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Victor Hugo, l'éclat d'un siècle - Groupe Hugo

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Allons « cueillir les Immortels » 54<br />

La bataille pour l’élection dura cinq ans. Candidat dès l’hiver 1835, ce ne fut qu’en janvier<br />

1841, à la cinquième tentative, que <strong>Hugo</strong> fut élu. Les séniles occupants des illustres<br />

« fauteuils » avaient beau tomber comme des mouches, les survivants trouvaient toujours,<br />

pour la place vacante, un titulaire plus convenable et moins dangereux que <strong>Victor</strong>. Celui-ci,<br />

pourtant, avec un respect amusé des traditions, fit les choses dans les règles et sacrifia à la<br />

cérémonie des « visites » : il était de bon ton Ŕ cela n’a pas changé Ŕ d’aller solliciter à<br />

domicile toutes ces voix chenues. Assisté et soutenu par la gouaille tendre de Juliette qui<br />

l’attendait aux portes dans un cabriolet. <strong>Victor</strong> fit très poliment la tournée des débris. Ceci<br />

nous vaut, dans le <strong>Victor</strong> <strong>Hugo</strong> raconté par Adèle <strong>Hugo</strong>, une impayable galerie de ces<br />

caricatures dont aucune, bien sûr, ne pouvait voter pour <strong>Hugo</strong>. Royer-Collard lui explique que<br />

son entré créerait un courant d’air et que l’Académie « n’aimait pas les changements de<br />

température ». Scribe, le roi fortuné du vaudeville, déclara avec « la solennité d’un homme<br />

d’affaires », que son devoir était de s’opposer à l’envahissement de cette « littérature de<br />

barbare ». Le dénommé Tissot, prêt à vendre sa voix pour mille francs, l’encouragea à faire du<br />

« classique ». Presque tous effarouchés par le romantisme, ces académiciens étaient encore<br />

plus méfiants du tour politique que <strong>Victor</strong> donnerait à son élection.<br />

Une exception de taille à tant de médiocrité hypocrite : Chateaubriand. Plein de mépris pour<br />

une confrérie dont il ne partageait jamais les réunions et qu’il n’honorait de sa présence que<br />

les jours de vote Ŕ encore n’attendait-il même pas le dépouillement Ŕ, il assura <strong>Hugo</strong> de son<br />

soutien, en dépit d’un désaccord littéraire réel. La voix du grand aîné, qui ne s’effrayait pas<br />

d’être seule, ne lui manqua pas une seule fois.<br />

Le prince et le poète<br />

Ce ne furent ni Les Voix intérieures (1837), ni Ruy Blas (1838), ni Les Rayons et les Ombres<br />

(1840) qui désarmèrent les Immortels, mais la pression grandissante, et décisive en 1840, du<br />

« Château ». Cette métaphore, qui désignait les Tuileries, servait aussi à nommer le roi et son<br />

entourage. <strong>Victor</strong> en était devenu le familier. Le duc d’Orléans, héritier du trône, et son<br />

épouse, jeune et intelligente princesse, avaient été commis par le roi au ralliement de<br />

l’intelligentsia. <strong>Victor</strong> <strong>Hugo</strong>, dont ils admiraient les œuvres, était à séduire en premier. Il fut<br />

invité à une grande fête donnée par le roi qui célébrait à la fois le mariage princier et<br />

l’inauguration du musée de Versailles. Ce geste royal Ŕ donner à la nation ce qui avait été le<br />

bien des rois Ŕ plut à <strong>Hugo</strong> qui militait pour la préservation du passé au Comité des<br />

Monuments historiques. Mais, conscient de ce que sa présence à cette fête signifiait, il exigea<br />

que Dumas y fût aussi invité et décoré de la Légion d’honneur. Le marché fut accepté. <strong>Hugo</strong><br />

vint à Versailles. Une promotion au rang d’officier de la Légion d’honneur, qu’il n’avait pas<br />

sollicitée, marqua la satisfaction royale. Intelligente ou politique, l’admiration princière ne<br />

s’arrêta pas là : le gouvernement fit savoir à <strong>Hugo</strong> Ŕ dont les difficultés étaient permanentes à<br />

la Comédie-Française comme à la Porte Saint-Martin, qu’on lui accorderait, par privilège, un<br />

théâtre de son choix pour y promouvoir l’art nouveau. Ce sera, après bien des déboires, le<br />

Théâtre de la Renaissance.<br />

La carrure officielle de <strong>Hugo</strong> prend de l’ampleur : il est élu en 1840 président de la récente<br />

Société des Gens de Lettres qu’il avait contribué à fonder pour défendre les droits fort mal<br />

garantis des écrivains.<br />

Désormais, l’Académie n’avait plus qu’à s’incliner. Le 7 janvier 1841, dix-sept voix contre<br />

quinze à Ancelot (qui est-ce ?) donnèrent à <strong>Hugo</strong>, en même temps que l’habit vert, l’accès à la<br />

Pairie.<br />

54 Le jeu de mots est de Juliette<br />

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