Introduction à la réflexion philosophique

10 Introduction générale
sensibles ; déclarer « réalité » le seul sensible est une ingénuité dont
on fait habituellement porter la responsabilité aux sciences
modernes ; les « réalités » renvoient plutôt chacune à un « événement
» et ensemble à ce que nous appelons le « réel » (au singulier),
c’est-à-dire à une profondeur qui n’apparaît qu’au travail de l’esprit.
La quatrième et dernière étape affronte enfin la question du principe
premier qui oriente depuis toujours la question philosophique la
plus radicale, en considérant cependant que le projet unificateur de
la raison humaine, qui risque depuis toujours d’oublier les réalités
singulières, peut cependant être maintenu droitement. La philo -
sophie contemporaine est très attentive au péril de la globalisation
où toutes les spécificités humaines disparaissent ; elle rappelle
l’origi nalité de tout « ce qui est », des personnes humaines en tout
premier lieu, sans pour autant annuler le projet traditionnel de la
philosophie qui est de penser l’« un ». Elle poursuit en cela le vieux
projet des Grecs, penser à la fois l’« un » et les « multiples », un projet
toujours d’actualité.
Dans le titre, Introduction à la réflexion philosophique, le terme
« réflexion » indique un retournement de la pensée qui, d’abord
élancée vers les « choses », revient sur son activité pour se l’attribuer,
la vérifier et en découvrir les possibilités et les conditions. L’ouvrage
présenté ici introduit à la réflexion, qui est l’âme de la philosophie
depuis toujours. Si l’on tient à caractériser notre projet et le distinguer
de tant d’autres propositions d’introduction « à » la philo -
sophie, ne pourrions-nous pas dire que nous tentons ici une
introduction « à » la « philosophie réflexive » ? Mais y a-t-il une
philosophie qui ne soit pas « réflexive », qui ne soit pas « dans » la
réflexion, qui soit sans réflexion ? Le syntagme « philosophie
réflexive » n’est-il pas un pléonastique ?