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Au Bonheur des Dames - Lecteurs.com

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Il était excellent. Elle re<strong>com</strong>mençait à espérer, quand une dernièrequestion la gêna.– Avez-vous d’autres références à Paris ?… Où demeurez-vous ?– Chez mon oncle, murmura-t-elle, hésitant à le nommer, craignantqu’on ne voulût jamais de la nièce d’un concurrent. Chez mon oncle Baudu,là, en face.Du coup, Mouret intervint une seconde fois.– Comment, vous êtes la nièce de Baudu !… Est-ce que c’est Baudu quivous envoie ?– Oh ! non, monsieur !Et elle ne put s’empêcher de rire, tant l’idée lui parut singulière. Ce futune transfiguration. Elle restait rose, et le sourire, sur sa bouche un peugrande, était <strong>com</strong>me un épanouissement du visage entier. Ses yeux grisprirent une flamme tendre, ses joues se creusèrent d’adorables fossettes,ses pâles cheveux eux-mêmes semblèrent voler, dans la gaieté bonne etcourageuse de tout son être.– Mais elle est jolie ! dit tout bas Mouret à Bourdoncle.L’intéressé refusa d’en convenir, d’un geste d’ennui. Clara avait pincéles lèvres, tandis que Marguerite tournait le dos. Seule, M me <strong>Au</strong>rélie approuvaMouret de la tête, quand il reprit :– Votre oncle a eu tort de ne pas vous amener, sa re<strong>com</strong>mandation suffisait…On prétend qu’il nous en veut. Nous sommes d’esprit plus large,et s’il ne peut occuper sa nièce dans sa maison, eh bien ! nous lui montreronsque sa nièce n’a eu qu’à frapper chez nous pour être accueillie…Répétez-lui que je l’aime toujours beaucoup, qu’il doit s’en prendre, nonpas à moi, mais aux nouvelles conditions du <strong>com</strong>merce. Et dites-lui qu’ilachèvera de se couler, s’il s’entête dans un tas de vieilleries ridicules.Denise redevint toute blanche. C’était Mouret. Personne n’avait dit sonnom, mais il se désignait lui-même, et elle le devinait maintenant, elle<strong>com</strong>prenait pourquoi ce jeune homme lui avait causé une telle émotion,dans la rue, au rayon <strong>des</strong> soieries, à présent encore. Cette émotion, oùelle ne pouvait lire, pesait de plus en plus sur son cœur, <strong>com</strong>me un poidstrop lourd. Toutes les histoires contées par son oncle, revenaient à sa mémoire,grandissant Mouret, l’entourant d’une légende, faisant de lui lemaître de la terrible machine, qui depuis le matin la tenait dans les dentsde fer de ses engrenages. Et, derrière sa jolie tête, à la barbe soignée, auxyeux couleur de vieil or, elle voyait la femme morte, cette M me Hédouin,dont le sang avait scellé les pierres de la maison. Alors, elle fut reprise dufroid de la veille, elle crut qu’elle avait simplement peur de lui.48

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