To All Appearances A Lady - University of British Columbia

Books in Review
Vita Nova
Anne Hébert
L'Enfant chargé de songes (roman). Seuil n.p.
Le Jour n'a d'égal que la nuit (poèmes). Seuil
$18.95
Oeuvres poétiques- Boréal/Seuil Coll. Boréal
Compact n.p.
Reviewed by Grazia Merler
Autant la critique a été élogieuse à l'égard
du roman qui, en effet a reçu le prix du
Gouverneur Général (1992), autant elle a été
réticente à l'égard du retour d'Anne Hébert
à la poésie. Et pourtant, à peine quelques
mois après la parution du recueil Le Jour n'a
d'égal que la nuit, une nouvelle édition réunissant
les deux autres recueils de poèmes
est parue dans l'édition de poche. Il était
temps, d'ailleurs, que cette oeuvre, un peu
comme pour le théâtre, soit réunie et trouve
sa place à côté des grands de la poésie.
Si la constante tension émotive de l'univers
d'Anne Hébert est bien reconnaissable,
le ton de ces deux dernières oeuvres a
cependant changé. La sensualité sourde qui
menace à tout moment d'éclater et de tout
détruire dans son déchaînement est toujours
présente. Roman et poèmes, dans leur
mise en oeuvre d'un monde paradoxal,
visent, comme toujours, à nommer les
choses extrêmes mais, cette fois-ci, c'est
pour les maintenir ensemble, pour qu'elles
coopèrent à une certaine illusion de la joie
de la vie, pour qu'elles disent l'étonnement
de la naissance. Le songe, ainsi, dans les
deux oeuvres n'est plus porteur d'oubli, de
fuite mais il engendre une vie nouvelle.
Enfantement et création artistique semblent
se rejoindre dans un seul geste d'amour
posé avec précaution et patience. Dans l'introduction
au recueil de poèmes dont le
titre même suggère cette recherche d'unité
(Le Jour n'a d'égal que la nuit), Anne Hébert
explique sa propre évolution: "Le poète est
au monde deux fois plutôt qu'une." Une
première fois pour nommer et refléter le
monde le plus fidèlement possible, une deuxième
fois pour dire le "passage du dehors au
dedans et du dedans au dehors, échange et
jubilation.... La parole, empoignée de toutes
parts, est dite, surprenante et de naissance
inconnue, pourrait-on croire, tant l'événement
nous dépasse et nous enchante".
Les "Poèmes anciens" écrits entre 1961 et
1980 ainsi que les "Poèmes nouveaux" écrits
entre 1987 et 1989 témoignent du fait que, de
façon intermittente, Anne Hébert n'a jamais
arrêté d'écrire des poèmes à côté des romans
et des pièces. A la différence, cependant,
des trois autres recueils qui tracent un parcours
intime et spirituel de la mort vers la
vie, celui-ci explore différentes attitudes à
l'égard de la vie et de la réalité quotidienne,
différents états d'âme et impressions.
Certains poèmes démasquent l'injustice
(Le Piano, Les Offensés, Soleil dérisoire,
Sous la voûte céleste, Les fusillés, Fin du
monde), d'autres dénoncent la supercherie
(Noël, Parricide, L'Ange gardien, Nuit
d'été, Que Dieu soit). D'autres poèmes
moins engagés expriment des impressions
rapides dans l'éclat de leur fraîcheur et
justesse (Bel été, Baigneuse, Referme l'eau,
Silence, Matin ordinaire, Chant des cloches,
Oiseau de givre, Cher amour, Le Cri, Le
Pain, Parmi les aulnes). D'autres poèmes
encore offrent des images non dépourvues
d'une certaine ironie moqueuse (La Soeur
de Charité, La Page blanche, Terre originelle,
Pour un phénix, Le Jour n'a d'égal
que la nuit, Les Tournesols, Cher amour).
Les tableaux surréalistes (Apparition,
Couronne de félicité, Terre brûlée, Une fois
seulement, Leçon de ténèbres) parlent d'inspiration
poétique et d'attente. D'autres,
enfin, font preuve d'humour et de rapidité
d'expression (L'Aide-ménagère, Etrange
capture, L'Offense faite au jardin, Les
Vieux, Jardin dévasté). Bref, il s'agit d'un
recueil d'inspiration fort variée. La simplicité
du vocabulaire, la rigueur de l'expression,
sa clarté même produisent une oeuvre
110