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Magazine CNC été 2023

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ÉTÉ <strong>2023</strong><br />

TKTKTKTKTKTKT<br />

À grande<br />

échelle<br />

Adopter des technologies et des innovations pour engendrer<br />

des changements transformationnels en conservation<br />

natureconservancy.ca<br />

WINTER 2021 1


ÉTÉ <strong>2023</strong><br />

SOMMAIRE<br />

Conservation de la nature Canada<br />

4 Beauté fragile<br />

Végétaux en péril des Prairies canadiennes.<br />

6 Nebo<br />

En Saskatchewan, des paysages spectaculaires<br />

abondent là où la forêt boréale rencontre<br />

la prairie.<br />

7 Le Grand BioBlitz de <strong>CNC</strong><br />

Allez à la rencontre de la nature et de<br />

ses adeptes.<br />

7 L’attrait de la nature<br />

Kimberly Orren, présidente-directrice générale<br />

de Fishing for Success, se laisse guider par les<br />

sons et les récits du littoral.<br />

8 En première ligne<br />

L’innovation et l’audace contribuent à accélérer<br />

le travail de conservation de la nature.<br />

12 Spécialiste des prairies<br />

Le pipit de Sprague : un oiseau indicateur<br />

de l’état de santé des milieux de prairies.<br />

14 Une voix pour la nature<br />

Jane Gilbert, la communicatrice en chef de <strong>CNC</strong>,<br />

dirige les projecteurs sur les héros de la nature.<br />

16 <strong>CNC</strong> à l’œuvre<br />

<strong>CNC</strong> collabore avec une organisation Mi’gmaq,<br />

N.-B.; L’aire de conservation Reginald Hill, C.-B.;<br />

Éliminer le roseau commun, QC; La réserve<br />

naturelle Haley Lake, N.-É.<br />

18 Lumières dansantes<br />

Caméra en main, Esme Batten poursuit les<br />

aurores boréales.<br />

C’est extra!<br />

Visitez magazinecnc.ca pour accéder à du<br />

contenu supplémentaire en lien avec ce<br />

numéro de notre magazine.<br />

Conservation de la nature Canada<br />

245, avenue Eglinton Est, bureau 410 | Toronto (Ontario) Canada M4P 3J1<br />

magazine@conservationdelanature.ca | Tél. : 416 932-3202 | Sans frais : 1 877 231-3552<br />

Conservation de la nature Canada (<strong>CNC</strong>) est la force rassembleuse au pays pour la sauvegarde de la nature. Par la<br />

conservation permanente de vastes territoires, <strong>CNC</strong> apporte des solutions à la double crise du déclin rapide de la<br />

biodiversité et des changements climatiques. <strong>CNC</strong> est un organisme de bienfaisance enregistré.<br />

Avec la nature, nous créons un monde prospère.<br />

Le magazine Conservation de la nature Canada est offert aux personnes qui appuient <strong>CNC</strong>.<br />

MC<br />

Marque de commerce de La Soci<strong>été</strong> canadienne pour la conservation de la nature<br />

FSC MD n’est pas responsable des calculs concernant<br />

l’économie des ressources réalisée<br />

en choisissant ce papier.<br />

Imprimé au Canada avec des encres végétales par Warrens Waterless Printing.<br />

La publication de ce magazine a sauvegardé 27 arbres et 24 924 litres d’eau*.<br />

TKTKTKTKTKTKT<br />

GÉNÉRÉ PAR : CALCULATEUR.ROLLANDINC.COM. SEAN FEAGAN/<strong>CNC</strong>. COUVERTURE : GATES CREEK, C.-B., ALEX NEWALL.<br />

*<br />

2 ÉTÉ <strong>2023</strong> conservationdelanature.ca


Tétras à queue fine,<br />

The Yarrow, Alb.<br />

Bonjour,<br />

Ont collaboré<br />

à ce numéro<br />

TKTKTKTKTKTKT<br />

CHRISTIAN BLAIS.<br />

Dans mon travail à Conservation de la nature Canada<br />

(<strong>CNC</strong>) au Québec, je suis souvent étonnée de constater<br />

que nos plus grandes réussites sont aussi les plus<br />

inattendues. Prenons l’exemple de notre collaboration avec<br />

Groupements forestiers Québec (GFQ). Il y a 5 ans, je n’aurais<br />

jamais imaginé que <strong>CNC</strong> puisse collaborer efficacement avec des<br />

propriétaires de terrains dont l’activité première est l’exploitation<br />

forestière. À l’époque, nous avions fait le choix de sortir des<br />

sentiers battus en lançant l’Initiative québécoise Corridors<br />

écologiques (IQCÉ), qui réunit des propriétaires et une foule<br />

d’autres partenaires dans le but de conserver des milieux naturels<br />

reliés par des corridors écologiques. Cinq ans plus tard, nous<br />

avons élaboré une conférence et un programme de formation<br />

avec GFQ, qui encourage plus de 600 propriétaires de terres à<br />

bois à favoriser la connectivité écologique sur leur propri<strong>été</strong>.<br />

L’importance que <strong>CNC</strong> accorde aux idées et aux approches<br />

novatrices visant à accélérer le rythme de la conservation<br />

démontre que nous devons aller au-delà de nos domaines<br />

d’expertise, établir de nouvelles collaborations et développer ou<br />

adopter de nouveaux outils pour véritablement contrer la double<br />

crise des changements climatiques et de la perte de biodiversité.<br />

Dans ce numéro du magazine Conservation de la nature<br />

Canada, le journaliste Jimmy Thomson explore trois projets<br />

de <strong>CNC</strong> qui illustrent bien cette réalité.<br />

Ce numéro présente aussi comment une vision ambitieuse<br />

nécessite la mise en œuvre de nouvelles idées, un travail à plus<br />

grande échelle et à un rythme sans précédent, et ce, pour<br />

conserver des aires naturelles diversifiées et de grande valeur<br />

écologique. À d’autres moments, comme à Reginald Hill, en<br />

Colombie-Britannique (voir p. 17), cela consiste à saisir une<br />

grande occasion de conserver un petit territoire.<br />

Ensemble, nous pouvons tous prendre la juste mesure de notre<br />

rôle dans la création d’un monde où la nature prospère. Puisque<br />

quand la nature prospère, nous en bénéficions tous.<br />

Avec vous pour la conservation,<br />

Kateri Monticone<br />

Kateri Monticone<br />

Kateri Monticone<br />

Directrice, Conservation stratégique et Innovation - Québec<br />

Jimmy Thomson est un<br />

journaliste environnemental<br />

de renommée<br />

nationale. Ses textes ont<br />

entre autres <strong>été</strong> publiés<br />

dans The Narwhal, le<br />

Globe and Mail et The<br />

Walrus. Il a enseigné le<br />

journalisme et la<br />

rédaction à l’Université<br />

de Colombie-Britannique<br />

ainsi qu’à l’Université de<br />

Victoria (C.-B.), ville qu’il<br />

habite. M. Thomson<br />

est l’auteur de « Au<br />

premier plan », p. 8.<br />

Remie Geoffroi est<br />

un illustrateur basé à<br />

Ottawa. Il compte parmi<br />

ses clients le MIT, le Wall<br />

Street Journal, Billboard<br />

et ESPN. Il a illustré des<br />

ouvrages de Martha<br />

Stewart et Tim Feriss.<br />

Il aime les voyages, le<br />

yoga et la pêche<br />

sportive. Remie Geoffroi<br />

a illustré « Au premier<br />

plan », p. 8<br />

conservationdelanature.ca<br />

ÉTÉ <strong>2023</strong> 3


D’UN OCÉAN<br />

À L’AUTRE<br />

Beauté fragile<br />

La richesse et la diversité des espèces végétales des<br />

milieux de prairies risquent de disparaître.<br />

Les milieux de prairies sont des écosystèmes exceptionnels. Ceux plus spécifiquement<br />

situés dans les Prairies canadiennes (Alberta, Saskatchewan, Manitoba) abritent des<br />

dizaines d’espèces en péril. La chevêche des terriers (une chouette), le tétras des armoises<br />

(un oiseau) et le renard véloce, sont des animaux emblématiques de cette région du pays, tout<br />

comme le sont plusieurs végétaux aussi magnifiques que fascinants.<br />

Les étendues de prairies sont de nature variée : dunes, badlands et milieux humides entrecoupent<br />

des zones herbeuses, et chacun de ces écosystèmes crée son microhabitat. Ces milieux sont peuplés<br />

de centaines d’espèces végétales, ce qui inclut des mousses, des plantes herbacées et des arbustes.<br />

Toutes ces espèces incarnent l’incroyable diversité de la vie végétale qui tapisse les Prairies<br />

canadiennes, et ce, des prairies à fétuques des contreforts de l’Alberta aux prairies à herbes<br />

hautes du Manitoba, en passant par les prairies mixtes de la Saskatchewan. Cette diversité peut être<br />

évidente, comme là où les lupins, balsamorhizes et castilléjies en fleurs colorent les contreforts de<br />

violet, de jaune et de rouge. Ailleurs, il faut une loupe et un œil de lynx pour discerner les espèces.<br />

Rares ou non, ces végétaux procurent tous des bienfaits aux humains comme aux écosystèmes.<br />

Par exemple, de nombreuses plantes à fleurs nourrissent les pollinisateurs, tandis que d’autres<br />

fertilisent le sol en convertissant l’azote présent dans l’air pour qu’il profite à d’autres espèces.<br />

Certaines espèces végétales des prairies sont toutefois en péril. Quelques-unes sont « naturellement<br />

» rares ou ont une aire de répartition restreinte. D’autres voient leur population dépérir<br />

alors que disparaissent de plus en plus de milieux de prairies ou qu’ils sont envahis par des espèces<br />

non indigènes (ou exotiques).<br />

Voici quelques-unes des espèces végétales en péril que vous contribuez à protéger en conservant<br />

les Prairies du Canada. Tout comme nous, ces plantes vous remercient!1<br />

Platanthère<br />

blanchâtre de<br />

l’Ouest<br />

Lorsqu’on pense aux orchidées,<br />

on ne peut qu’imaginer une fleur<br />

splendide. La platanthère blanchâtre<br />

de l’Ouest n’y fait pas exception.<br />

Cette magnifique plante à fleurs<br />

blanches des prairies à herbes hautes<br />

du Manitoba pousse dans les<br />

sols riches en calcium de prés et de<br />

prairies humides. Au Manitoba, les<br />

populations de cette espèce en voie<br />

de disparition, soit la moitié de ses<br />

populations mondiales, se trouvent à<br />

occuper l’extrémité nord de son aire<br />

de répartition. Cette plante vivace,<br />

qui peut atteindre 40 à 90 centimètres<br />

de haut, atteint son apogée,<br />

de la fin juin à la mi-juillet.<br />

LETA PEZDERIC. ILLUSTRATIONS : JACQUI OAKLEY.<br />

4 ÉTÉ <strong>2023</strong> conservationdelanature.ca


Cryptanthe<br />

minuscule<br />

Nichée dans les vallées fluviales du<br />

sud-est de l’Alberta et du sud-ouest de la<br />

Saskatchewan, cette petite plante aux<br />

poils rigides produit de minuscules fleurs<br />

blanches au centre jaune. Au Canada, les<br />

populations de cette espèce menacée<br />

sont isolées de ses autres populations; la<br />

plus proche se situant au Montana<br />

(É.-U.), soit à environ 200 kilomètres plus<br />

au sud. Prospérant dans les dunes et les<br />

hautes terres sablonneuses, la cryptanthe<br />

minuscule est menacée par la<br />

dégradation et la perte de son habitat.<br />

Iris du Missouri<br />

L’iris du Missouri est une espèce<br />

indigène trouvée en Alberta et désignée<br />

comme préoccupante par le gouvernement<br />

fédéral. Ses feuilles sont en forme<br />

de glaive et ses tiges sont couronnées de<br />

deux à quatre fleurs aux teintes variant du<br />

bleu pâle au bleu nuit. Cet iris pousse le<br />

plus souvent dans la zone de transition<br />

entre les milieux de prairies et les habitats<br />

riverains. L’iris du Missouri est principalement<br />

menacé par la compétition que lui<br />

livrent les espèces envahissantes.<br />

Tradescantie de<br />

l’Ouest<br />

Cette plante menacée croît sur les<br />

crêtes dunaires, généralement sur les<br />

plus escarpées et orientées au sud. Sa<br />

présence a <strong>été</strong> observée sur une poignée<br />

de sites dans le sud-est de l’Alberta, le sud<br />

de la Saskatchewan et le sud-ouest du<br />

Manitoba. La tradescantie de l’Ouest<br />

fleurit de mai à juillet, et chacune de ses<br />

splendides fleurs bleu-violet ne vit qu’une<br />

seule journée. Restez à l’affût, car cligner<br />

des yeux pourrait vous faire rater sa<br />

floraison! Cette<br />

plante est<br />

principalement<br />

pollinisée par des<br />

halictes (types<br />

d’insectes<br />

ailés).<br />

Cypripède blanc<br />

Niché dans les prairies à herbes hautes et<br />

les prairies mixtes du Manitoba, le cypripède<br />

blanc (une orchidée) croît généralement dans<br />

des zones touchées par des perturbations<br />

naturelles, comme les feux de forêt, le broutage<br />

léger et la fauche. Sans ces perturbations, la<br />

végétation haute et les plantes ligneuses<br />

supplanteraient cette minuscule plante. Le<br />

cypripède blanc doit son nom anglais small<br />

white lady’s-slipper à sa fleur en forme de<br />

chausson, qui s’épanouit de mai à juin.<br />

Oxytrope<br />

patte-de-lièvre<br />

Membre de la famille des légumineuses,<br />

cette espèce menacée croît dans les prairies<br />

à fétuques du sud de l’Alberta. C’est l’extérieur<br />

duveteux de sa fleur, qui rappelle à certains<br />

une patte de lièvre, qui lui a donné son nom.<br />

Cette plante à fleurs violettes, qui pousse près<br />

du sol, est menacée par la perte d’habitat<br />

et la compétition que lui livrent les espèces<br />

envahissantes, en particulier l’agropyre à crête<br />

(une graminée).<br />

Yucca glauque<br />

Le yucca est une plante menacée qui<br />

peuple les ravins (coulee) du sud de l’Alberta<br />

et de la Saskatchewan. Ses feuilles raides<br />

et pointues arborent des grappes de fleurs<br />

d’un blanc crème qui émergent d’une tige<br />

pouvant atteindre 1 mètre de haut. Le yucca<br />

glauque soutient plusieurs espèces de<br />

papillons nocturnes dites spécialistes (c.-à-d.<br />

aux besoins très précis en termes d’habitat) et<br />

qui sont en voie de disparition au Canada.<br />

conservationdelanature.ca<br />

ÉTÉ <strong>2023</strong> 5


SUR LES<br />

SENTIERS Township Road 500<br />

<br />

N<br />

Ordale Road<br />

Nebo<br />

Nebo<br />

En Saskatchewan, là où la forêt boréale rencontre<br />

la prairie, les paysages spectaculaires abondent.<br />

Les soucis s’estompent à mesure qu’on avance dans notre exploration de<br />

Nebo, un site protégé par Conservation de la nature Canada (<strong>CNC</strong>), à environ<br />

70 kilomètres à l’ouest de Prince Albert. La géographie des lieux est<br />

spectaculaire, avec ses collines ondulées qui se terminent par des milieux humides<br />

isolés et bordés de forêts. En traversant cette zone de transition remarquable, vous<br />

verrez peut-être les travaux de restauration forestière entrepris par <strong>CNC</strong> en 2017.<br />

En effet, grâce au soutien généreux d’Arbres Canada, plus de 32 000 épinettes<br />

blanches y ont en effet <strong>été</strong> plantées. Au-delà des collines de Nebo, vous pourriez<br />

apercevoir des espèces sauvages tels que des cerfs, des orignaux, des oiseaux<br />

chanteurs et de nombreuses sauvagines.1<br />

POUR EN SAVOIR PLUS : conservationdelanature.ca/nebo<br />

LÉGENDE<br />

-- Sentier Railbed<br />

-- Sentier Cutblock<br />

ESPÈCES À OBSERVER<br />

• Blaireau d’Amérique<br />

• Carouge à tête jaune<br />

• Chauve-souris nordique<br />

• Engoulevent<br />

d’Amérique<br />

• Grèbe élégant<br />

• Grèbe esclavon<br />

• Harle couronné<br />

• Hirondelle rustique<br />

-- Lien vers le sentier Ouest<br />

-- Lien vers le sentier Est<br />

• Mésange à tête brune<br />

• Mésangeai du Canada<br />

• Moucherolle à côtés olive<br />

• Orignal<br />

• Ours noir<br />

• Paruline du Canada<br />

• Paruline noir et blanc<br />

• Quiscale rouilleux<br />

• Sarcelle d’hiver<br />

CARTE : JACQUES PERRAULT. PHOTOS : MIKE DEMBECK (4); LETA PEZDERIC/<strong>CNC</strong> (ORIGNAL).<br />

6 ÉTÉ <strong>2023</strong> conservationdelanature.ca


ACTIVITÉ<br />

LES<br />

INDISPENSABLES<br />

EMILY WILLIAMS.<br />

Le Grand<br />

BioBlitz de<br />

<strong>CNC</strong><br />

Allez à la rencontre de la nature<br />

et de ses adeptes<br />

Un bioblitz est une activité scientifique communautaire<br />

visant à inventorier le plus grand nombre<br />

d’espèces dans une zone et sur une période<br />

données. On peut y participer avec son téléphone<br />

intelligent, sa tablette, et bien entendu avec sa<br />

caméra. Le Grand BioBlitz de Conservation de la<br />

nature Canada (<strong>CNC</strong>) se déroule sur cinq jours et<br />

permet de documenter, à votre rythme, les<br />

espèces qui vous entourent. Vos observations<br />

aideront des expert(e)s de la conservation dans<br />

leur étude de la biodiversité locale, leur suivi<br />

d’espèces rares et leur lutte contre celles qui<br />

sont envahissantes.<br />

Voici quatre façons de rendre cet événement<br />

amusant :<br />

POUR LES FAMILLES<br />

Faites-en une chasse au trésor pour petits et<br />

grands en formant des équipes pour voir qui peut<br />

repérer le plus grand nombre de petites bestioles.<br />

POUR LES AMIES ET AMIS<br />

Mettez vos ami(e)s au défi en leur demandant de<br />

soumettre le plus grand nombre d’observations<br />

d’espèces possible. Puisque les photos du BioBlitz<br />

sont téléversées dans une base de données<br />

pancanadiennes, les personnes qui participent<br />

avec vous peuvent être d’ailleurs au pays!<br />

POUR LES CURIEUX DE NATURE<br />

Apprenez des choses amusantes sur des espèces<br />

végétales et animales, et partagez-les avec<br />

d’autres curieuses et curieux.<br />

POUR LES ENTHOUSIASTES DE HAUT NIVEAU<br />

Lors de votre prochaine randonnée, enregistrez<br />

le chant d’un oiseau ou le son d’un insecte.<br />

Remarquez la différence entre les sons de la nature<br />

entendus en milieu urbain et ceux provenant<br />

d’environnements plus naturels.<br />

Au début d’août, faites comme des milliers de<br />

personnes en tournant votre regard vers la nature<br />

et en contribuant à cette collecte de données<br />

scientifiques très précieuses.<br />

Grand BioBlitz de <strong>CNC</strong> : 3 au 7 août <strong>2023</strong><br />

Inscrivez-vous à legrandbioblitz.ca<br />

L’attrait de la nature<br />

Kimberly Orren, présidente-directrice générale de Fishing for<br />

Success (« Pêcher pour réussir »), se laisse guider par les sons et<br />

les récits du littoral.<br />

Même si un bateau n’entrera jamais dans mon sac à dos, je voudrai toujours<br />

m’assurer que mes aventures dans la nature me mènent près d’un plan<br />

d’eau. Peu importe si c’est un ruisseau, un étang, un lac, une chute ou le<br />

bord de l’océan, comme c’est souvent le cas lors de mes randonnées préférées dans<br />

ma province : Terre-Neuve-et-Labrador!<br />

À Petty Harbour-Maddox Cove nous avons la chance d’avoir la East Coast Trail,<br />

qui longe certaines des plus belles côtes de l’île de Terre-Neuve et qui passe par<br />

un site protégé par Conservation de la nature Canada dans la fog forest (« forêt de<br />

brume »). Cela m’amène à mon lieu de prédilection, celui d’un arbre magique.<br />

Assis au pied de cet arbre, on entend les vagues se fracasser sur le littoral. En<br />

écoutant bien, on réalise que le bruit des vagues change en fonction de la direction<br />

ou de l’intensité du vent. Sous ce fracas, un autre rythme, celui de la houle, peut laisser<br />

présager le temps qu’il fera demain, juste derrière l’horizon.<br />

L’accès à la nature n’est pas toujours facile, et c’est encore plus vrai quand il s’agit<br />

de l’océan. Il en va de même pour l’apprentissage des techniques de pêche traditionnelles.<br />

La pêche, qui fait partie de l’expérience humaine, est un héritage commun<br />

antérieur à l’agriculture. L’expérience de la pêche est transformatrice. Profondément<br />

personnelle, elle stimule la pensée créative. De nombreux scientifiques mentionnent<br />

d’ailleurs que c’est une expérience vécue à la plage ou à la pêche avec un parent qui<br />

a éveillé leur intérêt pour le monde naturel.<br />

Tous les enfants devraient avoir la chance de pratiquer cette activité, qui constituerait<br />

un élément essentiel de leur éducation au monde naturel. Puisque nous habitons<br />

la partie terrestre du globe, nous oublions qu’elle ne représente que 30 % de la surface<br />

de la planète et que notre existence dépend de la santé des écosystèmes aquatiques.<br />

Je vous invite à planifier une randonnée au bord de l’eau; à vous asseoir sous votre<br />

propre arbre magique et à écouter l’eau qui se fraie un chemin vers l’océan.1<br />

conservationdelanature.ca<br />

ÉTÉ <strong>2023</strong> 7


En<br />

première ligne<br />

Une vision ambitieuse, des stratégies novatrices et de<br />

nouvelles technologies pour accélérer la conservation.<br />

PAR Jimmy Thomson, journaliste et enseignant en journalisme<br />

PHOTO : GETTY IMAGES.<br />

ILLUSTRATION : REMIE GEOFFROI.<br />

8 ÉTÉ <strong>2023</strong> conservationdelanature.ca


ALBERT LAW.<br />

Le panorama<br />

à partir du<br />

mont PKOLS;<br />

Aerin Jacob.<br />

Derrière Aerin Jacob, directrice de la science et de la<br />

recherche à Conservation de la nature Canada (<strong>CNC</strong>), j’atteins<br />

le sommet du mont PKOLS fouetté par le vent. C’est une de ces<br />

rares journées extrêmement venteuses sur la pointe sud de l’île de<br />

Vancouver, en Colombie-Britannique. Journée où l’océan en contrebas semble déterminé<br />

à dévorer le rivage. Les occasionnelles gouttes de pluie, même à cette altitude,<br />

goûtent aussi salé que les gerbes d’eau qui arrosent les plages discrètes.<br />

Par une journée grisâtre comme celle-ci, Mount Douglas – de plus en plus reconnu<br />

par son nom d’origine, PKOLS (en langue SENĆOŦEN) – peut donner<br />

l’impression d’être une haute montagne. Mais malgré ses 225 mètres d’altitude,<br />

ce parc municipal offre un splendide point de vue d’où l’on peut admirer les<br />

lignes imprécises du paysage en contrebas : des terres agricoles qui se fondent<br />

dans les terrains de golf, des rues résidentielles bordées de feuillus qui disparaissent<br />

dans des parcs grandioses, et, à mi-chemin, le dense réseau de Victoria,<br />

la capitale provinciale, tout contre le littoral dentelé qui descend vers la mer.<br />

Chacun des éléments qui composent cette mosaïque a un rôle à jouer dans<br />

l’écologie de la région, explique Aerin Jacob. Ici, au sommet du PKOLS, un pygargue<br />

à tête blanche utilise le vent pour s’élever au-dessus des chênes de Garry,<br />

dont la silhouette ployée est enveloppée de lichens rappelant des filaments argentés<br />

(signe d’une bonne qualité de l’air, dit-on). Plus bas sur le versant, de vénérables<br />

thuyas géants et douglas de Menzies couvrent de leur ombre des sols humides<br />

et des ruisseaux. C’est l’exemple parfait d’une aire urbaine protégée.<br />

Il peut être tentant de considérer les terres agricoles et les zones résidentielles<br />

des plaines situées en contrebas comme étant des zones pouvant être sacrifiées,<br />

c’est-à-dire de moindre importance pour les objectifs de conservation. Voilà une<br />

fausse présomption, qui ne prendrait pas en compte le fonctionnement de la nature<br />

et les besoins de la biodiversité et des humains.<br />

« Nous savons que la nature est exposée à une multitude de menaces graves<br />

qui ne cessent de se multiplier, et que la cadence des changements augmente<br />

rapidement. Il faut nous appuyer sur des stratégies éprouvées, comme l’acquisition<br />

et l’intendance de terres privées, et en tirer des leçons », affirme Mme Jacobs.<br />

« Il faut opérer des changements transformationnels à l’échelle des territoires,<br />

qui aideront la nature et la population, aujourd’hui et dans l’avenir. Nous devons<br />

adopter une vision ambitieuse et être ouverts à l’innovation. »<br />

Lorsqu’un déclin de la biodiversité et des changements climatiques sans précédent<br />

déchirent l’étoffe « tissé serré » des écosystèmes de la planète, il ne suffit<br />

pas de faire notre possible et d’espérer, défend Mme Jacob. Des objectifs majeurs<br />

et ambitieux, comme la détermination de <strong>CNC</strong> à doubler le soutien accordé à la<br />

conservation dans les trois prochaines années, ainsi que les retombées de ses efforts<br />

d’ici 2030, exigent une stratégie audacieuse qui ne tient aucune méthode<br />

pour acquise et qui ne manque pas d’analyser chaque échec et chaque réussite.<br />

Il faut de nouveaux outils : des outils financiers qui encouragent le secteur<br />

privé à investir pour conserver la nature; des technologies de nouvelle génération<br />

pour utiliser plus efficacement les données; et des technologies de<br />

planification qui surveillent, comprennent et communiquent, à l’échelle<br />

nationale, les changements qui s’opèrent dans chacune des petites parcelles<br />

sous nos pieds. Une vue d’ensemble peut nous aider à éviter les<br />

modes de pensée qui menacent l’atteinte des résultats transformateurs<br />

devenus nécessaires en conservation.<br />

En exemple, Mme Jacob explique qu’elle entame une nouvelle<br />

recherche sur la connectivité écologique qui évaluera les liens entre<br />

les aires protégées au Canada. Ce projet montrera comment chaque<br />

aire protégée contribue à la connectivité globale et comment le réseau<br />

dans son ensemble peut être enrichi par de nouvelles aires conservées<br />

ou restaurées.<br />

« Nous devons accélérer et renforcer la conservation. Nous devons raffiner<br />

et préciser notre compréhension de ce qui fonctionne dans quels milieux et<br />

pour quelles espèces », poursuit-elle. « La meilleure façon d’y arriver est de nous<br />

montrer ouverts aux nouvelles idées et collaborations, d’essayer de nouvelles<br />

conservationdelanature.ca<br />

ÉTÉ <strong>2023</strong> 9


Terres boréales, Ont.<br />

approches et de les mettre à l’essai pour s’assurer<br />

qu’elles fonctionnent comme prévu. »<br />

Tous ces éléments (vision ambitieuse,<br />

stratégies novatrices, nouvelles technologies)<br />

doivent être communiqués au grand<br />

public, pour que les gens comprennent ce<br />

qui affecte la nature qui les entoure et les<br />

raisons qui sous-tendent ces changements.<br />

Impact numérique<br />

Le virage numérique de la conservation<br />

tombe directement dans la cour de Richard<br />

Schuster qui, enthousiaste à l’idée de concrétiser<br />

ses idées, a délaissé sa profession d’enseignant<br />

pour devenir directeur de la planification<br />

spatiale et de l’innovation à <strong>CNC</strong>.<br />

Le projet d’innovation technologique qu’il<br />

chapeaute vise à créer des outils d’aide à la<br />

décision pour que les organismes et les gouvernements<br />

puissent faire des choix plus<br />

éclairés en matière d’utilisation des terres.<br />

« Nous devons être plus stratégiques en ce<br />

qui concerne nos actions et les sites où nous<br />

travaillons », explique-t-il. Cela signifie faire<br />

plus avec ce que nous avons : les données et<br />

les terres, évidemment, mais aussi l’implication<br />

des communautés. De bonnes intentions<br />

et des politiques efficaces ne mènent pas à<br />

grand-chose si elles sont finalement rejetées<br />

par des intervenants perplexes et contrariés.<br />

Grâce à ce projet, des discussions qui<br />

s’appuient sur des données et analyses<br />

concrètes peuvent être tenues en temps réel.<br />

Le grand public, les propriétaires fonciers et<br />

les partenaires peuvent voir les répercussions<br />

de leurs décisions en un clic, plutôt que de<br />

parler en termes et objectifs abstraits. Par<br />

exemple, si des décideurs et décideuses<br />

souhaitent voir les impacts des changements<br />

climatiques sur une aire de conservation<br />

existante ou future et sur les espèces qui les<br />

habitent, ils peuvent voir cette information<br />

dans l’outil. Cela nous permet de déterminer<br />

les actions pouvant atténuer ces impacts.<br />

« Pour moi, nos outils sont innovateurs,<br />

car ils permettent aux gens d’interagir<br />

directement avec des données,<br />

idées et algorithmes<br />

complexes, en temps plus ou<br />

moins réel », explique<br />

M. Schuster. « Il y a trois ans<br />

seulement, personne sur la<br />

planète ne pouvait faire ça. »<br />

C’est tout un outil révolutionnaire<br />

dans une ère où les<br />

conversations peuvent être limitées<br />

par différents niveaux d’accès à des<br />

renseignements de haute qualité ou par<br />

l’aptitude à visualiser les issues possibles<br />

de différentes décisions.<br />

Le fait que le public ainsi que les décideuses<br />

et décideurs voient les résultats<br />

d’une politique de conservation efficace peut<br />

favoriser la mobilisation des gens pour une<br />

nouvelle suite de politiques bénéfiques (une<br />

boucle de rétroaction qui rend essentielle<br />

notre capacité à évaluer nos réussites et<br />

à les communiquer clairement).<br />

Richard<br />

Schuster<br />

Le projet de Richard Schuster peut d’ailleurs<br />

faciliter cet aspect communicationnel.<br />

Les observations satellitaires peuvent aider<br />

<strong>CNC</strong> et ses partenaires à surveiller les sites à<br />

distance (même les plus éloignés) et à comprendre<br />

les changements au fur et à mesure<br />

que les projets prennent forme.<br />

« Il devient plus pratique de “visiter”<br />

chaque site annuellement », précise-t-il. « Si<br />

nous entreprenons un projet de restauration,<br />

nous pourrons plus facilement suivre son<br />

évolution et son impact au fil du temps. »<br />

Ce travail peut aussi bénéficier de<br />

l’enthousiasme des gens à comprendre<br />

la nature. Des outils de<br />

science communautaire, comme<br />

iNaturalist et eBird, alimentent<br />

constamment leurs bases de<br />

données d’observations réelles<br />

qu’utilise l’équipe de Richard<br />

Schuster pour mieux prédire les<br />

sites où se trouvent certaines espèces.<br />

L’intelligence artificielle (IA), qui représente<br />

possiblement la plus grande révolution<br />

technologique de notre ère, pourrait aussi<br />

s’avérer utile en conservation.<br />

Les programmes de suivi et de prise de<br />

décisions peuvent être bonifiés par l’« apprentissage<br />

automatique », grâce à des systèmes<br />

d’IA nouveau genre qui rendent des<br />

outils mathématiques complexes plus accessibles<br />

à un nombre accru d’utilisateurs.<br />

« Ces outils, qui peuvent être utilisés partout<br />

au pays, se fondent sur les meilleures<br />

ADAM BIALO/KONTAKT FILMS; AVEC LA PERMISSION DE RICHARD SCHUSTER.ILLUSTRATION : REMIE GEOFFROI.<br />

10 ÉTÉ <strong>2023</strong> conservationdelanature.ca


MIKE DEMBECK; AVEC LA PERMISSION DE ADAIR RIGNEY;. ILLUSTRATION : REMIE GEOFFROI.<br />

données disponibles sur la biodiversité, les<br />

contributions de la nature au bien-être humain<br />

et les menaces telles que les changements<br />

climatiques et l’impact de l’activité<br />

humaine. Ils aideront les personnes qui y auront<br />

recours à déterminer où concentrer<br />

leurs efforts et quoi faire pour aider la nature<br />

à prospérer », selon M. Schuster. Puisque<br />

l’objectif est de créer des occasions de diffuser<br />

de meilleurs renseignements pour favoriser<br />

une prise de décisions plus éclairée, ces<br />

outils sont offerts non seulement au personnel<br />

de <strong>CNC</strong>, mais aussi à d’autres organismes<br />

communautaires ou de conservation, à des<br />

propriétaires fonciers ainsi qu’à tous les<br />

ordres de gouvernement.<br />

Nous ne devons toutefois pas<br />

nous contenter de laisser des<br />

algorithmes prendre ces décisions<br />

à notre place. Joe Bennett,<br />

professeur adjoint à l’Université<br />

Carleton (Ottawa) qui<br />

a supervisé Richard Schuster<br />

pendant son postdoctorat, souligne<br />

que la transparence dans la<br />

manière dont les décisions sont prises<br />

est cruciale pour obtenir de bons résultats.<br />

« Le problème de cas passés, c’est qu’une<br />

personne ou un groupe de personnes choisissait<br />

un lieu et personne ne savait vraiment<br />

pourquoi », expose-t-il. « La transparence est<br />

très, très importante et pourra à l’avenir apaiser<br />

certains conflits. »<br />

La transparence, soutient M. Bennett,<br />

pourrait même signifier devoir s’asseoir avec<br />

les intervenants et leur montrer à l’ordinateur<br />

comment les résultats varient lorsque les différentes<br />

données et besoins sont soupesés.<br />

Cela serait possible grâce aux outils de prise<br />

de décisions de <strong>CNC</strong>.<br />

Moyens de financement<br />

novateurs<br />

Les grandes idées audacieuses ne sont pas<br />

nécessairement coûteuses. Elles servent parfois<br />

à générer du financement qui soutiendra<br />

le travail à réaliser.<br />

Les inondations peuvent causer des milliards<br />

de dollars de dégâts aux villes et aux<br />

terres agricoles, et nous savons que la perte<br />

de milieux humides amplifie ces catastrophes<br />

naturelles. Les gouvernements, les propriétaires<br />

fonciers et les compagnies d’assurance<br />

savent tous pertinemment ce qui est en jeu.<br />

« Ils sont incroyablement conscients<br />

des coûts de plus en plus élevés qu’ils remboursent<br />

au pays pour les dégâts liés aux<br />

changements climatiques », confirme Adair<br />

Rigney, directrice des projets et de l’innovation<br />

pour l’équipe de l’Accélérateur de projets<br />

Nature + Climat à <strong>CNC</strong>. La conservation de<br />

milieux humides est un des moyens mis en<br />

Adair Rigney<br />

place pour réduire au minimum ces coûts<br />

à long terme.<br />

On reconnaît de plus en plus que les<br />

avantages de protéger la nature sont plus<br />

importants que l’affection que nous portons<br />

aux paysages naturels et aux espèces sauvages.<br />

La nature procure aux humains des<br />

bénéfices directs qui ont aussi des implications<br />

financières. Des efforts colossaux sont<br />

déployés en ce moment pour définir une<br />

façon d’évaluer ces bénéfices et trouver des<br />

moyens d’encourager le secteur privé à<br />

investir pour soutenir la conservation.<br />

« Nous ne protégeons pas la nature uniquement<br />

pour son bien : les aires protégées<br />

procurent des avantages cruciaux aux<br />

populations voisines, mais aussi à<br />

celles plus éloignées », poursuit<br />

Mme Rigney. La même réflexion<br />

peut s’appliquer à d’autres solutions<br />

fondées sur la nature.<br />

« Nous voulons montrer comment<br />

nos projets de conservation<br />

fournissent des services<br />

écologiques à la collectivité, et<br />

les rentabiliser. »<br />

<strong>CNC</strong> s’aventure maintenant dans une<br />

nouvelle voie : restaurer des parcelles de<br />

forêt au Manitoba, en combinant ce travail à<br />

la mise en marché de crédits carbone pour<br />

attirer plus d’investisseurs en appui à ce projet.<br />

<strong>CNC</strong> envisage en effet de restaurer des<br />

forêts dégradées et de planter de nouveaux<br />

arbres entre le parc national du Mont-Riding<br />

et la forêt provinciale du mont Duck. Cela<br />

pourrait générer des crédits carbone, qui<br />

représentent la quantité de dioxyde de carbone<br />

dans l’atmosphère que les arbres absorberont<br />

durant leur vie. Les revenus générés<br />

par la vente de ces crédits carbone pourront<br />

ensuite être réinvestis dans d’autres<br />

projets de conservation, créant ainsi une<br />

boucle de rétroaction positive.<br />

« Si ce projet pilote s’avère viable et qu’il<br />

se réalise, il est très possible que nous puissions<br />

appliquer cette méthode à d’autres<br />

terres de <strong>CNC</strong> qui nécessitent des efforts de<br />

reforestation, et ce, dans l’espoir de récupérer<br />

des fonds et d’attirer des partenaires ou<br />

des investisseurs qui ont à cœur la conservation<br />

», conclut Mme Rigney.<br />

C’est l’occasion d’entreprendre un projet<br />

d’envergure, et d’en tirer des leçons.<br />

Ce projet n’est d’ailleurs que le début.<br />

Pensons aux bénéfices que nous procurent<br />

les pollinisateurs lorsque nous protégeons<br />

leur habitat, ou à la manière dont les barachois<br />

(banc de sable) préservent les côtes de<br />

l’érosion : la nature est notre filet de protection.<br />

Toute intention de remplacer les bénéfices<br />

que nous retirons de la nature par des<br />

solutions faites par des humains nous donne<br />

Réserve naturelle de la pointe<br />

Escuminac, N.-B.<br />

le tournis à la seule mention des coûts.<br />

L’équipe de l’Accélérateur de projets de <strong>CNC</strong><br />

s’efforce de mieux comprendre la valeur de<br />

ces services et d’encourager les investissements<br />

dans la nature, pour éliminer le besoin<br />

en solutions techniques dispendieuses.<br />

Alliance des cœurs et<br />

des esprits<br />

Aerin Jacob et moi n’avons tenu que quelques<br />

moments au sommet venteux du PKOLS.<br />

Nous sommes pratiquement seuls là-haut, ce<br />

qui est peut-être justifié. En une journée plus<br />

calme, ce mont grouillerait d’adeptes de la<br />

nature, de jeunes couples, de personnes plus<br />

âgées actives, avec ou sans chien, et peutêtre<br />

même d’ornithologues amateurs avec<br />

leur application iNaturalist qui contribuent<br />

sans le savoir au programme de collecte de<br />

données de <strong>CNC</strong>. Aujourd’hui, toutefois, la<br />

plupart de nos camarades Victoriens et Victoriennes<br />

sont assez raisonnables pour éviter de<br />

s’aventurer en montagne.<br />

Même si l’humanité reconnaît de plus en<br />

plus l’importance financière de la nature,<br />

sa valeur intrinsèque et sentimentale reste<br />

fondamentale pour la plupart d’entre nous.<br />

Quand vient le temps de faire des compromis<br />

difficiles, les données analysées par des modèles<br />

informatiques sophistiqués peuvent aider,<br />

mais la prise de décisions repose toujours<br />

entre nos mains humaines et les résultats, sur<br />

nos épaules.<br />

Pour que <strong>CNC</strong> atteigne ses objectifs ambitieux<br />

et brave les vents contraires, il faudra<br />

miser sur les deux côtés de la médaille : les<br />

cœurs et les esprits.1<br />

conservationdelanature.ca<br />

ÉTÉ <strong>2023</strong> 11


PROFIL<br />

D’ESPÈCE<br />

Pipit de Sprague<br />

La présence de cette espèce spécialiste des prairies indigènes est un indicateur<br />

de la santé des prairies à grande échelle.<br />

GLENN BARTLEY.<br />

12 ÉTÉ <strong>2023</strong> conservationdelanature.ca


APPARENCE<br />

Apercevoir un pipit de Sprague au sol<br />

dans son habitat de prairie est tout un défi! Le<br />

mâle et la femelle de cet oiseau chanteur de taille<br />

moyenne ont tous deux un bec mince et sont pourvus<br />

d’un plumage brunâtre qui leur permet de se camoufler<br />

dans la végétation desséchée. Pendant la saison de<br />

reproduction, le mâle se fait moins discret en annonçant sa<br />

présence en décrivant des cercles au-dessus de son territoire<br />

tout en chantant une série de notes aiguës et en cascade. Ce<br />

chant est accompagné d’une parade aérienne comprenant<br />

des battements d’ailes et des vols planés, qui permettent<br />

de voir les longues plumes blanches de part et d’autre<br />

de sa queue. Le spectacle dure souvent plus de<br />

30 minutes et se termine par une impressionnante<br />

descente en piqué jusqu’à<br />

quelques mètres du sol.<br />

HABITAT<br />

Les besoins biologiques<br />

spécifiques du pipit de Sprague en<br />

font une espèce dite spécialiste des prairies<br />

indigènes. Il se reproduit en effet sur de<br />

vastes étendues de prairies à herbes courtes et<br />

mixtes et presque dépourvues d’arbres. Pendant<br />

la migration et l’hivernage, il dépend des milieux<br />

de prairies ouverts (pâturages, champs de foin<br />

et champs agricoles, etc.). Cet oiseau est un<br />

indicateur de la santé et du niveau de<br />

connectivité des prairies à l’échelle<br />

du paysage.<br />

Que fait <strong>CNC</strong> pour protéger<br />

l’habitat de cette espèce?<br />

Conservation de la nature Canada (<strong>CNC</strong>) protège<br />

plusieurs sites où se trouve le pipit de Sprague.<br />

Au Manitoba, il s’agit notamment de Fort Ellice,<br />

Maple Lake et de la réserve naturelle Yellow Quill<br />

Prairie. En Saskatchewan, il a <strong>été</strong> observé dans<br />

des aires naturelles comme celles de Coteau<br />

Missouri, du bassin versant de la rivière Milk, de<br />

l’Upper Qu’Appelle, de Saskatoon Prairie, et de<br />

Lower-Qu’Appelle-Assiniboine-Quill Lakes. En<br />

Alberta, sa présence a <strong>été</strong> notée dans toutes<br />

les aires naturelles de prairies où travaille <strong>CNC</strong>,<br />

y compris sur le territoire des ranchs Haugan,<br />

Ridge et Sandstone.<br />

La plupart des milieux naturels protégés par <strong>CNC</strong><br />

permettant au pipit de Sprague de prospérer<br />

sont broutés par des bovins ou des bisons. Le<br />

pâturage est en effet un important outil de<br />

gestion de la végétation des prairies sans lequel<br />

les plantes deviendraient trop hautes et trop<br />

denses, ce qui priverait cet oiseau d’un habitat.1<br />

Aidez à protéger<br />

cette espèce<br />

Pour aider à conserver l’habitat<br />

naturel de cette espèce, visitez<br />

conservationdelanature.ca/donnez<br />

CALVIN FEHR.<br />

conservationdelanature.ca<br />

AIRE DE<br />

DISTRIBUTION<br />

Le pipit de Sprague est présent du<br />

sud et du centre de l’Alberta jusqu’au<br />

sud-ouest du Manitoba, au sud du<br />

Montana, au nord du Dakota du Sud et<br />

au nord-ouest du Minnesota. L’hiver,<br />

on le retrouve dans le centre et le<br />

sud des États-Unis ainsi que<br />

dans le nord<br />

du Mexique.<br />

MENACES<br />

Le Comité sur la situation des<br />

espèces en péril au Canada (COSEPAC)<br />

a désigné le pipit de Sprague comme une<br />

espèce menacée. La perte et la fragmentation de<br />

son habitat de prairie indigène dans l’ensemble de son<br />

aire de reproduction et d’hivernage menacent l’espèce,<br />

ainsi que l’usage de pesticides, qui peuvent réduire<br />

l’abondance des insectes dont il se nourrit. Au sein de son<br />

aire de reproduction, les menaces comprennent<br />

également la fenaison (récolte du foin) pendant la<br />

période de nidification, le surpâturage, l’augmentation<br />

de la prédation des nids et l’intensification<br />

des périodes de sécheresse et d’humidité<br />

causée par les changements<br />

climatiques.<br />

•<br />

Aire de distribution<br />

ÉTÉ <strong>2023</strong> 13


UNE FORCE POUR<br />

LA NATURE<br />

Une voix<br />

pour la nature<br />

La communicatrice en chef de <strong>CNC</strong> dirige les projecteurs sur les héros de la nature.<br />

BRIANNA ROYE.<br />

14 ÉTÉ <strong>2023</strong> conservationdelanature.ca


Lorsqu’elle traversait le Canada en avion,<br />

à la recherche de nouvelles dans son rôle de<br />

journaliste pour la radio et la télévision, Jane<br />

Gilbert observait le territoire défiler, semblable à une<br />

gigantesque courtepointe. Elle était émerveillée par<br />

les couleurs, les bouquets d’arbres voisins de champs<br />

agricoles, et les « coutures grises ou bleues» que sont<br />

les routes et les rivières reliant ces parcelles.<br />

BRIANNA ROYE.<br />

Toutefois, peu de temps après avoir intégré son rôle de communicatrice<br />

en chef à Conservation de la nature Canada (<strong>CNC</strong>), une pensée<br />

nouvelle lui vint à l’esprit : « J’ai réalisé que cette courtepointe révélait<br />

en fait la fragmentation du territoire. Entre ces parcelles en contrebas,<br />

les espèces ne pouvaient plus se déplacer comme avant. » Elle comprit<br />

alors le besoin de reconnecter ces lieux à leur histoire.<br />

Depuis 2008, Jane Gilbert travaille pour que l’histoire de ces milieux<br />

naturels soit connue des allié(e)s et des partenaires de <strong>CNC</strong>,<br />

ainsi que du grand public. Au fil du temps, elle est parvenue à transformer<br />

le discours de <strong>CNC</strong>, auparavant axé sur une sincère croyance<br />

d’une éventuelle diminution des besoins en conservation, vers une<br />

pensée urgente et ambitieuse qui articule chaque récit autour des<br />

gens qui rendent possible la conservation de la nature.<br />

Aujourd’hui, alors qu’elle s’apprête à quitter <strong>CNC</strong>, elle réfléchit<br />

au défi qui consiste à transformer l’histoire inquiétante du déclin de<br />

la nature en une version remplie plutôt d’espoir et de possibilités.<br />

« J’ai réalisé que si les gens ne se voient pas dans le paysage qu’on<br />

leur dépeint, ils ne peuvent se percevoir comme faisant partie de la<br />

solution », confie la porte-parole sur ses débuts à <strong>CNC</strong>. « Le secret,<br />

c’est les héros. Sans héros dans une histoire, il n’y a pas d’histoire. »<br />

Si les gens ne se voient pas dans le paysage<br />

qu’on leur dépeint, ils ne peuvent se percevoir<br />

comme faisant partie de la solution. Le<br />

secret, c’est les héros. Sans héros dans une<br />

histoire, il n’y a pas d’histoire.<br />

En feuilletant aujourd’hui les chapitres de l’histoire de <strong>CNC</strong>,<br />

on remarque un nombre sans cesse croissant de personnages. « Plus<br />

de 500 000 héros et héroïnes travaillent maintenant à nos côtés »,<br />

déclare Mme Gilbert en parlant des allié(e)s de <strong>CNC</strong>. « Chaque jour,<br />

de plus en plus de gens nous appuient. Sans compter les personnes<br />

exceptionnelles qui forment notre personnel. »<br />

Voir des empreintes d’ours dans la boue d’un sentier, ressentir<br />

des courbatures après une journée à débarrasser une forêt des populations<br />

envahissantes d’alliaire officinale… « Pour notre personnel<br />

sur le terrain, tout ça fait partie du quotidien. Pour nos équipes des<br />

communications , c’est phénoménal! », lance l’ancienne journaliste.<br />

« Et quand on nous le raconte, on peut en parler. » C’est pourquoi<br />

Jane Gilbert a rép<strong>été</strong> ces 15 dernières années une phrase qui a inspiré<br />

une génération tout entière de collègues de <strong>CNC</strong> à trouver (parfois<br />

même à devenir) les héros et héroïnes de leur histoire : « Ce qui<br />

est ordinaire pour vous peut être extraordinaire<br />

aux yeux des autres. »<br />

Sa carrière à <strong>CNC</strong> a <strong>été</strong> ponctuée de visites<br />

à certains des plus impressionnants territoires<br />

protégés par l’organisme. Des côtes<br />

déchiquetées de l’Atlantique, aux sommets<br />

des Rocheuses, en passant par les Prairies<br />

tapissées d’armoises aromatiques. Plus près<br />

de chez elle, elle a vu le pouvoir de la nature<br />

à l’œuvre chaque fois qu’un couple reproducteur<br />

de faucons pèlerins (une victoire de<br />

la conservation en soi) revenait nourrir ses<br />

petits, juste de l’autre côté de la fenêtre de<br />

son bureau.<br />

Jane Gilbert sait toutefois que peu de gens<br />

auront la chance de vivre de tels moments.<br />

Pour pallier cette infortune, elle a rassemblé<br />

en parfaite symbiose l’humain et la nature<br />

dans l’histoire de <strong>CNC</strong>, en encourageant chacune<br />

et chacun à se voir comme acteur et actrice<br />

du changement : comme une figure héroïque<br />

inhérente à la nature.<br />

« Il est très facile pour nous de l’oublier,<br />

dans nos villes, ou canyons de béton, mais<br />

nous sommes ici grâce aux rivières et aux milieux<br />

humides qui bordent nos communautés<br />

et nous procurent de l’eau potable; grâce aux<br />

forêts qui stockent le carbone et contribuent<br />

à rafraîchir les températures », explique<br />

cette narratrice hors pair. « Nous sommes la<br />

nature », nous rappelle-t-elle. Que ce soit<br />

l’adepte du jardinage qui plante des tournesols<br />

sur un balcon au cœur de la plus grande<br />

métropole du Canada ou la bénévole qui<br />

arrache des plantes envahissantes dans une<br />

réserve naturelle de <strong>CNC</strong>. En plaçant les héros<br />

et héroïnes au cœur de l’histoire de <strong>CNC</strong>,<br />

Jane Gilbert a contribué à réunir au sein<br />

d’une même trame narrative le destin des humains<br />

et de la nature, en un effort pour rapiécer<br />

les morceaux disparates de cette courtepointe<br />

qu’était le paysage qu’elle a contemplé<br />

du haut des airs il y a 15 ans.1<br />

conservationdelanature.ca<br />

ÉTÉ <strong>2023</strong> 15


<strong>CNC</strong><br />

À L’ŒUVRE<br />

1<br />

<strong>CNC</strong> collabore dans une APCA<br />

SUD-EST DU NOUVEAU-BRUNSWICK<br />

2<br />

MERCI!<br />

Votre appui a permis la réalisation de<br />

ces projets. Pour en savoir plus, visitez :<br />

conservationdelanature.ca/nous-trouver<br />

Protéger l’arche de Frontenac<br />

« En 1930, mon arrière-grand-père a acheté des terres en bordure<br />

d’un lac au nord de Kingston, en Ontario. Ayant grandi à Montréal,<br />

je pensais que cette région était un trésor méconnu, car mes<br />

ami(e)s avaient plutôt des chalets au Québec (dans les Laurentides<br />

ou les Cantons-de-l’Est) et mes connaissances de Toronto se<br />

rendaient plutôt dans la région de Muskoka et plus au nord. Très<br />

vite, j’ai appris que cette région bien spéciale de l’Ontario avait<br />

un nom : l’arche de Frontenac.<br />

3<br />

1<br />

4<br />

Grâce à une collaboration entre Mi’gmawe’l Tplu’taqnns<br />

Inc., une organisation Mi’gmaq fondée sur les droits, et<br />

<strong>CNC</strong>, les premiers intendants du territoire mettent à profit<br />

leur expertise tout en renouvelant leurs liens à la terre dans la<br />

toute nouvelle aire protégée et de conservation autochtone<br />

(APCA) Simogwik, dans le sud-est de la province.<br />

L’automne dernier, <strong>CNC</strong> a transféré 44 hectares à Keki’namuanen<br />

Msit Wen Wlo’tmnen Nmaqami’kminu, un organisme de conservation<br />

mi’gmaq qui voit au maintien de l’intégrité écologique du territoire<br />

et de la conservation de la biodiversité, tout en faisant la<br />

promotion du patrimoine, de la culture et de la langue mi’gmaq.<br />

L’APCA Simogwik abrite des bouleaux blancs, des lièvres d’Amérique,<br />

des roitelets à couronne dorée et plusieurs autres espèces<br />

d’oiseaux. Ses forêts et milieux humides abritent ces espèces et<br />

soutiennent le lien profond du peuple Mi’gmaq au territoire.<br />

« Avec ses nombreux cours d’eau et son accès au détroit de Northumberland<br />

et à la baie de Fundy, Simogwik était à la fois une aire<br />

commune importante et une route commerciale très fréquentée »,<br />

a expliqué Rebecca Knockwood, chef de la Première Nation<br />

d’Amlagog (Fort Folly).<br />

« Nous sommes honorés d’être associé à Mi’gmawe’l Tplu’taqnn<br />

Inc. pour créer cette APCA », a ajouté Paula Noel, directrice de<br />

programmes à <strong>CNC</strong>, au Nouveau-Brunswick. « La conservation qui<br />

soutient le leadership autochtone et les liens culturels au territoire<br />

est une forme importante de réconciliation. »<br />

Une fois ce projet achevé, les terres, les eaux, les végétaux et<br />

les animaux de l’APCA Simogwik seront protégés pour les sept<br />

prochaines générations (principe selon lequel une décision est<br />

prise en tenant compte des effets sur les générations futures).<br />

Bouleau blanc.<br />

ANDREW HERYGERS/<strong>CNC</strong>.<br />

Mon épouse et moi avons pris connaissance des activités de <strong>CNC</strong><br />

dans cette région, et avons rapidement commencé à contribuer à ses<br />

efforts pour acquérir des parcelles de terre stratégiques. Aujourd’hui,<br />

<strong>CNC</strong> gère plus de 2 760 hectares dans l’arche de Frontenac en plus de<br />

participer à la protection de 2 985 hectares d’habitat de plus.<br />

La proximité de la frontière avec les États-Unis et la myriade d’activités<br />

récréatives qu’offre la région en ont fait un lieu très prisé par<br />

la population américaine. C’est aussi l’un des plus importants<br />

corridors écologiques entre nos deux pays, puisqu’il relie le Bouclier<br />

canadien aux Appalaches. Aujourd’hui, mon épouse et moi avons<br />

la double nationalité et vivons aux États-Unis. Je préside le Conseil<br />

d’administration de American Friends of Canadian Nature, qui<br />

permet à la population américaine d’appuyer la conservation au<br />

Canada en accordant du financement et des dons de terres à<br />

<strong>CNC</strong> et à d’autres organismes. »<br />

~ Tim Gardiner est donateur à <strong>CNC</strong> depuis 2006. Il est<br />

membre du Conseil d’administration de American Friends of<br />

Canadian Nature (AFCN) depuis octobre 2018 et en est le<br />

président depuis 2022.<br />

L’AFCN est un organisme de bienfaisance enregistré auprès de l’IRS 501(c)(3) dans<br />

l’État de New York. Sa mission est de soutenir la conservation et la gestion de<br />

terres au Canada en travaillant avec des partenaires clés en conservation et avec<br />

16 WINTER l’appui <strong>2023</strong> de bailleurs de fonds américains.<br />

natureconservancy.ca


4<br />

Une nouvelle<br />

réserve<br />

naturelle<br />

PORT L’HEBERT, N.-É.<br />

FERNANDO LESSA; FIONA BROOKS; CAROLINE DKS/<strong>CNC</strong>.<br />

Aire de conservation Reginald Hill, C.-B.<br />

2<br />

Une victoire<br />

pour la<br />

côte Ouest<br />

ÎLE SALT SPRING, C.-B.<br />

Sur l’île Salt Spring, au sud-est<br />

de l’île de Vancouver, <strong>CNC</strong><br />

protège des écosystèmes forestiers<br />

parmi les plus rares de la<br />

Colombie-Britannique, et ce,<br />

sur plus de 160 hectares. Ce site<br />

grouillant de vie, nommé aire<br />

de conservation Reginald Hill,<br />

comprend une forêt côtière de<br />

douglas de Menzies en cours de<br />

maturation, des affleurements<br />

rocheux couverts de mousses,<br />

des communautés végétales<br />

composées de chêne de Garry,<br />

des falaises rocheuses et des<br />

milieux humides.<br />

Les écosystèmes de forêts<br />

côtières de douglas de Menzies<br />

n’occupent que 0,3 % du territoire<br />

de la province. Malgré leur<br />

rareté, ils sont essentiels à la<br />

survie de certaines des espèces<br />

les plus menacées de la province,<br />

comme la couleuvre à<br />

queue fine et le leptoge à quatre<br />

spores (un lichen).<br />

L’aire de conservation Reginald<br />

Hill s’ajoute à un réseau de<br />

parcs et de terres protégées<br />

pour créer une zone connectée<br />

plus vaste où les espèces sauvages<br />

peuvent prospérer et se<br />

déplacer librement.<br />

Pour en savoir plus :<br />

conservationdelanature.ca/<br />

reginaldhill<br />

3<br />

Se retrousser<br />

les manches<br />

ÎLE AUX GRUES, QC<br />

Au cœur du fleuve Saint-Laurent,<br />

à environ 80 kilomètres à l’est<br />

de la ville de Québec, se trouve<br />

l’île aux Grues. Ce site, qui est<br />

doté d’une grande biodiversité<br />

à l’échelle provinciale, accueille<br />

plus de 200 espèces d’oiseaux qui<br />

y nichent ou y font une halte au<br />

cours de leur migration.<br />

Un redoutable envahisseur<br />

peuple l’île : le roseau commun<br />

(ou phragmite). Cette plante a<br />

envahi le haut marais (zone située<br />

entre l’île aux Grues et sa<br />

voisine l’île aux Oies) où elle appauvrit<br />

la qualité des milieux humides<br />

en privant la faune d’habitats<br />

essentiels et en supplantant<br />

les espèces végétales indigènes.<br />

<strong>CNC</strong> a entrepris un projet<br />

visant à lutter contre la présence<br />

de cet envahisseur. Après avoir<br />

procédé à la tonte de 2 hectares,<br />

des membres du personnel et<br />

des spécialistes locaux ont utilisé<br />

une machine à coudre industrielle<br />

pour assembler de grandes<br />

bâches. Les peuplements ont<br />

ensuite <strong>été</strong> recouverts de ces<br />

bâches pour bloquer la lumière<br />

du soleil et faire ainsi mourir les<br />

plants de roseaux communs. Le<br />

personnel poursuit la surveillance<br />

et l’entretien du site et prévoit y<br />

planter des végétaux indigènes<br />

d’ici quelques années, afin d’aider<br />

la riche biodiversité de la région<br />

à prospérer.<br />

L’aire naturelle Haley Lake est<br />

l’habitat vital de nombreuses espèces<br />

en péril, dont l’érioderme<br />

boréal, un lichen rare à l’échelle<br />

mondiale. Elle est aussi une halte<br />

essentielle pour les oiseaux migrateurs.<br />

Le lac Haley se situe<br />

dans une Zone importante pour<br />

la conservation des oiseaux<br />

(ZICO) dans la collectivité de<br />

Port L’Hebert, sur la côte sud de<br />

la Nouvelle-Écosse. Cette nouvelle<br />

réserve de 610 hectares<br />

abrite une forêt Wabanaki (acadienne)<br />

inaltérée et en bonne<br />

santé, des landes côtières, des<br />

milieux humides d’eau douce et<br />

des berges lacustres. Quatre refuges<br />

d’oiseaux migrateurs de<br />

compétence fédérale se trouvent<br />

à proximité et abritent des milliers<br />

de sauvagines qui s’y reproduisent<br />

et y passent l’hiver. Les<br />

forêts autour du lac Haley comprennent<br />

d’importantes populations<br />

de lichens rares, dont la dégélie<br />

plombée, désignée lichen<br />

officiel de la Nouvelle-Écosse.<br />

<strong>CNC</strong> travaille en collaboration<br />

avec des partenaires de la Kespukwitk<br />

Conservation Collaborative<br />

pour protéger des espèces<br />

en péril dans la région. Fondé en<br />

2017, ce regroupement est composé<br />

de Premières Nations<br />

Mi’kmaq, d‘organisations non<br />

gouvernementales, d‘établissements<br />

universitaires et de ministères<br />

fédéraux et provinciaux.<br />

Érioderme boréal (un lichen).<br />

Onagre bisannuelle,<br />

Hastings Wildlife Junction, Ont.<br />

Pleins feux sur<br />

nos partenaires<br />

Intact Corporation financière<br />

aide Conservation de la<br />

nature Canada (<strong>CNC</strong>) à fournir<br />

des solutions fondées sur la<br />

nature en réponse à la perte<br />

de biodiversité et aux changements<br />

climatiques.<br />

Par son engagement sur<br />

cinq ans, Intact investit dans<br />

la protection et la restauration<br />

de milieux humides et d'autres<br />

écosystèmes cruciaux à travers<br />

le pays. Ce partenariat est déjà<br />

actif en Ontario (Hastings<br />

Wildlife Junction), au Nouveau-Brunswick<br />

(vallée de la<br />

rivière Wolastoq [Saint-Jean]) et<br />

au Québec (la Grande tourbière<br />

de La Jacques-Cartier).<br />

Intact soutient également<br />

l'élaboration d'un protocole<br />

canadien de compensation<br />

des émissions de carbone en<br />

lien avec les milieux humides.<br />

Une fois disponible, ce protocole<br />

sera un outil permettant<br />

d'augmenter les investissements<br />

axés sur la conservation dans<br />

les milieux humides au Canada.<br />

Intact soutient également les<br />

travaux de <strong>CNC</strong> visant à<br />

améliorer les mesures et à<br />

quantifier les avantages que<br />

les milieux humides procurent<br />

à la population. Ce partenariat<br />

souligne l'accélération du<br />

rythme de conservation de <strong>CNC</strong><br />

au Canada, ainsi que l'engagement<br />

d'Intact envers <strong>CNC</strong> et le<br />

soutien des solutions fondées<br />

sur la nature.<br />

conservationdelanature.ca


GRANDEUR<br />

NATURE<br />

Lumières dansantes<br />

Par Esme Batten, directrice des programmes à <strong>CNC</strong> pour le Centre-Ouest de l’Ontario<br />

Avant, quand on me parlait d’aurores<br />

boréales, je m’imaginais les observer<br />

un jour dans le Nord du Canada ou<br />

en voyage dans un autre pays comme l’Islande<br />

ou la Finlande. Je n’aurais jamais cru avoir le<br />

privilège de les voir de chez moi, sur la péninsule<br />

Saugeen Bruce, dans le sud de l’Ontario.<br />

Les chatoyantes aurores boréales de l’hémisphère<br />

Nord, tout comme les aurores australes<br />

de l’hémisphère Sud, sont causées par<br />

l’activité qui se déroule à la surface du Soleil.<br />

Pendant un type de tempête solaire, appelé<br />

éjections de masse coronale (EMC), des particules<br />

et des gaz chargés électriquement<br />

sont projetés dans l’espace. C’est au moment<br />

où ces particules pénètrent le champ magnétique<br />

de la Terre, habituellement trois jours<br />

après l’EMC, que les aurores sont visibles.<br />

Étant donné la forme du champ magnétique<br />

de notre planète (ou magnétosphère),<br />

certaines des particules chargées qui le traversent<br />

sont dirigées vers les pôles le long<br />

des lignes du champ magnétique. C’est pourquoi<br />

nous voyons souvent des lumières aux<br />

pôles, c’est-à-dire là où ces particules chargées<br />

pénètrent l’atmosphère.<br />

Quand les particules chargées interagissent<br />

avec les gaz atmosphériques, elles<br />

produisent des lueurs de différentes couleurs<br />

dans le ciel, selon l’altitude à laquelle elles<br />

heurtent l’atmosphère. À faible altitude, elles<br />

produisent des lueurs vertes, tandis qu’à<br />

haute altitude, ces lueurs sont rouges. Le<br />

contact entre les particules et l’azote à faible<br />

altitude produit des lueurs roses ou rouges<br />

alors qu’une collision avec l’hydrogène et l’hélium<br />

engendre des lueurs bleues et violettes.<br />

À la fin mars, je consultais les prévisions<br />

de la National Oceanic and Atmospheric<br />

Administration pour savoir si j’aurais la<br />

chance de voir des aurores à partir de chez<br />

moi. Depuis mon coup de foudre avec l’astrophotographie<br />

en 2019, ces prévisions m’ont<br />

plusieurs fois donné la chance de photographier<br />

le mouvement d’aurores à l’horizon.<br />

Cette fois, les tempêtes annoncées allaient<br />

être intenses; du jamais vu pour moi!<br />

Ce soir-là, en revenant à la maison, j’ai<br />

commencé à distinguer des aurores juste<br />

avant que le ciel s’assombrisse complètement.<br />

Mon excitation commençait à grimper! Je me<br />

suis empressée de saisir mon matériel photographique<br />

et d’enfiler des vêtements chauds<br />

avant de repasser la porte en courant. Je rêvais<br />

de photographier les étoiles depuis une<br />

grotte située au bord de la baie Georgienne,<br />

et je savais que c’était aussi là que je devais<br />

photographier les aurores.<br />

Une fois sur place, j’ai marché rapidement<br />

jusqu’au rivage en empruntant le sentier<br />

Bruce et en évitant les plaques de glace,<br />

sous la lumière de ma lampe frontale. Une<br />

fois arrivée à la grotte, j’ai éteint ma lampe<br />

et pris le temps de fermer les yeux pour<br />

qu’ils s’ajustent à l’obscurité. Quand je les<br />

ai rouverts, ce que j’ai vu était incroyable.<br />

Les aurores dansaient partout autour et<br />

au-dessus de moi, d’un vert vif rarement visible<br />

aussi loin au sud. Elles sont habituellement<br />

de discrètes barres grises ondulant<br />

à l’horizon et dont les couleurs ne peuvent<br />

être captées qu’avec un appareil photo après<br />

une longue exposition.<br />

Mon enthousiasme était tel que je riais de<br />

manière hystérique en plaçant mon appareil,<br />

éblouie par la beauté de la nature. Une amie<br />

m’a rejointe et nous sommes restées assises<br />

là des heures, levant souvent les yeux sans<br />

dire un mot. Lorsque je me suis finalement<br />

mise au lit vers 4 h du matin, les lueurs dansaient<br />

toujours. Ce moment me paraît encore<br />

irréel.<br />

Il est probable que l’activité solaire augmente<br />

et que les tempêtes solaires soient plus<br />

fréquentes et plus intenses jusqu’au milieu de<br />

2025, ce qui signifie que les aurores deviendront<br />

plus fréquentes. Portez votre regard<br />

vers le Nord dans les mois à venir; vous aurez<br />

peut-être vous aussi la chance d’admirer la<br />

majesté des aurores boréales.1<br />

ESME BATTEN<br />

18 ÉTÉ <strong>2023</strong> conservationdelanature.ca


METTEZ VOTRE<br />

PASSION AU<br />

CŒUR DE<br />

VOTRE<br />

HÉRITAGE<br />

Votre passion pour les espaces naturels qui nous entourent est au cœur de votre vie.<br />

Et maintenant, vous pouvez en faire votre héritage. Un don testamentaire à Conservation<br />

de la nature Canada, quel que soit le montant, vous permet de contribuer à la protection<br />

de nos habitats les plus vulnérables et de la faune qu’ils abritent. Pour aujourd’hui,<br />

pour demain, et pour les générations à venir.<br />

Commandez votre livret d’information sur les dons planifiés dès aujourd’hui.<br />

Contactez-nous par courriel à don.planifie@conservationdelanature.ca,<br />

ou visitez natureenheritage.ca


VOTRE<br />

IMPACT<br />

Conservation<br />

d’habitats<br />

côtiers<br />

En Nouvelle-Écosse,<br />

votre soutien a permis<br />

d'ajouter 14 hectares<br />

à la réserve naturelle<br />

Dr Bill Freedman. Située<br />

le long du populaire<br />

sentier High Head, cette<br />

étendue nouvellement<br />

protégée comprend un<br />

habitat côtier intact, dont<br />

une section rocheuse<br />

donnant sur le littoral.<br />

Le site est une halte importante<br />

pour les oiseaux<br />

de rivage migrateurs<br />

qui se nourrissent des<br />

abondantes camarines<br />

(petits fruits) des landes<br />

couvrant le granit et qui<br />

sont aussi l’habitat idéal<br />

de certaines plantes<br />

côtières rares.<br />

Réserve naturelle Dr Bill Freedman, N.-É.<br />

Grands Lacs, grande victoire.<br />

Grâce à votre soutien, la plus grande île privée du lac Supérieur est désormais<br />

protégée. Les 27 kilomètres de rivage de l'île Batchewana entourent plus<br />

de 2 000 hectares de forêts matures et de milieux humides intacts. Du travail<br />

d'intendance y est toujours en cours. Pour en savoir plus et faire un don afin de<br />

contribuer à la protection de l'île, visitez conservationdelanature.ca/batchewana<br />

Ile Batchewana, Ont.<br />

Merci d’en faire autant pour la nature au Canada!<br />

ANDREW HERYGERS/<strong>CNC</strong>; GARY MCGUFFIN.

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