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le livret de visite - Bondues

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DOC 14 Récit du Nouvel An 1944 par Elie Wiesel, déporté à<br />

Auschwitz puis transféré à Buchenwald.<br />

« La veil<strong>le</strong> <strong>de</strong> Roch-Hachanah, <strong>de</strong>rnier jour <strong>de</strong> cette année maudite,<br />

tout <strong>le</strong> camp était é<strong>le</strong>ctrisé par la tension qui régnait dans <strong>le</strong>s cœurs.<br />

C’était malgré tout un jour différent <strong>de</strong>s autres. Le <strong>de</strong>rnier jour <strong>de</strong><br />

l’année. Le mot « <strong>de</strong>rnier » rendait un son étrange. Si c’était vraiment<br />

<strong>le</strong> <strong>de</strong>rnier jour ? On nous distribua <strong>le</strong> repas du soir, une soupe bien<br />

épaisse, mais personne n’y toucha. On voulait attendre jusqu’après la<br />

prière. Sur la place d’appel, entourés <strong>de</strong> barbelés é<strong>le</strong>ctrifiés, <strong>de</strong>s<br />

milliers <strong>de</strong> Juifs si<strong>le</strong>ncieux se sont rassemblés, <strong>le</strong> visage décomposé. »<br />

(…) Dix mil<strong>le</strong> hommes étaient venus assister à l’office so<strong>le</strong>nnel, chefs<br />

<strong>de</strong> blocks, kapos, fonctionnaires <strong>de</strong> la mort. […] J’entendais la voix <strong>de</strong><br />

l’officiant s’é<strong>le</strong>ver, puissante et brisée à la fois, au milieu <strong>de</strong>s larmes,<br />

<strong>de</strong>s sanglots, <strong>de</strong>s soupirs <strong>de</strong> toute l’assistance :<br />

- Toute la terre et l’univers sont à Dieu !<br />

Il s’arrêtait à chaque instant, comme s’il n’avait pas la force <strong>de</strong><br />

retrouver sous <strong>le</strong>s mots <strong>le</strong>ur contenu. La mélodie s’étranglait dans sa<br />

gorge. […] L’office s’acheva par <strong>le</strong> Kaddich [prière pour <strong>le</strong>s morts].<br />

DOC 15 Témoignage d’Imre Kertesz, déporté à Auschwitz en 1944<br />

puis transféré à Buchenwald.<br />

« À un autre moment, j’entends <strong>de</strong>s murmures bizarres, quelqu’un<br />

chante tout bas <strong>de</strong>s incantations d’une voix saccadée, je remarque la<br />

lueur atténuée <strong>de</strong> bougies dans un coin <strong>de</strong> la tente, et j’entends dire<br />

qu’on est vendredi soir, et qu’il y a là-bas un religieux, c’est-à-dire un<br />

rabbin. Je me hisse au sommet <strong>de</strong>s grabats pour avoir une vue<br />

plongeante, et au milieu <strong>de</strong> l’attroupement, c’est bien lui, <strong>le</strong> rabbin que<br />

je connais. Il fait la prière comme il est, en tenue et casquette <strong>de</strong><br />

détenu, et je ne lui prête pas longtemps attention, parce que j’ai plutôt<br />

envie <strong>de</strong> dormir que <strong>de</strong> prier. »<br />

Imre Kertesz, Etre sans <strong>de</strong>stin.<br />

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