ÉVÉNEMENT ÉVÈNEMENT ROCKETMAN I N T E R V I E W C’EST L’ÉVÈNEMENT CINÉMATOGRAPHIQUE ET MUSICAL DU PRINTEMPS, EN SALLES LE 29 MAI : LA VIE D’ELTON JOHN RACONTÉE DANS UN BIOPIC ÉTOURDISSANT, DÉCRYPTÉ ICI PAR SON RÉALISATEUR, DEXTER FLETCHER. PROPOS RECUEILLIS PAR CÉDRIC PAGE Taron Egerton et Dexter Fletcher. 6 LES CINÉMAS PATHÉ ET GAUMONT
ÉVÉNEMENT ÉVÈNEMENT Parmi toutes les chansons d’Elton John, pourquoi avoir choisi Rocketman, qui date de 1972, comme titre du film ? Disons que le film parle de quelqu’un qui s’envole et plane très haut ! C’est l’histoire d’une personnalité publique qui part en voyage et se retrouve seule, bien qu’ayant tous les regards braqués sur elle. C’est un titre très évocateur… Presque un titre de film de super-héros… Oui, d’une certaine façon ! Superman, Batman, Rocketman… Peut-être que certains penseront qu’il s’agit du nouveau Marvel (Rires) ! <strong>Mai</strong>s, même si Elton John en tant qu’artiste a fait des choses extraordinaires, nous nous intéressons surtout aux aspects humains de sa vie. <strong><strong>Le</strong>s</strong> combats qu’il a menés pour atteindre la lumière. <strong>Le</strong> thème du film, c’est la recherche de son identité… Oui, exactement. Elton entame un voyage pour échapper à son passé, mais il va si loin qu’il perd contact avec qui il est vraiment et doit trouver le chemin du retour. C’est un sujet intéressant à traiter à travers des chansons, et en particulier à travers les chansons d’Elton John. On a envisagé le film comme une comédie musicale : les personnages entonnent des chansons dans plein d’endroits différents, à la maison, dans la cuisine, dans la rue, dans une piscine… Ce sentiment d’isolement, de solitude, dont parle le film, c’est propre à Elton John, ou c’est le lot de toutes les stars ? Quand on regarde son histoire, on se rend compte qu’Elton John est quand même un cas à part. En 1974-75, il était responsable de 4 % de la totalité des ventes de disques dans le monde ! C’est un chiffre stupéfiant. En termes de notoriété, il est assez inégalé. Et ça fait quarante ans que ça dure ! C’est intéressant de réfléchir au coût humain de tout ça. Vous avez travaillé sur Bohemian Rhapsody. Un bon entraînement pour Rocketman ? <strong><strong>Le</strong>s</strong> deux films n’ont en fait pas grandchose à voir. Bohemian Rhapsody est un biopic, Rocketman une comédie musicale. Si on montait Rocketman sur scène, celui qui interprète Elton John devrait chanter lui-même. Bohemian Rhapsody raconte la vie d’un musicien, mais le film n’aurait pas été forcément différent s’il avait été question d’un astronaute ou d’un aviateur. Biopic et comédie musicale : à mes yeux, ce sont deux genres totalement différents. Ici, c’est Elton John le narrateur, on ne raconte pas l’histoire à la troisième personne, on ne le regarde pas d’un point de vue extérieur. On est dans sa vie. <strong>Le</strong> film commence au moment où il doit aller en cure de désintoxication et décide de nous raconter son histoire. C’est un mécanisme narratif très puissant. Quelles étaient vos références ? Que le spectacle commence (Bob Fosse, 1979), un film extraordinaire. <strong>Le</strong> principe est un peu le même. Un homme, au soir de sa vie, regarde derrière lui, réfléchit à son existence, et les numéros musicaux viennent s’insérer dans cette « remémoration ». Ce n’est pas une comédie musicale au sens traditionnel, comme Chantons sous la pluie ou La La Land. Il y a des moments sombres dans le film car il y a en a eu dans la vie d’Elton. Il faut en passer par là pour atteindre la lumière. Mon autre référence, toujours signée Bob Fosse, c’est Cabaret (1972). Pour obtenir le poste de réalisateur de Rocketman, faut-il être le fan numéro 1 d’Elton John ? Non, sinon trop de gens seraient qualifiés pour le job ! (Rires.) Il se trouve que j’avais déjà travaillé avec Taron Egerton (la tête d’affiche du film, que Dexter Fletcher avait dirigé dans Eddie the Eagle en 2015) et Matthew Vaughn (le producteur), que je connais depuis vingt ans. J’adore la musique – comme plein de gens! – et j’ai eu une vision pour ce film qui a manifestement plu à ceux qui le produisaient. Je ne prétends pas connaître toutes les chansons d’Elton John par cœur – même si j’en connais un paquet désormais. (Rires.) Si je faisais un western, j’apprendrais tout ce qu’il y a à apprendre sur les cow-boys. C’est l’un des aspects les plus merveilleux de ce métier. LES CINÉMAS PATHÉ ET GAUMONT 7