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DOSSIER PSYCHO-ONCOLOGIE - Institut Jules Bordet Instituut

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D O S S I E RP S Y C H O - O N C O L O G I EUne étude menée par l’<strong>Institut</strong><strong>Jules</strong> <strong>Bordet</strong> montre que les famillesdoivent être mieux soutenuesYves Libert, Clinique de Psycho-oncologie et des Soins Supportifs,<strong>Institut</strong> <strong>Jules</strong> <strong>Bordet</strong> et Unité de Recherche en Psychosomatique et Psycho-oncologie,Université Libre de Bruxellesyves.libert@bordet.beDans un avenir proche, une famille sur trois sera confrontée aucancer d’un de ses membres. Chaque famille ainsi touchéepar la maladie sera amenée à développer des mécanismesd’adaptation à la maladie et à ses conséquences. On sait aujourd’huique l’efficacité de ces mécanismes dépendra de la capacitéde la famille à modifier la répartition des rôles et les modes defonctionnement selon les demandes et difficultés liées à la maladieet à ses conséquences, à développer une communicationouverte, à se soutenir et à se sentir soutenus les uns les autres,à créer et maintenir des liens émotionnels et affectifs satisfaisants.Dans les phases terminales et palliatives s’ajoutera lacapacité de la famille à résoudre des conflits dont la fréquencepeut augmenter en raison des décisions majeures à prendre dansce contexte.Parallèlement à cet accroissement du nombre de familles confrontéesau cancer, l’augmentation de la survie des patientsatteints d’un cancer, la réduction du nombre et de la durée deleurs hospitalisations amènent dès aujourd’hui de plus en plussouvent les proches à consacrer du temps et de l'énergie à leurprise en charge quotidienne. Pour faire face à la maladie, c'estsouvent le partenaire qui prend le principal de cette charge; c’estla personne qui lui apporte le plus de soutien et qu’il considèrecomme la source d'aide la plus appropriée et la plus satisfaisante.Pour certains patients, c’est un autre membre de la familleou un autre proche qui prendra ce rôle.Deux cent quatre-vingt quatre couples composés de patientsatteints d’un cancer et de leur proche aidant principal ont étéinvités à prendre part à une étude nationale multicentrique dontl’objectif principal était d’évaluer quantitativement et qualitativement,l’aide que les proches aidants principaux apportent auxpatients, leurs propres difficultés psychosociales et leur bienêtreémotionnel. Les résultats de cette étude démontrent queles proches aidants principaux consacrent un temps considérableà apporter diverses formes de soutien informationnel,émotionnel et pratique à leur proche malade. Signalons queles proches peuvent également distraire le patient et tout particulièrementlors d’hospitalisations de longue durée. Ces résultatsrejoignent ceux d’autres études menées auprès de patientstraités par chimiothérapie et de leurs proches qui montrent quesoutenir un proche atteint d’un cancer n’implique pas moinsde 63 compétences pouvant être regroupées en 9 catégoriesprincipales: observer tout changement, interpréter ceux-ci, prendredes décisions, poser des actes, adapter la prise en charge,évaluer, rechercher et utiliser diverses ressources, manipulerphysiquement le patient, impliquer le malade dans les soins,interagir avec les intervenants médicaux.Si cette prise en charge peut générer un sentiment d’accomplissement,les seconds résultats de l’étude nationale belgedémontrent qu’elle amène également la majorité des preneursen charge principaux à être les témoins privilégiés des nombreusesdifficultés vécues par leur proche malade. Les patientsinclus dans l’étude présentent, en effet, dans leur grande majorité,une à plusieurs difficultés physiques, psychosociales, conjugales,sexuelles ainsi que des difficultés liées aux conséquencesdes traitements (Libert et al. 2006). Outre ces difficultés, d’autresliées aux interactions avec l'équipe soignante peuvent survenir.Face à ces problèmes, 20 à 60% des proches aidants principauxrapportent être personnellement en difficulté (Libert et al. 2007).Les troisièmes résultats de l’étude nationale belge démontrentquant à eux qu’être le proche aidant principal d’un patientatteint d’un cancer n’exclut pas le risque de présenter desdifficultés personnelles. Ainsi, la majorité des preneurs en chargeprincipaux présentent eux-mêmes des difficultés au niveauphysique, psychosocial et sexuel de même que des difficultésde communication avec leur partenaire, et ceci indépendammentde la maladie de leur proche (Table 1).Table 1. Les difficultés psychosociales des prochesaidants principaux les plus fréquentes (n = 384)n %Détresse psychologique 231 82Inquiétudes 221 79Dysfonctions sexuelles 112 59Loisirs 152 54Fonctionnement cognitif 134 48Mobilité 129 46Communication conjugale 116 46Rencontres amoureuses 11 42Intérêt sexuel 110 40Communication avec les proches 106 38La présence de ces difficultés personnelles, la perception desdifficultés vécues par le patient, son état physique et la quantitéd’aide donnée de même que l’impact de cette aide sur la viequotidienne, peuvent induire chez les proches un état de détresseémotionnelle. Ainsi, 25 à 54% des proches inclus dans cetteétude nationale présentent une détresse émotionnelle d’unniveau psychiatrique. Si cette détresse émotionnelle peut êtreconsidérée comme normale dans une période d’adaptation àcertaines phases critiques de la maladie (l’annonce du diagnostic,la confrontation aux effets secondaires des traitements,l’annonce d’une récidive, etc.), son évaluation et sa prise encharge éventuelle doivent faire l’objet d’une attention touteparticulière.L’ensemble des résultats de l’étude nationale belge illustre doncl’importance des difficultés et de la détresse émotionnelle desproches aidants des patients atteints d’un cancer, et appelle àla mise en place d’interventions spécifiques de prévention,d’information, d’éducation et de soutien telles que celles qui sontmises en place par l’équipe de Psycho-oncologie de l’<strong>Institut</strong><strong>Jules</strong> <strong>Bordet</strong>. L’objectif commun de ces interventions est defavoriser l’adaptation psychologique au cancer et à sesconséquences.Des prises en charge individuelles y sont proposées aux prochesdes patients afin de traiter leur détresse émotionnelle, de renforcerle soutien naturellement apporté au patient tout en recherchantà maintenir l’équilibre entre celui-ci et le bien-être individuel. Unprojet Psycho-oncologique de l’<strong>Institut</strong> <strong>Jules</strong> <strong>Bordet</strong> centreradans un avenir proche ces interventions sur une période particulièrementcritique de la maladie, celle qui suit l’annonce d’unerécidive (cf l’article de Madame Nicole Delvaux dans ce numéro).Des prises en charges conjugales et familiales visent par ailleursà soutenir les différentes capacités d’adaptation du systèmefamilial voire à les développer. Relancer la communication ausein de la famille mais aussi favoriser la communication entre lafamille et l’équipe soignante constitueront les principaux leviersthérapeutiques de ces interventions.Par ses effets tant psychologiques que physiques, la survenuedu cancer a des répercussions sur l’entièreté du systèmefamilial. Elle modifie les modes de communication ainsi que lesrôles et relations existant entre les différents membres de lafamille. Le cancer induit une détresse chez le patient et sonconjoint. Cette perturbation de la détresse les rend moins disponiblespsychologiquement pour assurer leur rôle parental.L’impact du cancer sur les enfants est par ailleurs l’une des principalespréoccupations des patients et de leur conjoint. Leurstatut de parent influence leur prise de décision par rapport àleur traitement. De plus, les patients et leurs proches rapportentdes difficultés à assumer leur rôle parental auprès de leursenfants 1 . Ils se posent aussi de nombreuses questions sur lesinformations à transmettre aux enfants: Comment parler ducancer? Que leur dire? Quand? Comment vont-ils réagir? Lesenfants sont de bons observateurs qui perçoivent les modificationssoudaines du fonctionnement familial et les changementsd'humeur de leurs parents. Ne pas donner d'explication à ceschangements à l'enfant, est en général source d'angoisse poureux. D'ailleurs, la détresse des enfants à tendance à diminuerlorsqu'ils sont informés du diagnostic de leur parent.Actuellement, peu d’études se sont intéressées au vécu et auxbesoins de l’enfant dont l’un des parents est atteint d’un cancer.À l'heure actuelle, les données 2 indiquent que la confrontationau cancer d’un parent peut entraîner chez près d'un tiers desenfants et des adolescents, des changements de comportementainsi que des difficultés émotionnelles et relationnelles. De plus,l'enfant est confronté à une menace de séparation ce qui peutengendrer des sentiments d'abandon, de perte et d'insécurité.Les progrès médicaux ont transformé les proches des patientsen acteurs centraux de la prise en charge. Soutenir ces proches,les aider dans leurs rôles de preneurs en charge informels et enfaire des partenaires des équipes soignantes constitue l’objectifmajeur des interventions mises en place par l’équipe de Psychooncologiede l’<strong>Institut</strong> <strong>Jules</strong> <strong>Bordet</strong>.■Références1. Libert Y, Merckaert I, Etienne A-M,, Farvacques C, Liénard A, Messin S,Meunier J, Milani M, Moucheux A, Reynaert C, Salis J, Slachmuylder J-L,Razavi D, Les besoins psychosociaux et le soutien apporté patients atteintsd’un cancer: une étude nationale belge, Oncologie 2006; 8 :465-4762. Libert Y, Merckaert I, Etienne A-M, Farvacques C, Liénard A, Messin S,Meunier J, Milani M, Moucheux A, Reynaert C, Salis J, SlachmuylderJ-L, Razavi D, Une «toxicité» sous-estimée: les impacts psychosociauxdes traitements sur les proches aidants principaux, Oncologie 2007, 9,HS26-HS36.<strong>Bordet</strong>’n Family: un projet de soutien destinéà aider les enfants à mieux faire face à la maladiecancéreuse d’un parentAurore Liénard, Julie Beckers. Clinique de Psycho-oncologie et des Soins Supportifs,<strong>Institut</strong> <strong>Jules</strong> <strong>Bordet</strong> et Unité de Recherche en Psychosomatique et Psycho-oncologie,Université Libre de Bruxelles – aurore.lienard@bordet.beDans le contexte des affections cancéreuses,il convient également deconsidérer le processus de «parentification».Il s’agit d’un processus parlequel un enfant endosse le rôle de parent vis-à-vis de sespropres parents. Jusqu'à un certain niveau, c'est un processusnormal qui peut responsabiliser l’enfant et traduire une solidaritébien naturelle. Cependant, une «parentification» prolongéepeut être délétère pour un enfant lorsque les exigences imposéesdépassent son degré de développement.Les enfants et les adolescents vont réagir au cancer de leurparent de différentes façons. Leur réaction va dépendre d’unesérie de caractéristiques liées non seulement à l’enfant maiségalement au parent malade, à la famille, à la maladie et auxtraitements 3 . Les éléments essentiels à l’adaptation de l’enfantsemblent être l’adaptation psychologique du parent malade,une relation maritale satisfaisante pour les parents et une communicationouverte au sein de la familles 2; 4 . Si les niveaux dedifficultés et de détresse psychologiques chez les enfants neparaissent pas atteindre le seuil de trouble psychiatrique, leursouffrance nécessite souvent une aide psychologique. Desinterventions psycho-éducationnelles et psychothérapeutiquesont été mises en place afin d'aider les familles à faire face aucancer. Celles-ci ont généralement pour objectif de favoriserla communication au sein de la famille et d'améliorer les stratégiesd'adaptation. Les quelques études existant à ce sujetrapportent des effets positifs des interventions: moins d’anxiétéet une meilleure circulation de la parole au sein de la famille 2-5 .>>>JOURNAL DU RÉSEAU CANCER DE L’UNIVERSITÉ LIBRE DE BRUXELLESN°12 – JANVIER-FÉVRIER-MARS 200967JOURNAL DU RÉSEAU CANCER DE L’UNIVERSITÉ LIBRE DE BRUXELLESN°12 – JANVIER-FÉVRIER-MARS 2009

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