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Sociologie des acteurs de la gentrification des quartiers anciens ...

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Les gran<strong><strong>de</strong>s</strong> dimensions <strong>de</strong> <strong>la</strong> comparaison inter-temporelle<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>acteurs</strong> et <strong><strong>de</strong>s</strong> processus <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>gentrification</strong><br />

L’exploration <strong><strong>de</strong>s</strong> gran<strong><strong>de</strong>s</strong> dimensions <strong>de</strong> cette perspective particulière sur <strong>la</strong> <strong>gentrification</strong> conduit<br />

à <strong><strong>de</strong>s</strong> questions sociologiques plus fondamentales. Ces questions peuvent être comprises et<br />

éc<strong>la</strong>irées à l’ai<strong>de</strong> d’un dialogue entre <strong><strong>de</strong>s</strong> auteurs et <strong><strong>de</strong>s</strong> recherches, à chaque pério<strong>de</strong> et entre les<br />

pério<strong><strong>de</strong>s</strong>.<br />

La <strong>gentrification</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> années 1970-1980<br />

Qui étaient les <strong>acteurs</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>gentrification</strong> ?<br />

Il s’agit dans un premier temps d’expliciter et <strong>de</strong> déconstruire les « figures » <strong>de</strong><br />

l’embourgeoisement urbain - médiatisées comme « hippies » puis comme « bobos » - et <strong>de</strong> cerner<br />

les caractéristiques <strong><strong>de</strong>s</strong> individus et <strong><strong>de</strong>s</strong> groupes particulièrement actifs dans <strong>la</strong> recomposition<br />

sociale <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>quartiers</strong> <strong>anciens</strong> dans les années 1970-1980.<br />

Les étu<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> chercheurs <strong>de</strong> l’O.C.S. ont permis <strong>de</strong> caractériser finement ces popu<strong>la</strong>tions, en<br />

particulier celles qui transformèrent les <strong>quartiers</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> Croix-Rousse à Lyon et Daguerre à Paris.<br />

Elles appartiennent aux « nouvelles couches moyennes » (terme pluriel soulignant leur diversité)<br />

caractérisées par leur positionnement sur le marché du travail - ce sont plutôt <strong><strong>de</strong>s</strong> sa<strong>la</strong>riés <strong>de</strong> l’Etat,<br />

exerçant une activité « sociale » au sens <strong>la</strong>rge (éducation, santé, architecture,...) dans <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

professions récemment développées, où <strong>la</strong> reproduction sociale est donc rare pour <strong><strong>de</strong>s</strong> raisons<br />

structurelles ; on y trouve également <strong><strong>de</strong>s</strong> étudiants ou <strong><strong>de</strong>s</strong> marginaux vivant <strong>de</strong> « petits métiers »<br />

avant <strong>de</strong> s’installer comme artisans ou restaurateurs (surtout à Croix-Rousse). Ils sont aussi<br />

caractérisés par leur adhésion à un système <strong>de</strong> valeurs inspiré <strong>de</strong> 1968, valorisant<br />

l’interconnaissance, <strong>la</strong> convivialité (surtout à Daguerre), <strong>la</strong> lutte et <strong>la</strong> contestation politiques. Jean<br />

Rémy dresse peu ou prou le même portrait, les gentrifieurs étant selon lui constitués principalement<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> c<strong>la</strong>sses moyennes ayant un fort capital culturel et un assez faible capital économique - ce qui<br />

les met face à <strong><strong>de</strong>s</strong> contradictions dans leur vie quotidienne.<br />

C. Bidou, dans Les aventuriers du quotidien [6], a aussi rencontré, en quartier ancien comme en<br />

vil<strong>la</strong>ge péri-urbain, ces « nouvelles couches moyennes sa<strong>la</strong>riées » qu’elle a d’ailleurs contribué à<br />

définir. Elle insiste davantage sur plusieurs points qui nous semblent particulièrement intéressants<br />

pour <strong>la</strong> comparaison avec les popu<strong>la</strong>tions actuellement actrices <strong>de</strong> l’embourgeoisement.<br />

D’abord, il s’agit d’une catégorie <strong>de</strong> popu<strong>la</strong>tion peu évi<strong>de</strong>nte à nommer et à situer dans l’espace<br />

social : elle appartient aux c<strong>la</strong>sses ou aux couches moyennes qui sont le « ventre mou » d’un espace<br />

social structuré <strong>de</strong> façon très po<strong>la</strong>risée en France. P. Bourdieu, dans La distinction [7], les situe<br />

dans <strong>la</strong> « petite bourgeoisie » très extensive (« tout ce qui n’est pas le prolétariat et <strong>la</strong> vraie<br />

bourgeoisie », c’est-à-dire le tertiaire dans son ensemble), dans <strong>la</strong> sous-catégorie <strong>de</strong> « petite<br />

bourgeoisie nouvelle » (instituteurs et professions intellectuelles, services médicaux et sociaux).<br />

Cette catégorisation, que l’on retrouve également chez d’autres auteurs à l’époque, ne satisfait<br />

cependant pas un grand nombre d’intellectuels souffrant, selon C. Bidou, <strong>de</strong> « culpabilité<br />

idéologique », et qui considèrent que le système <strong>de</strong> valeurs <strong>de</strong> ces « nouvelles couches moyennes »<br />

les différencie <strong>de</strong> <strong>la</strong> « petite bourgeoisie » où leurs positions socio-économique les p<strong>la</strong>cent pourtant<br />

(« il n’est jamais imaginé qu’elles puissent ne pas faire partie intégrante <strong><strong>de</strong>s</strong> couches dominées, tant<br />

apparaîtrait grand alors le risque d’assimi<strong>la</strong>tion injurieuse à <strong>la</strong> funeste "petite bourgeoisie", à<br />

<strong>la</strong>quelle elles n’appartiennent effectivement pas » [8]).<br />

En effet, ces catégories semblent se définir autant par leur système <strong>de</strong> valeurs que par leur situation<br />

professionnelle ; celui-ci se distingue sur plusieurs points sail<strong>la</strong>nts (on suit C. Bidou) : le rapport au<br />

travail d’abord, qui est pacifié, sort d’un paradigme d’aliénation et est associé à <strong>de</strong> nouvelles<br />

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