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LE RATTACHEMENT DE LA BRETAGNE A LA FRANCE - Agence ...

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Son but n'est-il pas de nous faire connaître de plus en plus, de mieux en mieux, dans ses traits les plus<br />

intimes, notre race, notre nation, notre pays, la patrie ! La grande et la petite patrie, la France et la<br />

Bretagne, que nous ne séparons point dans nos cœurs…<br />

Si nous jetons une vue d'ensemble sur l'histoire de Bretagne, si nous envisageons du dehors, pour<br />

ainsi dire, son aspect et sa physionomie générale, et si nous la comparons aux autres histoires du<br />

même genre, ce qui frappe tout d'abord, c'est qu'elle a incontestablement pour objet et pour matière la<br />

plus longue, la plus complète des existences provinciales qui ont fini, tour à tour, par verser leur flot<br />

dans le fleuve immense et splendide de l'Histoire de France.<br />

Et pourquoi cela, Messieurs ? La raison en est bien simple. C'est que la Bretagne est mieux qu'une<br />

province, elle est un peuple, une nation véritable et une société à part. Non pas – grâce à Dieu –<br />

étrangère à la nation, à la société française, mais du moins parfaitement distincte dans ses origines,<br />

parfaitement originale dans ses éléments constitutifs.<br />

Voyez ! même encore aujourd'hui, après un siècle de centralisation, d'unification complète, souvent<br />

encore dans les livres, dans les discours publics, on parle du peuple breton, de la nation bretonne, en<br />

appliquant ce mot au présent, et sans que nul n'y trouve à dire …<br />

Maintenant, regardez autour de nous les autres provinces, nos sœurs, nos voisines, pour lesquelles<br />

nous avons les sentiments de l'amitié la plus sympathique. Même cette Normandie qui a une histoire,<br />

une existence si grande, si illustre, qui a des traditions universitaires où il est question de la "nation<br />

normande" ; malgré cela, je ne vois pas qu'on fasse mention aujourd'hui du peuple normand. Qui a<br />

jamais songé à saluer nos excellents voisins les Angevins, les Poitevins, du nom de nation angevine et<br />

de nation poitevine ? Et si quelqu'un s'avisait de parler, par exemple, du peuple Manceau, ou du<br />

peuple Berrichon, il aurait peut-être du succès, mais ce serait, je crois, un succès d'hilarité. C'est que<br />

ces populations, ces contrées, n'ont jamais été que des fractions, des membres d'un tout, soit la Gaule,<br />

soit la France ; fractions fort honorables, glorieuses, illustres ; mais aucune d'entre elles ne possédait<br />

le germe d'une originalité nationale, aucun au moins n'a développé ce germe de façon à fournir une<br />

carrière indépendante, une vie spéciale, autonome, individuelle, assez longue pour constituer<br />

l'existence d'un peuple…"<br />

Il avait déjà exprimé la même position, en 1884, dans son célèbre essai sur la révolte des Bonnets<br />

rouges :<br />

" Après les guerres de la Ligue, fruit amer de son union à la France, la Bretagne aux abois commença<br />

de reprendre haleine, vie et force, grâce au gouvernement paternel du premier des bourbons. Sous le<br />

règne suivant, elle recouvra en partie son ancienne prospérité du temps des ducs, et la garda même<br />

encore après la mort de Louis XIII, jusque vers l'an 1664. Pendant cette tranquille période de<br />

soixante cinq ans, les princes et leurs ministres semblèrent presque aussi jaloux de respecter les<br />

libertés de la Bretagne que de ménager, par des impôts modérés, la fortune des Bretons. Respecter le<br />

droit, ménager le bien de leurs sujets, c'est là tout le secret des meilleurs princes pour créer la félicité<br />

publique. Ainsi le comprenaient Henri IV, Louis XIII, Richelieu lui-même ; car ce grand ministre, qui<br />

poursuivait avec tant d'ardeur le solide établissement de l'unité politique en France, ne songea<br />

vraiment jamais à détruire, à engloutir les droits de tous dans ce gouffre d'usurpations iniques que<br />

l'on appelle la centralisation administrative … La Bretagne répondit à ces égards par un<br />

redoublement de fidélité ; les troubles de la minorité de Louis XIII l'effleurèrent à peine… Pendant<br />

soixante cinq ans rien, pour ainsi dire, ne vint troubler cette harmonie féconde de la couronne et de la<br />

province…[cet âge d'or] trouva son terme ; Louis XIV fut pris du goût des dépenses fastueuses, des<br />

palais magnifiques et des grandes batailles, en un mot de ce qu'on appelle vulgairement la passion de<br />

la gloire".<br />

Vision indiscutablement idyllique, s'agissant des premiers Bourbons, et même des règnes précédents :<br />

les frictions entre Français et Bretons furent incessantes, et même dès avant le traité de 1532, le duché<br />

étant passé sous la coupe du roi de France en 1514, à la mort d'Anne de Bretagne.<br />

La Borderie a t-il été aussi sincèrement Français qu'il l'a dit ? Difficile de penser que cet homme<br />

honnête ait pu dire autre chose que la vérité ; difficile, pourtant, de croire que son choix ait été guidé<br />

par autre chose que la raison. La Borderie est le prototype de l'intellectuel breton ambigu, informé du<br />

passé de son pays, mais conduit devant une situation irréversible à penser qu'il valait mieux l'accepter.

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