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par Céline Chazalviel

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Dewar & Gicquel<br />

Sans titre 2007<br />

Sculpture en kaolin. 180 x 800 x 1000 cm<br />

Vue de l’exposition Hamsterwheel, Le Printemps de septembre, Toulouse, 2007<br />

Production Le Printemps de septembre, Toulouse<br />

Courtesy Galerie Loevenbruck, Paris<br />

Photo Philippe Migeat<br />

Les Frères Chapuisat<br />

L’Incomplétude permanente de la vie 2009<br />

Photo Stéphane Bellanger/Estuaire NantesSaint-Nazaire 2009<br />

La fin des années 1990 marque le retour en<br />

grâce de la sculpture, d’œuvres autonomes dont<br />

la présence s’exprime <strong>par</strong> leur seule matérialité.<br />

Il serait bien sûr illusoire de croire à une<br />

réap<strong>par</strong>ition subite de cette pratique, qui nierait<br />

les systèmes de diffusion et le temps nécessaire<br />

12<br />

pour cerner plus globalement l’implication<br />

d’artistes qui n’ont pas attendu leur heure,<br />

13<br />

celle de l’exposition et de la reconnaissance,<br />

pour fixer, de manière plus ou moins aboutie,<br />

les enjeux de leurs recherches. Le fait est<br />

pourtant là : les années 2000 braquent leurs<br />

projecteurs, du moins en <strong>par</strong>tie, sur une<br />

approche renouvelée de la sculpture. Se pose<br />

d’emblée la question des raisons et des stratégies<br />

d’émergence, à un moment qui ne semble<br />

rien devoir au hasard tout en ap<strong>par</strong>aissant<br />

comme magique, d’attitudes artistiques qui,<br />

bien que ne cherchant pas à se constituer en<br />

mouvement, nourrissent suffisamment de<br />

vecteurs communs pour dessiner les contours<br />

d’une tendance. Si nous manquons cruellement<br />

de recul historique pour en juger – la pratique<br />

de ces artistes reste après tout engagée dans<br />

le présent, nous pouvons toutefois tenter<br />

d’apporter quelques hypothèses. Avec un réel<br />

sens de la polémique, Éric Troncy s’étonnait<br />

de l’annonce d’un « retour de la sculpture », se<br />

demandant « si elle avait fait bon voyage » 1 programmes artistiques et si, comme toutes<br />

œuvres, les propositions des Pierre Huyghe<br />

et consorts relèvent d’une mise en forme, la<br />

pratique sculpturale – comme celle de la peinture<br />

<strong>par</strong> ailleurs – ap<strong>par</strong>aît comme la possibilité de<br />

réinscrire l’art à l’intérieur de ses frontières,<br />

comme un acteur formidablement physique<br />

d’une exposition de nouveau ancrée dans le<br />

présent de la perception. Ces artistes adoptent<br />

également une attitude plus pragmatique<br />

vis-à-vis d’un marché de l’art en plein boom,<br />

toujours capable de négocier la moindre trace<br />

d’expérience. D’autres, sûrement de mauvaises<br />

langues, diront qu’ils produisent des objets<br />

plus facilement écoulables.<br />

Le retour du refouLé<br />

Sculpture is back! Très bien mais laquelle ? Le<br />

critique anglais JJ. Charlesworth la présente<br />

sous la forme improvisée d’un « nouveau<br />

formalisme »<br />

, et<br />

louait le talent de mise en forme d’artistes<br />

comme Philippe Parreno et Rirkrit Tiravanija.<br />

Ces propos permettent d’ancrer ce retour<br />

présupposé dans un rapport d’antagonisme<br />

avec la décennie qui l’a précédée, caractérisée,<br />

pour faire vite, <strong>par</strong> une dématérialisation de<br />

l’objet d’art, un questionnement du statut du<br />

spectateur, de l’institution et de l’exposition, un<br />

intérêt pour les formats extérieurs au champ<br />

strictement artistique et <strong>par</strong> la tentative de<br />

s’inscrire directement dans le réel, <strong>par</strong> le biais<br />

des flux économiques et sociaux existants. S’il<br />

faudrait sûrement nuancer dans une étude<br />

<strong>par</strong>ticulière les différences entre ces deux<br />

2 interprétatif tout en proposant au spectateur<br />

une entité visuelle reposant sur la présence<br />

concrète de l’œuvre dans l’espace. Parmi ces<br />

artistes, JJ. Charlesworth cite Jim Lambie et<br />

Gary Webb, auxquels nous ajouterons Delphine<br />

Coindet. Tout en évoquant le travail d’Anthony<br />

Caro et David Annesley, les œuvres de ces trois<br />

artistes convoquent en un même objet un<br />

faisceau de références qui, bien que familières,<br />

restent difficilement identifiables. À l’instar<br />

de Robert Grosvenor, ils produisent des pièces<br />

génériques valant pour elles-mêmes, malgré un<br />

background historique sur lequel les tentatives<br />

d’expertises du spectateur viennent s’échouer.<br />

Si la question des matériaux était fortement<br />

contenue <strong>par</strong> le formalisme historique, elle<br />

relève ici d’une certaine importance : Lambie<br />

avec le vinyl et le scotch, Webb avec le plexiglas<br />

et Coindet avec ses surfaces laquées et ses objets<br />

recouverts de skaï ou de fourrures semblent<br />

, qui se positionnerait en porte- plus ancrer leurs sculptures, avec un certain<br />

à-faux contre la sculpture hyperréaliste et goût pour le baroque, dans des références<br />

anthropomorphique d’un Duane Hanson, explicites à la société de consommation et à la<br />

dont les dérives s’exprimeraient dans la fasci- séduction pop que dans les formes désinvesties<br />

nation populiste pour le trash et le morbide de du minimalisme. Autre infidélité au modèle,<br />

certains Young British Artists comme les frères les titres de Jim Lambie, comme Shakira,<br />

Chapman et dans la circonscription d’un renvoient explicitement à l’univers nocturne<br />

médium destiné, comme chez Maurizio des dance floors et de la pop music, tandis que<br />

Cattelan, à devenir le réceptacle d’un discours ceux de Delphine Coindet, comme Choco ou<br />

politique et critique. Dans leur volonté de Chérie-chérie, apportent au spectateur, non sans<br />

contourner l’aspect « bavard » et l’immédiateté ambiguïtés, de possibles clés d’interprétation.<br />

d’un art <strong>par</strong>fois trop littéral ou informatif, les Bien qu’incarnées, ces œuvres n’en perdent<br />

artistes regardent à nouveau les productions pas pour autant leur caractère de surface,<br />

des années 1960, qui incarnent, de la sculpture n’esquissant qu’à peine, comme le décor d’une<br />

abstraite anglaise au minimalisme, la dernière pièce qui ne serait pas jouée, les possibilités<br />

période où l’œuvre existait en et <strong>par</strong> elle- d’un récit lacunaire, n’imposant <strong>par</strong> avance<br />

même comme objet formel délivré de toutes aucune interprétation.<br />

significations extérieures aux questions de<br />

l’ontologie de l’art. Ils ne tentent cependant À base de popopopop<br />

pas de rejouer les enjeux autonomistes et Un certain nombre d’artistes investissent les<br />

essentialistes du modernisme greenbergien, surfaces neutres et lisses du minimalisme<br />

mais cherchent dans l’histoire les stratégies de sens et de fantasmes qui, s’ils ne se don-<br />

leur permettant d’éviter le cloisonnement nent pas à première vue, sont suffisamment

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