dossier 3 faire regner l'ordre colonial - le site d'Histoire Géographie
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Le contrô<strong>le</strong> des détenus s’avère diffici<strong>le</strong> et <strong>le</strong> fonctionnement du pénitencier est souvent<br />
anarchique. Il existe ainsi une contre-société avec ses jeux d’argent et son trafic d’opium. Par<br />
ail<strong>le</strong>urs, <strong>le</strong>s évasions des prisonniers sont courantes, entre 10 et 15 % des effectifs en<br />
moyenne. En fait, <strong>le</strong>s évadés se réfugient dans <strong>le</strong>s collines couvertes d’une épaisse forêt.<br />
L’évasion par mer constitue l’exception. Les révoltes ne sont pas rares et s’inscrivent souvent<br />
dans un mouvement plus large de révoltes <strong>colonial</strong>es comme à la fin de la Première Guerre<br />
mondia<strong>le</strong> ou dans <strong>le</strong>s années 1930. Au quotidien, <strong>le</strong>s protestations des détenus sont régulières.<br />
Les tensions se traduisent par des vengeances contre des matas ou des gardiens qui doivent<br />
toujours être sur <strong>le</strong>ur garde (cf. doc. D). Parmi <strong>le</strong>s révoltes, on peut citer la première, cel<strong>le</strong> de<br />
juin 1862, cel<strong>le</strong> de juin 1890 et surtout cel<strong>le</strong> de 1918 (cf. doc. E). La répression radica<strong>le</strong> est <strong>le</strong><br />
moyen utilisé pour réprimer <strong>le</strong>s révoltes ou <strong>le</strong>s tentatives d’évasion, à l’exemp<strong>le</strong> de cel<strong>le</strong> de la<br />
révolte de 1918 où <strong>le</strong> directeur Andouard fait tiré sur <strong>le</strong>s mutins dont 83 sont tués. La vio<strong>le</strong>nce<br />
de la répression de cette révolte entraîne une enquête et <strong>le</strong> jugement du directeur Andouard,<br />
qui est acquitté. Mais ce dernier, détesté, est assassiné quelques mois plus tard <strong>le</strong> 3 décembre<br />
1919 par des bagnards. Les protestations sont nombreuses et face à un verdict considéré<br />
comme scanda<strong>le</strong>ux, Nguyên Ai Quôc, <strong>le</strong> futur Hô Chi Minh, publie un artic<strong>le</strong> intitulé « C'est<br />
cela la justice des <strong>colonial</strong>istes français en Indochine ». Par la suite, des moyens plus<br />
appropriés sont utilisés comme <strong>le</strong>s pompes à incendie et <strong>le</strong> gaz lacrymogène.<br />
Durant <strong>le</strong>s années trente, Poulo Condore devient un des lieux de contestation principaux<br />
de l’univers carcéral en Indochine contre la colonisation et contre l’enfermement de<br />
prisonniers politiques. Ainsi, au début de 1935, Poulo Condore joue un rô<strong>le</strong> essentiel dans <strong>le</strong><br />
déc<strong>le</strong>nchement du mouvement général de manifestations et de grèves dans <strong>le</strong>s prisons et <strong>le</strong>s<br />
bagnes indochinois. En Indochine des mouvements de sympathie à l’égard du bagnard<br />
apparaissent, en particulier dans la littérature vietnamienne, et en France, <strong>le</strong>s prisonniers<br />
politiques indochinois sont soutenus par divers organismes et partis comme <strong>le</strong> Secours rouge<br />
international ou <strong>le</strong> Parti communiste français. Face à la réputation du bagne, Albert Londres a<br />
un projet d’enquête que sa mort ne lui permet pas de réaliser. C’est fina<strong>le</strong>ment, Jean-Claude<br />
Demariaux (voir supra) qui mènera donc trois enquêtes entre 1936 et 1940. La revendication<br />
essentiel<strong>le</strong> des « politiques » est l’amnistie. Pour l’obtenir, <strong>le</strong>s grèves des corvées et surtout de<br />
la faim se multiplient, par exemp<strong>le</strong> en mars-avril 1935, <strong>le</strong>s prisonniers protestent aussi contre<br />
la mauvaise qualité de l’alimentation. Une mission d’enquête est menée. Fina<strong>le</strong>ment, après<br />
une nouvel<strong>le</strong> grève de la faim, <strong>le</strong> Front populaire promulgue une amnistie <strong>le</strong> 11 août 1936 :<br />
plus de 1 532 prisonniers politiques sont libérés dont 500 de Poulo Condore. Cependant, <strong>le</strong><br />
bagne n’est pas supprimé et il n’y aura pas de réforme pénitentiaire.<br />
À la fin de la Deuxième Guerre mondia<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s Français perdent <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> de l’archipel<br />
suite au coup de force des Japonais du 9 mars 1945. Les î<strong>le</strong>s sont ensuite contrôlées par <strong>le</strong><br />
Vietminh puis par des prisonniers de droit commun comme <strong>le</strong> « roi des montagnes ». Il ne<br />
reste plus que 400 droits communs lors du retour des Français <strong>le</strong> 18 avril 1946. Durant la<br />
guerre d’Indochine, <strong>le</strong>s effectifs du bagne augmentent de nouveau comptant jusqu’à plus de<br />
2 000 prisonniers. Après <strong>le</strong> départ des Français, <strong>le</strong> 1 er Septembre 1955, <strong>le</strong> bagne continue de<br />
fonctionner et est agrandi sous la République du Viêt-nam et reçoit désormais des<br />
communistes capturés par <strong>le</strong>s troupes gouvernementa<strong>le</strong>s et américaines. Les effectifs<br />
atteignent alors <strong>le</strong>ur maximum avec plus de 10 000 prisonniers.<br />
Après la réunification du Viêt-nam, <strong>le</strong> bagne sert de camps de rééducation jusqu’au début<br />
des années 1990. Par la suite, <strong>le</strong> gouvernement met en place un plan de développement<br />
économique avec l’aménagement de différents ports, dont un port de pêche, mais <strong>le</strong><br />
développement touristique est favorisé avec la création d’un parc national en mars 1993 et <strong>le</strong><br />
classement de Poulo Condore, Con Dao, comme un des lieux de mémoire de l’histoire