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nommait Emily French et habitait Cricklewoo. Nous c<strong>au</strong>sâmes un instant, je suppose qu’elle devait<br />

éprouver des sympathies subites, car je lui plus à c<strong>au</strong>se d’un geste poli que n’importe qui <strong>au</strong>rait pu faire.<br />

Quand elle partit, elle me serra fortement la main et m’invita à venir la voir. Je répondis que j’en serais<br />

ravi et elle me demanda de fixer un jour ; je n’y tenais guère, mais refuser eût semblé grossier, de sorte<br />

que je fixai le samedi suivant. Après son départ, j’appris par un ami qu’elle était riche, assez originale,<br />

vivait seule avec une domestique et avait huit chats.<br />

— Je comprends, dit Mayherne, vous avez su tout de suite qu’elle était clans une situation aisée.<br />

— Si vous vous imaginez que je m’en suis préoccupé ! s’écria Vole vivement.<br />

Mais l’avocat le fit taire d’un geste et déclara :<br />

— Il f<strong>au</strong>t que j’examine l’affaire telle qu’elle sera présentée par la partie adverse. Un observateur<br />

impartial n’<strong>au</strong>rait pas supposé que Miss French fût riche ; elle vivait simplement, presque p<strong>au</strong>vrement. Si<br />

l’on ne vous avait pas dit le contraire vous l’eussiez probablement jugée peu fortunée, <strong>au</strong> début du moins.<br />

Qui vous a appris le contraire ?<br />

— Mon ami Georges Harvey, chez lequel avait lieu la soirée.<br />

— Se souviendra-t-il vous en avoir parlé ?<br />

— Je ne sais pas. Il s’est écoulé pas mal de temps depuis.<br />

— En effet. Vous comprenez, le premier soin de <strong>ce</strong>ux qui vous accusent consistera à prouver que vous<br />

étiez très désargenté. Ce qui est vrai je crois ?<br />

Leonard Vole rougit :<br />

— Oui, répondit-il très bas. Je traversais une période de guigne.<br />

— En effet, acquiesça Mayherne. Étant donc gêné, vous avez fait la connaissan<strong>ce</strong> de <strong>ce</strong>tte vieille<br />

dame riche et avez cultivé assidûment <strong>ce</strong>tte relation. Si nous pouvions déclarer que vous ignoriez qu’elle<br />

était fortunée et que vous alliez la voir par pure bonté…<br />

— Ce qui était absolument vrai.<br />

— C’est possible et je n’en disconviens pas ! J’examine la question du point de vue extérieur. Tout<br />

dépendra de la déclaration de Mr. Harvey. Se souviendra-t-il de votre conversation ? Pourra-t-il être<br />

troublé par l’avocat de la partie adverse, <strong>au</strong> point de croire que <strong>ce</strong>t entretien fut situé be<strong>au</strong>coup plus<br />

tard ?<br />

Vole réfléchit un instant, puis répondit d’un ton ferme, mais en pâlissant :<br />

— Je ne crois pas, maître Mayherne, que <strong>ce</strong>tte manœuvre réussirait. Plusieurs personnes ont entendu<br />

<strong>ce</strong> que disait Harvey et m’ont plaisanté <strong>au</strong> sujet de ma riche conquête.<br />

L’avocat essaya de cacher sa dé<strong>ce</strong>ption en faisant un geste de la main et répondit :<br />

— Dommage. Mais je vous félicite de votre franchise et c’est vous qui me guiderez désormais. Vous<br />

voyez juste et le système que j’envisageais serait désastreux. Laissons <strong>ce</strong>la. Vous avez donc fait la<br />

connaissan<strong>ce</strong> de Miss French, vous lui avez rendu visite et vous avez continué. Il nous f<strong>au</strong>t savoir<br />

pourquoi un homme de votre âge – trente-cinq ans – be<strong>au</strong> garçon, sportif, aimé de vos amis, a consacré<br />

une partie notable de son temps à une femme âgée, dont les goûts devaient être fort éloignés des vôtres ?<br />

Vole tendit les mains en un geste nerveux.<br />

— Je ne puis l’expliquer, vraiment pas ; à la fin de ma première visite elle m’a supplié de revenir,<br />

m’a dit qu’elle était isolée et malheureuse. Il m’était difficile de refuser, d’<strong>au</strong>tant plus qu’elle me<br />

témoignait une si grande sympathie que j’en étais touché. Voyez-vous, maître, je suis faible de nature et ne<br />

sais pas dire non. Et, vous ne me croirez peut-être pas, mais après lui avoir fait trois ou quatre visites, je<br />

me suis sincèrement attaché à <strong>ce</strong>tte vieille femme : ma mère mourut alors que j’étais très jeune, une de<br />

mes tantes m’a élevé jusqu’à <strong>ce</strong> que j’aie quinze ans, puis elle est morte <strong>au</strong>ssi. Si je vous avoue que<br />

j’étais heureux d’être choyé et gâté, vous en rirez sans doute.<br />

L’avocat ne riait pas. Il ôta de nouve<strong>au</strong> son lorgnon, le frotta, <strong>ce</strong> qui prouvait qu’il était songeur.<br />

— J’ac<strong>ce</strong>pte votre explication, dit-il enfin, car j’estime qu’elle est vraisemblable du point de vue

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