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— Vous ne l’avez pas pensé consciemment, mais le subconscient nous joue parfois de drôles de tours.<br />
D’ailleurs, <strong>ce</strong>tte explication ne v<strong>au</strong>t rien, car, s’il s’agissait d’une suggestion, vous eussiez entendu le cri<br />
à sept heures vingt-cinq d’après votre montre, mais pas <strong>au</strong> moment où vous supposiez que l’heure était<br />
passée.<br />
— Et alors ?<br />
— Voyons, c’est bien simple, <strong>ce</strong>t appel <strong>au</strong> secours occupe un endroit et un moment bien définis dans<br />
l’espa<strong>ce</strong>. L’espa<strong>ce</strong> est situé près de <strong>ce</strong>tte maison et le moment se pla<strong>ce</strong> à sept heures vingt-cinq.<br />
— Bien, mais pourquoi suis-je seul à les entendre ? Je ne crois ni <strong>au</strong>x fantômes ni <strong>au</strong>x esprits<br />
frappeurs. Pourquoi est-<strong>ce</strong> moi qui perçois <strong>ce</strong>s bruits ?<br />
— Nous ne pouvons le dire à présent ; il est d’ailleurs étrange que les meilleurs médiums soient<br />
choisis parmi les pires s<strong>ce</strong>ptiques. Ce ne sont pas les personnes qui s’intéressent <strong>au</strong>x phénomènes<br />
occultes qui les enregistrent. Certains êtres humains voient et entendent <strong>ce</strong> que d’<strong>au</strong>tres négligent. Nous<br />
ignorons pourquoi et, neuf fois sur dix, ils ne le souhaitent pas et croient avoir eu des hallucinations<br />
comme vous. L’électricité <strong>au</strong>ssi a de bons et de m<strong>au</strong>vais conducteurs et, pendant fort longtemps, nous<br />
avons ignoré pourquoi et nous nous sommes contentés d’ac<strong>ce</strong>pter les faits. Maintenant nous en<br />
connaissons la raison et un jour, sans doute, nous comprendrons pourquoi vous entendez <strong>ce</strong> que <strong>ce</strong>tte<br />
jeune fille et moi ne per<strong>ce</strong>vons pas. Voyez-vous, tout est actionné par une loi naturelle et le surnaturel<br />
n’existe pas.<br />
— Que dois-je faire ? interrogea Jack.<br />
Lavington se mit à rire et répondit :<br />
— Vous ne manquez pas d’esprit pratique. Pour l’instant, déjeunez bien et partez pour Londres sans<br />
vous tourmenter <strong>au</strong> sujet de <strong>ce</strong> que vous ne comprenez pas. De mon côté je vais me promener et essayer<br />
de me renseigner <strong>au</strong> sujet de <strong>ce</strong>tte petite maison qui est derrière nous. Je parie que le mystère y réside.<br />
Jack se leva et répondit :<br />
— D’accord, monsieur, mais je suis sûr…<br />
— De quoi ?<br />
Le jeune homme rougit et murmura :<br />
— Que la jeune fille est normale.<br />
Lavington sourit et répondit :<br />
— Vous ne m’avez pas dit qu’elle est jolie ? Prenez courage car je crois que le mystère existait avant<br />
elle.<br />
Ce soir-là, Jack était bourrelé de curiosité en rentrant. Il mettait désormais tous ses espoirs en<br />
Lavington qui avait traité la question avec tant de calme que le jeune homme était impressionné.<br />
Quand il des<strong>ce</strong>ndit pour dîner, il trouva son nouvel ami dans le vestibule et Lavington lui proposa de<br />
dîner à la même table.<br />
— Avez-vous des nouvelles, docteur ? interrogea vivement Jack ?<br />
— J’ai appris l’histoire de la villa des Bruyères. Au début, elle était habitée par un vieil horticulteur<br />
et sa femme. Un entrepreneur en prit possession quand le mari mourut et la vieille femme se retira chez sa<br />
fille. Le nouve<strong>au</strong> propriétaire modernisa la bicoque et la vendit à un citadin qui vint y passer les fins de<br />
semaines, puis la céda à un ménage appelé Turner. D’après <strong>ce</strong> que j’ai entendu dire, <strong>ce</strong>s gens étaient<br />
assez origin<strong>au</strong>x. Le mari était anglais, la femme, très jolie et d’allure exotique, était à moitié russe. Ils<br />
vivaient très retirés, ne voyaient personne et ne sortaient jamais de leur jardin. La rumeur publique<br />
déclarait qu’ils avaient peur… mais on ne peut guère ajouter foi à des propos de <strong>ce</strong> genre.<br />
« Puis, un matin, de très bonne heure, ils disparurent et ne revinrent jamais. L’agent de location reçut<br />
une lettre de Turner, datée de Londres et lui enjoignant de vendre la maison le plus vite possible, ainsi