John Maynard Keynes (1931), Essais de persuasion
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<strong>John</strong> <strong>Maynard</strong> <strong>Keynes</strong> (<strong>1931</strong>), <strong>Essais</strong> <strong>de</strong> <strong>persuasion</strong> 46<br />
France équivaut à un remboursement au taux <strong>de</strong> 1,6 % d'intérêt et celui avec<br />
l'Italie à un remboursement au taux <strong>de</strong> 0,4 %. Ainsi l'accord direct <strong>de</strong> la<br />
Gran<strong>de</strong>-Bretagne avec l'Amérique est-il <strong>de</strong>ux fois plus onéreux que celui <strong>de</strong> la<br />
France, et huit fois plus onéreux que celui <strong>de</strong>, l'Italie. La Gran<strong>de</strong>-Bretagne à<br />
son tour a conclu <strong>de</strong>s accords avec la France et l'Italie, encore plus avantageux<br />
pour ces pays que ceux qu'ils ont conclu avec l'Amérique, l'accord anglofrançais<br />
étant <strong>de</strong> 10% plus avantageux pour la France, et l'accord anglo-italien<br />
<strong>de</strong> 33% plus avantageux que les accords <strong>de</strong> ces pays avec les États-Unis.<br />
Aussi, alors que les autres Alliés ont vu leurs charges considérablement<br />
allégées, notre pays se voit-il dans l'obligation <strong>de</strong> tout rembourser, et n'a<br />
obtenu pour toute satisfaction qu'un taux modéré d'intérêt fixé à 3,3%.<br />
Le résultat <strong>de</strong> cet accord, c'est que la Gran<strong>de</strong>-Bretagne <strong>de</strong>vra payer aux<br />
États-Unis une somme d'environ £ 33.000.000 jusqu'en 1933, somme qui<br />
s'élèvera par la suite à près <strong>de</strong> £ 38.000.000 jusqu'en 1984, date à laquelle sa<br />
<strong>de</strong>tte se trouvera éteinte. Pour bien mesurer le poids <strong>de</strong> ce far<strong>de</strong>au, je citerai<br />
quelques calculs que je fis au cours <strong>de</strong> l'été <strong>de</strong> 1923, lorsqu'on connut<br />
officiellement pour la première fois les détails <strong>de</strong> l'accord que Mr. Baldwin<br />
conclut avec Washington. Nous paierons tous les ans pendant soixante ans aux<br />
États-Unis une somme égale aux <strong>de</strong>ux tiers <strong>de</strong> nos dépenses navales, égale<br />
environ aux dépenses totales <strong>de</strong> l'État en matière d'éducation, une somme qui<br />
dépassera le total <strong>de</strong> notre <strong>de</strong>tte d'avant-guerre. Envisagée sous un autre angle,<br />
cette somme est supérieure aux bénéfices normaux réunis <strong>de</strong> nos mines <strong>de</strong><br />
charbon et <strong>de</strong> notre marine marchan<strong>de</strong>. Avec ces mêmes sommes, nous<br />
pourrions nous permettre tous les mois <strong>de</strong>s dotations suffisantes à la création<br />
et à l'aménagement parfait d'une nouvelle Université, d'un nouvel hôpital, d'un<br />
nouveau laboratoire et ceci pendant soixante ans; en faisant le même sacrifice<br />
pendant le même laps <strong>de</strong> temps, nous pourrions supprimer les taudis, et loger<br />
dans <strong>de</strong>s maisons confortables la moitié <strong>de</strong> notre population qui aujourd'hui ne<br />
possè<strong>de</strong> que <strong>de</strong>s abris insuffisants et précaires.<br />
D'autre part, nous recevons aujourd'hui <strong>de</strong> nos Alliés et <strong>de</strong> l'Allemagne, <strong>de</strong><br />
quoi couvrir une bonne part <strong>de</strong> nos paiements aux États-Unis. Il peut être<br />
intéressant d'indiquer brièvement comment se répartissent ces comptes.<br />
En 1928, nous recevrons £ 12.800.000 <strong>de</strong> nos Alliés et verserons aux<br />
États-Unis £ 33.200.000; d'ici 1983 ces chiffres auront atteint respectivement<br />
£ 17.700.000 et £ 37.800.000. Ainsi, sans compter notre part <strong>de</strong>s réparations<br />
alleman<strong>de</strong>s, nous <strong>de</strong>vrons payer tous les ans pour nos <strong>de</strong>ttes <strong>de</strong> guerre £<br />
20.000.000 <strong>de</strong> plus que nous ne recevrons. Si le plan Dawes est appliqué<br />
intégralement, nous nous en tirerons à peu près sans rien débourser. Car<br />
l'annuité normale du plan Dawes, une fois qu'elle aura atteint son niveau le<br />
plus élevé (déduction faite <strong>de</strong> l’intérêt <strong>de</strong> l'emprunt allemand), s'élèvera à £<br />
117.000.000 sur lesquels (sans compter la part <strong>de</strong>s autres états <strong>de</strong> l'Empire<br />
britannique) £ 22.000.00. doivent nous revenir Mr. Churchill a - estimé que<br />
pour l'année financière en cours, 1928-1929, nos paiements seront <strong>de</strong> £<br />
32.845.000 et nos rentrées <strong>de</strong>, près <strong>de</strong> £ 32.000.000.<br />
Il est peu vraisemblable que ces rentrées se fassent toutes. Mais nous<br />
pouvons, pour la commodité <strong>de</strong> notre raisonnement, supposer un instant<br />
qu'elles se réalisent. En ce cas chaque Allié serait en état <strong>de</strong> payer les États-<br />
Unis avec les sommes qu'il aura reçues <strong>de</strong> l'Allemagne. Lorsque les paiements