong>it :Le verre <strong>de</strong> <strong>la</strong>it est l’objet <strong>de</strong> l’assassin comme dans le film Soupçons d’Alfred Hitchcock (1941).Trente minutes après le début <strong>du</strong> film, le spectateur s’aperçoit que Ana n’a pas tué son père. Son« poison » s’avère être en fait <strong>du</strong> bicarbonate. Dans Cria Cuervos, le verre <strong>de</strong> <strong>la</strong>it est l’objet <strong>du</strong>meurtrier comme dans le film d’Hitchcock.Deux autres « armes » sont dans le film <strong>de</strong> Carlos Saura :- Les yeux d’Ana qui ont le pouvoir magique <strong>de</strong> montrer l’imaginaire,- Le pistolet que brandit Ana sur sa tante Paulina et sur Nico<strong>la</strong>s, l’ami <strong>de</strong> <strong>la</strong> famille.Carlos Saura sait mêler ou changer les temporalités dans un même p<strong>la</strong>n (p<strong>la</strong>n où Rosa, <strong>la</strong> bonne, coiffeAna) ou dédoubler son personnage principal lorsque celle-ci se voit sauter <strong>du</strong> toit voisin.d) Visionnement <strong>de</strong> quelques extraits <strong>de</strong> films :La Caza <strong>de</strong> Carlos Saura (http://www.abc-lefrance.com/fiches/Caza.pdf)Ce film, très silencieux, contemp<strong>la</strong>tifs et plein <strong>de</strong> sens, <strong>de</strong>vient un film c<strong>la</strong>ssique <strong>du</strong> cinéma espagnol.L’esprit <strong>de</strong> <strong>la</strong> ruche <strong>de</strong> Victor Erice (1972)http://www.youtube.com/watch?v=xVS7xFsPWPACe film pourrait passer pour un film <strong>de</strong> Carlos Saura car on y retrouve Ana Torrent et le thème <strong>de</strong> <strong>la</strong>Mort traitée à travers son personnage.Extrait <strong>de</strong> Cria Cuervos : <strong>la</strong> mère souffrante (43 min 29 sec)Cette scène fait écho à une séquence <strong>du</strong> film Cris et chuchotements d’Ingmar Bergman (1972).Dans le film <strong>de</strong> Carlos Saura, tout tourne autour <strong>de</strong> <strong>la</strong> Mort. La disparition <strong>de</strong> <strong>la</strong> mère entraîne chezAna <strong>la</strong> perte, outre d’une certaine innocence, <strong>de</strong> quelque chose d’insaisissable.Extrait <strong>de</strong> La Prima Angelica <strong>de</strong> Carlos Saura (1973)La <strong>de</strong>rnière scène <strong>de</strong> La Prima Angelica est <strong>la</strong> première scène <strong>de</strong> Cria Cuervos : dans La Prima Angelica,<strong>la</strong> cousine coiffe sa fille tout comme Maria coiffe sa fille, Ana, dans Cria Cuervos. De plus, l’actrice quijouait <strong>la</strong> fille interprétait également <strong>la</strong> cousine jeune.Document Association Collège au Cinéma 37


Extrait d’Elisa, vida mia <strong>de</strong> Carlos Saura (1977)Carlos Saura a tourné une scène où <strong>de</strong>ux histoires se mêlent dans les p<strong>la</strong>ns. Il éc<strong>la</strong>te l’espace et letemps. Le personnage <strong>de</strong> Géraldine Chaplin regar<strong>de</strong> sa mère (également jouée par l’actrice) et <strong>la</strong>petite fille qu’elle était (jouée par Ana Torrent), et qui l’observe également. Le père ne présente quantà lui aucun changement physique dans le film alors que l’histoire se déroule sur une longue pério<strong>de</strong>.Extrait <strong>de</strong> La vie criminelle d’Archibald <strong>de</strong> <strong>la</strong> Cruz <strong>de</strong> Luis Bunuel (1955)Le spectateur y retrouve <strong>de</strong>s objets simi<strong>la</strong>ires comme <strong>la</strong> boîte à musique (comparable au tourne disqued’Ana dans Cria Cuervos) et le verre <strong>de</strong> <strong>la</strong>it.Extrait <strong>de</strong> Cria Cuervos <strong>de</strong> Carlos Saura : p<strong>la</strong>n <strong>du</strong> regard caméra d’Ana (1 h 29 min 43 sec)Dans cette scène, elle nous dit qu’elle va tuer sa tante comme dans le film Monika d’Ingmar Bergman(1953).Nico<strong>la</strong>s Lasnibat montre cette affiche franquiste anonyme<strong>de</strong> 1937« Espagne, gui<strong>de</strong> spirituel <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> »La scène où Ana montre sa croix à Rosa fait référence à Elvampiro <strong>de</strong> <strong>la</strong> autopista <strong>de</strong> José Luis Madrid (1972).Nico<strong>la</strong>s Lasnibat conclue son exposé en soulignant <strong>la</strong> richesse <strong>de</strong> ce film qui nécessite une préparationavant <strong>la</strong> projection <strong>avec</strong> les élèves et aussi une explicitation <strong>de</strong> <strong>la</strong> symbolique après <strong>la</strong> projection.L’association Collège au Cinéma 37 remercie Nico<strong>la</strong>s Lasnibat pour sa venue à Tours et son analyse <strong>du</strong>film <strong>de</strong> Carlos Saura, Cria Cuervos.Document Association Collège au Cinéma 37

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