30.04.2013 Views

Kléos, Revista de Filosofia Antiga - Programa de Estudos em ...

Kléos, Revista de Filosofia Antiga - Programa de Estudos em ...

Kléos, Revista de Filosofia Antiga - Programa de Estudos em ...

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

DES ACCIDENTS KATA TEN PHANTASIAN A LA PHANTASIA BOULEUTIKE: LE TRAITE DE L’AME D’ARISTOTE<br />

Il n’est pas exact, croyons-nous, d’affirmer que la phantasia interprète,<br />

quelle que puisse être une philosophie pertinente du phénomène, ou<br />

une histoire pertinente <strong>de</strong> la conception grecque du phénomène. Mais il n’est<br />

pas judicieux non plus <strong>de</strong> ramener la phantasia au phainomenon, car le phainomenon<br />

c’est déjà <strong>de</strong> la vieille histoire, tandis que le propos aristotélicien sur la phantasia<br />

s’attaque, même sous un nom ancien, à un nouvel objet théorique. Il est exact<br />

que phantasia et phainomenon sont <strong>de</strong>s termes apparentés. Il y a beaucoup <strong>de</strong> vrai<br />

égal<strong>em</strong>ent dans la thèse selon laquelle Aristote <strong>em</strong>ploie le terme <strong>de</strong> phantasia<br />

pour évoquer <strong>de</strong>s expériences infra-sensorielles. Mais précisément, lorsqu’Aristote<br />

a recours à ces <strong>em</strong>plois, il n’est pas en train d’innover, il se situe dans la continuation<br />

<strong>de</strong> l’ancien. Comme on le sait <strong>de</strong>puis longt<strong>em</strong>ps, son propos est hétérogène,<br />

et phantasia ne constitue pas chez lui un terme univoque. Ainsi, la tâche<br />

principale <strong>de</strong> l’interprétation est-elle moins <strong>de</strong> repérer ce qu’il y a <strong>de</strong> peu novateur<br />

chez Aristote, que <strong>de</strong> reconnaître, là où elle se produit, l’invention théorique.<br />

Or, entendre “représentation” n’est pas non plus faire droit à l’invention<br />

aristotélicienne, c’est même presque refuser d’y rester sensible. En<br />

pr<strong>em</strong>ière approche, choisir <strong>de</strong> rendre phantasia par “représentation” s<strong>em</strong>ble le<br />

résultat d’une volonté louable <strong>de</strong> simplification théorique. “Imagination” est<br />

un terme flou, surchargé d’histoire, et dont l’histoire précisément connaît <strong>de</strong>s<br />

développ<strong>em</strong>ents peu aristotéliciens 7 : en cessant <strong>de</strong> dire “imagination”, ne supprime-t-on<br />

pas <strong>de</strong>s risques <strong>de</strong> contresens, et n’évite-t-on <strong>de</strong> projeter sur Aristote<br />

du surréalisme, du romantisme ou même <strong>de</strong> l’<strong>em</strong>pirisme? Le problème,<br />

c’est que “représentation” n’est pas plus sobre, sonne un peu trop hellénistique,<br />

et surtout qu’Aristote est bien d’une façon ou d’une autre à l’origine <strong>de</strong> la<br />

conceptualisation <strong>de</strong> la vie mentale en termes d’ “imagination”.<br />

Son propos ne doit pas cette fécondité seul<strong>em</strong>ent aux contresens<br />

“In the case of non-linguistic creatures we will, as a rule, speak of phantasia only in practical cases”, le rôle <strong>de</strong><br />

la phantasia étant <strong>de</strong> présenter l’objet comme désirable ou non désirable. Pour maintenir une approche unitaire,<br />

M. Nussbaum est alors conduite à affirmer à diverses reprises que les “non-practical cases” (où il en va<br />

égal<strong>em</strong>ent du “voir comme”) ne diffèrent pas <strong>de</strong>s “practical cases”. Nous lisons par ex<strong>em</strong>ple, p. 269, qu’Aristote<br />

“is right to make it the job of the same theory to explain both practical and non-practical cases; for these differ<br />

not cognitively, but only with référence to the rôle played by <strong>de</strong>sire” (cf. aussi p. 261 et 267). S’il revient à la<br />

phantasia d’ouvrir le ch<strong>em</strong>in au désir, il est un peu tortueux <strong>de</strong> prendre comme modèle <strong>de</strong> la phantasia la<br />

phantasia qui informe le désir, pour déclarer ensuite qu’il n’y a là rien <strong>de</strong> plus sur le plan cognitif que lorsque la<br />

phantasia n’est pas une préparation au désir.<br />

7 Comme le dit fort bien BODEUS, (L’imagination au pouvoir. Dialogue, Waterloo, v. 29, n. 1, 1990), à propos<br />

d’Aristote, p. 23, “insister sur la phantasia [...] c’est ramener au réel ce qui risque <strong>de</strong> s’éva<strong>de</strong>r dans la pensée, non<br />

inviter à l’évasion dans l’imaginaire”. Mais <strong>de</strong> quoi s’agit-il alors tout <strong>de</strong> même, sinon <strong>de</strong> voir les choses quand<br />

elles ne sont pas là? NUSSBAUM, 1978, nous s<strong>em</strong>ble près <strong>de</strong> l’admettre, dans les <strong>de</strong>rnières pages <strong>de</strong> son essai,<br />

p. 265-267, lorsqu’elle fait du reste état d’une “sub-theory of imagining”.<br />

K LÉOS N. 5: 35-63, 2001/2<br />

38

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!