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LE GRAND ENTRETIEN
Vivant…
d’abord survivant
Nous sommes à Bergen-Belsen en
Basse-Saxe, Allemagne, le 1 er février
1944. Plus de 110 000 juifs vivant au
Pays-Bas sont « livrés » en pâture
à la barbarie nazie depuis le début
de la guerre. Ici, au beau milieu de
nulle part, il se retrouve déporté.
Il n’a alors que 12 ans et comprend
rapidement que l’enfer n’est pas
une simple vision de l’esprit.
Arrivée par train dans des wagons
à bestiaux, après deux jours de
transfert dans la puanteur, les cris
des enfants – qui le marqueront
à vie-, le gémissement des aînés,
les excréments…, la famille est
guidée vers des baraquements
et séparée, lui et son père d’un
côté, son jeune frère avec sa mère
de l’autre. Il va falloir survivre.
Chaque matin, levé à 4 heures pour
l’appel à côté de son père, celui qui
n’est alors qu’un jeune adolescent
doit d’abord, avec ses compagnons
de misère, vider les baraquements
des cadavres des hommes morts
durant la nuit pour les entasser
et les voir se décomposer jour
après jour à quelques pas de là.
À Bergen-Belsen, on dénombre
quelque 600 décès chaque
jour vers la fin de la guerre.
Il doit ensuite vider les excréments
et procéder au nettoyage du
baraquement avant l’appel.
Ici, en rang par cinq, ils sont
comptabilisés. Après une soupe
de « légumes » sales et terreux,
où se promène de temps à autre
un bout de viande, comme il le dit
(« On apprend plus tard qu’il s’agit
bien souvent de viande de chat,
de chien, quand ce n’était pas du
rat ou de la souris »), il est envoyé
au travail forcé. Le sien consiste à
trier les chaussures qui, reçues par
tonnes des autres camps, finissent
en matière première pour les nazis.
46 INFOGREEN.LU