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interview exclusive<br />
> LE JOURNAL<br />
D’ANNE FRANK<br />
AU THÉÂTRE RIVE GAUCHE<br />
À PARIS<br />
60 | hayom 46<br />
Traduite en plus de 50 langues, on dit d’Anne Frank qu’elle<br />
est aujourd’hui l’auteur le plus lu au monde. Son Journal,<br />
dont des millions d’exemplaires circulent à travers<br />
la terre entière, est aujourd’hui notamment porté à la scène<br />
par un autre auteur à la renommée elle aussi<br />
indiscutable, Éric-Emmanuel Schmitt, sur les planches<br />
du théâtre Rive Gauche, à Paris, que lui-même<br />
co-dirige avec Francis Lombrail et Bruno Metzger.<br />
ans doute d’ailleurs cette rencontre<br />
entre ces deux grands<br />
noms de la littérature étaitelle<br />
inéluctable et il est envisageable<br />
que les ouvrages consacrés par<br />
l’écrivain contemporain à la période de<br />
la 2ème S<br />
guerre mondiale (citons notamment:<br />
La part de l’autre, L’enfant de Noé ou<br />
encore Le visiteur) auront notamment<br />
contribué à convaincre le Fonds Anne<br />
Frank – que l’on sait particulièrement<br />
exigeant – de lui offrir l’opportunité de<br />
servir à son tour cette œuvre majeure?<br />
(bénéficiant même, avoue-t-il, d’éléments<br />
qui ne sont pas dans le Journal)<br />
Des producteurs hollandais ont procédé,<br />
voici trois ans, à un casting international:<br />
des dramaturges du monde<br />
entier ont exposé leur vision du Journal<br />
d’Anne Frank et si Éric-Emmanuel<br />
Schmitt a été retenu, c’est, sans doute,<br />
pour la singularité du point de vue à<br />
partir duquel il a choisi d’adapter le récit:<br />
c’est-à-dire celui du seul rescapé de la<br />
famille Frank: Otto, le père d’Anne.<br />
Ce qui était intéressant pour Éric-Emmanuel<br />
Schmitt dans ce projet n’était<br />
pas, en effet, de se lancer dans une<br />
simple adaptation du Journal mais bien<br />
de faire œuvre nouvelle, acte de création,<br />
à partir du texte original.<br />
Ainsi la pièce débute avec le retour<br />
d’Otto Frank à Amsterdam.<br />
Chaque jour, il erre à travers la gare, à<br />
la recherche de ses deux filles Anne et<br />
Margot. Il finira par apprendre leur disparition.<br />
Sa secrétaire, Miep Gies, celle qui rendit<br />
possible leur sursis durant la guerre, lui<br />
confie alors le journal intime d’Anne,<br />
retrouvé deux ans après la mort de sa<br />
Roxane Duran<br />
Éric-Emmanuel Schmitt<br />
interview exclusive<br />
femme et des ses filles en déportation.<br />
Ni Otto Frank, ni sa fidèle alliée n’imaginent<br />
à cet instant le retentissement<br />
que connaîtra le petit carnet d’Anne, à<br />
travers le monde et le temps!<br />
Nul besoin de rappeler ici le destin à la<br />
fois lumineux et tragique de la jeune<br />
Anne, à peine sortie de l’enfance et plongée<br />
avec sa famille dans les affres de<br />
l’Histoire, à l’âge de tous les possibles.<br />
L’Annexe, qui a abrité les deux familles,<br />
est reconstituée de façon harmonieuse<br />
par la talentueuse scénographe Stéfanie<br />
Jarre: neuf décors dont la couleur dominante,<br />
orangé, confère une certaine chaleur<br />
à l’ensemble.<br />
La mise en scène, confiée à Steve Suissa<br />
(voir le portrait), se révèle d’une fluidité<br />
remarquable, visuelle et quasi cinématographique<br />
avec des flash-back, des<br />
scènes courtes rythmées par la musique<br />
et un montage son particulièrement<br />
efficace. Le spectateur a l’impression de<br />
tourner les pages du Journal: la même<br />
émotion est au rendez-vous.<br />
Rien n’est laissé au hasard dans la direction<br />
d’acteurs habile et rigoureuse: cha-<br />
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